21 décembre 2023
Cour d'appel de Versailles
RG n° 23/02637

14e chambre

Texte de la décision

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 79Z



14e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 21 DECEMBRE 2023



N° RG 23/02637 - N° Portalis DBV3-V-B7H-VZ63



AFFAIRE :



[J] [N] [I]





C/



WIKIMEDIA FOUNDATION INC





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Avril 2023 par le Président du TJ de NANTERRE

N° RG : 22/01608



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 21.12.2023

à :



Me Frédéric-Michel PICHON, avocat au barreau de PARIS



Me Mélina PEDROLETTI, avocat au barreau de VERSAILLES







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT ET UN DECEMBRE DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :



Monsieur [J] [N] [I]

né le 16 Juin 1951 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représentant : Me Frédéric-Michel PICHON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1397 - N° du dossier [I]





APPELANT

****************



WIKIMEDIA FOUNDATION INC

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



[Adresse 1]

94104 ETATS UNIS



Représentant : Me Mélina PEDROLETTI, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626 - N° du dossier 26134

Ayant pour avocat plaidant Me Christine GATEAU, du barreau de Paris, substituée par Me Sarah DE MAGALHAES





INTIMEE

****************



Composition de la cour :



En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 22 Novembre 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseiller faisant fonction de Président chargé du rapport.



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :



Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseiller faisant fonction de président,

Madame Marina IGELMAN, Conseiller,

Madame Florence SCHARRE, Conseiller,



Greffier, lors des débats : Madame Elisabeth TODINI,

En présence de Madame Camille MOUTON, Greffière stagiaire,






EXPOSE DU LITIGE



La fondation Wikimedia Foundation Inc est une fondation de droit américain à but non lucratif, créée le 20 juin 2003, dont le siège est situé à [Localité 7] en Californie (Etats-Unis).



Cette fondation possède les noms de domaine, les marques et les serveurs du site et de l'application Wikipédia qu'elle héberge.



Wikipédia est une encyclopédie en ligne collective, à but non lucratif, régie par des « principes fondateurs », des règles et des recommandations établies par la communauté des utilisateurs volontaires.



Tout utilisateur du site Wikipédia, qu'il soit enregistré ou non, peut y intervenir en devenant contributeur, sans nécessité d'indiquer son identité réelle.



Certains contributeurs ont accès à des outils techniques particuliers : ce sont des administrateurs appelés « administrateurs », « sysop » ou « opérateur » dont le rôle est avant tout technique et a pour objet de protéger l'encyclopédie.



Pour les interventions sujettes à débat, les administrateurs doivent consulter leurs collègues ou s'en remettre à la communauté et à ses autres représentants, dont ils exécutent les décisions prises sur Wikipédia et sans aucune directive de la Fondation Wikimédia.



Chaque article sur Wikipédia dispose d'une page spécifique qui se décompose en plusieurs fenêtres :

- fenêtre 'article' présentant la dernière version de l'article (les versions précédentes de l'article étant accessibles en cliquant dans « voir l'historique ») ;

- fenêtre 'discussion' mettant à disposition des utilisateurs un forum permettant d'échanger sur le contenu de la page, notamment en cas de désaccord ;

- fenêtres 'modifier/modifier le code' permettant à tout utilisateur de modifier la page ;

- fenêtre 'historique' faisant apparaître l'ensemble des interventions des contributeurs sur une page.



Le 31 août 2019, l'article Wikipédia dédié à M. [J] [N] [I] a été créé par un contributeur de l'encyclopédie.



Par courriel du 14 mai 2020, le conseil de M. [N] [I] a écrit à la fondation Wikimédia pour lui demander de supprimer l'article consacré à sa personne, hébergé sur le site, et de supprimer toutes les références relatives à son changement de nom patronymique évoqué dans l'article.



Par courriel du 8 juin 2020, la fondation Wikimédia lui a répondu qu'il convenait qu'il adresse sa demande aux contributeurs volontaires ayant participé à l'édition de cette page.



Par acte d'huissier en date du 27 janvier 2022, M. [N] [I] a fait assigner en référé la fondation Wikimédia devant le tribunal judiciaire de Nanterre.



Par ordonnance du 9 juin 2022, le président du tribunal judiciaire de Nanterre, statuant en référé, a constaté le désistement d'instance de M. [N] [I].



