11 janvier 2024
Cour d'appel de Limoges
RG n° 22/00930

Chambre sociale

Texte de la décision

ARRET N° .



N° RG 22/00930 - N° Portalis DBV6-V-B7G-BIM3H



AFFAIRE :



M. [S] [D]



C/



Association SPORTING CLUB [Localité 4] CORREZE









VC/MS







Demande de requalification du contrat de travail



















Grosse délivrée à Me Anthony MOTTAIS, Me Catherine TERRIAC, le 11-01-24.





COUR D'APPEL DE LIMOGES

Chambre sociale

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ARRET DU 11 JANVIER 2024

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Le ONZE JANVIER DEUX MILLE VINGT QUATRE la chambre économique et sociale a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe:



ENTRE :



Monsieur [S] [D]

né le 14 Août 1992 à [Localité 3], demeurant [Adresse 2] / GEORGIE

représenté par Me Anthony MOTTAIS de la SELARL DERBY AVOCATS, avocat au barreau de CAEN substituée par Me Romuald PALAO, avocat au barreau de BAYONNE









APPELANT d'une décision rendue le 30 NOVEMBRE 2022 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE TULLE



ET :



Association SPORTING CLUB [Localité 4] CORREZE, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Catherine TERRIAC de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de BRIVE









INTIMEE







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Suivant avis de fixation du Président de chambre chargé de la mise en état, l'affaire a été fixée à l'audience du 20 Novembre 2023. L'ordonnance de clôture a été rendue le 08 novembre 2023.



La Cour étant composée de Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, de Madame Géraldine VOISIN et de Madame Valérie CHAUMOND, Conseillers, assistés de Mme Sophie MAILLANT, Greffier. A cette audience, Madame Valérie CHAUMOND, a été entendu en son rapport oral, les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.



Puis Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 11 Janvier 2024 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.



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LA COUR

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FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES :



M. [S] [D] est joueur de rugby. A ce titre, il a conclu avec l'association SPORTING CLUB [Localité 4] CORRÈZE, un contrat de travail à durée déterminée pour la période courant du 12 août 2019 au 11 juin 2020.



Ce contrat a été rompu d'un commun accord le 31 janvier 2020 et, le 08 septembre 2020, un document intitulé 'protocole d'accord joueur/club' a été signé entre M. [S] [D] et le SPORTING CLUB [Localité 4] CORRÈZE pour la saison 2020/2021, mentionnant une période sportive du 01 août 2020 au 31 mai 2021.



Des différends sont apparus entre les parties, à la fois sur la nature du contrat les liant et sur le paiement des sommes dues à ce titre.



Le 16 mars 2021, après des échanges entre l'association et M. [D], ce dernier a pris acte de la rupture de son contrat.



Par requête reçue le 06 avril 2021, M. [S] [D] a saisi le conseil de prud'hommes de Tulle aux fins de voir requalifier sa relation de travail en contrat de travail à durée indéterminée et d'obtenir la condamnation de l'association SPORTING CLUB [Localité 4] CORRÈZE au paiement de diverses sommes.



Par jugement du 03 novembre 2022, le conseil de prud'hommes de Tulle a :

- dit que le protocole signé entre les parties pour la saison 2021/2022 [sic] s'analyse en un contrat de travail et en conséquence se déclare compétent pour connaître du litige entre les parties ;

- débouté M. [D] de sa demande de requalification du premier contrat de travail en contrat temps plein ;

- débouté M. [D] de sa demande de requalification du second contrat en contrat à durée indéterminée ;

- dit que la prise d'acte s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- condamné l'association SPORTING CLUB [Localité 4] CORRÈZE à payer à M. [D] les sommes suivantes :

' 3 000 euros au titre de rappels de salaire, outre 300 euros au titre de congés payés y afférents,

' 500 euros de dommages-intérêts pour défaut de paiement de salaire,

' 1 200 euros d'indemnité de préavis outre 120 euros au titre des congés payés y afférents,

' 400 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' 900 euros au titre des congés payés afférents au contrat pour l'année 2020/2021,

