22 novembre 2023
Cour d'appel de Bordeaux
RG n° 21/00201

CHAMBRE SOCIALE SECTION A

Texte de la décision

COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 22 NOVEMBRE 2023







PRUD'HOMMES



N° RG 21/00201 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-L4DX



















Monsieur [I] [F]



c/



Association PLIE DES HAUTS DE GARONNE

















Nature de la décision : AU FOND





















Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 décembre 2020 (R.G. n°F 17/01563) par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de BORDEAUX, Section Activités Diverses, suivant déclaration d'appel du 12 janvier 2021,





APPELANT :

Monsieur [I] [F]

né le 17 Juillet 1972 à [Localité 3] de nationalité Française demeurant chez Mme [F] - [Adresse 1]

représenté par Me Elise DELROT, avocat au barreau de BORDEAUX substituant Me Béatrice LEDERMANN de la SELARL AFC-LEDERMANN, avocat au barreau de BORDEAUX,





INTIMÉE :

Association Plie des Hauts de Garonne, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social [Adresse 2]

représentée par Me Anthony BABILLON de la SELARL B.G.A., avocat au barreau de BORDEAUX







COMPOSITION DE LA COUR :



L'affaire a été débattue le 25 septembre 2023 en audience publique, devant la cour composée de :



Madame Catherine Rouaud-Folliard, présidente

Madame Sylvie Tronche, conseillère

Madame Bénédicte Lamarque, conseillère



qui en ont délibéré.



Greffier lors des débats : A.-Marie Lacour-Rivière,





ARRÊT :



- contradictoire



- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.




















***



EXPOSE DU LITIGE



Monsieur [I] [F], né en 1972, a été engagé en qualité de coordonnateur des référents par l'association PLIE des Hauts de Garonne, par contrat de travail à durée déterminée d'une durée de douze mois à compter du 15 janvier 2007.



Le 15 janvier 2008, les parties ont signé un contrat de travail à durée indéterminée.



Leurs relations contractuelles étaient soumises à la convention collective nationale de l'animation socioculturelle (IDCC 1518).



Le 27 août 2013, le salarié a signé une fiche de poste.



Par avenant en date du 1er septembre 2013, M. [F] a été promu coordonnateur emploi/entreprises.



À compter du mois de septembre 2013, il a bénéficié d'un congé individuel de formation pour suivre une licence professionnelle construction bois, jusqu'au 27 juin 2014.



Il a été placé en arrêt de travail du 24 septembre au 23 décembre 2015.



Le 20 décembre 2016, l'association a notifié un avertissement à M. [F], qu'il a contesté par courrier du 4 février 2017.



Par courrier en date du 22 décembre 2016, le salarié a usé de son droit de retrait.



Le 6 janvier 2017, il a adressé un courriel à la médecine du travail, faisant état de difficultés rencontrées dans le cadre de son travail au sein de l'association. Suite à une visite de cette dernière, la médecine du travail lui a écrit une lettre d'observation le 16 janvier 2017, à laquelle l'association a répondu le 8 février suivant.



Par courrier du 22 février 2017, M. [F] a pris acte de la rupture de son contrat de travail.



A cette date, il avait une ancienneté de 10 ans et 1 mois, et la société occupait à titre habituel moins de onze salariés.



Demandant avant dire droit l'audition de plusieurs personnes, soutenant que la prise d'acte de la rupture doit produire les effets d'un licenciement nul et réclamant diverses indemnités, dont des dommages et intérêts au titre du préjudice subi du fait de la prise d'acte et pour le préjudice moral et psychologique lié au harcèlement moral, outre des rappels de salaires pour heures supplémentaires, M. [F] a saisi le 29 septembre 2017 le conseil de prud'hommes de Bordeaux qui, par jugement de départage rendu le 14 décembre 2020, a :

- débouté M. [F] de sa demande d'ordonner avant dire droit les auditions de Mme [R], M. [S], Mme [B], Mme [K], Mme [X], Mme [C] et Mme [P],

- dit n'y avoir lieu à écarter des débats les pièces numérotées 13, 13-1, 38-1 produites par M. [F],

- condamné l'association PLIE des Hauts de Garonne à lui régler les sommes suivantes, avec intérêts au taux légal à compter du 3 octobre 2017 :

* 219,77 euros bruts à titre d'indemnité de congé payés de fractionnement,

* 21,98 euros bruts au titre des congés payés afférents,

- dit produire les effets d'une démission la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par M. [F] à l'égard de l'association PLIE des Hauts de Garonne,

- débouté M. [F] de ses demandes formées au titre du préjudice subi du fait de la prise d'acte, de dommages et intérêts pour le préjudice moral et psychologique lié à une situation de harcèlement moral, d'indemnité de préavis et des congés payés y afférents, d'indemnité conventionnelle de licenciement, de rappels de salaire pour heures supplémentaires et des congés payes y afférents,

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit pour le paiement de l'indemnité compensatrice de congés payés dans la limite maximum de neuf mois de salaire, à calculer sur la base d'un salaire de référence de 2.476,85 euros bruts correspondant à la moyenne des trois derniers mois de salaire,

- débouté chacune des parties de leur demande formée au titre des frais irrépétibles,

- laissé à chacune des parties la charge de ses dépens.



Par déclaration du 12 janvier 2021, M. [F] a relevé appel de cette décision, notifiée le 14 décembre 2020.



Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 12 avril 2021, M. [F] demande à la cour de :

- recevoir les conclusions et y faire droit,

Sur la demande de requalification de la prise d'acte de rupture en licenciement nul en raison de faits de harcèlement moral et de violence au travail

A titre principal,

- réformer le jugement rendu par le juge départiteur en date du 14 décembre 2020,

- dire que l'employeur a commis des faits de harcèlement moral,

- dire que sa prise d'acte de rupture est justifiée par de graves manquements,

- dire qu'elle les effets d'un licenciement nul,

Sur les conséquences financières et indemnitaires de la requalification de la prise d'acte en un licenciement nul en raison de faits de harcèlement moral et de violence au travail

- condamner l'association PLIE des Hauts de Garonne, prise en la qualité de son représentant légal, à lui verser les sommes suivantes :

* 30.000 euros (correspondant à 12 mois de salaires arrondis) au titre du préjudice subi du fait de la prise d'acte,

