8 février 2024
Cour d'appel de Versailles
RG n° 21/03480

Chambre sociale 4-6

Texte de la décision

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



Chambre sociale 4-6



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 08 FEVRIER 2024



N° RG 21/03480 - N° Portalis DBV3-V-B7F-U3MF



AFFAIRE :



[P] [X]





C/



S.A.R.L. CISCO SYSTEMS FRANCE









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 30 Septembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOULOGNE BILLANCOURT

N° Chambre :

N° Section : E

N° RG : F 19/00941



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Sophie CORMARY de la

la SCP HADENGUE & ASSOCIES





Me Sébastien DUCAMP de

la SELEURL Sébastien DUCAMP AVOCAT







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE HUIT FEVRIER DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :



Monsieur [P] [X]

né le 12 Janvier 1964 à [Localité 6] (57)

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 2]





Représentant : Me Sophie CORMARY de la SCP HADENGUE & ASSOCIES, , avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 98 -





APPELANT

****************





S.A.R.L. CISCO SYSTEMS FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représentant : Me Sébastien DUCAMP de la SELEURL Sébastien DUCAMP AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R052 substitué par Me Eloïse DE LA CHESNAIS avocat au barreau de PARIS





INTIMEE



****************







Composition de la cour :



En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 28 Novembre 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Nathalie COURTOIS, Président chargé du rapport.



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :



Madame Nathalie COURTOIS, Président,

Madame Véronique PITE Conseiller,

Madame Odile CRIQ Conseiller,



Greffier lors des débats : Madame Isabelle FIORE,








FAITS ET PROCÉDURE



A compter du 1er août 1998, M. [P] [X] a été engagé par contrat de travail à durée indéterminée, en qualité de responsable commercial, statut cadre, par la SARL Cisco Systems France, qui a pour activité le développement et la commercialisation de services de conseil et d'assistance pour le choix et l'installation d'ensembles informatiques, emploie plus de dix salariés et relève de la convention collective des bureaux d'études techniques dite SYNTEC.



En dernier lieu, M. [P] [X] occupait les fonctions de responsable commercial partenaires (« Partner Account Manager»).



Le 28 octobre 2018, un accord collectif d'entreprise portant rupture conventionnelle collective (RCC) a été signé entre la société et les partenaires sociaux.



Le 9 novembre 2018, il a été validé par l'administration et une période de volontariat au départ s'est ouverte du 15 novembre au 14 décembre 2018.



Par courriel du 14 décembre 2018, M. [P] [X] a informé la société de sa volonté de bénéficier des dispositions de l'accord portant mesures de rupture conventionnelle collective.



Le 20 décembre 2018, il a signé la convention de rupture d'un commun accord avec adhésion au congé de mobilité. La rupture intervenait le 7 janvier 2019 à l'issue du délai de rétractation de quinze jours.



Le 11 juillet 2019, M. [P] [X] a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt de la dénonciation des conditions d'exécution de son contrat ayant précédé la rupture de son contrat de travail et a sollicité des dommages et intérêts au titre de l'inexécution fautive de son contrat de travail, de la discrimination en raison de son âge et au titre de la violation par la société de son obligation de sécurité, ce à quoi la société s'est opposée.



Par jugement rendu le 30 septembre 2021, notifié le 4 novembre 2021, le conseil de prud'hommes a:


condamné la société Cisco Systems France à payer à M. [P] [X] les sommes suivantes :


* 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité en matière de santé au travail

* 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.




débouté M. [P] [X] de ses autres demandes.





débouté la société Cisco Systems France de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile





dit qu'il n'y a pas lieu d'ordonner l'exécution provisoire du présent jugement au-delà des dispositions de l'article R 1454-28 du code du travail





condamné la société Cisco Systems France aux éventuels dépens.




Le 25 novembre 2021, M. [P] [X] a relevé appel de ce jugement par voie électronique.



Par conclusions transmises par RPVA du 18 février 2022, M. [P] [X] sollicite de la cour de voir:




recevoir Monsieur [X] en son appel et l'y déclarer bien fondé,





infirmer le jugement prud'homal en ce qu'il a débouté Monsieur [X] de ses demandes,





le réformant, en conséquence,





juger l'inexécution fautive du contrat de travail par la Société CISCO France,





juger le traitement discriminatoire subi par Monsieur [X], en raison de son âge,





en conséquence, condamner la Société CISCO SYSTEMS France à verser à Monsieur [X] les sommes suivantes :




* 60 000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail,

* 160 000 € à titre de dommages et intérêts pour discrimination liée à l'âge,

* 16 000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité

en matière de santé au travail,



* 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,




condamner la Société CISCO SYSTEMS France aux éventuels dépens.




