14 février 2024
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-22.440

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2024:SO00201

Texte de la décision

SOC.

CZ



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 14 février 2024




Cassation partielle


M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 201 F-D

Pourvoi n° W 22-22.440

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M.[D].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 22 septembre 2022.





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 14 FÉVRIER 2024

M. [E] [D], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° W 22-22.440 contre l'arrêt rendu le 25 novembre 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-4), dans le litige l'opposant à la société Colas France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], venant aux droits de la société Colas Midi Méditerranée, défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Ollivier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. [D], de la SARL Le Prado-Gilbert, avocat de la société Colas France, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2024 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ollivier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Sommé, conseiller, et Mme Thuillier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 25 novembre 2021), M. [D] a été engagé en qualité de maçon, le 2 mai 2007, par la société Sacer Sud Est. Le 1er janvier 2013, son contrat de travail a été transféré à la société Colas Midi Méditerranée.

2. Par lettre du 8 janvier 2014, l'employeur a notifié au salarié une mise à pied disciplinaire de deux jours pour des faits d'insubordination et d'abandon de poste.

3. Par lettre du 3 février 2017, le salarié a été convoqué à un entretien préalable à son éventuel licenciement fixé au 13 février 2017. Par lettre du 23 février 2017, il a été licencié pour cause réelle et sérieuse.

4. Contestant le bien-fondé de son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale le 26 juin 2017 aux fins de condamnation de l'employeur au paiement, notamment, de dommages-intérêts pour licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse.

5. La société Colas France est venue aux droits de la société Colas Midi Méditerranée.

Examen des moyens

Sur le premier moyen


6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Mais sur le second moyen

Enoncé du moyen

7. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, alors « qu'aucune sanction antérieure de plus de trois ans à l'engagement des poursuites disciplinaires ne peut être invoquée à l'appui d'une nouvelle sanction ; que la date de la convocation à l'entretien préalable constitue l'engagement des poursuites disciplinaires ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme l'y invitait M. [D] dans ses conclusions d'appel, si les faits d'insubordination et d'abandon de poste précédemment sanctionnés par une mise à pied disciplinaire notifiée le 8 janvier 2014 n'étaient pas prescrits au regard de sa convocation à l'entretien préalable en date du 3 février 2017 ayant donné lieu à son licenciement de sorte que ces faits prescrits ne pouvaient être invoqués par l'employeur à l'appui de son licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1332-5 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1332-5 du code du travail :

8. Aux termes du texte susvisé, aucune sanction antérieure de plus de trois ans à l'engagement des poursuites disciplinaires ne peut être invoquée à l'appui d'une nouvelle sanction.

9. Pour débouter le salarié de sa demande tendant à dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, après avoir constaté que la lettre de licenciement, notifiée le 23 février 2017, indiquait notamment que « ce n'est pas la première fois que nous devons faire face à un comportement inapproprié de votre part. En effet, en janvier 2014, nous vous avions notifié une mise à pied de deux journées suite à une insubordination et un abandon de poste », l'arrêt retient que le salarié a manqué à ses obligations découlant de son contrat de travail et que ce manquement, qui s'ajoute à des faits d'insubordination et d'abandon de poste précédemment sanctionnés par une mise à pied disciplinaire, justifie la rupture de son contrat de travail.

10. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a retenu une sanction antérieure de plus de trois ans à l'engagement des poursuites disciplinaires pour justifier le licenciement, a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

11. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif de l'arrêt disant que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse entraîne la cassation du chef de dispositif rejetant les demandes au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse qui s'y rattachent par un lien d'indivisibilité.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, rejette les demandes au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 25 novembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;

Condamne la société Colas France aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Colas France à payer à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel la somme de 3000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze février deux mille vingt-quatre.

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