1 février 2024
Cour d'appel de Douai
RG n° 21/05746

CHAMBRE 1 SECTION 1

Texte de la décision

République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 1



ARRÊT DU 01/02/2024





****





N° de MINUTE :

N° RG 21/05746 - N° Portalis DBVT-V-B7F-T6MO



Jugement (N° 19/000750)

rendu le 21 septembre 2021 par le tribunal judiciaire de Lille







APPELANT



Monsieur [K] [J]

[Adresse 2]

[Localité 4]



représenté par Me Bernard Franchi, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

assisté de Me Eric Demey, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant



INTIMÉES



L'association Entente Sportive Basket [Localité 4] (ESBVA)

prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 3]

[Localité 4]



représentée par Me Gilles Maton, avocat au barreau de Lille, avocat constitué



La Fédération Française de Basket-Ball

[Adresse 1]

[Localité 5]



défaillante, à qui la déclaration d'appel a été signifiée le 27 janvier 2022 à personne habilitée



DÉBATS à l'audience publique du 20 novembre 2023, tenue par Céline Miller magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.



GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe







COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ



Bruno Poupet, président de chambre

Samuel Vitse, président de chambre

Céline Miller, conseiller



ARRÊT RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 1er février 2024 après prorogation du délibéré en date du 25 janvier 2024 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Bruno Poupet, président et Delphine Verhaeghe, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.




ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 02 novembre 2023



****



L'association Entente Sportive Basket [Localité 4] (ci-après, 'l'association ESBVA'), créée en 1987, est une association soumise aux dispositions de la loi du 1er juillet 1901 et du décret du 16 août 1901, dont l'objet est la pratique du basket-ball.



M. [K] [J] a été membre de cette association pendant de nombreuses années depuis sa création.



Après que celle-ci eut refusé de renouveler sa licence sportive pour la saison 2016/2017, M.'[K] [J] l'a fait assigner devant le tribunal d'instance de Lille par acte du 14 février 2019 aux fins, notamment, de la voir condamner à lui délivrer, sous astreinte, une licence sportive, ainsi qu'à lui payer une somme de 4 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral et 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



Par acte du 28 août 2020, M. [J] a fait assigner en intervention forcée la Fédération française de basket-ball à la demande du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille.



Ces deux affaires ont été jointes et, par jugement du 21 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Lille s'est déclaré compétent pour juger l'affaire et a :

- rejeté l'exception tirée du défaut d'intérêt à agir soulevée par l'association ESBVA ;

- débouté M. [J] de l'ensemble de ses demandes ;

- débouté l'association de sa demande de dommages et intérêts, ainsi que de sa demande de suppression des publications sous astreinte ;

- condamné M. [J], outre aux dépens de l'instance, à verser à cette dernière la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- constaté que la Fédération française de basket-ball était tierce au procès et qu'aucune demande n'avait été faite à son encontre ;

- débouté celle-ci de sa demande formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.



M. [J] a interjeté appel de ce jugement et, aux termes de ses dernières conclusions remises le 14 février 2022, demande à la cour, au visa des articles 1303 et 1304 du code civil, de l'infirmer en ce qu'il l'a débouté de l'ensemble de ses demandes et condamné, outre aux dépens de l'instance, à verser à l'association

ESBVA la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et, statuant à nouveau, de :



- juger que le non-renouvellement de sa licence s'analyse comme une exclusion irrégulière de l'association ESBVA ;



- juger qu'il demeure membre de l'association ESBVA ;



- ordonner à l'association ESBVA de transmettre sa demande d'affiliation à la Fédération française de basket-ball'dans un délai de quinze jours à compter de la signification de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard pendant soixante jours ;



- lui ordonner de lui transmettre la licence sollicitée dans un délai de quinze jours à compter de son affiliation auprès de la Fédération française de basket-ball et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard pendant soixante jours ;



- condamner l'association intimée à lui verser la somme de 4 000 euros au titre des dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;



- débouter l'association intimée et la Fédération française de basket-ball de l'ensemble de leurs demandes ;



- condamner l'association ESBVA, outre aux dépens d'instance et d'appel, avec distraction au profit de la SCP Processuel au titre de l'article 699 du code de procédure civile, à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



Il soutient principalement qu'en refusant de procéder au renouvellement de sa licence sportive annuelle, l'association ESBVA l'a abusivement exclu de ses rangs sans respecter la procédure contradictoire prévue à cet effet par l'article 7 de ses statuts.



L'association ESBVA et la Fédération française de basket-ball, à qui la déclaration d'appel a été signifiée par actes d'huissier respectivement des 26 et 25 janvier 2022, n'ont pas déposé de conclusions dans le délai prévu à l'article 909 du code de procédure civile, bien que la première ait constitué avocat devant la cour.