Par conclusions d'intimée et appelant à titre incident n°1 transmises par RPVA du 10 mai 2022, la SARL Cisco Systems France sollicite de la cour de voir:




infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la Société au paiement de 1000,00€ à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité en matière de santé au travail et 1.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,





confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [X] de toutes ses autres demandes,





infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile,





et en conséquence, à titre principal :




* juger que M. [X] n'a pas été victime de discrimination liée à son âge,

* juger que la Société n'a pas manqué à son obligation de sécurité,

* juger que la Société n'a pas exécuté le contrat de travail de façon fautive,




en conséquence, débouter M. [X] de l'ensemble de ses demandes,





à titre subsidiaire, ramener les demandes indemnitaires de M. [X] à de plus justes proportions,





à titre reconventionnel, condamner M. [X] à la somme de 3 000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.




Par ordonnance rendue le 18 octobre 2023, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 28 novembre 2023.



Pour plus ample exposé des moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées ainsi qu'aux développements infra.






MOTIFS DE LA DÉCISION




Sur l'exécution fautive alléguée par le salarié du contrat de travail




Il résulte de l'article L1222-1 du code du travail que le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi. L'exécution loyale du contrat de travail implique que l'employeur n'abuse pas de ses pouvoirs de direction et d'organisation et permette aux salariés d'exécuter leur contrat de travail dans les meilleures conditions possibles.



La bonne foi étant toujours présumée, c'est à celui qui allègue la mauvaise foi de la prouver.



En l'espèce, M. [P] [X] soulève plusieurs violations par la SARL Cisco Systems France de ses obligations:



- en refusant de lui fournir du travail à compter du 17 juillet 2018, date à laquelle il lui a été signifié que son poste se trouvait supprimé



- en refusant de le positionner sur un autre poste ou mission pendant de longs mois en dépit de ses états de service irréprochables et des possibilités de reclassement ouvertes



- en omettant de lui notifier un plan de commissionnement lui ouvrant droit au bénéfice de sa rémunération variable contractuellement garantie



- en omettait de lui verser le salaire dû pendant près de 5 mois à savoir la rémunération à 100% de l'OTE faute d'objectifs notifiés



- en lui signifiant que son maintien au sein de CISCO était compromis et refusant de l'accompagner dans ses démarches personnelles de reclassement en interne



- en le menaçant d'une procédure de licenciement économique et en lui soumettant un calendrier de procédure pour le mois d'octobre dénué de tout fondement juridique pour le convaincre d'accepter le dispositif de rupture conventionnelle collective (ci-après RCC)



- en le décourageant jusqu'à la veille de la date limite de candidature au RCC en lui indiquant qu'il n'y aura pas de postes en interne au channel qui corresponde à son niveau, indication qui sera contredite quelques semaines plus tard



- en régularisant sa situation salariale une fois acquise sa signature de la convention de rupture dans le cadre du dispositif de RCC.



La SARL Cisco Systems France conteste l'intégralité des manquements qui lui sont reprochés.



- Sur le défaut de fourniture de travail et sur le refus de le positionner sur un autre poste ou mission pendant de longs mois en dépit de ses états de service irréprochables et des possibilités de reclassement ouvertes : il n'est pas contesté par la SARL Cisco Systems France qu'à compter du 17 juillet 2018 M. [P] [X] a été informé que son poste ne serait pas renouvelé l'année prochaine (soit dans les 15 jours) et que deux choix s'offraient à lui : le licenciement économique ou rechercher par lui même un nouveau poste au sein de l'entreprise (pièce 9).



La SARL Cisco Systems France explique qu'il est d'usage au sein de ce type d'organisation commerciale que les cartes soient rebattues à la fin de chaque année fiscale et que les périmètres d'intervention des collaborateurs soient redéfinis' et qu'il 'n'est pas totalement anormal que M. [P] [X] ait effectivement eu à faire face à une période de 'flottement' liée à la mise en place de la nouvelle organisation des périmètres en lien avec les orientations stratégiques de la société qui allaient dessiner le futur accord de rupture conventionnelle collective'.



Néanmoins, il convient de rappeler que la conclusion d'un contrat de travail emporte pour l'employeur obligation de fournir du travail à son salarié conformément à l'article 1221-1 du code du travail et si l'employeur n'envisage pas de licenciement dans l'immédiat, il n'appartient pas à ce salarié de trouver lui-même un autre emploi soit au sein de l'entreprise soit en dehors. Sans être contredit, M. [P] [X] relève que durant cette période d'attente, son employeur ne lui a même pas proposé un reclassement interne ni même sur l'une des six filiales situées en France.



Or, il justifie avoir interrogé dès le 17 juillet sa hiérarchie européenne sur un possible positionnement pour l'année suivante (fiscale 2019) sur un poste de ITSP Ventes sur le périmètre EMEAR, en adéquation avec son expérience et son expertise, et recevoir pour réponse que les embauches avaient été effectuées 15 jours avant le démarrage de la nouvelle année fiscale (pièce 9).



Il justifie également (pièce 14) avoir signalé à son supérieur hiérarchique par courriel du 24 septembre 2018 qu'il était en contact avec ' [I]' pour un poste ITSP EMEAR PAM paru une semaine avant et toujours vacant.