' 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- fixé le salaire brut moyen à 1 258,03 euros mensuels ;

- condamné l'association SPORTING CLUB [Localité 4] CORRÈZE à remettre à M. [D] les fiches de paie rectifiées pour les mois de janvier à mars 2021 ainsi que tous les documents légaux afférents au contrat ;

- rappelé que les sommes allouées ayant une nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la date de réception par le défendeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation, soit le 09 avril 2021, et que les sommes allouées à titre indemnitaire produiront intérêt à compter du présent jugement ;

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit pour ce qui concerne les sommes allouées ayant une nature salariale ;

- dit que les créances de nature indemnitaires seront assorties de l'exécution provisoire ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

- condamné l'association SPORTING CLUB [Localité 4] CORRÈZE aux entiers dépens.



M. [S] [D] a interjeté appel de la décision le 23 décembre 2022.





Aux termes de ses écritures transmises par voie électronique le 21 septembre 2023, M. [S] [D] demande à la cour :

- d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de ses demandes et quant au quantum des sommes octroyées au titre du rappel de salaire et congés payés y afférents, des dommages-intérêts pour défaut de paiement du salaire, de l'indemnité de préavis et des congés payés y afférents, des congés payés afférents au contrat pour l'année 2020/2021 ;

- le confirmer pour le surplus ;

Statuant à nouveau, de :

- requalifier la relation contractuelle en contrat de travail à durée indéterminée ;

- condamner l'association SPORTING CLUB [Localité 4] CORRÈZE aux sommes suivantes :

' 10 500 euros net de rappel de salaire outre 1 260 € net de congés payés y afférents,

' 2 000 euros de dommages-intérêts pour défaut de paiement du salaire,

' 2 564 euros d'indemnité de requalification en contrat à durée indéterminée,

' 2 564 euros au titre de l'indemnité de préavis et 307,68 euros au titre des congés payés y afférents,

' 1 014,91 euros d'indemnité de licenciement,

' 7 600 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' 2 666,56 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,

' 15 384 euros d'indemnité de travail dissimulé,

' 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre la somme octroyée en première instance,

les sommes ci-dessus portant intérêts au taux légal au jour de la saisine du conseil de prud'hommes;

- ordonner à l'association SPORTING CLUB [Localité 4] CORRÈZE de lui transmettre les bulletins de paie et documents de fin de contrat conformes à la décision à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement ;

- condamner l'association SPORTING CLUB [Localité 4] CORRÈZE aux entiers dépens.



Il soutient que :

- le contrat litigieux est un contrat de travail, la terminologie utilisée étant sans incidence au regard des relations contractuelles lors de la saison sportive précédente ainsi que des missions et rémunérations identiques, l'ensemble des critères constitutifs d'un contrat de travail étant réuni ;

- dès lors, le contrat doit être requalifié en contrat de travail à durée indéterminée, les contrats conclus ne reprenant pas les mentions obligatoires prévues par l'article L. 222-2-5 du code du sport, n'ayant pas été signés dans les deux jours suivant l'embauche, ni ne respectant la durée minimale prévue par l'article L. 222-2-4 du code du sport ;

- il est fondé à voir requalifier son contrat à temps partiel 2019/2020 en contrat à temps plein en raison du non respect par l'employeur du formalisme imposé par la convention collective nationale du sport ;

- il n'a pas été rempli de ses droits concernant le salaire contractuellement prévu pour la saison 2020/2021 : il fait valoir que le préjudice né de cette situation le fonde à obtenir des dommages-intérêts de ce chef ; en outre, il expose que l'employeur, en procédant de la sorte, s'est rendu coupable de travail dissimulé, de même qu'en ne déclarant pas l'avantage en nature représenté par le logement ;

- sa prise d'acte de rupture du contrat de travail doit s'analyser en une rupture aux torts exclusifs de l'employeur et produire les conséquences d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse : sur ce point, il soutient que le barème issu de l'article L. 1235-3 du code du travail ne peut s'appliquer en ce qu'il est contraire aux conventions internationales ratifiées par la France.