* 15.000 euros (correspondant à 6 mois de salaires arrondis) à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral et psychologique subi du fait

du harcèlement moral durant l'exécution du contrat de travail,

* 4.953,70 (2.476,85 x 2) euros bruts au titre du préavis et 495.37 euros de

congés payés y afférents,

* 6.309,77 euros nets (1/4 de 2.476,85 x 10.19 années),

Sur la demande de rappel de salaires pour non-paiement des heures supplémentaires et des jours de fractionnement

- réformer le jugement entrepris,

- constater que le récapitulatif qu'il produit est probant,

- constater qu'il a effectué des heures supplémentaires à hauteur de 599,45 euros qui ne lui ont pas été rémunérées,

- constater qu'il ressort du reçu pour solde de tout compte qui lui a été remis que la somme de 318,86 euros à titre d'heures supplémentaires lui a été versée,

- constater que l'employeur n'a pas respecté ses obligations légales en matière de paiement des majorations des heures supplémentaires,

- constater qu'il reste redevable de la somme de 280,59 euros bruts,

- en conséquence, condamner l'association, prise en la personne de son représentant légal à lui verser la somme de 280,59 euros bruts à titre d'heures supplémentaires ainsi que la somme de 28,05 euros à titre de congés payés y afférents,

En tout état de cause,

- soumettre ces sommes à intérêts légaux à compter de la saisine du conseil de prud'hommes,

- condamner l'association, prise en la personne de son représentant légal, à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux dépens et frais éventuels d'exécution.



Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 17 juin 2021, l'association PLIE des Hauts de Garonne demande à la cour de':

- déclarer M. [F] recevable mais particulièrement mal fondé,

Y faisant droit,

- confirmer le jugement du 12 décembre 2020 en ce qu'il a débouté M. [F] de l'ensemble de ses demandes,

- dire qu'il ne rapporte pas la preuve de faits de harcèlement moral,

- dire qu'il a démissionné,

En conséquence,

- le débouter de l'ensemble de ses demandes,

- le condamner à payer la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.



L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 septembre 2023 et l'affaire a été fixée à l'audience du 25 septembre 2023.



Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ainsi qu'à la décision déférée.






MOTIFS DE LA DÉCISION





Sur le harcèlement moral



M. [F] soutient avoir été victime de harcèlement moral de la part de sa directrice, Mme [Z], sur une période courte entre décembre 2016 et février 2017, mais que ces faits doivent être mis en perspective avec des agissements antérieurs de sa directrice qu'il avait déjà subis en juillet 2013, puis en juin et septembre 2015, et cela dans un climat délétère.



L'employeur, tenu d'une obligation de sécurité, doit assurer la protection de la santé des travailleurs dans l'entreprise et notamment prévenir les faits de harcèlement moral.

Dès lors que de tels faits sont avérés, la responsabilité de l'employeur est engagée, ce dernier devant répondre des agissements des personnes qui exercent de fait ou de droit une autorité sur les salariés.



Selon les dispositions de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L'article L. 1154-1 prévoit, qu'en cas de litige, si le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.



Au soutien de ses prétentions, M. [F] invoque les éléments suivants :

- une pression morale subie pour qu'il rédige une fiche de poste en urgence et qu'il signe un avenant à son contrat de travail en septembre 2013 avant son départ en congés individuel de formation.

Il produit la fiche de poste comprenant des missions de coordonnateurs, correspondant à l'avenant à son contrat de travail, signé le 2 septembre 2013 alors qu'il n'a eu de réponse positive à la prise en charge financière de son CIF que début juillet. L'employeur verse le courrier de recommandation de Mme [Z] en date 3 mai 2016 en appui au recours gracieux de la décision par laquelle sa demande de prise en charge avait été refusée. L'employeur produit également le courriel de M. [F] en date du 26 juin 2013 aux termes duquel il énumère les tâches de coordination à voir figurer dans sa fiche de poste et terminant ainsi : 'nous reverrons plus en détail ces différentes tâches mardi prochain. N'hésitez pas à me demander des éléments sur d'autres points que j'aurais éventuellement oublié', ne laissant pas apparaître de pression subie, la fiche de poste ainsi modifiée ayant été signée le 27 août 2013 par M. [F] et l'avenant à son contrat de travail le 2 septembre 2013, alors qu'il partait en formation à compter du 10 septembre 2013.

Aucune pression ne ressort de ces échanges, le départ de M. [F] ayant été validé en juillet. Ces fait ne sont pas établis.



- Une attitude vexatoire de la part de Mme [Z] le 14 décembre 2016 lors d'une demande de modification de la demande de récupération déposée deux jours avant, laquelle ne l'a pas écoutée, est sortie du bureau en l'obligeant à la suivre, a levé les yeux au ciel, a soupiré et soufflé. Il relate ces faits dans un courriel qu'il lui a adressé le lendemain des faits, auquel l'avertissement qui lui est notifié le 20 décembre 2016 fait référence.

Aucun salarié ne témoigne d'un comportement agressif de la directrice suite à cette demande. Dans l'avertissement du 20 décembre 2016, Mme [Z] y répond en ces termes : 'votre demande de récupérations rectifiée a été validée et signée par mes soins le jour même où vous me l'avez présentée.'

Si la validation du jour de récupération ne pose pas de difficulté, le salarié ne rapporte pas la preuve d'une altercation verbale ce jour.

Ces faits ne sont pas établis



- Des propos humiliants tenus devant toute l'équipe et des partenaires extérieurs lors d'une réunion le 14 décembre 2016, où alors qu'il allait mettre le chauffage pour l'ensemble des participants, Mme [Z] l'a interpellé 'vous avez demandé avant de mettre la clim ' Parce qu'on demande avant'. Après interrogation, tout le monde a donné son accord pour mettre le chauffage. Pour attester de ces propos, il verse le courriel qu'il adresse à Mme [Z] le lendemain dans lequel il lui fait part de son sentiment de s 'être senti humilié. Celle-ci y répond avec la notification de l'avertissement le 20 décembre 2016, en ces termes : 'à chaque fois que je rentre en séance de travail, je demande toujours aux personnes présentes si elles souhaitent augmenter la température de la salle ou non, ma zone de confort n'étant pas obligatoirement celle de mes collaborateurs.'