Par acte d'huissier de justice délivré le 22 avril 2022, M. [N] [I] a fait assigner selon la procédure accélérée au fond la fondation Wikimedia Foundation Inc aux fins d'obtenir principalement la suppression des serveurs Wikipédia de la page qui lui est consacrée, sous astreinte, la mise en place d'un message concernant M. [N] [I] informant qu'aucune contribution n'est acceptée ni possible, la suppression de toutes références relatives à son changement de nom dans la mesure où elles constituent un contenu illicite et ce sous astreinte.



Par jugement contradictoire rendu le 6 avril 2023 selon la procédure accélérée au fond, le tribunal judiciaire de Nanterre a :

- rejeté l'ensemble des demandes formées par M. [N] [I],

- condamné M. [N] [I] aux dépens,

- condamné M. [N] [I] à verser à la fondation de droit américain Wikimedia Foundation Inc la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé que l'ordonnance est exécutoire à titre provisoire.



Par déclaration reçue au greffe le 20 avril 2023, M. [N] [I] a interjeté appel de ce jugement en tous ses chefs de disposition.



Dans ses dernières conclusions déposées le 15 juin 2023 auxquelles il convient de se rapporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, M. [N] [I] demande à la cour, au visa des articles 9 et 61 du code civil, 6 de la loi du 21 juin 2004, 226-16 du code pénal, article 8 de la CEDH, 7 et 8 de la Charte des droits fondamentaux, 4, 17,21 du RGPD et 51 de la loi du 6 janvier 1978, L. 221-14, L. 221-15, L. 221-16 du code des relations entre le public et l'administration :

« -d' infirmer la décision attaquée en toutes ses dispositions,

et, statuant à nouveau,

- d'ordonner la suppression des serveurs Wikipedia de la page consacrée à M. [J] [I] accessible à l'URL https://[04] et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard,

- d'ordonner la mise en place d'un message concernant M. [I] informant qu'aucune contribution n'est désormais acceptée ni possible,

et, subsidiairement :

- d'ordonner la suppression de toute référence relatives au changement de nom de Monsieur [I] dans la mesure où elles constituent un contenu illicite, et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard.

- de condamner la société Wikipedia à une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du NCPC et d'ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

Et ordonner l'exécution de la présente au seul vu de la minute. »



Dans ses dernières conclusions déposées le 12 octobre 2023 auxquelles il convient de se rapporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la Fondation Wikimedia Foundation Inc. demande à la cour, au visa des articles 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique et 17.3 (a) du règlement général sur la protection des données n° 2016/679 du 27 avril 2016, de :

'- confirmer le jugement du 6 avril 2023 rendu par le président du tribunal judiciaire de Nanterre statuant selon la procédure accélérée au fond en toutes ses dispositions (RG n° 22/01608) ;

par conséquent,

- rejeter l'ensemble des demandes, fins et prétentions de M. [J] [N] [I] formées contre Wikimedia Foundation Inc. ;

- y ajoutant

- condamner M. [J] [N] [I] à verser à Wikimedia Foundation Inc. une indemnité complémentaire à hauteur d'appel de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [J] [N] [I] aux dépens dont distraction de ceux d'appel au profit de Maître Mélina Pedroletti, avocate au barreau de Versailles, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.'



L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 octobre 2023.




MOTIFS DE LA DÉCISION :



A titre liminaire il sera observé que figurent au dossier de la procédure des conclusions notifiées le 4 septembre 2023 par M. [N] [I] aux termes desquelles il soulevait l'irrecevabilité des conclusions de la Fondation Wikimedia pour n'avoir pas été notifiées dans le délai d'un mois ayant suivi le dépôt de ses conclusions d'appelant.



Il n'y avait toutefois pas lieu de statuer à leur égard, ayant été adressées au conseiller de la mise en état, inexistant en procédure à bref délai, et surtout compte tenu du fait que l'intimée avait par ailleurs saisi le premier président d'une demande de radiation ayant eu pour effet de suspendre les délais.



Aucune difficulté n'ayant été soulevée lors de l'audience de plaidoiries de l'affaire au fond, il doit être constaté que l'appelant a abandonné ses conclusions d'incident, qui n'auraient en tout état de cause pas pu prospérer.