Il produit (pièces 11-12-13) des annonces de postes dont certains correspondaient à son grade (11) ou susceptibles de s'en rapprocher et de l'intéresser (Grade 9) à savoir stratégie account manager France (grade 9), poste diffusé en septembre, novembre et décembre 2018, ITSP EMEAR PAM (grade 11) publié en septembre 2018, AppD enterprise Sales Exécutive France (grade 11) poste publié en novembre et décembre 2018.



Ce manquement est établi.



- sur l'absence de plan de commissionnement lui ouvrant droit au bénéfice de sa rémunération variable contractuellement garantie et sur l'absence de versement de l'intégralité de son salaire dû pendant près de 5 mois, après avoir rappelé que sa rémunération était principalement constituée d'une part variable, il explique qu'en l'absence de travail, il n'était destinataire d'aucun nouveau plan de commissionnement, de sorte que dans l'attente de son repositionnement, il interrogeait la DRH sur le mode de paiement de son salaire depuis le 1er août puisque ne touchant plus que le salaire de base en l'absence de 'goal skeet'. Il lui était alors répondu qu'il serait rémunéré 100% de son On Target Earning (OTE salaire de base augmentée de la partie variable du salaire en considérant que 100% des objectifs ont été atteints). Pour cela et sans que cela soit contesté, dès le 19 septembre, et conformément à la procédure interne à Cisco, il a ouvert un 'case' dans les systèmes pour solliciter la mise en place de ces éléments de salaire. Néanmoins aucune régularisation salariale ne devait intervenir avant décembre 2018. Au contraire, le 24 octobre 2018, il recevait une 'goalsheet' décorrélée de toute mission, lui affectant l'objectif total de la France alors même qu'il n'était affecté sur aucun poste. Par courriel (pièce 16), il en informait la DRH mais n'obtenait aucune réponse sur cette lettre d'objectifs qu'il qualifie d'ubuesque. Faute de recevoir l'intégralité de sa rémunération, il saisissait le 5 novembre 2018 le secrétaire du comité d'entreprise de sa situation (pièce 18). M.[P] [X] précise que fin novembre le reliquat de ses salaires impayés s'élevait à 20 220,98 euros.



En réponse, la SARL Cisco Systems France se contente d'imputer ce retard de paiement à des dysfonctionnements internes dans les logiciels de paie, ce dont elle ne justifie pas.



Or, par courriel du 22 novembre 2018, le service RH va répondre à M. [P] [X] avoir demandé à l'équipe commission de payer son bonus à compter de 'day 1 FY19" et lui communique sans autre commentaire le calendrier qui lui a été transmis par ce service et qui fait apparaître un premier versement prévu en décembre pour la période du 29 juillet au 24 novembre et un second en janvier pour la période du 25 novembre au 22 décembre)



Par ailleurs, comme relevé par M. [P] [X] dans son courriel du 5 novembre adressé au secrétaire du CSE, il y a lieu de s'interroger sur la raison pour laquelle, alors que l'absence d'affectation relève de la seule responsabilité de l'employeur, celui-ci ne met pas en place automatiquement le process de versement intégral de la rémunération dont la part variable qui lui est allouée d'office à 100% au lieu de le faire supporter au salarié.



Ce manquement est établi.



- sur l'absence d'accompagnement dans ses démarches personnelles de reclassement en interne alors que son maintien au sein de CISCO était compromis, il résulte des pièces produites par M. [P] [X] que c'est ce dernier qui prenait l'initiative d'interroger la DRH sur sa situation et non l'inverse. Il en est de même de la majorité des échanges de courriels et de SMS entre M. [P] [X] et des membres de l'équipe de ressources humaines voire de M.[L], directeur général, déclenchés sur la seule initiative du salarié.



En réponse, la SARL Cisco Systems France se contente de répondre : ' il convient de rappeler que M.[X] exerce à ce moment des responsabilités stratégiques (responsable commercial partenaires) depuis plus de 12 ans, avec une ancienneté de 20 ans, et bénéficie d'un des grades les plus élevés au sein de la société. Compte tenu de sa position, M.[X] n'est effectivement pas 'materné' par les ressources humaines. Comme il est d'usage au sein de ce type d'organisation commerciale, les cartes sont rebattues à la fin de chaque année fiscale et les périmètres des collaborateurs sont redéfinis'.



Sans aller jusqu'à du 'maternage', il convient de rappeler, comme le fait l'employeur sans en tirer les conséquences attendues notamment humaines, qu'après 20 ans passés dans la société, il pouvait paraître opportun de soutenir ce cadre dit de 'haut potentiel' dans la gestion de cette situation qui lui était imposée et de faciliter ses démarches pour limiter autant que possible les désagréments matériels afférents et notamment celui portant sur sa rémunération.

Or comme pour la fourniture du travail, l'employeur est tenu de verser au salarié la rétribution intégrale telle que prévue par son contrat de travail. La part variable fait partie intégrante du salaire.