Les salariés présents à la réunion ont témoigné sur l'annonce faite d'une suppression des missions de M. [F] mais n'ont pas confirmé avoir ressenti une gène ou que les propos de Mme [Z] étaient humiliants pour M. [F].

Ces faits ne sont pas établis.



- Une diminution de son portefeuille modifiant son contrat de travail à laquelle il n'avait pas été associé, annoncée en réunion d'équipe et en présence de personnes extérieures, le 14 décembre 2016, ayant entraîné une humiliation. Il précise que lors de cette réunion, Mme [Z] lui a appris la suppression d'une partie de ses fonctions pour lesquelles il s'était investi depuis des années, à savoir la co-animation des commissions CISP emplois/entreprises et 'l'alimenter ABCViesion Entreprises'.

M. [F] produit l'avenant à son contrat de travail du 1er septembre 2013, sa fiche de poste du 27 août 2013 ainsi que le témoignage de deux salariés présents à la réunion (Mme [K] et M. [S]). Cette modification de son poste de travail lui a été confirmée par la notification d'un avertissement le 20 décembre 2016.





- L'avertissement dont les motifs imprécis et non datés le rende vexatoire d'autant plus qu'il intervient à la suite du signalement d'un mal-être faite le 15 décembre 2016. Il produit la lettre de contestation de l'avertissement.



- Les violences verbales de Mme [Z] à son égard, celle- ci ayant poussé des cris et hurlements le 21 décembre 2016 suite à une demande de jour de récupération, laquelle aurait dit 'c'est vous qui décidez peut être, je n'ai pas à me justifier, je suis la Directrice, Sortez de mon bureau'. Il dit avoir été humilié par ces propos prononcés devant toute l'équipe. Il verse les attestations de Mme [P] , Mme [X], Mme [K], M. [S] et Mme [C] qui confirment avoir témoins des faits.

Il met dans les débats les faits identiques qui se sont déroulés le 18 septembre 2015, Mme [Z] lui ayant déjà crié de sortir de son bureau, dont il a fait part à la direction par courrier du 21 septembre 2015 et qui l'ont conduit à être placé en arrêt maladie le lendemain pour une durée de trois mois. Il produit une attestation de Mme [R] ainsi que les arrêts de travail correspondants.



- L'envoi d'un courriel 'de recadrage' vexatoire de Mme [Z] le 22 décembre 2016, revenant sur les faits de la veille dans lequel elle présente la scène de manière différente, laissant sous-entendre qu'il s'investit moins que ses collègues et lui demandant de cesser les menaces qu'il profère à son encontre ainsi que les moqueries sur son physique.

Par ce courriel, Mme [Z] s'est expliqué sur le refus de valider de nouvelles journées de récupération posées moins de 15 jours avant la date prévue. L'employeur justifie, par la production des congés déposés de l'ensemble des salariés présents au moment des faits que la règle était connue comme respectée en grande majorité par chacun, certains congés étant toutefois déposés peu de temps avant la date prévue. M. [F] s'était déjà vu refuser des congés déposés le 18 septembre 2015, remis le 23 septembre pour le 25 septembre 2015. L'employeur produit également le rappel de cette règle à tous les salariés le 3 janvier 2017 par courriel.

Dans son courriel de 'recadrage' du 22 décembre 2016, Mme [Z] précise regarder avec plus d'attention les demandes des collègues qui font preuve d'investissement et de disponibilité. 'Je considère qu'au regard de leur investissement après 17h30, voire des vendredis après-midi travaillés et justifiés, je me dois d'instaurer de mon côté une certaine souplesse. Cette décision est considérée pour ma part comme juste et équitable. Or, vous n'avez pas le même investissement, loin s'en faut'. Si l'employeur confirme être parfois obligé de prioriser les demandes d'absence, le tableau d'heures produit fait apparaître que M. [F] terminait tous les jours à 17h50, effectuant 8 heures de travail quotidien, en revanche, il n'était jamais présent les vendredis après midi.



Ces faits ne sont pas établis.



- Les violences verbales en date du 22 décembre 2016, après que M. [F] a remis à Mme [Z] un courrier dans lequel il faisait valoir son droit de retrait, qui lui a crié dessus devant ses collègues. Il produit des attestations de M. [S], Mme [P], Mme [X], Mme [K] et Mme [C].



- Le courrier de réponse de Mme [Z] à l'exercice du droit de retrait de M [F] qui lui a été remis le 22 décembre 2016 dont il invoque le caractère vexatoire, la direction ne prenant pas la peine de diligenter une enquête suite à l'exercice de son droit de retrait.



M. [F] évoque la dégradation de ses conditions de travail et de sa santé, s'étant rendu immédiatement le 22 décembre auprès de la médecine du travail et son médecin l'ayant placé en arrêt de travail qui sera prolongé jusqu'au 5 mars 2017, en raison d'un 'syndrome anxio-dépressif qui semble être en lien avec un conflit professionnel'. M. [N], un ami, témoigne des changements constatés de l'état mental de M. [F], dont il lui a confié qu'ils étaient en lien avec sa hiérarchie directe.

Il produit également le courrier adressé à l'inspection du travail le 6 janvier 2017 aux termes duquel il évoque notamment le harcèlement moral dont il se dit victime.





Il sera considéré que les faits portant sur la pression à signer un avenant au contrat de travail, le refus de modifier les jours de récupération le 14 décembre 2016, les propos tenus en réunion le 14 décembre 2016 sur l'opportunité de demander l'accord des participants pour mettre le chauffage en route et le contenu d'un courriel de Mme [Z] du 22 décembre 2016 par lequel elle lui rappelle la règle des 15 jours pour poser des congés et constate son moindre investissement horaire sur son poste ne peuvent pas être retenus comme laissant supposer des agissements constitutifs de harcèlement moral.



En revanche, sur les autres faits, il sera donc considéré que M. [F] présente des éléments de fait qui, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement.



Il revient dès lors à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement moral et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement moral



La société conteste l'existence d'une telle situation.



- Sur le retrait de deux missions dans son portefeuille annoncé le 14 décembre 2016 devant toute l'équipe et des partenaires extérieurs, la société soutient qu'il ne s'agissait en aucun cas d'une modification du contrat de travail de M. [F], qui a gardé ses responsabilités.



