25 octobre 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-21.405

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2023:SO01087

Texte de la décision

SOC.

CZ



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 25 octobre 2023




Cassation


M. FLORES, conseiller le plus ancien
faisant fonction de président



Arrêt n° 1087 F-D

Pourvoi n° W 22-21.405



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 OCTOBRE 2023

Mme [C] [U], domiciliée [Adresse 1], [Localité 3], a formé le pourvoi n° W 22-21.405 contre l'arrêt rendu le 15 juillet 2022 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4 - 6), dans le litige l'opposant à l'Opéra de Toulon, établissement public de coopération culturelle, dont le siège est [Adresse 4], [Localité 2], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Thomas-Davost, conseiller référendaire, les observations de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [U], de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de l'Opéra de Toulon, après débats en l'audience publique du 27 septembre 2023 où étaient présents M. Flores, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Thomas-Davost, conseiller référendaire rapporteur, Mme Techer, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée en application des articles R. 431-7 et L. 431-3, alinéa 2,du code de l'organisation judiciaire, des présidents et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 juillet 2022), Mme [U] a été engagée en qualité de pianiste répétitrice des choeurs chef de chants, le 7 juin 1993, par l'Opéra de Toulon.

2. Elle a saisi la juridiction prud'homale, le 7 juillet 2017, afin d'obtenir la condamnation de son employeur à lui payer un rappel de salaire.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes en paiement de rappels de salaire différentiel salaire de base/minimum conventionnel, de prime d'ancienneté en plus du salaire de base, calculée sur le salaire minimum conventionnel, et d'indemnité de congé payé afférent, d'une somme au titre des intérêts légaux ainsi que d'une somme au titre des préjudices subis du fait de la résistance abusive, alors « qu'en l'absence de dispositions particulières, la prime d'ancienneté liée à la présence du salarié dans l'entreprise n'a pas à être prise en compte pour le calcul du salaire minimum prévu par la convention collective ; qu'en retenant que la salariée ne peut fonder sa demande en rappel de salaire en considération de son seul salaire brut et que le contrôle du respect par l'employeur des minima conventionnels doit prendre en compte, outre le salaire de base perçu, la prime d'ancienneté dans la mesure où la convention collective applicable, le contrat de travail de la salariée et l'accord d'entreprise des artistes musiciens permanents de l'Opéra de Toulon-Provence Méditerranée du 1er juillet 2009 n'excluaient pas la prime d'ancienneté de l'assiette de calcul des minima conventionnels, la cour d'appel a violé les articles X-3 et X-3.3.A de la convention collective nationale des entreprises artistiques et culturelles, ensemble l'article 1134 du code civil, devenu l'article 1103 du même code. »

Réponse de la Cour

Vu les articles X.3, dans ses rédactions antérieure et postérieure à l'avenant du 6 novembre 2017 et X.3.3.A de la convention collective nationale pour les entreprises artistiques et culturelles du 1er janvier 1984 :

4. Selon le premier de ces textes, à chaque emploi correspond un salaire brut minimum, au-dessous duquel aucun salarié ne peut être rémunéré. Le montant de ces salaires minima figure à l'annexe Salaires de la convention. La revalorisation de ces salaires est négociée chaque année lors de la négociation annuelle obligatoire.

5. Selon le second de ces textes, les artistes musiciens appartenant aux ensembles musicaux à nomenclature qui perçoivent une rémunération mensualisée, qu'ils soient titulaires de contrat de travail à durée indéterminée ou de contrat de travail à durée déterminée d'une durée supérieure à un mois, perçoivent une rémunération mensuelle brute d'un montant au moins égal à celui figurant à l'annexe Salaires de la convention, montant revalorisé lors de la négociation annuelle obligatoire (en distinguant les catégories suivantes : tuttiste, soliste, chef de pupitre).

6. Il en résulte qu'en l'absence de dispositions contraires mentionnées par la convention collective, seules les sommes perçues en contrepartie du travail doivent être prises en compte dans le calcul de la rémunération à comparer avec le salaire minimum.

7. Pour débouter la salariée de sa demande en paiement d'un rappel de salaire, l'arrêt retient qu'il est de principe que la prime d'ancienneté constitue un élément de rémunération permanent devant être pris en compte dans le calcul des minima conventionnels. Il constate que la convention collective n'exclut pas la prime d'ancienneté de l'assiette de calcul des minima conventionnels. Il ajoute que si le contrat de travail de la salariée prévoit qu'elle percevra un salaire de base et, le cas échéant, la prime d'ancienneté en vigueur dans l'entreprise, il ne ressort pas de ses stipulations que les parties ont entendu exclure la prime d'ancienneté de l'assiette servant de base de calcul pour veiller au respect des minima conventionnels. Il retient que l'accord d'entreprise des artistes musiciens permanents de l'Opéra de [Localité 2]-Provence-méditerranée du 1er juillet 2009 ne prévoit pas une telle exclusion.

8. Il en conclut que la salariée ne peut fonder sa demande en rappel de salaire en considération de son seul salaire brut et que le contrôle du respect par l'employeur des minima conventionnels devra prendre en compte, outre le salaire de base perçu par la salariée, la prime d'ancienneté payée par l'employeur.

9. En statuant ainsi, alors que la prime d'ancienneté n'est pas perçue en contrepartie du travail, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 juillet 2022, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;

Condamne l'Opéra de [Localité 2] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'Opéra de [Localité 2] et le condamne à payer à Mme [U] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq octobre deux mille vingt-trois.

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