Sur les demandes de M. [N] [I] :



L'appelant sollicite l'infirmation du jugement attaqué faisant valoir que ses demandes de suppressions sont fondées sur deux catégories de dispositions.



Il argue en premier lieu d'une atteinte à sa vie privée, soutenant que la mention sur la page Wikipédia qui lui est consacrée relative à sa demande de changement de nom constitue une information protégée, ce qu'a au demeurant retenu le premier juge mais sans en tirer les conséquences logiques puisqu'il a considéré que la demande relative à la suppression des mentions concernant le changement de nom constituait une atteinte à la liberté d'expression et au droit à l'information du public.



Il fait ensuite des développements contestant que la présentation faite par Wikipédia est objective et neutre comme l'a retenu le premier juge.



Ainsi, s'agissant de la première page de Wikipédia, il expose qu'elle est totalement lacunaire en ce qui concerne ses multiples activités et donne une fausse image, restreignant sa présentation à une information tronquée sur le seul problème de son nom.



Il relate que cette page consacre 2 lignes à ses différentes activités, pourtant multiples (politiques, professionnelles, associatives), contre neuf lignes à son changement de nom.



Il précise que s'il a ouvert un site personnel, c'est en réponse à cette fiche Wikipédia « chaotique ».



Il prétend ensuite que les pages « discussion », qui sont publiques et font partie intégrante de sa présentation, ont pour objet de lui nuire, et souligne que l'historique des discussions révèle que toutes les modifications apportées par des contributeurs souhaitant compléter sa fiche sont systématiquement supprimées par des contributeurs malveillants qui veulent s'en tenir à la fiche existante, qui ne représente en aucun cas « un ensemble cohérent de connaissances synthétiques », reprenant le contenu de certains messages révélateurs selon lui de cette volonté de lui nuire.



S'agissant des pages « discussion entre contributeurs », il y relève un malaise entre administrateurs et/ou contributeurs sur la manière de traiter sa fiche, certains contributeurs demandant sa suppression.



En second lieu, l'appelant soutient que ses demandes de suppression sont justifiées par application de l'article 6 de la loi du 21 juin 2002 pour la confiance dans l'économie numérique ainsi que par application du RGPD, relevant que le temps écoulé (19 ans depuis la modification patronymique) enlève toute pertinence à l'information donnée et insistant sur le fait que les demandes de changement de nom constituent des « informations nominatives à accès protégé ».



Il avance qu'il n'existe aucun motif légitime et impérieux qui viendrait prévaloir sur son droit à voir supprimer des informations nominatives, protégées, incomplètes, périmées, relevant de la vie privée, et dont la divulgation particulièrement agressive présente un caractère illicite susceptible de susciter des commentaires méprisants de contributeurs anonymes.



Il considère qu'il n'est pas une personnalité publique d'une telle notoriété que la suppression de sa fiche porterait atteinte à des principes fondamentaux à mettre en balance avec le droit à l'oubli à au respect de sa vie privée.



Il déplore que sa généalogie constitue la majeure partie de sa fiche et relève que cela va à l'encontre du principe de base de Wikipédia qui est de ne nuire à personne, prévoyant que « toute demande de suppression exprimée par la personne concernée devra être accueillie avec bienveillance et attention ».



Il argue enfin de la violation de l'article 226-16 du code pénal qui réprime le fait de procéder ou de faire procéder à un traitement de données à caractère personnel sans avoir procédé aux formalités prévues par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978.



La Fondation Wikimédia sollicite la confirmation du jugement critiqué en toutes ses dispositions et le rejet des demandes de l'appelant.



Elle demande en premier lieu la confirmation du jugement en ce qu'il a rejeté la demande de suppression totale de l'article Wikipédia dédié à M. [N] [I] en arguant de la légitimité d'un tel article au regard de la notoriété de M. [N] [I], soulignant qu'il édite lui-même un site internet personnel dédié à ses diverses activités.



Elle prétend ensuite que l'article de Wikipédia respecte les principes de l'encyclopédie compte tenu de sa formulation neutre et objective, ainsi que de la pertinence de ses sources, contestant toute formulation méprisante.



