20 mars 2024
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-22.398

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2024:CO00146

Titres et sommaires

MESURES D'INSTRUCTION - Sauvegarde de la preuve avant tout procès - Motif légitime - Secret des affaires - Séquestre provisoire - Objet - Protection contre les atteintes au secret des affaires

La procédure prévue à l'article R. 153-1 du code de commerce a pour seul objet d'éviter, par une mesure de séquestre provisoire, que la communication ou la production d'une pièce, à l'occasion de l'exécution d'une mesure d'instruction ordonnée sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, ne porte atteinte à un secret des affaires. Elle n'a ni pour objet ni pour effet d'attribuer au juge qui, saisi en référé d'une demande de modification ou de rétractation de sa mesure, statue sur la levée totale ou partielle de la mesure de séquestre, le contentieux de son exécution

REFERE - Sauvegarde d'éléments de preuve avant tout procès - Séquestre provisoire - Demande de modification ou de rétractation de la mesure - Attribution au juge du contentieux de l'exécution de la mesure

Texte de la décision

COMM.

RB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 20 mars 2024




Rejet


M. VIGNEAU, président



Arrêt n° 146 F-B

Pourvoi n° A 22-22.398




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 20 MARS 2024

M. [G] [J], domicilié [Adresse 3], [Localité 4] (Pologne), a formé le pourvoi n° A 22-22.398 contre l'arrêt rendu le 23 juin 2022 par la cour d'appel de Versailles (14e chambre), dans le litige l'opposant à la société Valeo vision, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], [Localité 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bellino, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de M. [J], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Valeo vision, après débats en l'audience publique du 30 janvier 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Bellino, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 23 juin 2022), M. [J], salarié de la société Valeo vision, équipementier automobile, et travaillant au pôle « Systèmes de Visibilité » de cette société, lequel conçoit et produit des systèmes d'éclairage et d'essuyage, a démissionné et rejoint la société Varroc Lighting Systems, également équipementier automobile, ayant notamment pour activité la vente de systèmes d'éclairage extérieur.

2. Soutenant que M. [J] avait violé ses obligations de loyauté, de discrétion et de confidentialité au profit de son nouvel employeur, la société Valeo vision a obtenu, sur requête, la désignation d'un huissier de justice par le président d'un tribunal judiciaire avec pour mission de se rendre à son domicile, de rechercher fichiers, pièces jointes et courriels sur ses ordinateurs personnel et professionnel et d'en prendre copie. M. [J] et la société Varroc Lighting Systems, intervenante volontaire, ont sollicité en référé la rétractation de cette ordonnance. Un arrêt du 5 décembre 2019 a confirmé l'ordonnance ayant rejeté la demande de rétractation, mais a restreint le périmètre de la mesure d'instruction initiale et a ordonné le placement sous séquestre, entre les mains de l'huissier de justice, des documents et fichiers appréhendés, jusqu'à ce que le juge éventuellement saisi autorise leur communication ou que les parties en soient d'accord.

3. La société Valeo vision a assigné en référé M. [J] devant le président du tribunal judiciaire pour obtenir la mainlevée du séquestre et la communication des éléments saisis.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. M. [J] fait grief à l'arrêt d'ordonner la mainlevée du séquestre entre les mains d'un huissier de justice et, par suite, la communication ou la production à la société Valeo vision de l'ensemble des autres pièces issues de la mesure d'instruction ordonnée le 27 novembre 2018 par le tribunal judiciaire de Nanterre, telle que modifiée par l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 5 décembre 2019, alors « que le juge saisi d'une demande de levée de la mesure de séquestre, ordonnée sur le fondement de l'article R. 153-1 du code de commerce, doit s'assurer de la régularité de la saisie au regard de la mission impartie à l'expert ; qu'en retenant que le juge saisi d'une demande de levée de la mesure de séquestre n'a pas à vérifier la régularité de la saisie au regard du périmètre de la mission confiée à l'expert, cette procédure ne permettant que la protection du droit fondamental du secret des affaires, quand, préalablement, à la recherche de l'atteinte au secret des affaires, le juge devait rechercher si la saisie était régulière au regard du périmètre de la mission confiée à l'expert par l'ordonnance du 27 novembre 2018 du tribunal judiciaire de Nanterre, telle que modifiée par l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 5 décembre 2019, la cour d'appel a violé les articles R. 153-3 à R. 153-10 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

5. La procédure prévue à l'article R. 153-1 du code de commerce a pour seul objet d'éviter, par une mesure de séquestre provisoire, que la communication ou la production d'une pièce, à l'occasion de l'exécution d'une mesure d'instruction ordonnée sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, ne porte atteinte à un secret des affaires.

6. Elle n'a ni pour objet ni pour effet d'attribuer au juge qui, saisi en référé d'une demande de modification ou de rétractation de sa mesure, statue sur la levée totale ou partielle de la mesure de séquestre, le contentieux de son exécution.

7. Le moyen, qui postule le contraire, n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [J] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [J] et le condamne à payer à la société Valeo vision la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mars deux mille vingt-quatre.

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