MOTIFS DE LA DECISION



Sur la portée de l'appel



A titre liminaire, il est observé qu'alors que la déclaration d'appel déposée par M. [J] précisait qu'il entendait obtenir l'annulation et/ou la réformation de la décision entreprise, celui-ci ne sollicite plus, dans le dernier état de ses écritures, que la réformation de la décision sur des chefs limitativement énumérés, de sorte qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour n'étant plus saisie d'une demande d'annulation, ce point ne sera pas évoqué dans la discussion.





Ne seront pas plus évoquées les dispositions non frappées d'appel du jugement contesté ayant rejeté l'exception d'incompétence et la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir soulevées par l'ESBVA, débouté celle-ci de ses demandes de dommages et intérêts et de suppression de publications sous astreinte, et débouté la Fédération française de basket-ball de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



Enfin, alors que M. [J] sollicite l'infirmation de la décision entreprise en ce que celle-ci l'a débouté de l'ensemble de ses demandes, il ne renouvelle pas devant la cour la demande de dommages et intérêts qu'il avait formulée en première instance, de sorte qu'il est réputé l'avoir abandonnée, en application de l'article 954 précité.





Sur la demande de licence sportive



La cour relève tout d'abord que M. [J] invoque, au soutien de ses demandes, les articles 1303 et 1304 du code civil, lesquels ne peuvent manifestement fonder juridiquement celles-ci, que ce soit dans leur version ancienne ou dans leur version nouvelle, en vigueur depuis le 1er octobre 2016.



L'appelant invoque par ailleurs les statuts de l'association ESBVA, dont le premier article dispose qu'elle est régie par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association et le décret du 16 août 1901 pris pour l'exécution de cette loi.



L'article 1er de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association dispose que l'association est la convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun, d'une façon permanente, leurs connaissances ou leur activité dans un but autre que de partager des bénéfices'; qu'elle est régie, quant à sa validité, par les principes généraux du droit applicables aux contrats et obligations.



Il doit donc être fait application de cette loi, des statuts et des principes généraux du droit des contrats pour ce qui concerne le fonctionnement même de l'association, concerné par la première partie des demandes de M. [J], tendant à voir 'juger que'.



Si la demande de M. [J] tendant à voir ordonner la transmission de sa demande de licence par l'association à la Fédération française de basket-ball n'est quant à elle soutenue par aucun texte, elle s'avère néanmoins manifestement fondée sur les articles L. 131-1 et suivants du code des sports, ainsi que sur les dispositions statutaires de ladite Fédération.



Aux termes de l'article L131-1 du code du sport, les fédérations sportives ont pour objet l'organisation de la pratique d'une ou de plusieurs disciplines sportives. Elles exercent leur activité en toute indépendance.



L'article L131-3 dudit code ajoute que les fédérations sportives regroupent des associations sportives ; qu'elles peuvent regrouper en qualité de membres, dans des conditions prévues par leurs statuts :

1° Les personnes physiques auxquelles elles délivrent directement des licences ;

2° Les organismes à but lucratif dont l'objet est la pratique d'une ou de plusieurs de leurs disciplines et qu'elles autorisent à délivrer des licences ;

3° Les organismes qui, sans avoir pour objet la pratique d'une ou de plusieurs de leurs disciplines, contribuent au développement d'une ou de plusieurs de celles-ci ;

4° Les sociétés sportives.



L'article L131-6 du même code précise que la licence sportive est délivrée par une fédération sportive ou en son nom ; qu'elle ouvre droit à participer aux activités que la fédération et ses structures affiliées organisent et, selon des modalités fixées par ses statuts, à son fonctionnement'; qu'en vue de la délivrance de la licence, les associations sportives recueillent l'identité complète des personnes pouvant être concernées par les dispositions de l'article L. 212-9, dans des conditions définies par un décret pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés ; que les statuts des fédérations sportives peuvent prévoir que les membres adhérents des associations affiliées doivent être titulaires d'une licence sportive.



L'article 2 des statuts de la Fédération française de basket-ball stipule que :

'I. La Fédération se compose d'associations sportives constituées dans les conditions prévues par le chapitre 1er du titre II du livre Ier du Code du sport et ayant pour objet la pratique du Basket-ball sous toutes ses formes.

