9 novembre 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-21.314

Troisième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2023:C300734

Texte de la décision

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 9 novembre 2023




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 734 F-D

Pourvoi n° X 22-21.314








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 NOVEMBRE 2023

Mme [D] [Z], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° X 22-21.314 contre l'arrêt rendu le 2 juin 2022 par la cour d'appel de Douai (1re chambre, 1re section), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [R] [W],

2°/ à Mme [I] [G],

tous deux domiciliés [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Rat, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme [Z], de la SCP Poupet & Kacenelenbogen, avocat de M. [W] et de Mme [G], après débats en l'audience publique du 26 septembre 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Rat, conseiller référendaire rapporteur, M. Delbano, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 2 juin 2022), et les productions, M. [W] et Mme [G] (les vendeurs) ont vendu à Mme [Z] (l'acquéreur) une maison d'habitation.

2. Se plaignant de l'affaissement d'une section de la toiture et de difficultés d'évacuation des sanitaires, l'acquéreur a assigné les vendeurs en paiement de dommages-intérêts sur le fondement de la garantie des vices cachés et, subsidiairement, sur celui du dol.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. L'acquéreur fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en paiement du coût des travaux de remise en état de la toiture, sur le fondement des vices cachés, alors :

« 1°/ que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; qu'en l'espèce, Mme [Z] avait produit aux débats l'avis d'un professionnel, qui avait constaté l'existence d'un flambage significatif de la charpente, une pente insuffisante avec la réalisation d'un ouvrage « peu professionnel », ainsi que l'inadaptation de la tuile utilisée ; qu'en énonçant néanmoins, que l'auteur de cet avis « se prononce de manière prudente et n'évoque que des désordres éventuels à plus ou moins long terme, avec la possibilité de survenance de fuites sur le velux ou sous les tuiles et un risque d'aggravation de l'affaissement de la toiture », la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis d'une pièce régulièrement versée aux débats et a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2°/ que constitue un vice caché un défaut affectant la structure de l'immeuble rendant le bien impropre à sa destination ; qu'en jugeant néanmoins que « la preuve n'est pas suffisamment rapportée de l'existence d'un vice de la toiture présentant les caractères de gravité visés à l'article 1641 du code civil », cependant qu'elle avait constaté l'existence d'un vice affectant la structure de l'immeuble, soit un élément nécessairement déterminant du consentement de l'acquéreur, et connu des vendeurs avant la vente, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1641 du code civil. »

Réponse de la Cour

4. C'est par une interprétation souveraine du courriel de la société Activ'Toit, rendue nécessaire par l'ambiguïté de ses termes et exempte de dénaturation, que la cour d'appel a retenu que son auteur n'avait donné qu'un avis succinct dans lequel il se prononçait de manière prudente et n'évoquait que des désordres éventuels à plus ou moins long terme, avec la possibilité de survenance de fuites sur la fenêtre de toit ou sous les tuiles et un risque d'aggravation de l'affaissement de la toiture.

5. Ayant retenu que l'avis du menuisier professionnel sollicité de manière non contradictoire par l'acquéreur s'analysait en une expertise non judiciaire et rappelé, à bon droit, que le juge ne pouvait en tenir compte qu'à la condition qu'elle soit corroborée par d'autres éléments de preuve, elle a, par une appréciation souveraine des preuves qui lui étaient soumises, relevé que les autres éléments versés aux débats, s'ils permettaient d'attester de la réalité du fléchissement de la toiture, ne suffisaient pas à caractériser un vice de nature à porter atteinte à l'usage attendu de la chose, et ainsi en déduire que la preuve d'un vice présentant le caractère de gravité visé à l'article 1641 du code civil n'était pas rapportée.

6. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

7. L'acquéreur fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes subsidiaires en paiement de dommages et intérêts, sur le fondement du dol, alors :

« 1°/ que le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des manoeuvres ou des mensonges ; que constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie ; qu'en énonçant, pour débouter l'exposante de sa demande en réparation des défauts de la toiture formée sur le fondement du dol, que « la gravité du vice n'est pas établie », cependant que la gravité des désordres dissimulés est sans incidence pour qualifier le dol, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1137 du code civil, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

2°/ qu'en jugeant qu'il n'était pas démontré que les vendeurs avaient eu conscience de la gravité des désordres allégués et du caractère potentiellement déterminant du consentement de leur acquéreur, cependant qu'elle avait constaté l'existence d'un vice affectant la structure de l'immeuble, soit un élément nécessairement déterminant du consentement de l'acquéreur, et la connaissance par les vendeurs de l'existence de ce vice avant la vente, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1137 du code civil, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

3°/ qu'en énonçant « que plusieurs visites de l'immeuble ont été organisées avant la vente, dont une précisément pour vérifier l'état du toit, et que les clefs du logement ont été confiées à Mme [Z] quatre jours avant la vente, de sorte que les vendeurs ne peuvent avoir cherché intentionnellement à dissimuler l'état de la toiture », cependant qu'il résultait de ses propres constatations que les désordres n'étaient pas visibles du jardin de la maison, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1137 du code civil. »

Réponse de la Cour

8. Après avoir rappelé que le dol n'était constitué que par la dissimulation intentionnelle, par l'un des contractants, d'une information dont il savait le caractère déterminant pour l'autre partie, la cour d'appel a constaté que plusieurs visites de l'immeuble avaient été organisées avant la vente, dont une pour vérifier l'état du toit, puis que les clefs du logement avaient été confiées à l'acquéreur quatre jours avant la vente.

9. Elle a pu déduire, de ces seuls motifs, que les vendeurs n'ayant pas cherché intentionnellement à dissimuler l'état de la toiture, le dol n'était pas constitué et a, ainsi, légalement justifié sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme [Z] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille vingt-trois.

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