Par courriel du 19 novembre 2018, M. [P] [X] relançait la DRH sur le non versement de sa part variable, lui en rappelant les conséquences (impact sur son budget familial, impact fiscal si cette somme lui était versée en 2019 en raison du passage au prélèvement à la source, impact sur le calcul des indemnités de congé de mobilité dans le cadre du plan de RCC auquel il était éligible)



Ce manquement est établi



- sur la menace d'une procédure de licenciement économique et la proposition d'un calendrier de procédure pour le mois d'octobre dénué de tout fondement juridique pour le convaincre d'accepter le dispositif de RCC, le courriel de M. [P] [X] à la DRH (pièce 9) dans lequel il lui écrit, en mettant en copie le directeur général et le secrétaire du CSE, 'Afin d'être alignés, entre mon management, les ressources humaines et les délégués du personnel, je souhaite faire un point écrit de ma situation indiquée très directement pendant notre entretien:



- mon poste est supprimé à compter du 30 juillet 2018,

- je n'ai pas de nouveau poste prévu par le management de Cisco France,

- deux choix se présentent à moi:



* démarrer immédiatement une procédure de licenciement économique,

* m'activer pour trouver d'ici mi-septembre un nouveau job, faute de quoi la procédure de licenciement économique sera lancée'.



Ce courriel et son contenu ne sont pas remis en cause par la SARL Cisco Systems France.



Les échanges postérieurs à ce courriel font apparaître que la direction avait fait le choix de son départ, lui faisant comprendre implicitement que l'option de son reclassement au sein de la société n'était pas envisageable.



C'est ainsi que le 12 décembre 2018, le directeur général écrit à M. [P] [X] ' Hello - je viens d'avoir une discussion avec [B] [DRH] qui me dit que si un job de PAM s'ouvre tu serais intéressé - je suis surpris car cela veut dire baisse de salaire et baisse de grade et ce sont des jobs full time à [Localité 5] - je suis US dispo si tu veux en parler'.



Le 13 décembre 2018, M. [P] [X] lui répondra ' Bonsoir [M], je ne comprends pas pourquoi d'un seul coup mon salaire est devenu trop élevé' Je n'ai pas été augmenté depuis 5 ans alors que je suis allé au Chair man club en 2014 et ai connu 5 ans successifs de dépassements de mes objectifs donnés par mes managers sans aucune négociation de ma part...Et pourquoi mon grade qui correspond à celui d'AM ou PAM senior dans la grille Cisco (ce qui est normal pour mes diplômes et mes 30 années d'expérience IT dont 20 ans chez Cisco + mes bons résultats et bonnes notations chez Cisco) est aujourd'hui aussi considéré comme trop élevé pour gérer nos grands partenaires stratégiques' Pour info, il y a 20 ans j'étais déjà dans le même grade et cela n'a jamais gêné Cisco...que se passe t-il d'un coup''.

Et le directeur général de répondre 'je ne dis pas que ton salaire est trop ou pas je te dis que les postes seront ouverts sur des grades 8 peut-être 9 ", ce qui sera contredit par la publication ultérieure de postes au grade 10 voire 11.



Ces échanges démontrent bien que tout était fait pour inciter M. [P] [X] à partir et donc à accepter le plan de RCC tout comme la photographie du paper board sur lequel la DRH a retranscrit le 13 septembre 2018 le calendrier de la procédure envisagée pour M. [P] [X] lors de son entretien avec lui, et qui n'est pas contestée utilement par la SARL Cisco Systems France, celle-ci se contentant de remettre en cause son authenticité sans produire la moindre attestation contraire de la DRH.



Ce manquement est établi.



- sur les pressions pour le décourager jusqu'à la veille de la date limite de candidature au RCC en lui indiquant qu'il n'y aura pas de postes en interne au channel qui correspond à son niveau, indication qui sera contredite quelques semaines plus tard,



A la suite des échanges du 13 décembre 2018 précités, M. [P] [X] écrira ' Grade 8' Mais avant l'arrivée de [W] et [O] en juin, personne dans l'équipe Channel n'avait le grade 8 si je ne me trompe pas' Donc ce ne sont que des postes pour junior de 25/28 ans qui vont s'ouvrir' C'est un changement de politique Cisco' Quand j'étais Manager sur Channel GSP ou commercial, nous n'avons jamais embauché de grade 8, le grade le plus bas pour AM ou PAM était 9, ce qui correspondait à AM Position 1, sachant évidemment qu'à un grade correspond une grille de salaire et donc un âge aussi...Personne de 40 ans ne pourra prendre un poste Grade 8 en interne...ni en externe car la grille de salaire Cisco est calée sur le marché....'

Et son directeur général lui répondra, ' On en parle live à mon retour on se connaît depuis longtemps - Avec l'ensemble des changements dans le marché, je ne nous vois pas faire ce que nous avons toujours fait. Je suis en droit de recruter le niveau d'expérience qui me parait approprié et c'est un des objectifs de la RCC. Donc à ce jour, il n'y aura pas de postes en interne au Channel qui correspondant à ton niveau, c'est ce que je voulais te dire. N'hésite pas à joindre [B]' (pièce 20).



