7 février 2024
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-10.755

Chambre sociale - Formation de section

ECLI:FR:CCASS:2024:SO00138

Texte de la décision

SOC.

ZB1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 7 février 2024




Rejet


M. SOMMER, président



Arrêt n° 138 FS-D

Pourvoi n° Z 21-10.755




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 7 FÉVRIER 2024

Mme [N] [L], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Z 21-10.755 contre l'arrêt rendu le 19 novembre 2020 par la cour d'appel de Dijon (chambre sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société France toupie location, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 3],

2°/ à Pôle emploi Bourgogne Franche-Comté, dont le siège est [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Laplume, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de Mme [L], de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société France toupie location, et l'avis de M. Juan, avocat général, après débats en l'audience publique du 9 janvier 2024 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Laplume, conseiller référendaire rapporteur, Mme Capitaine, conseiller doyen, Mmes Lacquemant, Salomon, Palle, conseillers, Mmes Valéry, Pecqueur, MM. Chiron, Leperchey, conseillers référendaires, M. Juan, avocat général, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à Mme [L] du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Pôle emploi.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Dijon, 19 novembre 2020), Mme [L] a été engagée en qualité de chauffeur camion le 1er janvier 2011 par la société Dijon Béton. Son contrat de travail a été transféré à la société France toupie location le 1er octobre 2014.

3. Elle a été victime d'un accident du travail le 7 septembre 2015 et placée en arrêt de travail à compter de cette date.

4. Elle a été déclarée inapte à son poste le 9 mars 2017 par le médecin du travail, l'avis délivré à la salariée précisant qu'elle pouvait effectuer un travail à un poste de type administratif à temps réduit inférieur à une heure par jour à domicile alors que celui délivré à l'employeur mentionnait que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé et que son état de santé faisait obstacle à tout reclassement dans l'entreprise.

5. La salariée a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 31 mars 2017.

Examen des moyens

Sur le premier moyen


6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Et sur le second moyen

Enoncé du moyen

7. La salariée fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et de la débouter de ses demandes, alors :

« 1°/ qu'en cas de contestation des éléments de nature médicale justifiant les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail mentionnés à l'article L. 4624-7, la formation de référé est saisie dans un délai de quinze jours à compter de leur notification ; que les modalités de recours ainsi que ce délai sont mentionnés sur les avis et mesures émis par le médecin du travail ; qu'il en résulte que le délai pour contester un avis d'inaptitude émis par le médecin du travail ne peut courir à l'encontre du salarié s'il ne lui a pas été personnellement notifié et qu'il ne peut lui être opposé ; qu'en l'espèce, l'arrêt constate que l'avis d'inaptitude produit par la salariée précise qu'elle ''pourrait effectuer un travail à un poste de type administratif à temps très réduit inférieur à une heure par jour à domicile'' tandis que celui produit par l'employeur indique que ''tout maintien du salarie dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé et son état de santé fait obstacle à tout reclassement dans l'entreprise'', qu'il comporte un tampon ''reçu le 16 mars 2017'' et qu'il était donc postérieur à celui produit par la salariée ; qu'il n'est pas prouvé que l'appelante l'ait obtenu par fraude et qu'au surplus, les lettres de convocation à entretien préalable du 15 mars 2017 et de licenciement du 31 mars 2017 en reprenaient les termes exacts, de sorte que ''la salariée a eu connaissance dès le 15 mars 2017 du second avis rédigé par le médecin du travail ; qu'il est constant qu'elle n'a émis aucune contestation en application des articles L.4624-7 et R. 4624-45 du code du travail, dans leurs versions applicables à la présente espèce ; qu'en conséquence, il y a lieu d'étudier le respect par l'employeur de ses obligations légales au regard du second avis'' ; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses propres constatations, dont il résultait que l'avis d'inaptitude obtenu par l'employeur postérieurement à celui qui avait été remis à la salariée n'avait pas été notifié à cette dernière, qu'elle en avait eu connaissance par la seule citation qu'en faisaient les lettres de convocation à entretien préalable et de licenciement, de sorte que le délai pour contester l'avis n'avait pas couru, qu'il ne pouvait être opposé à la salariée et que l'obligation de reclassement s'appréciait au regard des termes du seul avis qui avait été remis au salarié par le médecin du travail, la cour d'appel a violé ensemble les articles L. 1226-10, L. 4624-7, R. 4624-25, R. 4624-42 et R. 4624-55 du code du travail ;

2°/ qu'en cas de contestation des éléments de nature médicale justifiant les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail mentionnés à l'article L. 4624-7, la formation de référé est saisie dans un délai de quinze jours a compter de leur notification ; que cette procédure contradictoire de contestation, d'ordre public, tend à obtenir un nouvel avis technique ; qu'en l'espèce, il ressort de l'arrêt attaqué qu'après émission de l'avis d'inaptitude par le médecin du travail précisant que la salariée ''pourrait effectuer un travail à un poste de type administratif à temps très réduit inférieur à une heure par jour à domicile'', l'employeur a obtenu un nouvel avis mentionnant que ''tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé et son état de santé fait obstacle à tout reclassement dans l'entreprise'' et que M. [D], délégué syndical ayant accompagné la salariée lors de l'entretien préalable, atteste que ''M. [V] nous a dit qu'il avait rappelé le médecin du travail pour changer le motif de l'inaptitude'' ; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que l'employeur n'avait, pour contester l'avis du médecin du travail du 9 mars 2017, pas utilisé la procédure prévue par l'article L. 4624-7 du code du travail et saisi le conseil de prud‘hommes en référé, mais avait contacté directement le médecin du travail, de sorte que le seul premier avis émis devait s'appliquer, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-10, L. 4624-4 et L. 4624-7 du code du travail. »

Réponse de la Cour

8. En l'absence de recours exercé en application de l'article L. 4624-7 du code du travail contre l'avis du médecin du travail, celui-ci s'impose aux parties comme au juge.

9. La cour d'appel, qui a constaté, d'une part, que la preuve que l'employeur ait obtenu par fraude l'avis d'inaptitude dont il se prévalait, n'était pas rapportée, d'autre part, que cet avis n'avait pas, au jour où elle statuait, fait l'objet d'un recours en application des articles L. 4624-7 et R. 4624-45 du code du travail, en a exactement déduit, peu important que le délai de recours à l'encontre de cet avis n'ait pas couru, que celui-ci s'imposait aux parties et au juge saisi de la contestation du licenciement.

10. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme [L] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept février deux mille vingt-quatre.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.