16 novembre 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-25.194

Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2023:C201127

Titres et sommaires

SECURITE SOCIALE, ASSURANCES SOCIALES - Maladie - Frais de transport - Remboursement - Absence d'urgence - Défaut d'accord préalable de la caisse - Exclusion - Cas - Transport de plus de 150 kilomètres effectué sur une prescription médicale établie a posteriori

Selon les articles R. 322-10-2 et R. 322-10-4 du code de la sécurité sociale, sauf le cas d'urgence, la prise en charge des frais de transport prévus à l'article R. 322-10 du même code et exposés par l'assuré pour recevoir des soins, subir des examens ou se soumettre à un contrôle, est subordonnée à la présentation par cet assuré de la prescription médicale établie préalablement à l'exécution de la prestation de transport, et, lorsque la distance à parcourir excède 150 kilomètres, à l'accord préalable de la caisse d'assurance maladie. Viole ainsi les textes susvisés le tribunal qui, en l'absence d'urgence attestée par le médecin prescripteur, et à défaut d'accord préalable de la caisse, valide la prise en charge d'un transport de plus de 150 kilomètres effectué sur une prescription médicale établie a posteriori

Texte de la décision

CIV. 2

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 16 novembre 2023




Cassation sans renvoi


Mme MARTINEL, président



Arrêt n° 1127 F-B

Pourvoi n° U 21-25.194





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 NOVEMBRE 2023

La caisse primaire d'assurance maladie du Cantal, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° U 21-25.194 contre le jugement rendu le 11 octobre 2021 par le tribunal judiciaire d'Aurillac (pôle social (section générale)), dans le litige l'opposant à M. [K] [Z], domicilié [Adresse 2], pour le compte de Mme [C] [Z], son épouse, défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Reveneau, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie du Cantal, et l'avis de Mme Tuffreau, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 3 octobre 2023 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Reveneau, conseiller rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Catherine, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire d'Aurillac, 11 octobre 2021), rendu en dernier ressort, et les productions, la caisse primaire d'assurance maladie du Cantal (la caisse) lui ayant refusé, par courrier du 19 novembre 2018, la prise en charge des frais de transport entre [Localité 3] et [Localité 4] exposés le 1er octobre 2018 pour conduire son épouse (l'ayant droit de l'assuré) vers une structure de soins, M. [Z] a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

Examen des moyens

Sur les moyens réunis

Enoncé des moyens

2. Par son premier moyen, la caisse fait grief au jugement de la condamner à prendre en charge le transport litigieux, alors :

« 1°/ que sauf le cas d'urgence, la prise en charge des frais de transport est subordonnée à la présentation par l'assuré de la prescription médicale établie préalablement à l'exécution de la prestation de transport ; qu'en ordonnant la prise en charge du transport litigieux (aller [Localité 3]-[Localité 4]), quand ils constataient que les époux n'avaient obtenu la prescription médicale pour l'aller-retour qu'une fois sur place à [Localité 4], ce dont il résultait que la prescription médicale n'avait pas été établie préalablement à l'exécution du transport aller litigieux, les juges du fond ont violé l'article R. 322-10-2 du code de la sécurité sociale ;

2°/ que l'urgence, pour justifier d'une prise en charge sur la base d'une prescription médicale de transport établie a posteriori, doit être attestée dans ladite prescription médicale de transport ; qu'en ordonnant la prise en charge du transport litigieux, sans constater que la prescription médicale de transport établie a posteriori attestait de l'urgence, les juges du fond ont encore violé l'article R. 322-10-2 du code de la sécurité sociale. »

3. Par son second moyen, la caisse fait le même grief au jugement, alors :

« 1°/ que sauf le cas d'urgence, la prise en charge des frais d'un transport excédant 150 kms est subordonnée au respect de la formalité de l'entente préalable ; qu'en ordonnant la prise en charge du transport litigieux dont ils constataient qu'il excédait 150 kms, sans rechercher, comme ils y étaient pourtant invités, si la formalité de l'entente préalable avait été respectée, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article R. 322-10-4 du code de la sécurité sociale ;

2°/ que l'urgence, pour justifier d'une prise en charge sans que la formalité de l'entente préalable ait été respectée quand elle aurait dû l'être, doit être attestée dans la prescription médicale de transport ; qu'en ordonnant la prise en charge du transport litigieux, sans constater que la prescription médicale de ce transport excédant 150 kms attestait de l'urgence, les juges du fond ont encore violé l'article R. 322-10-4 du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

Vu les articles R. 322-10, R. 322-10-2 et R. 322-10-4 du code de la sécurité sociale :

4. Selon le deuxième de ces textes, sauf le cas d'urgence, la prise en charge des frais de transport prévus au premier est subordonnée à la présentation par l'assuré de la prescription médicale établie préalablement à l'exécution de la prestation de transport.

5. Il résulte du troisième de ces textes que, sauf prescription médicale attestant de l'urgence, la prise en charge des frais de transport exposés sur une distance excédant 150 kilomètres est subordonnée à l'accord préalable de l'organisme social.

6. Pour dire que la caisse doit prendre en charge les frais de transport litigieux, le jugement relève que ce transport, de plus de 150 kilomètres, a été réalisé le 1er octobre 2018 avec une prescription médicale du 2 octobre 2018. Il retient que si la caisse fait valoir que rien ne fait état d'une urgence permettant de justifier que la prescription soit établie a posteriori, il ressort du dossier que l'ayant droit de l'assuré bénéficiait de soins à [Localité 4] dans le cadre d'une affection de longue durée, et qu'immédiatement après avoir pris un rendez-vous téléphonique, le couple s'est rendu à [Localité 4] le 1er octobre 2018, où leur a été délivrée la prescription aller-retour.

7. En statuant ainsi, alors qu'en l'absence d'urgence attestée par le médecin prescripteur, d'une part, la prescription médicale établie a posteriori n'était pas de nature à justifier la prise en charge, et d'autre part, le transport litigieux, effectué en un lieu distant de plus de 150 kilomètres, ne pouvait être pris en charge à défaut du respect de la formalité de l'entente préalable, le tribunal a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

8. Conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, avis a été donné aux parties qu'il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

9. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie que la Cour de cassation statue au fond.

10. Il résulte de ce qui est dit aux points 4, 5 et 7 que la demande tendant à la prise en charge du transport litigieux doit être rejetée.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 11 octobre 2021, entre les parties, par le tribunal judiciaire d'Aurillac ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

REJETTE la demande de M. [Z] tendant à la prise en charge des frais de transport exposés le 1er octobre 2018 ;

Condamne M. [Z] aux dépens, en ce compris ceux exposés devant le tribunal judiciaire d'Aurillac ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre deux mille vingt-trois.

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