M. [P] [X] déposera son dossier de candidature au plan RCC le 14 décembre 2018, retenu le 17 décembre 2018 et signé le 20 décembre 2018.



M. [P] [X] produit un courriel de la DRH (pièce 22) adressé le 11 janvier 2019 à l'ensemble des personnels dont l'objet est opportunités d'évolution 2019-Job opportunities 2019" dans lequel elle écrit que 'Notre volonté' Recréer une dynamique des compétences et des talents à Cisco France grâce aux nombreux postes ouverts au sein de toutes les organisations présentes en France'.



Par ailleurs, le 8 février 2019, des offres d'emplois ont été diffusées au sein de l'entreprise dont deux 'partner account manager France grade 10 (pièce 23).



Ce manquement est établi.



- sur la régularisation de sa situation salariale une fois acquise sa signature de la convention de rupture dans le cadre du dispositif de RCC, si la SARL Cisco Systems France parle d'un simple concours de circonstance, il convient de relever que le versement de la part variable est versée sur la paie de décembre et comme indiqué précédemment, l'employeur ne justifie nullement du motif du retard invoqué.



Ce manquement est établi.



Au vu des manquements ci-dessus retenus, il convient de retenir l'exécution déloyale du contrat de travail par l'employeur et de condamner ce dernier à la somme de 30 000 euros.




Sur la discrimination en raison de l'âge




Il résulte des dispositions de l'article L. 1132-1 du code du travail qu'aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte notamment en raison de son état de santé ou de son âge.



Aux termes de l'article L. 1132-4, toute disposition ou tout acte pris à l'égard d'un salarié en méconnaissance de ces dispositions est nul.



En application de l'article L. 1134-1, en cas de litige relatif à la méconnaissance de ces textes, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte ; au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.



Au soutien de sa demande tendant à voir juger le caractère discriminatoire de la rupture de son contrat de travail, M. [X] relève que son activité déployée au cours de ses 20 ans d'activité a toujours été en parfaite adéquation avec les attentes de la hiérarchie alors que, suite à l'annonce de la suppression de son poste intervenue le 17 juillet, la SARL Cisco Systems France a purement et simplement refusé de le repositionner alors même qu'il existait de nombreuses solutions de reclassement.



Il relève que les postes d'account manager et partner account manager classés en grade 11 (le sien) publiés après son départ se sont trouvés relégués à une classification très inférieure 9 et 10. Selon lui, de telles modifications statutaires confirment un changement de politique salariale au sein de Cisco qu'il avait déjà pressenti lors de ses échanges avec le directeur général. Il soutient que les procédés d'isolement dont il a été victime étaient liés à son âge, sa séniorité au sein du groupe et le niveau de salaire élevé correspondant. Il invoque d'autres salariés, présentant le même profil que lui, qui ont dénoncé également en 2018 avoir subi un traitement identique.



Il produit les pièces suivantes:



- un courrier d'alerte collectif (pièce 24) signé le 11 mars 2018, envoyé au secrétaire du CE, au secrétaire du CHSCT, aux médecins du travail ACMS, à l'assistance sociale ACMS et à la manager country consultant RH Cisco, par quatre salariés Cisco qui déclarent 'nous souhaitons dénoncer les dérives et pressions managériales que nous subissons depuis de longs mois sur notre lieu de travail, lesquelles constituent un dévoiement manifeste de l'exercice de l'autorité hiérarchique.

Des alertes ont été émises auprès des services des ressources humaines, sans qu'aucune suite n'y soit apportée.



Les illustrations de ces traitements dégradants sont nombreuses:



- mise en place d'un encadrement drastique de notre activité qui s'apparente à une véritable mise sous tutelle et qui entrave la bonne réalisation des tâches,

- perte progressive d'autonomie,

- retrait de territoires commerciaux,

- procédés de dénigrement via:



* la mise en place de PIP [ performance improvement plan] sans raison pertinente et objective, reconduite arbitraire,



* mesures de contrôle de l'activité infantilisantes.



Il convient de préciser que ces mises en causes soudaines et brutales de nos compétences et expertises interviennent sans rappel à l'ordre préalable et en totale inadéquation avec les performances réalisées.

Force est, en outre, d'admettre qu'aucun entretien annuel d'évaluation ne s'est tenu depuis 2015.

Il semble pour finir que ces attaques ciblent une catégorie professionnelle spécifique seniors (+50 ans) occupant des postes de responsables commerciaux, bénéficiant tous d'une importante ancienneté au sein de Cisco (+18 ans).

A regard des répercussions lourdes sur notre santé psychologique et physique qu'engendre ce traitement, il nous incombe de vous alerter officiellement afin que des mesures puissent être enfin prises pour y mettre un terme'



- le procès-verbal de la réunion du CE le 17 juillet 2014 (pièce 25) dans lequel est abordée notamment la question relative à l'effectif de la société et au profil des salariés. Il est retranscrit que:

* 'la direction pointe un maintien de la tendance de répartition entre CDD et CDI et souligne le vieillissement de la population qui pourrait être remis en cause par le PSE. Cisco affiche, au niveau mondial, une volonté de rajeunir sa population et renouveler la force de travail

'

* ' Les élus soulignent que la population impactée est très ciblée en termes d'âge, ce qui revient à une forme de discrimination'



* ' la direction met en avant une volonté 'd'aplanir' la structure qui engendre un ciblage de rôle et non d'âge. Le périmètre reste constant'



* ' La direction observe une légère augmentation du rapport entre les rémunérations les plus élevées et celles les moins élevées. Le montant total des dix rémunérations les plus élevées a néanmoins baissé'.