II. La Fédération peut comprendre également conformément à l'article L. 131-3 du code du sport':

1. des licenciés à titre individuel,

2. des organismes à but lucratif ou non, privés ou publics, dont l'objet est la pratique du basketball et qu'elle autorise à délivrer des licences et/ou qui contribuent au développement du basket sous toutes ses formes ; dans les statuts et les règlements de la fédération, ces organismes à but lucratif sont dénommés « établissements »,

3. ainsi que des membres donateurs et des membres bienfaiteurs agréés par le Comité Directeur'



L'article 5 de ces statuts précise que la licence prévue à l'article L131-1 et suivants du code du sport et délivrée par la Fédération marque l'adhésion volontaire de son titulaire à l'objet social et aux statuts et règlements de celle-ci ; que la licence confère à son titulaire le droit de participer au fonctionnement et aux activités de la Fédération dans les conditions fixées par ses statuts et les règlements fédéraux ; que la licence est annuelle et délivrée pour la durée de la saison sportive laquelle est fixée par les règlements généraux de la Fédération ; qu'elle peut être délivrée à des joueurs comme à des non-joueurs.



L'article 6 de ces statuts ajoute que la délivrance d'une licence ne peut être refusée que par décision motivée de la Fédération.



L'association Entente sportive basket [Localité 4] est affiliée à la Fédération française de basket-ball.



Il n'est pas contesté que M. [J] a été adhérent de cette association depuis sa création en 1987 et qu'il y a occupé des fonctions de membre du comité directeur, de président et de coach sportif.



A la suite de différends avec la nouvelle direction de l'association, il a été rendu destinataire d'un courrier du 14 septembre 2016, émanant de M. [W] [R], président de l'association, aux termes duquel il lui était indiqué : 'Suite à ta demande de renouvellement de licence, le comité directeur s'est réuni le 13 septembre 2016 à 19h. Conformément à l'article 5 de nos statuts, le comité directeur a refusé de t'accorder une licence pour la saison 2016-2017. Je te ferai suivre ultérieurement le compte-rendu de la réunion.'



Or l'article 5 des statuts de l'association n'est pas relatif au refus de licence, qui ne relève pas d'ailleurs pas de ses compétences mais de celles de la Fédération, l'association étant simplement chargée de transmettre à celle-ci la demande de licence de ses adhérents, mais porte sur l'admission à l'association et est rédigée dans les termes suivants : 'Pour faire partie de l'association, la candidature est agréée par le Comité directeur'.



Le comité directeur de l'association ESBVA, dont l'intention était manifestement d'exclure de ses rangs M. [J] au motif officiel qu'il n'entraînait plus d'équipe, ainsi qu'il ressort du compte-rendu de sa réunion du 14 septembre 2016 ayant donné lieu à la décision contestée, a ainsi opéré une confusion entre le renouvellement (ou non) de la licence, dont la décision incombait à la Fédération, et le renouvellement (ou non) de l'adhésion de M. [J] à l'association, lequel estime en avoir été injustement exclu sans qu'ait été respectée la procédure contradictoire prévue à l'article 7 des statuts.



C'est donc à juste titre que M. [J] a contesté cette décision de l'association de ne pas transmettre sa demande de licence à la Fédération, laquelle constituait manifestement un abus de pouvoir, bien qu'il se méprenne sur la portée réelle de cette décision, qui n'a pu entraîner son exclusion de l'association.



Pour autant, alors que l'article 6 des statuts stipule que l'association comporte outre des membres d'honneur et des membres bienfaiteurs, catégories auxquelles M. [J] ne prétend pas appartenir, des membres dits actifs comportant les personnes 'qui s'engagent à verser une cotisation et qui pratiquent effectivement le basket-ball, ou les personnes chargées de l'encadrement et/ou de l'organisation générale de l'association', l'intéressé ne justifie pas appartenir à cette dernière catégorie, aucun justificatif du bon versement de ses cotisations annuelles n'étant versé aux débats et les éléments produits démontrant qu'il n'est plus chargé de l'encadrement et/ou de l'organisation générale de l'association.



Il n'est donc pas prouvé que M. [J] soit toujours membre actif de l'association.



Dès lors, il doit être débouté de ses demandes tendant à voir 'juger que' le non-renouvellement de sa licence s'analyse comme une exclusion irrégulière de l'association ESBVA et qu'il demeure membre de l'association ESBVA.



En conséquence, il sera également débouté de sa demande tendant à ce qu'il soit ordonné sous astreinte à l'association de transmettre sa demande de licence à la Fédération et de lui retourner ensuite cette licence une fois celle-ci émise par ladite Fédération, étant précisé que M. [J] a tout à fait la possibilité de solliciter une licence à titre individuel directement auprès de la Fédération, ce qu'il a déjà pu faire au cours des années passées.



Sur les autres demandes



Le premier juge a exactement statué sur le sort des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile.





M. [J], succombant en son appel, sera tenu aux entiers dépens de celui-ci et débouté de sa demande formée au titre de ses frais irrépétibles.



PAR CES MOTIFS



La cour



Statuant dans les limites de l'appel,



Confirme la décision entreprise,



Condamne M. [K] [J] aux entiers dépens d'appel ;



Le déboute de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.











Le greffier







Delphine Verhaeghe







Le président







Bruno Poupet

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.