13 décembre 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-19.749

Chambre commerciale financière et économique - Formation de section

Publié au Bulletin - Publié au Rapport

ECLI:FR:CCASS:2023:CO00790

Titres et sommaires

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (LOI DU 26 JUILLET 2005) - Liquidation judiciaire - Jugement - Effets - Arrêt des poursuites individuelles - Domaine d'application - Exclusion - Cas - Inopposabilité de la déclaration d'insaisissabilité

Il résulte de l'article L. 526-1 du code de commerce que le créancier auquel l'insaisissabilité de plein droit de la résidence principale est inopposable peut, même après clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, et sans que l'article L. 643-11 du même code y fasse obstacle, exercer son droit de poursuite sur l'immeuble qui n'était pas entré dans le gage commun des créanciers de la liquidation judiciaire

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (LOI DU 26 JUILLET 2005) - Liquidation judiciaire - Règlement des créanciers - Créanciers bénéficiant d'une sûreté - Déclaration d'insaisissabilité publiée avant l'ouverture de la liquidation - Inopposabilité - Portée

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (LOI DU 26 JUILLET 2005) - Liquidation judiciaire - Clôture - Clôture pour insuffisance d'actif - Droit de poursuite individuelle - Inopposabilité de la déclaration d'insaisissabilité

Texte de la décision

COMM.

FB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 13 décembre 2023




Cassation


M. VIGNEAU, président



Arrêt n° 790 FS-B+R

Pourvoi n° W 22-19.749




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 13 DÉCEMBRE 2023

La Caisse de crédit mutuel de [Localité 6] Sévigné, dont le siège est [Adresse 1], anciennement dénommée Caisse de crédit mutuel de [Localité 6] [Adresse 5], a formé le pourvoi n° W 22-19.749 contre l'arrêt rendu le 8 juin 2022 par la cour d'appel de Rennes (1re chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [C] [T],

2°/ à Mme [G] [T] [V],

tous deux domiciliés [Adresse 4],

3°/ à la société Banque populaire Grand Ouest, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3], anciennement dénommée Banque populaire Atlantique,

4°/ à la direction générale des finances publiques, dont le siège est [Adresse 7],

5°/ au directeur général des finances publiques, domicilié [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Vallansan, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la Caisse de crédit mutuel de [Localité 6] Sévigné, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. et Mme [T], et l'avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 octobre 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Vallansan, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller doyen, Mme Bélaval, M. Riffaud, Mmes Boisselet, Guillou, M. Bedouet, Mmes Schmidt, Sabotier, conseillers, Mme Brahic-Lambrey, M. Le Masne de Chermont, Mmes Vigneras, Coricon, conseillers référendaires, Mme Henry, avocat général, et Mme Mamou, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 8 juin 2022), les 27 mai et 22 juillet 2016, M. [T] a été mis en redressement puis liquidation judiciaires, la procédure ayant été étendue à Mme [T] le 16 septembre suivant. La liquidation a été clôturée pour insuffisance d'actif par un jugement du 3 avril 2018.

2. La société Caisse de crédit mutuel de [Localité 6] Sévigné (la banque), qui avait précédemment déclaré une créance représentant le solde d'un prêt consenti en 2001 à M. et Mme [T] pour l'acquisition de leur résidence principale, a signifié le 7 janvier 2021 un commandement de payer valant saisie immobilière du bien, puis, le 21 avril suivant, les a assignés à l'audience d'orientation du juge de l'exécution. Ces derniers ont soulevé l'irrecevabilité de la demande.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

3. La banque fait grief à l'arrêt de déclarer son action irrecevable et de prononcer la nullité des actes de la procédure de saisie immobilière, alors « qu'un créancier auquel l'insaisissabilité d'un immeuble est inopposable peut exercer son droit de poursuite sur celui-ci indépendamment de ses droits dans la procédure collective du propriétaire de cet immeuble ; qu'en retenant que l'article L. 643-11 du code de commerce était applicable à la Caisse de crédit mutuel, créancier personnel des époux [T] exerçant son droit de poursuite sur leur résidence principale dont l'insaisissabilité lui était inopposable, la cour d'appel a violé les articles L. 526-1 et L. 643-11 du code de commerce. »

Réponse de la cour

Vu les articles L. 526-1 et L. 643-11 du code de commerce :

4. Il résulte du premier de ces textes que le créancier auquel l'insaisissabilité de plein droit de la résidence principale est inopposable peut, même après clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, et sans que le second texte y fasse obstacle, exercer son droit de poursuite sur l'immeuble, qui n'était pas entré dans le gage commun des créanciers de la liquidation judiciaire.

5. Pour déclarer irrecevable l'action de la banque tendant à saisir l'immeuble de M. et Mme [T], l'arrêt, après avoir retenu que l'action de la banque n'entrait dans aucune des exceptions prévues à l'article L. 643-11 du code de commerce, au principe de non-recouvrement par les créanciers de l'exercice individuel de leurs actions après la clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de leur débiteur, en déduit que la banque n'était plus en droit de saisir l'immeuble.

6. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés, le premier par refus d'application, le second par fausse application.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 juin 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;

Condamne M. et Mme [T] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize décembre deux mille vingt-trois.

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