* 'les élus sont surpris de l'augmentation de 100 000 euros du recours au travail temporaire en période de réduction du personnel' ' la direction indique qu'il s'agit principalement de contrats d'intérim'

- le procès-verbal de la réunion ordinaire du CE du 20 mars 2018 (pièce 26) dans lequel, sur l'état des départs involontaires de FY16 à nos jours avec répartition âge/ancienneté/grade:



* ' les élus constatent que les plus de 50 ans représentent près d'un tiers des départs involontaires, ce qui est supérieur à la part des salariés de plus de 50 ans au sein de l'effectif de l'entreprise. De la même manière, les grades 9, les grades 11 et 12, et les salariés ayant beaucoup d'ancienneté sont plus représentés parmi les départs involontaires qu'au sein de l'effectif. Les élus souhaitent connaître les explications de ce décalage'.



* 'la direction constate également ces proportions plus importantes parmi les départs involontaires mais souligne qu'il n'y a aucune volonté de l'entreprise en ce sens. Tous les collaborateurs licenciés le sont pour des raisons qu'elle estime valablement justifiées'

* 'les élus s'interrogent sur le taux d'échec plus important de cette population quelle qu'en soit la cause'



* ' la direction note que la motivation peut baisser, une fois arrivé à un certain grade, un certain âge et une certaine ancienneté. De plus, les évolutions sont plus compliquées à partir du grade 12 car les promotions vers les grades 13 sont de plus en plus rares, ce qui implique une stagnation dans la carrière'.



* ' Les élus estiment que ce raisonnement est valable pour les quadragénaires, mais pas des quinquagénaires, sachant qu'il n'est pas certain que tous aient envie de passer grade 13. Ils souhaitent tirer des leçons de cet état de fait et inverser la tendance'



* ' la direction note que dans la mesure où cette situation n'est pas délibérée, elle considère qu'il n'y a pas d'action rectificative à apporter' tout en précisant que 'on peut constater une corrélation forte entre l'âge et l'ancienneté. Il est possible, après un certain nombres d'années à occuper le même poste et le même grade, que les attentes de l'entreprise puissent varier et que l'on demande aux collaborateurs de modifier leur manière de travailler par rapport à ce qu'ils faisaient depuis des années. Dans ce contexte, certains peuvent avoir plus de mal que d'autres à s'adapter. L'entreprise est dans un phase de transition que tout le monde n'arrive peut-être pas à suivre'. Elle poursuit en indiquant que 'ces départs interviennent dans le cadre d'un problème de performance et ne sont pas liés à un problème d'âge. Elle indique également que certains salariés ont du mal à entendre qu'ils ont un problème de performance, quel que soit l'âge'. S'agissant du courrier d'alerte collectif du 13 mars 2018, la direction précise que 'les procédures appliquées à ces quatre collaborateurs sont liées à des questions de performances pour trois d'entre eux'.



- l'attestation de M.[N] [E] (pièce 41), salarié Cisco pendant plus de 20 ans comme responsable commercial de grands clients ou de partenaires majeurs, atteste que M. [P] [X] et lui 'avons été atteints moralement par des pressions inhabituelles de la part de nos managers respectifs en 2018 avec un but évident de faire quitter la société à toute une population 'd'anciens'. Les moyens utilisés étaient divers et ils ont affecté notre santé physique et psychologique: suppression de poste pour M. [P] [X], proposition d'un licenciement économique alors que l'agilité et le changement de poste était une valeur Cisco ou bien la menace d'un plan d'amélioration personnel alors que mon partenaire me nommait personnellement meilleur partenaire de l'année lors de sa réunion annuelle avec remise de trophée. A noter que d'autres collègues ayant subi ce plan sont tombés gravement malade. Des échanges que j'ai eus avec M. [P] [X] j'ai bien noté un sentiment d'incompréhension puis de désespoir et enfin d'abandon et de maltraitance de son management qui nuisait à sa santé. Je lui ai conseillé d'avertir la médecine du travail comme beaucoup de collègues l'avait fait et de consulter rapidement son médecin. Lorsque la RCC a été présentée, les pressions du management ont été grandissantes et de plus en plus blessantes. Sans aucun doute ce plan devait être un succès pour la DRH et les managers'