Aux termes de ses écritures transmises par voie électronique le 10 octobre 2023, l'association SPORTING CLUB [Localité 4] CORRÈZE demande à la cour de :

- confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a débouté M. [D] de ses demandes ;

- l'infirmer en ce qu'il a dit que la prise d'acte s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Dès lors, de :

- dire et juger que le protocole d'accord pour la saison 2020/2021 n'est pas un contrat de travail à durée indéterminée avec M. [D] et, en conséquence, se déclarer incompétente pour connaître du présent litige, soulevé au titre du dit protocole ;

- le débouter de sa demande d'indemnité de requalification présentée au titre de l'article L. 1245-2 du code du travail ;

- le débouter de sa demande de 15 384 euros de dommages-intérêts présentée sur le fondement de l'articIe L. 8223-1 du code du travail ;

- dire et juger qu'elle n'est redevable d'aucune somme ayant la nature de salaire et, en conséquence, débouter M. [D] de l'intégralité de ses prétentions de ce chef ainsi que de sa demande de 2 000 euros de dommages-intérêts pour défaut de paiement du salaire ;

- dire et juger que la prise d'acte produit les effets d'une démission et, en conséquence, le débouter de l'ensemble des demandes présentées pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- dire et juger que M. [D] lui est redevable de la somme nette de 2 400 euros versée à titre d'avance en novembre et décembre 2020 ;

- débouter M. [D] de sa demande de paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [D] à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.  



Elle soutient que :

- rien ne justifie la requalification des protocoles d'accord 'joueur / club' en un contrat de travail à durée indéterminée. Elle indique que M. [D] ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un contrat de travail ou d'une quelconque subordination. Elle précise que pour la période sportive 2019/2020, le club étant en Fédérale 2, le contrat de travail est obligatoire pour les joueurs n'ayant pas le statut amateur et que ce contrat est conforme à la réglementation. Pour la période 2020/2021, seul le protocole d'accord, qui n'est en rien un contrat de travail, peut trouver application ; qu'il a été respecté par l'association, l'absence d'un contrat de travail auprès d'une entreprise tiers n'étant que le fruit du refus de M. [D] ;

- dès lors, la prise d'acte de rupture du contrat de travail doit s'analyser en une démission en ce qu'elle est privée de tout fondement, l'association n'ayant jamais manqué à ses obligations.



L'ordonnance de clôture a été rendue le 08 novembre 2023.



Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées.










MOTIFS DE LA DÉCISION



- Sur la nature juridique du protocole d'accord conclu la saison 2019/2020 :



Le premier critère de compétence de la juridiction prud'homale tient à l'existence d'un contrat de travail liant les parties.



Selon la construction jurisprudentielle, il y a contrat de travail quand une personne s'engage à travailler pour le compte et sous la direction d'une autre, moyennant rémunération : le contrat de travail se définit donc par la réunion de trois critères : l'exécution d'une prestation de travail, une rémunération et un lien de subordination ; au demeurant, seul ce dernier est propre au contrat de travail.

De jurisprudence constante, la Cour de cassation définit le lien de subordination comme caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.



Au cas d'espèce, l'association SPORTING CLUB [Localité 4] CORRÈZE a conclu avec M. [S] [D], à une date non mentionnée dans le document, un 'protocole d'accord saison 2019/2020" dans le cadre du championnat de France de rugby de Fédérale 2.

Ce protocole prévoyait, à la charge de l'association, une indemnité mensuelle nette de 1 500 euros pour la période du 01 août 2019 au 31 mai 2020 et la prise en charge du différentiel entre le montant du loyer et l'allocation pour le logement.

En contrepartie pesaient sur le joueur les obligations suivantes :

- assiduité à tous les entraînements, sauf empêchement majeur ou dispense expresse et sous réserve d'en informer un des entraîneurs ;

- participation à des soirées promotionnelles en réponse à au moins 04 sollicitations du club ;

- en cas de blessure, se soumettre à des examens et, le cas échéant, à des soins propres à assurer sa remise en forme et informer un membre de la commission sportive de l'évolution de la blessure ;

- intégration totale et assidue au groupe 1 pendant toute la saison sportive ;

- sanctions financières au pro rata des absences injustifiées aux entraînements ;

- rediscussion des conditions du protocole en cas de non-appartenance prolongée au groupe 1.



