14 février 2024
Cour d'appel de Toulouse
RG n° 24/00197

ETRANGERS

Texte de la décision

COUR D'APPEL DE TOULOUSE









Minute 24/198

N° RG 24/00197 - N° Portalis DBVI-V-B7I-QAKM



O R D O N N A N C E



L'an DEUX MILLE VINGT QUATRE et le mercredi 14 février à 16h00



Nous P. ROMANELLO, magistrat délégué par ordonnance de la première présidente en date du 20 DECEMBRE 2023 pour connaître des recours prévus par les articles L. 743-21 et L.342-12, R.743-10 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.



Vu l'ordonnance rendue le 13 Février 2024 à 17H19 par le juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de Toulouse statuant sur la régularité du placement en rétention et ordonnant la prolongation du maintien au centre de rétention de



X se disant [D] [H] [V]

né le 03 Janvier 1991 à [Localité 1] (TUNISIE)

de nationalité Tunisienne



Vu l'appel formé le 14/02/2024 à 09 h 55 par courriel, par Me Majouba SAIHI, avocat au barreau de TOULOUSE;



A l'audience publique du mercredi 14 février 2024 à 14h30, assisté de D.BARO, greffier, lors des débats, et de P.GORDON, adjoint administratif faisant fonction de greffier, lors de la mise à disposition, avons entendu :



X se disant [D] [H] [V]

assisté de Me Majouba SAIHI, avocat au barreau de TOULOUSE



qui a eu la parole en dernier ;



avec le concours de [K] [O], interprète, qui a prêté serment,



En l'absence du représentant du Ministère public, régulièrement avisé;



En présence de Mme [T] représentant la PREFECTURE DU VAR ;



avons rendu l'ordonnance suivante :






Exposé des faits



Vu les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile et les dispositions du CESEDA,



Vu l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse en date du 13 février 2024 à 17h19 qui a joint les procédures, constaté la régularité de la procédure et ordonné la prolongation pour une durée de 28 jours de la rétention de M. [D] [V] sur requête de la préfecture du Var du 12 février 2024 et de celle de l'étranger du même jour ;



Vu l'appel interjeté par M. [D] [V] par courrier de son conseil reçu au greffe de la cour le 14 février 2024 9h55 heures, soutenu oralement à l'audience, auquel il convient de se référer en application de l'article 455 du code de procédure civile et aux termes duquel il sollicite l'infirmation de l'ordonnance et sa remise immédiate en liberté pour les motifs suivants :



- Le préfet n'a pas procédé à un examen sérieux de l'état de vulnérabilité de l'étranger

- l'étranger dispose de garanties de représentation, il peut bénéficier d'une assignation à résidence et la décision est donc entachée d'une erreur manifeste d'appréciation,



Entendu les explications fournies par l'appelant à l'audience du 14 février 2024 ;



Entendu les explications orales du préfet du Var qui sollicite confirmation de l'ordonnance entreprise ;



Vu l'absence du ministère public, avisé de la date d'audience, qui n'a pas formulé d'observation.






SUR CE :





Sur la recevabilité de l'appel



En l'espèce, l'appel est recevable pour avoir été fait dans les termes et délais légaux.





Sur la régularité de l'arrêté de placement en rétention administrative



En application de l'article L741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision.

Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3.



Aux termes de ce dernier article le risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :

1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;

2° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;

3° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;

4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;

5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ;

6° L'étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l'un des États avec lesquels s'applique l'acquis de Schengen, fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par l'un des États ou s'est maintenu sur le territoire d'un de ces États sans justifier d'un droit de séjour ;

7° L'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou a fait usage d'un tel titre ou document ;

8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5.



En l'espèce, l'appelant soutient que l'arrêté de placement en rétention est insuffisamment motivé ou entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.



Cependant, la décision critiquée cite les textes applicables à la situation de M. [D] [V] et énonce les circonstances de fait qui justifient l'application de ces dispositions.



Elle précise en effet notamment que l'intéressé :

- a fait l'objet d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai avec interdiction de retour le 4 juin 2023, auquel il n'a pas déféré,

- ne peut justifier d'une entrée régulière et n'a pas demandé de titre de séjour,

- ne justifie pas de ressources et n'a pas de billet de transport pour exécuter la mesure d'éloignement,

- ne présente pas d'état de vulnérabilité, en dépit de ses déclarations selon lesquelles il est claustrophobe, il a des vers dans l'estomac, des problèmes aux yeux et aux dents, il prend de la Ventoline,

- ne présente pas de garanties de représentation suffisantes faute de document d'identité ou de voyage en cours de validité et faute d'une adresse stable.



Le préfet a tiré toutes les conséquences de droit de la situation qu'il a relevée dans son arrêté.





Sur l'erreur manifeste d'appréciation



L'intéressé verse au débat une attestation rédigée par Mademoiselle [Y] [M] qui affirme l'héberger depuis deux mois.



Ce document doit être examiné avec la plus grande réserve car il sera rappelé que Monsieur [D] [V] a été interpellé le 10 février 2024 par les policiers du commissariat de [Localité 2] en flagrant délit d'occupation illégale d'un immeuble (squat).

En garde à vue, il a déclaré être seul en France avec son frère sans aucun document d'identité. Il a réaffirmé qu'il squattait à [Localité 2].



La cour considère donc que l'attestation susmentionnée ne reflète aucunement la réalité et doit être écartée des débats.



Dès lors, que l'intéressé s'est soustrait à l'obligation de quitter le territoire français qui a été prise à son encontre en 2023, qu'il a affirmé vouloir rester en France pour se faire soigner et qu'il ne dispose ni d'un document d'identité ni d'une adresse, le grief tiré d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.





L'état de vulnérabilité



L'article L. 741-4 précise : " La décision de placement en rétention prend en compte l'état de vulnérabilité et tout handicap de l'étranger ".



Les arrêtés de placement en rétention administrative doivent comporter une mention relative à l'état de vulnérabilité, même succincte, ne serait-ce que pour l'écarter, sinon ils sont irréguliers.

C'est bien le cas en l'espèce puisque le préfet du Var reprend la description des pathologies évoquées par l'intéressé.

Il appartient donc à l'appelant de démontrer que son état de vulnérabilité n'a pas été suffisamment pris en compte.

Les pathologies simples comme celles évoquées, peuvent être traitées au sein du centre de rétention administrative qui abrite une antenne de l'hôpital toulousain avec des médecins à demeure et le matériel médical adéquat.

L'argument soulevé est dès lors totalement inopérant et sera rejeté.





L'assignation à résidence



Selon l'article L.743-13 du CESEDA, le juge peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives.

Toutefois, une assignation à résidence suppose que soit remis aux services de police ou à une unité de gendarmerie, l'original d'un passeport ou d'un document d'identité. Cette formalité prescrite par l'article L743-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile conditionne impérativement l'examen d'une demande d'assignation à résidence.



Faute de respecter cette condition, la demande d'assignation à résidence sera rejetée.



En conséquence, l'ordonnance déférée sera confirmée en toutes ses dispositions.





PAR CES MOTIFS



Statuant par ordonnance mise à disposition au greffe après avis aux parties,



Déclarons recevable l'appel interjeté par Monsieur [D] [V] à l'encontre de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Toulouse du 13 février 2024,



Confirmons ladite ordonnance en toutes ses dispositions,



Disons que la présente ordonnance sera notifiée à la PREFECTURE DU VAR, service des étrangers, à X se disant [D] [H] [V], ainsi qu'à son conseil et communiquée au Ministère Public.





LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE







P.GORDON P. ROMANELLO.

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