11 octobre 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-12.361

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2023:CO00655

Texte de la décision

COMM.

CH.B



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 11 octobre 2023




Cassation partielle


M. VIGNEAU, président



Arrêt n° 655 F-D

Pourvoi n° R 22-12.361




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 11 OCTOBRE 2023

M. [I] [S], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° R 22-12.361 contre l'arrêt rendu le 4 janvier 2022 par la cour d'appel de Montpellier (chambre commerciale), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société AXS Medical, société par actions simplifiée,

2°/ à la société Diagnostic Medical Systems, société anonyme,

ayant toutes deux leur siège [Adresse 2],

défenderesses à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Ponsot, conseiller, les observations de la SARL Delvolvé et Trichet, avocat de M. [S], de la SCP Alain Bénabent, avocat des sociétés AXS Medical et Diagnostic Medical Systems, après débats en l'audience publique du 29 août 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Ponsot, conseiller rapporteur, M. Mollard, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 4 janvier 2022), le 6 juillet 2015, la société Diagnostic Medical Systems (la société DMS) a acquis la totalité des actions de la société par actions simplifiée AXS Medical, dont M. [S] était le fondateur et le dirigeant.

2. L'acte de cession prévoyait le maintien en fonction de M. [S] et mettait, en cas de révocation, à la charge de la société une indemnité de rupture correspondant à neuf mois de rémunération, sauf en cas de faute grave ou lourde.

3. Le 14 mars 2016, par décision de l'associé unique, la société DMS, M. [S] a été révoqué de ses fonctions pour faute lourde.

4. Soutenant que cette révocation était abusive et vexatoire, il a assigné les sociétés DMS et AXS Medical afin d'obtenir des dommages et intérêts pour rupture abusive ainsi que le paiement de l'indemnité de rupture prévue contractuellement.

Examen des moyens

Sur le second moyen


5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Mais sur le premier moyen, pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

6. M. [S] fait grief à l'arrêt de rejeter intégralement sa demande de condamnation des sociétés AXS Medical et DMS à des dommages et intérêts pour révocation abusive, alors « que la révocation d'un dirigeant social est abusive, et engage à ce titre la responsabilité contractuelle de la société et la responsabilité délictuelle des associés ou organes de la société habilités à y procéder, lorsqu'elle a été décidée brutalement, sans respecter l'obligation de loyauté et le principe du contradictoire qui en relève dans l'exercice du droit de révocation, même en présence d'une faute lourde du dirigeant ; qu'en se fondant néanmoins sur l'existence d'une faute lourde de M. [S], pour écarter tout abus de droit des sociétés AXS Medical et DMS lié au non-respect du principe du contradictoire dans l'exercice du droit de révocation de M. [S], la cour d'appel s'est déterminée par un motif impropre à justifier la privation du droit du dirigeant de se faire entendre par la société et ses associés ou organes compétents avant qu'ils ne se prononcent sur sa révocation, violant ainsi l'[...] ancien article 1382 du code civil, [...] applicable tant à la responsabilité de la société AXS Medical qu'à celle de la société DMS, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable en la cause. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1382, devenu 1240, du code civil :

7. Il résulte de ce texte qu'est abusive la révocation, fût-ce pour faute lourde, du président d'une société par actions simplifiée décidée sans que celui-ci ait été préalablement mis en mesure de présenter ses observations.

8. Pour décider que la révocation de M. [S] a pu intervenir immédiatement sans entretien préalable de nature à permettre à l'intéressé, à l'issue d'un débat contradictoire, de connaître les motifs de la décision prise par l'associé unique et rejeter, en conséquence, ses demandes indemnitaires, l'arrêt énonce que le projet élaboré par M. [S], de concert avec le directeur général de la société, visant à s'approprier les données essentielles au développement des produits de la société AXS Medical, n'a été découvert que le 9 mars 2016 et laissait craindre à la société DMS une déperdition rapide de ces données essentielles, caractérisant une réelle intention de nuire et donc une faute lourde de sa part.

9. En se déterminant par de tels motifs, sans constater que, à défaut d'entretien préalable, M. [S] avait été informé de la révocation envisagée et mis en mesure de présenter ses observations préalablement à la décision prise, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement, il déboute intégralement M. [S] de sa demande de condamnation des sociétés AXS Medical et DMS à des dommages et intérêts pour révocation abusive, l'arrêt rendu le 4 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;

Condamne les sociétés AXS Medical et Diagnostic Medical Systems aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par les sociétés AXS Medical et Diagnostic Medical Systems et les condamne à payer à M. [S] la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze octobre deux mille vingt-trois.

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