Elle fait valoir également que l'atteinte illégitime au droit au respect de la vie privée de l'appelant n'est pas démontrée, relevant que le changement de nom de M. [N] [I] est une information publique, officielle et connue, qu'il révèle lui-même au public sur son site internet personnel, et alors qu'il n'a jamais caché avoir changé de patronyme puisqu'il a publié ses premiers ouvrages sous le seul nom de « [N] », puis les suivants sous le nom de « [N] [I] » à partir de 2006.



Elle ajoute que l'appelant ne saurait invoquer de préjudice s'agissant d'informations neutres relevant de son état civil, rédigées dans des termes objectifs, mesurés et non dénigrants.



Si la cour devait considérer qu'il y a une atteinte à la vie privée, la Fondation Wikimédia soutient que celle-ci ne serait pas illégitime, puisque justifiée par la liberté d'expression et le droit à l'information du public au regard de la notoriété de l'intéressé, du caractère sourcé des informations et de la révélation du changement de nom par l'appelant lui-même.



Elle expose par ailleurs que la violation des dispositions protectrices des données personnelles n'est pas démontrée eu égard à ces mêmes droits (liberté d'expression et droit à l'information) et que les dispositions du code des relations entre le public et l'administration ne sont pas applicables.



S'agissant de l'article 226-16 du code pénal et des formalités préalables auprès de la CNIL, l'intimée répond que l'appelant ne démontre pas en quoi elle aurait la qualité de « responsable de traitement » ou que ses activités relèveraient du champ d'application du RGPD.



En deuxième lieu, sur le rejet de la demande d'insertion d'un message sur Wikipédia informant qu'aucune contribution n'est désormais ni acceptée, ni possible à l'égard de M. [N] [I], elle avance que :

- l'appelant échoue à rapporter la preuve d'un dommage justifiant la mesure demandée,

- cette mesure serait contraire à l'essence d'une encyclopédie en ligne qui est un travail en constante progression,

- M. [N] [I] étant une personne jouissant d'une certaine notoriété, il a légitimement place sur Wikipédia,

- l'insertion d'un tel message serait incompatible avec son statut d'hébergeur.



En troisième et dernier lieu, la Fondation Wikimédia demande la confirmation du jugement en ce qu'il a rejeté la demande de suppression de « toutes références » relatives au changement de nom s'agissant d'une information concernant une personne publique et qui ne lui cause aucune préjudice.



Sur ce,



L'article 6 I. 8. de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique prévoit que le président du tribunal judiciaire, statuant selon la procédure accélérée au fond, peut prescrire à toute personne susceptible d'y contribuer toutes mesures propres à prévenir un dommage ou à faire cesser un dommage occasionné par le contenu d'un service de communication au public en ligne.



L'article 9 du code civil dispose que chacun a droit au respect de sa vie privée.



Le Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données), dit RGPD, dispose que la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel est un droit fondamental qui doit être mis en balance avec les autres droits fondamentaux dont la liberté d'expression et d'information.



Parmi les données à caractère personnel au sens de ce règlement figurent les données relatives au changement de nom patronymique, lorsqu'elles font l'objet d'un « traitement », comme tel est le cas en l'espèce au sens de l'article 4.2 qui vise « toute opération ou tout ensemble d'opérations effectuées ou non à l'aide de procédés automatisés et appliquées à des données ou des ensembles de données à caractère personnel, telles que la collecte, l'enregistrement, l'organisation, la structuration, la conservation, l'adaptation ou la modification, l'extraction, la consultation, l'utilisation, la communication par transmission, la diffusion ou toute autre forme de mise à disposition, le rapprochement ou l'interconnexion, la limitation, l'effacement ou la destruction », par le responsable du traitement, comme la fondation Wikimédia doit être ici qualifiée puisqu'elle est celle qui, seule ou conjointement avec d'autres, détermine les finalités et les moyens du traitement selon l'article 4.7.



L'article 5 1. a) du RGPD prévoit quant à lui que les données à caractère personnel doivent être traitées de manière licite, loyale et transparente au regard de la personne concernée et l'article 6 1. f) précise que le traitement n'est licite que s'il est nécessaire « aux fins des intérêts légitimes» du responsable du traitement ou d'un tiers, « à moins que ne prévalent les intérêts ou les libertés et droits fondamentaux de la personne concernée qui exigent une protection des données à caractère personnel (') ».