- l'attestation de M.[G] (pièce 40), salarié Cisco de juin 2000 à novembre 2019 comme responsable commerciale de grands clients, 'reconnaît avoir constaté de la part de la direction de fortes pressions managériales sur une frange bien particulières de collaborateurs commerciaux. Ces pressions se sont révélées principalement sur des collègues ayant principalement plus de 15 ans d'ancienneté, des grades de commerciaux seniors obtenu au mérite au cours de ces années (grade 11 et 12) et ayant d'excellents résultats commerciaux donc des salaires élevés'. Il relève que M. [P] [X] s'est retrouvé du jour au lendemain sans affectation alors même que Cisco recrutait en parallèle mais des profils beaucoup plus jeunes et de grade bien inférieur. Il souligne que les salariés concernés sont restés durant plusieurs mois sans information sur leur devenir, les plaçant dans un contexte de stress, et ce n'est qu'en octobre 2018 que le dispositif RCC a été évoqué et réservé à des cadres ayant un grade 11 et 12, ayant plus de 10 années d'ancienneté.



La cour retient que, pris dans leur ensemble, les faits ci-avant identifiés comme établis, permettent de présumer l'existence d'une discrimination en raison de l'âge.

Dès lors, il appartient à l'employeur de démontrer que ces agissements ne sont pas constitutifs de discrimination et que ses décisions étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.



Sur les justifications déniant à ces agissements d'être constitutifs d'une discrimination, l'employeur développe en premier lieu une argumentation sans lien avec l'objet de la demande puisqu'à aucun moment M. [P] [X] n'a évoqué une quelconque discrimination dans l'évolution de sa carrière.



S'agissant de la discrimination en raison de son âge, la référence par la SARL Cisco Systems France d'un précédent jugement rendu par le même conseil des prud'hommes concernant un autre salarié, débouté de ce moyen, est inopérante, ce jugement ne disant rien sur la situation personnelle aujourd'hui dénoncée par M. [P] [X].



Par ailleurs, elle se retranche sur la pyramide des âges pour expliquer la sur-représentation des profils comme celui de M. [P] [X] dans les départs involontaires et pour considérer comme normal leur sur-représentation dans les départs.



Sauf qu'il est question de départs non volontaires de cadres âgés et anciens dans l'entreprise qu'elle explique par le fait que 'la réorganisation ciblait des postes à responsabilités élevées dans le cadre de la mise en oeuvre d'une organisation horizontale'. Or, il y a nécessairement un lien entre le grade, l'âge et l'ancienneté dans l'entreprise. C'est donc bien une population âgée et gradée qui est visée par cette réorganisation.



En outre, elle soutient que le compte rendu de la réunion du CE en 2014 ne valide pas la thèse de la discrimination en lien avec l'âge alors même qu'il est retranscrit que 'la direction [...] souligne le vieillissement de la population qui pourrait être remis en cause par le PSE. Cisco affiche, au niveau mondial, une volonté de rajeunir sa population et renouveler la force de travail'. Ainsi donc le processus de rajeunissement des équipes avait commencé dès 2014 et se poursuivait en 2018 comme le lui faisaient remarquer les élus qui constataient ' que les plus de 50 ans représentent près d'un tiers des départs involontaires, ce qui est supérieur à la part des salariés de plus de 50 ans au sein de l'effectif de l'entreprise. De la même manière, les grades 9, les grades 11 et 12, et les salariés ayant beaucoup d'ancienneté sont plus représentés parmi les départs involontaires qu'au sein de l'effectif. Les élus souhaitent connaître les explications de ce décalage', observation à laquelle la société répondait constater également ces proportions plus importantes parmi les départs involontaires tout en soulignant qu'il n'y avait aucune volonté de l'entreprise en ce sens et précisant que tous les collaborateurs licenciés l'étaient pour des raisons qu'elle estimait valablement justifiées.



Or s'agissant de M.[X] elle ne s'explique pas sur le motif de la suppression de son poste et surtout sur l'absence de reclassement de ce dernier dont l'objectif était de rester et non de partir de l'entreprise et ce malgré la publication de postes vacants susceptibles de correspondre au profil de M. [P] [X] et sur laquelle la SARL Cisco Systems France ne se prononce pas.



Les données statistiques produites par la SARL Cisco Systems France s'agissant des ruptures (pièce 2) ne porte que sur l'année 2017 et non 2018, de sorte qu'elle ne permet pas une analyse pertinente du profil des partants. Par ailleurs, il convient de relever qu'en 2016 et 2019, la catégorie des plus de 50 ans représentait respectivement 36 et 38% de l'effectif de cisco systems France, filiale française du groupe Cisco, sans aucune autre donnée statistique du groupe Cisco.



Elle conteste, sans autre démonstration sur le fond, la valeur probante des attestations des salariés produites aux débats et notamment celle de M.[G] avec lequel elle serait en litige pour les mêmes faits.



Enfin, le fait que l'accord RCC ait été validé par les partenaires sociaux et par la DIRECTE n'est pas exclusif de toute discrimination notamment dans l'application dudit accord. Elle rappelle que le bénéfice de la RCC procède du volontariat des salariés alors même que tous les éléments précédemment développés démontrent que le choix laissé à M. [P] [X] était contraint.



