27 février 2024
Cour de cassation
Pourvoi n° 23-81.563

Chambre criminelle - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2024:CR00201

Titres et sommaires

MARQUE DE FABRIQUE

Texte de la décision

N° F 23-81.563 F-B

N° 00201


RB5
27 FÉVRIER 2024


REJET


M. BONNAL président,





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 27 FÉVRIER 2024




La société [2], partie civile, a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 7 mars 2023, qui, dans la procédure suivie contre personne non dénommée du chef d'infraction au code de la propriété intellectuelle, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction.

Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires, ont été produits.

Sur le rapport de M. Samuel, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société [2], les observations de Me Carbonnier, avocat de M. [N] [X], et les conclusions de M. Quintard, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 janvier 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Samuel, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. La société [2] a constaté, sur un panneau publicitaire, l'affichage d'un texte comportant l'usage de la marque déposée et enregistrée [1] ainsi que la publication à deux reprises, sur la page Facebook de M. [N] [X], de la photographie de cette affiche.

3. A l'issue de l'information ouverte sur sa plainte avec constitution de partie civile des chefs d'usage et de reproduction de la marque [1] et au cours de laquelle M. [X] a été placé sous le statut de témoin assisté, le juge d'instruction a rendu une ordonnance de non-lieu.

4. La partie civile a seule relevé appel de cette décision.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa seconde branche


5. Le grief n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.


Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a prononcé un non-lieu, alors :

« 1°/ que le délit d'usage et de reproduction d'une marque est caractérisé lorsque la reproduction ou l'usage de la marque est effectuée dans le cadre de l'activité professionnelle de l'auteur ; que la chambre de l'instruction a retenu que M. [X] participait à la « vie des affaires » et avait une activité « d'agence de publicité » ; qu'en prononçant un non-lieu en ce que l'affiche pourtant apposée sur « un panneau publicitaire », ne s'inscrirait pas dans la vie des affaires de M. [X], la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision et a méconnu les articles 5 de la directive n°2008/95 du 22 octobre 2008, L 713-1 et suivants et L 716-10 du code de la propriété intellectuelle, 211, 591 et 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

7. Pour confirmer l'ordonnance de non-lieu, l'arrêt attaqué énonce que l'article L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle sur lequel sont fondées les poursuites doit être interprété à la lumière de la directive 2008/95/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2008 rapprochant les législations des États membres sur les marques, abrogée le 14 janvier 2019, et de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE, arrêt du 12 novembre 2002, Arsenal Football Club, C-206/01).

8. Les juges en déduisent qu'il convient de déterminer si l'affiche litigieuse relève de la vie des affaires et, à cette fin, de vérifier si elle s'inscrit dans le domaine économique et vise à l'obtention d'un avantage direct ou indirect de nature économique.

9. Ils retiennent qu'au cours du mois de décembre 2018, l'affiche comportant la mention « Les syndicats de police et [1] vous souhaitent un bon enfumage 2019 » a été apposée sur un seul panneau publicitaire qui est la propriété personnelle de M. [X], que cette affiche a fait l'objet de deux publications sur la page Facebook de ce dernier et que la mention litigieuse, ainsi diffusée de façon restreinte et pour un temps donné, présente un caractère satirique, ne contient aucune proposition de produit, ne s'inscrit dans aucune activité économique et ne procède d'aucune opération commerciale.

10. Ils précisent que si M. [X] peut, au regard de son inscription au répertoire SIRENE pour une activité d'agence de publicité et de sa détention de parts avec son épouse dans la société [3], être considéré comme participant à la vie des affaires en dépit de sa situation de retraité, l'affiche litigieuse elle-même ne relève pas de la vie des affaires, en ce qu'elle ne s'inscrit en rien dans le domaine économique ni ne vise à l'obtention d'un avantage direct ou indirect de nature économique.

11. En se déterminant ainsi, par des motifs procédant d'une exacte interprétation de la notion de vie des affaires au sens de l'article 5, 1, de la directive 2008/95/CE précitée, la chambre de l'instruction a justifié sa décision.

12. Dès lors, le moyen doit être écarté.

13. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

FIXE à 2 500 euros la somme que la société [2] devra payer à M. [X] en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept février deux mille vingt-quatre.

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