Or au cas présent, la fiche Wikipédia de M. [N] [I] présente deux rubriques principales avant les « références » et les « liens externes », constituées d'une « biographie » et d'une liste d' « ouvrages ».



La présentation de sa biographie est limitée aux éléments suivants :

« Né le 16 juin 1951, il est le fis de [Z] [N] et de [X] [O]. D'abord connu sous son nom de naissance [J] [N] sous lequel il signe ses premiers ouvrages, il est autorisé sur sa demande en 2004 à ajouter à son nom celui [I] par décret du 14 avril 2016 ».



Dans la liste des ouvrages qu'il a écrit, il est spécifié pour les deux premiers qu'ils ont été écrits sous le « nom de [J] [N] ».



En comparaison avec son site internet personnel consultable à l'adresse : https://[05] (pièce n° 8 de l'appelant) ainsi qu'avec les éléments de sa biographie tels qu'il en fait état dans ses conclusions, à savoir qu'il est un financier français qui a occupé différents postes de direction dans plusieurs établissements bancaires et fonds d'investissement, ainsi qu'un militant politique et un homme ayant une activité associative développée, la biographie relatée sur le site Wikipédia apparaît comme il le prétend lacunaire et donnant une image biaisée de sa personne, pour qui seul son patronyme et ses origines auraient un intérêt.



Par ailleurs, il ressort de la pièce n° 10 qu'il verse aux débats, constituée de l'historique des « discussions générales » menées entre contributeurs et/ou administrateurs, que toutes les tentatives de modifications de cette fiche ont systématiquement été supprimées.



Alors que le respect des libertés d'expression et d'information aurait commandé de procéder à des corrections du contenu de la fiche Wikipédia de l'intéressé, ces mêmes droits ne sauraient dès lors prévaloir au regard du contenu tronqué et orienté litigieux.



C'est donc à bon droit que M. [N] [I] sollicite la mise en 'uvre de mesures de nature à faire cesser le dommage qu'il subit au regard de cette présentation publique sur internet et le jugement querellé sera infirmé en ce sens.



Il convient en conséquence afin d'y mettre un terme d'ordonner à la Fondation Wikimédia de supprimer des serveurs Wikipédia la page consacrée à M. [N] [I], accessible notamment à l'URL https://[04], ainsi que par tout autre biais, et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé un délai de 5 jours suivant le prononcé du présent arrêt, astreinte qui pourra courir pendant 6 mois.



En revanche, il apparaît disproportionné d'ordonner à l'intimée la mise en place d'un message informant qu'aucune contribution n'est désormais acceptée ni possible, un hébergeur d'une encyclopédie collaborative en ligne ne pouvant être contraint à agir préventivement s'agissant d'une atteinte devenue hypothétique.



Sur les demandes accessoires :



M. [N] [I] étant accueilli en son recours, l'ordonnance sera infirmée en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance.



Partie perdante, la Fondation Wikimédia ne saurait prétendre à l'allocation de frais irrépétibles. Elle devra en outre supporter les dépens de première instance et d'appel.



Il serait par ailleurs inéquitable de laisser à M. [N] [I] la charge des frais irrépétibles exposés. L'intimée sera en conséquence condamnée à lui verser une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



Le présent arrêt n'étant pas susceptible de faire l'objet d'un recours suspensif, il n'y a pas lieu de prononcer l'exécution provisoire.





PAR CES MOTIFS



La cour statuant par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort,



Constate que M. [J] [N] [I] a abandonné les conclusions d'incident notifiées le 4 septembre 2023,



Infirme le jugement rendu le 6 avril 2023 selon la procédure accélérée au fond,



Statuant à nouveau et y ajoutant,



Ordonne à la Fondation Wikimédia Foundation Inc. de supprimer des serveurs Wikipédia la page consacrée à M. [J] [N] [I], accessible notamment à l'URL https://[04], ainsi que par tout autre biais, et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé un délai de 5 jours suivant le prononcé du présent arrêt, astreinte qui pourra courir pendant 6 mois,



Déboute les parties du surplus de leurs demandes,



Condamne la Fondation Wikimédia Foundation Inc. à verser à M. [J] [N] [I] la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,



Dit que la Fondation Wikimédia Foundation Inc. supportera les dépens de première instance et d'appel.



Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseiller faisant fonction de Président et par Madame Elisabeth TODINI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.



Le greffier, Le président,

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