Dans ces conditions, au vu de l'ensemble des éléments qui précèdent outre les manquements retenus au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail dans l'unique objectif de le faire partir à l'occasion d'une RCC, la cour retient que la société échoue dans l'administration de la preuve que les agissements reprochés à la SARL Cisco Systems France à l'encontre de M. [P] [X] ne sont pas constitutifs de discrimination en lien avec son âge et qu'ils sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination de sa part.



En conséquence, la cour dit que ce manquement imputé à l'employeur est fondé et qu'il convient de condamner la SARL Cisco Systems France à payer à M. [P] [X] la somme de 50 000 euros par infirmation du jugement.




Sur le manquement allégué par le salarié de la société à son obligation de sécurité




Selon l'article L. 4121-1 du code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent : 1° des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail; 2° des actions d'information et de formation ; 3° la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.



Ces mesures sont mises en 'uvre selon les principes définis aux articles L. 4121-2 et suivants du même code.



Concernant le respect du suivi médical, l'article R4624-16 du code du travail, dans sa version applicable au litige, dispose que : 'Le salarié bénéficie d'examens médicaux périodiques, au moins tous les vingt-quatre mois, par le médecin du travail, en vue de s'assurer du maintien de son aptitude médicale au poste de travail occupé. Le premier de ces examens a lieu dans les vingt-quatre mois qui suivent l'examen d'embauche.'



S'agissant de l'absence de visite médicale périodique, s'il n'est pas discuté que celle-ci n'a pas été organisée par l'employeur, le salarié ne saurait l'invoquer utilement, sans alléguer de préjudice particulier (Cass. soc., 17 mai 2016, nº 14-23.138;Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 27 juin 2018, 17-15.438, Inédit).

M. [P] [X] produit:



- l'attestation du docteur [C] (pièce 27) où il est question d'une 'situation de stress que nous avions évoquée le 2 octobre et le 10 décembre 2018 qui s'est concrétisée le 4 janvier 2019 par des problèmes somatiques'



- un bilan rachidien dorso-lombo-sacré, bassin et sacro-iliaques (pièce 28) réalisé le 12 février 2019 qui fait mention d'un pincement discal postérieur modéré L3-L4, L4-L5 et d'un pincement discal global L5-S1 associé à des lésions arthrosiques articulaires postérieures modérées au même niveau.



- son dossier médical de la médecine du travail (pièce 29) où il apparaît que



* lors de la visite du 10 juillet 2003 il est question d'un problème au niveau du rachis (pincement discal L5-S1) et de quelques séances de kinésithérapie



* lors de la visite du 1er mars 2015 il est question de' moins de lombalgie'



* lors de la dernière visite du 1er juin 2017, il n'est plus fait mention de problème articulaire.



* lors de la visite du 30 avril 2019 sollicitée par M. [P] [X], il est question de 'troubles du sommeil caractérisés à partir de l'annonce brutale de licenciement à partir du 30 juillet 2018 économique avec pression pour prise de décision rapide de départ, potentiel sans aucune concertation ni prise d'information sur sa situation personnelle'.



En réponse, la SARL Cisco Systems France ne conteste pas que M. [P] [X] n'ait pas pu rencontrer la médecin du travail mais relève que les problèmes de maux de dos soulevés par M. [P] [X] sont très anciens et non liés à sa situation professionnelle. Elle relève que M. [P] [X] n'a jamais fait l'objet d'arrêt de travail et encore moins d'arrêt dont la longueur aurait nécessité une visite de reprise outre qu'il n'a jamais fait part à la société d'un quelconque problème de santé nécessitant un suivi médical régulier.



Les problèmes médicaux soulevés par M. [P] [X] étant sans lien avec son emploi et le salarié ne démontrant pas subir un préjudice en lien direct et certain avec l'absence de visite médicale périodique, il convient de le débouter de sa demande par infirmation du jugement.




Sur l'article 700 du code de procédure civile




Il convient de condamner la SARL Cisco Systems France à payer à M. [P] [X] la somme de 3 000 euros.




Sur les dépens




Il convient de condamner la SARL Cisco Systems France aux entiers dépens.





PAR CES MOTIFS





La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,



Confirme le jugement en ce qu'il a condamné la SARL Cisco Systems France à payer à M. [P] [X] la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;



Infirme pour le surplus;



Statuant à nouveau et y ajoutant;



Dit que la SARL Cisco Systems France a manqué à son obligation de loyauté dans l'exécution du contrat de travail;



Condamne la SARL Cisco Systems France à payer à M. [P] [X] la somme de 30 000 euros en réparation au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail;



Dit que M. [P] [X] a été victime d'une discrimination en lien avec son âge;



Condamne la SARL Cisco Systems France à payer à M. [P] [X] la somme de 50 000 euros en réparation de la discrimination subie du fait de son âge;



Condamne la SARL Cisco Systems France à payer à M. [P] [X] la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;



Condamne la SARL Cisco Systems France aux entiers dépens.



- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.



- signé par Madame Nathalie COURTOIS, Présidente et par Madame FIORE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.





Le greffier, Le président,

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