Il ressort ainsi des termes même du 'protocole d'accord' que le SPORTING CLUB [Localité 4] CORRÈZE a confié à M. [D] l'exécution d'un travail, à savoir l'activité de joueur de rugby en son sein. Ce travail était appelé à s'exécuter sous l'autorité de l'employeur

dans la mesure où c'est ce dernier qui détermine les obligations professionnelles auxquelles était astreint le joueur, telles la participation aux entraînements et aux matches ; il lui donnait des ordres et des directives portant sur la participation aux obligations annexes ainsi que sur sa santé. Enfin, l'employeur contrôlait l'exécution du travail du joueur : en contrepartie, il lui versait une rémunération et détenait le pouvoir de sanction, notamment financière, des manquements de son subordonné.



En outre, l'association SPORTING CLUB [Localité 4] CORRÈZE et M. [D] ont conclu, le 12 août 2019, 'un contrat de travail à durée déterminée d'un joueur de rugby' reprenant pour ce dernier les mêmes exigences d'assiduités, lui allouant la même rémunération et conférant à l'employeur les mêmes prérogatives.



Le protocole d'accord saison 2019/2020" dans le cadre du championnat de France de rugby de Fédérale 2 conclu entre le SPORTING CLUB [Localité 4] CORRÈZE et M. [S] [D] s'analyse donc en un contrat de travail.



En conséquence, en adoptant les motifs, il convient de confirmer le jugement du conseil des prud'hommes de Tulle en ce qu'il s'est déclaré compétent pour connaître du litige eu égard à l'existence d'un contrat de travail entre les parties.



- Sur la requalification du premier contrat en contrat à plein temps :



M. [S] [D] sollicite la requalification du 'protocole d'accord saison 2019/2020" en contrat de travail à temps plein au motif qu'il ne respecterait pas le formalisme prévu à l'article L. 3123-6 du code du travail, soit la mention obligatoire :

- de la qualification du salarié,

- de la rémunération,

- de la durée - hebdomadaire ou mensuelle - du travail,

- des modalités de fixation des horaires de travail et de leur répartition.



Le contrat de travail à durée déterminée en date du 12 août 2019 mentionne l'emploi de M. [D] en qualité de joueur de rugby, notamment au poste de joueur de première ligne, dans un club évoluant en championnat de France de Fédérale 2.

Il prévoit un salaire mensuel brut de 1 306,16 euros, outre des primes de manifestation pour un montant mensuel forfaitaire maximum de 625 euros ; au total, le club garantit une rémunération mensuelle nette de 1 500 euros, hors avantage en nature.

Il prévoit également une durée effective contractuelle de travail fixée à 30 heures hebdomadaires (soit 130 heures mensuelles) réparties en fonction des matches et du programme hebdomadaire d'entraînement communiqué par les entraîneurs, comme en font foi les courriers électroniques versés aux débats.



En conséquence, il convient de constater que le premier contrat de travail respecte les dispositions légales prescrites en matière de temps partiel : la décision critiquée sera donc confirmée sur ce point.







- Sur la requalification du second protocole en contrat de travail à durée indéterminée:



- Sur la requalification du protocole 2020/2021 en contrat de travail :



M. [S] [D] sollicite la requalification du 'protocole d'accord joueur/club saison 2020/2021" en contrat de travail : il argue de ce que la terminologie utilisée est sans incidence sur la nature du contrat, les relations contractuelles, les missions et les rémunérations étant identiques à celles de la saison sportive précédente.



De fait, le contrat de travail ne se définit pas par sa seule dénomination mais par l'existence de l'engagement d'une personne à travailler pour le compte et sous la direction d'une autre, moyennant rémunération.