L'avertissement est ainsi rédigé concernant la motivation de la suppression des deux missions :

'(...) 1 - de votre comportement en général

Vos difficultés relationnelles
Malgré les différents recadrages opérés concernant votre relation avec l'équipe des référents P.L.I.E. vous persistez à déqualifier systématiquement le travail effectué par les référents P.L.I.E, qui, même si elles ne sont pas sous ''autorité hiérarchique directe de l'association P.L.I.E des Hauts de Garonne, sont des collègues de travail avec lesquels nous sommes dans l'obligation de travailler au quotidien et dans des formes de relations sereines et respectueuses. ll en va de la bonne gestion de notre entreprise et de ses exigences.


Mes remarques allaient dans ce sens. Et vous avez fait montre depuis plusieurs mois d'une difficulté à travailler en équipe et d'une déresponsabilisation quant au rôle qui est le vôtre en tant que coordonnateur emploi-entreprises. Infantiliser ses collègues de travail comme vous le faites n'est pas signe de respect dans une relation de travail...


La déresponsabilisation quant au rôle qui est le votre
Vous mobilisez le temps de travail collectif de vos collègues à effectuer des reproches systématiques sur le travail réalisé par vos collègues 'référents PLIE', au lieu de construire une démarche constructive et tempérée.
Ces dernières ont mobilisé du temps de travail, pour améliorer les modes de collaboration entre le service que vous coordonnez et elles-mêmes. Vous ne m'avez fait aucun état par écrit des axes de progrès dégagés et avez poursuivi votre travail de dénigrement.


Sachez que-le respect ou non de leurs objectifs relève de mon autorité et de leurs employeurs, non de la votre.





Vous avez également pour missions de coordonner l'équipe des chargés de relations entreprises. Au lieu de vous inscrire dans une position 'tempérée' et 'modérée', propre à toutes relations saines de relations entre professionnels, vous avez attisé les conflits professionnelles, sans être à l'écoute des arguments factuels avancés par l'équipe. Notre métier ne s'appuie pas sur des a-priori, mais sur des faits.



'2 - Concernant vos propos tenus le lundi 12 décembre 2016 dans mon bureau
Tout au long de l'année 2016, vous avez formulé votre souhait que je n'anime plus la CISP partenaires/Entreprises, reprenant ainsi les propos que vous aviez pu tenir antérieurement, notamment dans votre courrier du 23 septembre 2015.

Vous avez ainsi, contre toute attente, maintenu ces positions et quelle ne fut pas ma surprise une réunion le 12 décembre dernier, vous avez formulé que l'animation de ces commissions m'en incombait. Je cite 'c'est votre boulot'.



Jusqu'à preuve du contraire, je n'ai pas à vous demander l'autorisation de ce sur quoi je dois intervenir en commission. Et l'ordre du jour, me semble-t-il, est de mon pilotage, non du votre.


Vous avez également signifié que les mauvaises relations avec l'équipe n'étaient pas de votre fait, mais de mon fait, me retournant la responsabilité de vos carences. Votre volonté est-il de me mettre en difficulté dans l'exercice de mes fonctions '


De fait, j'ai ainsi pris deux mesures :


- L'une est que vous êtes dessaisi du dossier concernant la mise en oeuvre des procédure ABC viesion sur le volet 'entreprise' à compter de 2017.

- L'autre est que les commissions relevant de ma responsabilité comme vous me l' avez très maladroitement rappelée, j'animerai, seule, les commissions en 2017.


Je rappelle enfin que s'opposer ouvertement à mes directives en commission et devant mon équipe relèvent de comportements inadaptés.'



L'examen du contrat de travail de M. [F] et de sa fiche de poste listant l'ensemble de ses tâches permet d'établir que le retrait des missions ABC viesion et la responsabilité des commissions, n'a pas modifié l'essentiel de ses attributions, sa qualification et sa rémunération. De sorte qu'il ne s'agissait pas d'une modification de son contrat qui aurait nécessité son accord préalable.



Il ressort de l'avertissement du 20 décembre 2016, qu'il s'agissait d'une réponse de Mme [Z] à M. [F] qui n'avait pas appliqué les directives données quant aux relations avec les référents, sans en avertir sa hiérarchie en amont et en la contredisant devant toute l'équipe, cherchant ainsi à la déstabiliser.



L'association produit également des échanges de courriels de M. [F] avec ses collaborateurs qui complètent ses propos sur les sujets concernés ou s'en étonnent comme n'étant pas fondés.



Toutefois, il ne ressort pas clairement des pièces produites que M. [F] avait souhaité ne plus s'investir dans ces fonctions, aucun compte rendu de la réunion du 12 décembre 2016 n'étant produit, même si M. [F] ne remet pas en cause les raisons de son dessaisissement par Mme [Z], s'étonnant du manque de logique par rapport à l'ensemble de son portefeuille.



Mais les témoignages de certains collaborateurs, quant à leur surprise à l'annonce du retrait de ces missions en réunion le 14 décembre 2016, M. [S] attestant que M. [F] 'ne semblait pas en informé au préalable', ne permettent pas d'établir de façon certaine que le salarié personnellement concerné n'était pas déjà au courant.





L'employeur ne démontre pas que le retrait des deux missions qui figuraient à sa fiche de poste parmi de nombreuses autres missions répondait à un désinvestissement du salarié ou une remise en cause des recommandations de sa directrice, ni qu'il avait été au courant de cette modification avant la réunion du 14 décembre 2016 de manière verbale puis par l'avertissement du 20 décembre 2016 de manière écrite.



En revanche, il ressort des pièces que la hiérarchie de M. [F] souhaitait reprendre la main sur la gestion des dossiers, qu'elle considérait non adéquate.



- Sur l'avertissement du 20 décembre 2016, Mme [Z] adresse un 'recadrage' à M. [Z], suite à ses 'propos tenus le lundi 12 décembre 2016 dans la matinée dans mon bureau et de votre mail rédigé à mon attention du jeudi 15 décembre 2016 a 17h29.'
'Vous faites le choix de la victimisation en transformant remarques en insultes, fermeté en colères... .ce qui est irritant et à la mesure du décalage entre le ton employé et votre comportement au quotidien.


Cette stratégie vous appartient mais vous indique que je n'entends pas rentrer dans votre jeu. Sachez juste que des accusations calomnieuses ne sont pas neutres. Je vous laisse le soin de vous le faire confirmer par votre conseil habituel.