Le 'protocole d'accord joueur/club saison 2020/2021" acte l'engagement de M. [S] [D] à travailler, en sa qualité de joueur de rugby, pour l'association SPORTING CLUB [Localité 4] CORRÈZE, laquelle fixe les obligations auxquelles l'employé sera astreint (participation à tous les entraînements et matches selon un calendrier imposé ainsi qu'à 04 sollicitations du club pour participer à des soirées promotionnelles, examens et soins médicaux pour assurer sa remise en forme après blessure, intégration totale du groupe senior, parrainage d'une catégorie de l'école de rugby et participation à 03 de ses entraînements). Le protocole fixe également la rémunération de M. [D] et consacre le pouvoir disciplinaire du club.

Le 'protocole d'accord joueur/club saison 2020/2021" constitue donc bien un contrat de travail dont il possède toutes les caractéristiques, conformément à ce qu'a jugé le conseil des prud'hommes de Tulle.





- Sur la requalification du contrat en contrat de travail à durée indéterminée :

Aux termes de l'article L. 222-2-4-1° du code du sport : 'La durée d'un contrat de travail mentionné à l'article L. 222-2-3-1° ne peut être inférieure à la durée d'une saison sportive fixée à douze mois.

Toutefois, un contrat conclu en cours de saison sportive peut avoir une durée inférieure à douze mois, dans les conditions définies par une convention ou un accord collectif national ou, à défaut, par le règlement de la fédération sportive ou, le cas échéant, de la ligue professionnelle dès lors qu'il court au minimum jusqu'au terme de la saison sportive'.



M. [S] [D] soutient que le contrat de travail doit être requalifié en contrat de travail à durée indéterminée faute de reprendre les mentions obligatoires prévues par l'article L. 222-2-5 du code du sport, d'avoir été signé avant l'embauche effective et de respecter la durée minimum prévue par l'article L. 222-2-4 du même code.



Au cas d'espèce, M. [D], qui procède par affirmations, ne précise cependant pas quelles seraient les mentions obligatoires qui feraient défaut et n'établit pas davantage que le document n'aurait pas été signé par les parties dans les deux jours suivant l'embauche.



Par ailleurs, le 'protocole d'accord joueur/club saison 2020/2021" porte la date du 08 septembre 2020 alors même que la saison sportive courait du 01 août 2020 au 31 mai 2021. Il a donc été conclu en cours de saison sportive, dès lors qu'il l'a été postérieurement au 01 août 2020, mais a couru jusqu'à la fin de la dite saison.

Le protocole d'accord litigieux est donc un contrat de travail à durée déterminée, conformément aux dispositions du second alinéa de l'article L. 222-2-4-1° du code du sport.



Il y a donc lieu de confirmer le jugement rendu le 30 novembre 2022 par le conseil des prud'hommes de Tulle en ce qu'il a débouté M. [D] de sa demande de ce chef ainsi que de ses demandes subséquentes.







- Sur la demande en restitution de sommes :



L'association SPORTING CLUB [Localité 4] CORRÈZE a sollicité du conseil des prud'hommes de Tulle la condamnation de M. [S] [D] à lui restituer la somme de 2 400 euros qu'elle lui aurait versée à titre d'avance pour les mois de novembre et décembre 2020, dans la mesure où la reprise des entraînements des licenciés majeurs était envisagée dès le 15 décembre 2020 pour une reprise des compétitions sportives le 20 janvier 2021.



La juridiction de première instance n'a cependant pas statué sur ce point.



Ladite association argue de ce que l'arrêt des compétitions de rugby amateur a été décidé le 26 février 2021, soit postérieurement à la période considérée.



Ce faisant, l'association SPORTING CLUB [Localité 4] CORRÈZE ne justifie pas en quoi les salaires versées pour les deux mois litigieux antérieurs à cet arrêt seraient indûs et devraient être restitués.



Elle sera en conséquence déboutée de sa demande de ce chef.