Pour ma part je me contenterai de vous rappeler, ce que j'ai déjà pu vous faire observer à de multiples reprises puisque, de toute évidence, vous ne souhaitez pas en tenir compte.'



Elle liste une série de reproches, dont certains ont déjà été examinés ci-dessus :



1 - Concernant votre comportement

(...)



2 - Concernant vos propos tenus le lundi 12 décembre 2016 dans mon bureau

(...)


3 - Concernant vos initiatives exprimées le 12 décembre dernier
Vous avez évoqué une dernière réunion de travail avec Pôle emploi le vendredi 9 décembre dernier, où vous avez évoqué, selon vos propos, la création d'une plate-forme mobilisant Pôle emploi, la Mission Locale et le P.L.I.E.


Depuis quand cette proposition a-t-elle été validée par le Conseil d'administration de l'association ' Depuis quand vous engagez des partenariats stratégiques aussi importants en lieu et place de votre direction ' Cette initiative est déplacée et une fois de plus, vous n'êtes pas en situation de prendre le relais sur un mandat que vous n'avez pas.


Enfin, l'ensemble des missions que vous exercez s'effectuent sous mon autorité ; les dossiers que vous engagez doivent donc être validés par mes soins avant toute diffusion à nos partenaires extérieurs.


4- Concernant votre mail du jeudi 15 décembre 2016 à 17h29


Concernant le premier point avancé, votre demande de récupérations rectifiée a été validée et signée par mes soins le jour même où vous me l'avez présentée



Pour le deuxième point, à chaque fois que je rentre en séance de travail, je demande toujours aux personnes présentes si elles souhaitent augmenter la température de la salle ou non, ma zone de confort n'étant pas obligatoirement celle de mes collaborateurs.





Quant au contenu général, il est au niveau de vos comportements, déplacés. Dans l'accompagnement pédagogique des participants du P,L.I.E dont nous avons la charge, nous pourrons le prendre comme exemple pour leur rappeler qu'un salarié ne doit pas s'exprimer de la sorte envers sa direction.


5 -Notre demande d'éléments chiffrés 2016
Le lundi 28 novembre 2016 à 8h59, je vous ai fait, par mail, une demande d'éléments chiffrés pour pouvoir établir une note circonstanciée à notre Présidente sur les réalisations du service emploi-entreprises.


Ces éléments devaient nous être livrés le 7 décembre 2016 et malgré mes relances le lundi 12 décembre 2016 à 8h57 et le mardi 13 décembre 2016 à 10h15 par mails, je n'ai toujours pas été
destinataire de vos chiffres. Aucune date de livraison ne m'a par ailleurs été proposée.


Comptez-vous nous rendre compte de l'activité du service que vous coordonnez'


Pour conclure, nous pourrons aborder sereinement les sujets qui concernent le P.L.I.E et votre mission quand vous daignerez respecter les directives de votre autorité hiérarchique et remplir vos missions telles qu'elles sont prévues à votre contrat de travail.


Ceci constitue pour ma part un premier avertissement et espérant que vous saurez rectifier utilement et immédiatement votre comportement afin de refermer cette parenthèse.'



Aux termes des dispositions de l'article L. 1333-1 du code du travail, en cas de litige sur une sanction disciplinaire, le juge apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction et forme sa conviction au vu des éléments retenus par l'employeur pour prononcer la sanction et de ceux fournis par le salarié à l'appui de ses allégations. Si un doute subsiste, il profite au salarié.



En application de l'article L. 1332-2, lorsque l'employeur envisage de prendre une sanction, il doit, sauf si la sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même nature, convoquer préalablement le salarié à un entretien au cours duquel il indique le motif de la sanction envisagée et recueille les explications du salarié.



S'agissant des griefs 1et 2, il a été retenu que l'association ne justifiait pas des raisons pour lesquelles elle avait retiré deux missions du portefeuille de M. [F].



S'agissant des initiatives de M. [F] (grief n°3), celui-ci les reconnaît dans son courrier de réponse du 4 janvier 2017, à l'avertissement, mais rappelle qu'il ne s'agissait que de proposition de collaboration sans avoir engagé le PLIE des Hauts de Garonne tant que le principe n'avait pas été validé. L'employeur ne produit aucune pièce permettant d'établir ces initiatives du salarié.



La cour a retenu que la demande de congés du 14 décembre 2016 avait été validée et que la réponse faite sur l'obtention de l'accord de tous les participants pour allumer la climatisation n'était pas vexatoire (griefs n°4).



L'absence de transmission des chiffres de 2016 n'est pas attestée par aucune pièce (grief n°5). Toutefois, M. [F] dans son courrier de contestation du 4 février 2017 rappelle que 'les chargés de relations entreprises et moi-même, vous avons remis, lors de nombreuses réunions du S2E, dirigés par vous même, les 1ers éléments chiffrés ; ces chiffres n'état pas définitifs. Votre insistance à obtenir des résultats avant la date que vous avez validez interroge sur votre pratique manageriale', confirmant ainsi les demandes faites sur les éléments chiffrés et son refus de les communiquer à la date demandée, remettant en cause l'autorité de Mme [Z].



De même, M. [F] ne peut soutenir que l'envoi d'un courriel de Mme [Z] à l'ensemble des équipes le 12 octobre 2016 valait première sanction disciplinaire en rapport avec la mauvaise ambiance qui lui est reprochée, le courriel étant une simple mise au point de la part de la directrice, ni que les faits avaient donc déjà été sanctionnés.



Si quatre griefs sur cinq reprochés dans l'avertissement ne sont pas établis par l'employeur, il ne peut être statué sur la demande d'annulation de l'avertissement qui n'est pas repris au dispositif des conclusions de M. [F], conformément à l'article 954 du code de procédure civile. La cour n'en est donc pas saisie.



En revanche, les griefs figurant dans l'avertissement, ne traduisent pas tant une tentative d'intimidation, qu'un mode d'échange ferme, Mme [Z] rappelant en début de notification qu'elle réitérait de manière formelle des observations déjà portées à sa connaissance, comme en atteste les courriels échangés entre les parties et répondant dans cet avertissement à de précédentes altercations qui ne trouvaient pas de solution, M. [F] remettant régulièrement en cause l'autorité de sa directrice.