- Sur la 'prise d'acte' :



Par courrier en date du 16 mars 2021 adressé au SPORTING CLUB [Localité 4] CORRÈZE, M. [D] a pris acte de la rupture de son contrat de travail au motif de l'absence de toute rémunération depuis janvier 2021.



La rupture immédiate du contrat de travail est donc la conséquence de la volonté de rompre du salarié sans toutefois pouvoir être d'emblée assimilée à une volonté de démissionner : en effet, la volonté en matière de prise d'acte est irréductiblement liée aux manquements imputés par le salarié à l'employeur. C'est donc à ce dernier qu'est attribuée la responsabilité de la rupture du contrat de travail. Il s'agit dès lors de vérifier qu'il y a bien eu objectivement un ou des manquements avérés de l'employeur suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail : si les faits invoqués justifient la rupture du contrat de travail, la prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; dans le cas contraire, d'une démission.



Au cas d'espèce, il ressort des pièces versées aux débats que l'association SPORTING CLUB [Localité 4] CORRÈZE s'est abstenue, à compter du mois d'octobre 2020, de remettre à M. [D] ses bulletins de salaires et, plus encore, à compter du mois de janvier 2021, de lui verser sa rémunération de sorte que son conseil mettra l'employeur en demeure de régulariser la situation par courrier recommandé du 02 mars 2021 et que, le 16 mars suivant, il prendra acte de la rupture du contrat de travail.



Il convient donc, comme l'a fait le conseil des prud'hommes de Tulle, de considérer que le non paiement de la rémunération ne peut trouver sa justification dans l'arrêt des compétitions décidé par la Fédération Française de Rugby comme le soutient l'association SPORTING CLUB [Localité 4] CORRÈZE, mais constitue une faute suffisamment grave pour justifier la prise d'acte qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.



La décision querellée sera en conséquence confirmée sur ce point.







- Sur les demandes indemnitaires de M. [D] :



- Sur le montant du salaire au titre de la saison 2020/2021 :



M. [S] [D] sollicite la condamnation de l'association SPORTING CLUB [Localité 4] CORRÈZE à lui verser le salaire mensuel convenu de 2 000 euros net pour la saison 2020/2021 au motif que, au 01 septembre 2020, il n'avait signé aucun contrat de travail avec une entreprise.



Il convient toutefois de constater que cette clause était en l'espèce inapplicable dès lors que le protocole n'a été signé par les parties que le 08 septembre 2020 de sorte que l'association SPORTING CLUB [Localité 4] CORRÈZE ne pouvait être tenue par aucun engagement relatif à la période précédant cette date.

Par ailleurs, il est constant que M. [D] s'est effectivement vu proposer deux emplois par l'association : M. [D] a lui-même refusé le premier tandis que l'employeur n'a pas souhaité donner suite au second à raison du comportement de l'appelant.



Le jugement du 30 novembre 2022 sera donc également confirmé sur ce point.





- Sur l'indemnisation au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse :



Dès lors que la prise d'acte a été analysée en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, c'est à bon droit que le conseil des prud'hommes de Tulle a considéré que M. [D] pouvait prétendre à l'indemnisation de ses préjudices.



Les sommes allouées par la juridiction de première instance étant correctement arbitrées, elles seront également confirmées.





- Sur les demandes accessoires :



M. [S] [D] n'obtient pas gain de cause et sera en conséquence condamné aux dépens d'appel.



En revanche, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.







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PAR CES MOTIFS

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La Cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, rendu par mise à disposition et après en avoir délibéré conformément à la loi ;



CONFIRME la décision entreprise rendue par le conseil des prud'hommes de Tulle le 30 novembre 2022 en toutes ses dispositions ;



Y ajoutant :



DÉBOUTE l'association SPORTING CLUB [Localité 4] CORRÈZE de sa demande en restitution de la somme de 2 400 euros versée à titre d'avance de salaire pour les mois de novembre et décembre 2020;



CONDAMNE M. [S] [D] aux entiers dépens de la procédure d'appel ;



DIT n'y avoir lui à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;











LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,











Sophie MAILLANT. Pierre-Louis PUGNET.

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