- Sur les violences verbales de Mme [Z] :

* le 21 décembre 2016 suite à une demande de récupération, laquelle aurait dit 'c'est vous qui décidez peut être, je n'ai pas à me justifier, je suis la Directrice, Sortez de mon bureau'.

L'employeur soutient qu'il s'agissait en réalité de faire respecter par M. [F] la règle de demande de pose des heures de récupération 15 jours minimum avant la date de prise effective et non le problème du décompte de ces heures et que M. [F] est venu en toute connaissance de cause déposer sa demande la veille des congés de Noël pour susciter la confrontation avec Mme [Z].



Malgré au moins deux rappels en septembre 2015 et le 14 et 15 décembre 2016, M. [F] a adressé une demande de jour de récupération le 19 décembre 2016 pour la période couvrant le 22 au 27 décembre 2016. Par courriel du 21 décembre 2016 il demandait de manière insistante à Mme [Z] de lui répondre.



Dans son courriel daté du lendemain matin, Mme [Z] rappelait à M. [F] la règle des 15 jours, l'obligation de prendre une pause méridienne d'une heure, l'association ne pratiquant pas les journées continues et tenant compte des demandes de chacun et souhaitant pour des raisons de sécurité qu'il y ait au moins deux salariés présents. D'autre part, elle demandait à M. [F] de se 'contenir ; les menaces ('ça ne va pas se passer comme ça') sont inappropriées, déplacées dans un cadre serein et respectueux de ma fonction et de ma personne. Quant à vos mimiques caricaturales me concernant (mimiques de mes soi-disant dents en avant) me faisant passer, soit pour un cheval, soit pour un lapin sont une atteinte directe à mon intégrité physique et morale. Et n'évoquons pas ici les courriers et les mails déplacés que vous m'adressez qui relèvent d'une attaque personnelle. Il vous est instamment demandé de cesser immédiatement vos comportements de dénigrement et de calomnies envers ma personne. Je suis votre autorité hiérarchique et à ce titre vous me devez respect et respect du cadre que je vous fixe'.



S'agissant des attestations des salariés versées, Mme [K] et Mme [P] attestent avoir entendu Mme [Z] affirmer qu'elle était la directrice et que c'est elle qui décidait, Mme [X] et Mme [C] témoigne avoir entendu 'dehors ! Sortez de mon bureau' et M. [S] confirme le ton de colère de Mme [Z]. Toutefois, ils ne peuvent attester du contenu de la discussion qui a abouti à ces propos, des paroles échangées par l'employeur comme par le salarié.



Il ressort de ces éléments que le fait d'avoir demandé à M. [Z] de sortir du bureau alors qu'il venait déposer des jours de récupération la veille des vacances de Noël après avoir déposé la demande hors délai dans un parapheur, réitéré sa demande la



veille dans un courriel et s'étant déplacé dans l'après midi pour avoir une confrontation directe avec la directrice ne constitue pas un comportement vexatoire de Mme [Z].



* Sur les faits identiques qui se seraient déroulés le 18 septembre 2015, M. [F] produit le courrier qu'il a adressé à Mme [Z] le 21 septembre 2015 faisant part de son indignation sur les propos tenus et le ton adopté par sa directrice, déplorant l'atmosphère délétère qu'elle entretenait depuis lors et lui posant la question de savoir si elle voulait toucher à son intégrité. Il verse également les attestations de Mme [X], [K] et de Mme [R], témoin des propos de Mme [Z] sur un ton virolent : 'Dehors, sortez Dehors'. Toutefois, M. [F] ne produit aucun témoignage des propos qui ont été tenus dans le bureau et qui ont conduit Mme [Z] à lui demander de sortir.



* Sur les cris et hurlements en date du 22 décembre 2016, après que M. [F] ait remis à Mme [Z] un courrier dans lequel il faisait valoir son droit de retrait,

l'employeur soutient qu'il s'agissait encore une fois d'une provocation de la direction pour lui remettre en main propre le courrier par lequel il lui notifiait son droit de retrait, alors qu'il aurait dû être absent toute la journée de 22 décembre 2016.



Aux termes de son courrier faisant valoir son 'droit de retrait et droit à récupération', M. [F] met en cause d'une part la dégradation des relations de travail depuis dix jours et le ton employé par la directrice, reprenant, l'ensemble des faits depuis le 14 décembre 2016 et d'autre part sa volonté affirmée de bénéficier des jours de récupération sur les dates proposées, ces deux motifs entraînant des souffrances psychologiques dont il se disait victime de la part de Mme [Z].



Cinq salariés présents attestent de ce que Mme [Z] les a rejoints sur le plateau pour poursuivre la discussion sur un ton animé et leur reprochant de faire 'conciliabule'.



Dans le contexte précité, la remise en main propre par le salarié d'un courrier par lequel il fait valoir son droit de retrait pour des raisons identiques aux précédentes altercations, qui se termine par une demande ferme de la directrice de sortir de son

bureau ne présente pas de caractère vexatoire.

Les témoignages des salariés sur le caractère humiliant de cette demande correspondent à leur ressenti personnel alors qu'il n'ont pas été témoins de l'ensemble de la conversation et des raisons soutenues par M. [F] pour faire valoir son droit de retrait. Les salariés ne décrivent d'ailleurs pas M. [F] en souffrance psychologique, ni se positionnent sur le droit de retrait qu'il revendique ce jour là.



S'agissant du comportement de Mme [Z], M. [F] verse l'attestation de Mme [B] ancienne salariée de juillet 2012 à septembre 2013 ayant été licenciée pour inaptitude en raison de souffrance psychique qu'elle attribue à Mme [Z], selon laquelle cette dernière rendait l'ambiance au sein de l'association extrêmement délétère, accompagnée des pièces médicales en attestant.

Toutefois, l'employeur verse des courriels très cordiaux de Mme [B] après son licenciement ainsi que des voeux qu'elle lui adresse en février 2014, de sorte que ce témoignage n'est pas probant.



Il produit également le témoignage de Mme [R] qui confirme la violence verbale utilisée par Mme [Z] pour s'adresser au personnel ainsi que de l'impossibilité d'évoquer les questions de 'gestion du temps et des ressources humaines' par crainte de 'me faire crier dessus'. Il n'est pas contesté que c'est sur la question des jours de récupération que les conflits entre M. [F] et Mme [Z] se sont cristalisés.



Mme [X] et Mme [C] témoignent avoir a été choquées par la violence verbale de Mme [Z] le 21 décembre 2021 et être revenue travailler le lendemain 'la boule au ventre'.



D'autres salariés témoignent du positionnement récurrent de Mme [Z] rappelant qu'elle décidait car elle était 'directrice' (Mme [X], Mme [K], Mme [P] et Mme [R]).



Ces faits, s'ils témoignent d'une absence d'autorité naturelle de la direction, obligée de répéter que c'est parce qu'elle est directrice que sa décision est fondée face à un salarié revendicatif témoignent d'un management directif sans constituer des faits vexatoires ou humiliants pour le salarié.



- Sur l'absence d'enquête suite à l'exercice de son droit de retrait, l'employeur indique que M. [F] a adressé ses différents courriers à Mme [Z] en qualité de directrice et non à la présidente. En tout état de cause une enquête sociale interne a été mise en place le 15 février 2017, qui a fait apparaître outre des revendications salariales et d'horaires variables, des difficultés de communication de Mme [Z] dont il est indiqué qu'ils ont été réglés par une formation.



Il ressort des courriers adressés par M. [F] pendant son arrêt de travail pour maladie en janvier et février 2017, qu'il a continué à chercher à s'adresser à Mme [Z], sur le même ton en reprenant les mêmes réclamations. Toutefois, l'employeur justifie que dès le 13 février 2017, la présidente faisait savoir à M. [F] qu'elle 'entendait la souffrance vécue ou ressentie, que vous exprimez et dont vous souhaitez imputer la responsabilité à Mme [Z]. C'est la raison pour laquelle j'ai décidé de tout mettre en oeuvre pour faire la lumière sur cette affaire'.



De sorte que l'employeur justifie avoir pris des mesures pour procéder à une enquête sociale dès le 15 février 2017, dont le rapport précise qu'elle a été demandée suite à des problèmes relationnels ouverts entre la directrice et un salarié.





Il ressort des pièces médicales versées que M. [F] a été placé en arrêt de travail pour maladie le lendemain d'une altercation avec Mme [Z] notamment sur une demande de justification d'un refus de congés payés, du 24 septembre au 23 décembre 2015, que suite à la dernière série d'altercations en décembre 2016, M. [F] a tenté de faire réagir sa hiérarchie en faisant valoir son droit de retrait, et a de nouveau été arrêté le 22 décembre 2016 sans reprise du poste de travail.



Les arrêts de travail font mention d'un syndrome dépressif. Toutefois, le médecin du travail après examen de M [F] le 22 décembre 2016 suite à l'exercice de son droit de retrait n'établit pas d'avis d'inaptitude, mais indique qu 'il relève de soins et doit consulter son médecin traitant'.

Le médecin du travail évoque le 2 janvier 2017, sur les dires du salarié, un 'syndrome anxio-dépressif réactionnel en raison d'un relationnel professionnel douloureusement décrit. Dans le discours de M [F], le travail semble devenir une source d'angoisse préoccupante au point d'exprimer une incapacité à se projeter dans le futur et d'envisager un retour dans son entreprise'.

Le dossier médical produit rapporte que M. [F] évoque un relationnel tendu lors de sa visite le 4 février 2011. Le 23 septembre 2015, après le courrier adressé à sa direction, et à la demande de M. [F], le médecin du travail expliquera rester à sa disposition. Dès le 29 décembre 2015, au moment de sa visite de reprise, le médecin note que M. [F] se plaint de propos dévalorisants et de critiques de sa direction. Le médecin du travail notait la fragilité de M [F], eu égard à la santé de son épouse, et envisageait 'l'intervention d'une psychologue pour médiation avec sa hiérarchie, M. [F] n'ayant plus confiance en elle'.



M. [F] a toujours été déclaré apte à reprendre son poste, le médecin du travail qui le suivait depuis 2011 n'a jamais alerté l'employeur des propos que ce dernier tenait quant à une situation conflictuelle.





Il apparaît enfin que dans le cadre de l'enquête sur la qualité de vie au travail menée en février 2017, auprès des salariés présents au moment du conflit ouvert entre Mme [Z] et M. [F], aucun n'a évoqué de harcèlement. 'La plupart des salariés voient le mal être de la directrice, sa charge de travail son implication. L'ensemble du personnel ressent une volonté de bien faire dans le management, veut l'accompagner et tous veulent apprendre à travailler ensemble'.



En conséquence, il y a lieu de dire que les éléments invoqués par M. [F], même pris dans leur ensemble, sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, qui ne doit pas se confondre avec des tensions et conflits pouvant survenir avec l'employeur, à partir notamment, des reproches que ce dernier est en droit d'adresser au salarié notamment quant à l'organisation du travail d'une structure comptant 7 salariés et aux obligations sur les jours de congés. Sans minimiser la souffrance ressentie par M. [F], il n'est pas établi par l'ensemble des éléments produits, y compris les certificats médicaux, que si elle est en lien avec une dégradation des relations de travail, elle serait imputable à un comportement vexatoire ou humiliant de la directrice, mais est due à une spirale de reproches que l'un et l'autre ont alimenté par des problèmes relationnels, leur comportement inadapté tant d'un point de vue managerial que d'un point de vue du respect des règles fixées, conjugués avec des propos tenus irrespectueux envers la personne.



Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [F] de sa demande au titre du harcèlement moral.



Sur le manquement à l'obligation de sécurité



M. [F] soutient que la direction n'a pas pris les mesures permettant d'assurer sa santé et sa sécurité, n'ayant diligenté aucune enquête une fois notifié l'exercice de son droit de retrait et son arrêt de travail pour maladie.



Il fait également part du refus de toute communication de la part de Mme [Z] après son arrêt de travail, ne donnant pas suite à ses courriels et refusant de lui parler lorsqu'il s'est déplacé le 13 février 2017, mais également de la part de la présidente de l'association qui a adopté un ton autoritaire et considéré comme non fondé ses demandes.



L'association soutient avoir diligenté une enquête mais que M. [F] a démissionné avant que les conclusions en soient données.



L'employeur est tenu d'une obligation légale de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise et doit en assurer l'effectivité en vertu des dispositions de l'article L 4121-1 du code du travail.

Ces mesures comprennent:

1) des actions de prévention des risques professionnels,

2) des actions d'information et de formation,

3) la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.



L'article L. 4121-2 du code du travail détermine les principes généraux de prévention sur le fondement desquels ces mesures doivent être mises en oeuvre.



L'employeur, tenu d'une obligation de sécurité, doit assurer la protection de la santé des travailleurs dans l'entreprise et doit notamment mettre en oeuvre les mesures de nature à prévenir les faits de harcèlement moral.



En l'espèce il ne saurait être reproché à Mme [Z] d'avoir refusé de communiquer avec M. [F] alors qu'il était en arrêt de travail pour maladie et qu'il cherchait une nouvelle fois à aborder les sujets conflictuels avec elle. Le courrier de la présidente à laquelle il s'adresse le 5 février 2017 n'est pas rédigé sur un ton hautain puisqu'elle lui fait part de sa compréhension et de l'enquête qu'elle va mettre en place. Elle poursuit en demandant à M. [F] de ne plus prendre contact avec Mme [Z], laquelle est affectée également par cette situation.



En l'espèce, l'association justifie avoir diligenté une enquête sociale sur la qualité de vie au travail directement en lien avec le conflit ouvert entre Mme [Z] et M. [F] ayant abouti au dépôt d'un droit de retrait, et de la mise en place d'un document unique sur les risques professionnels. Ce document unique reprend à ce titre la nécessité de tenir un ton neutre dans les échanges et une plus grande valorisation du travail accompli, passant notamment par l'octroi d'heures supplémentaires.



L'association a rempli son obligation de sécurité et le salarié sera débouté de cette demande.



Sur les heures supplémentaires



Aux termes de l'article L. 3171-2 alinéa 1er du code du travail lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.



Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.



Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées.



A l'appui de la demande d'heures supplémentaires, M. [F] sollicite le paiement de la somme de 280,59 euros bruts correspondant au reliquat sur les repos compensateurs dus outre la somme de 28,05 euros au titre des congés payés y afférents.



Il produit un tableau récapitulatif des heures supplémentaires qui ne lui ont pas été réglées qu'il décompte ainsi :

- 6,5 heures en 2014, non reportées sur l'année 2015,

- 7,5 heures en 2015, ayant récupéré 15 h sur les 18h majorées de 25% lui donnant droit au repos en remplacement de 22,5 heures,

- 22,5 heures en 2016, ayant récupéré 14 h sur les 29,25 majorées de 25% lui ayant donné droit au repos de remplacement de 36,56 heures.



M. [F] produit un relevé annuel des heures de travail effectuées depuis 2014 et qui constituent des éléments suffisamment précis pour permettre à l' employeur de fournir les horaires effectivement réalisés, dès lors que l'entreprise lui a réglé 318,88 euros lors du solde de tout compte au titre des heures supplémentaires, étant donc en mesure de répondre aux demandes.



Toutefois, en l'absence de décompte précis, il convient de se reporter aux tableaux produits par l'association faisant quotidiennement un relevé des horaires du salarié.



Comme le justifie l'association, les 6,5 heures supplémentaires de 2014 ont été reportées en janvier, dans le décompte 2015.

En revanche, il ne peut être soutenu que sur l'année 2015, la journée de solidarité devrait être déduite du solde des heures supplémentaires, de sorte qu'il restait bien 7,5 h supplémentaires à reporter sur 2016. Sur l'année 2016, l'association décompte 16,25 heures supplémentaires restant au solde, correspondant au tableau produit.



Le bulletin de paie de février 2017 porte mention du paiement de 16,25 heures supplémentaires majorées à 25% pour un montant de 318, 86 euros, et de majoration à 50% de 3,50 heures.



L'association sera donc condamnée à régler à M. [F] la somme de 147,16 euros correspondant aux 7,5 heures supplémentaires non réglées, outre 14,71 euros au titre des congés payés y afférents.



Le jugement sera infirmé de ce chef.



Sur la prise d'acte de la rupture



La prise d'acte de la rupture du contrat par un salarié produit les effets d'un licenciement nul si les faits invoqués par le salarié sont établis et caractérisent des manquements suffisamment graves de l'employeur, en lien avec le harcèlement moral empêchant la poursuite de la relation contractuelle. A défaut, la prise d'acte de la rupture produit les effets d'une démission.



M. [F] a pris acte de la rupture du contrat de travail par courrier du 22 février 2017, dans laquelle il reprend l'ensemble des actes listés au titre du harcèlement moral.



Ces faits de harcèlement et de violence au travail n'ont pas été retenus par la cour et la faute de l'employeur pour manquement à l'obligation de sécurité a porté sur la prévention d'une situation de souffrance, lequel a rapidement mis en place un audit sur la qualité de vie et un document unique sur les risques professionnels, permettant une reprise des relations sur un mode plus apaisé. De sorte que n'établissant pas que la dégradation de sa santé et de ses conditions de travail seraient la conséquence de faits de harcèlement de l'employeur, la prise d'acte de la rupture du contrat de travail en date du 22 février 2017 produit les effets d'une démission.



Le jugement déféré qui a rejeté la demande de requalification sera confirmée.



Sur les demandes financières



La cour n'ayant pas retenu la requalification de la prise d'acte de M. [F] en licenciement nul, ses demandes financières liées à la rupture du contrat seront rejetées.



Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.









Sur les intérêts



Il n'y a pas lieu de déroger aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, en application desquelles les créances salariales produisent intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires produisent intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant.



Sur les dépens et les frais irrépétibles



L'association PLIE des Hauts de Garonne, partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel ainsi qu'au paiement à M. [F] de la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés.





PAR CES MOTIFS



La cour



Infirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [F] de sa demande au titre du paiement d'heures supplémentaires,



Condamne l'association PLIE des Hauts de Garonne à verser à M. [F] les sommes de :

- 147,16 euros au titre des heures supplémentaires non réglées sur l'année 2015,

- 14,71 euros au titre des congés payés y afférents,



Rappelle que les créances salariales portent intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le conseil de prud'hommes tandis que les créances indemnitaires portent intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant ;



Condamne l'association PLIE les Hauts de Garonne aux dépens ;



Condamne l'association PLIE les Hauts de Garonne à payer à M. [F] la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés.





Signé par Madame Catherine Rouaud-Folliard, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.



A.-Marie Lacour-Rivière Catherine Rouaud-Folliard

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