27 septembre 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 23-80.314

Chambre criminelle - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2023:CR00985

Titres et sommaires

DOUANES - agent des douanes - pouvoirs - droit de visite des marchandises, des moyens de transport et des personnes - article 60 du code des douanes - mesures autorisées - limites - article 6 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales - présence de l'occupant du véhicule - nécessité

Il résulte des articles 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 60 du code des douanes que, si les agents des douanes sont compétents pour procéder à la visite d'un véhicule stationné sur la voie publique ou dans un lieu accessible au public, ils sont tenus de procéder à cette visite en présence de son occupant à défaut de garantie posée par la loi visant à s'assurer de l'authentification des recherches et découvertes effectuées. La méconnaissance de cette exigence, susceptible d'avoir entraîné une atteinte à la protection de l'authentification des recherches et découvertes effectuées lors d'une fouille, n'est pas exclue du champ d'application de l'article 802 du code de procédure pénale

Texte de la décision

N° Y 23-80.314 FS-B

N° 00985


RB5
27 SEPTEMBRE 2023


REJET


M. BONNAL président,






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 27 SEPTEMBRE 2023


M. [L] [G] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, en date du 25 octobre 2022, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 23 février 2022, pourvoi n° 21-85.050), dans l'information suivie contre lui des chefs d'association de malfaiteurs, blanchiment et complicité d'infraction à la législation sur les armes, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure.

Par ordonnance du 20 mars 2023, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi.

Un mémoire personnel a été produit.

Sur le rapport de M. Gillis, conseiller référendaire, et les conclusions de Mme Mathieu, avocat général, après débats en l'audience publique du 28 juin 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Gillis, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, M. Wyon, Mme Piazza, MM. Pauthe, Turcey, de Lamy, conseillers de la chambre, M. Ascensi, Mmes Fouquet, Chafaï, conseillers référendaires, Mme Mathieu, avocat général, et Mme Boudalia, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Dans le cadre d'une mission de contrôle, des douaniers ont découvert sur une aire d'autoroute un véhicule Renault Clio vide de tout occupant dans lequel étaient visibles des billets de banque enveloppés dans du papier cellophane, ainsi qu'une housse noire de forme allongée, fermée. Leurs chiens dressés à la recherche de stupéfiants ayant de plus marqué ce véhicule, ils ont procédé à sa fouille, après le bris de l'une de ses vitres, et découvert 3 000 euros en espèces, trois grammes de résine de cannabis et un sac contenant de nombreuses armes.

3. Les investigations ont conduit à la mise en examen de M. [L] [G], propriétaire du véhicule fouillé, des chefs susmentionnés. Il a été placé en détention provisoire.

4. Par requête reçue au greffe le 31 octobre 2022, il a sollicité l'annulation de la fouille du véhicule et de l'ensemble des actes subséquents, outre sa remise en liberté.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. Le moyen est pris de la violation des articles 171 et 802 du code de procédure pénale et 60 du code des douanes.

6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la requête de M. [G] tendant à voir prononcer la nullité de la fouille du véhicule Renault Clio, à dire et juger que ladite fouille constitue le support de l'intégralité de la procédure, à prononcer subséquemment l'annulation de l'intégralité de la procédure et à ordonner sa remise en liberté, alors que l'irrégularité de cette fouille, qui résulte de ce que les agents des douanes ne peuvent, sur le fondement de l'article 60 du code des douanes, fouiller un véhicule stationné sur la voie publique ou dans un lieu accessible au public libre de tout occupant, et de ce que cette fouille a été réalisée en l'absence de tout témoin, constitue une nullité d'ordre public ne nécessitant pas qu'il soit fait la démonstration d'un grief.

Réponse de la Cour

7. Pour rejeter la demande d'annulation de la fouille du véhicule et, subséquemment, de l'ensemble de la procédure, l'arrêt attaqué énonce que, cette fouille ayant été réalisée par les agents des douanes, alors que le véhicule était stationné et libre de tout occupant, hors la présence de toute personne susceptible d'authentifier les recherches et découvertes effectuées, elle est entachée d'irrégularité.

8. Les juges ajoutent que, toutefois, les agents des douanes ayant compétence pour procéder à une fouille et l'irrégularité relative aux conditions dans lesquelles ils y ont procédé n'étant pas d'ordre public, il n'y a lieu de prononcer la nullité de la procédure que s'il est résulté de cette irrégularité une atteinte aux intérêts de M. [G].

9. Or, ils relèvent que M. [G] n'a pas contesté la présence dans son véhicule des objets découverts et qu'il ne démontre pas que l'irrégularité de la visite lui a causé un grief particulier.

10. En statuant ainsi, la chambre de l'instruction n'a méconnu aucun des textes visés au moyen pour les motifs qui suivent.

11. D'une part, il résulte des articles 171 et 802 du code de procédure pénale que, hors les cas de nullité d'ordre public, l'inobservation des formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité doit entraîner la nullité de la procédure lorsqu'il en est résulté une atteinte aux intérêts de la partie concernée.

12. D'autre part, il résulte des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et 60 du code des douanes que, si les agents des douanes sont compétents pour procéder à la visite d'un véhicule stationné sur la voie publique ou dans un lieu accessible au public, ils sont tenus de procéder à cette visite en présence de son occupant à défaut de garantie posée par la loi visant à s'assurer de l'authentification des recherches et découvertes effectuées. La méconnaissance de cette exigence, susceptible d'avoir entraîné une atteinte à la protection de l'authentification des recherches et découvertes effectuées lors d'une fouille, n'est pas exclue du champ d'application de l'article 802 du code de procédure pénale.

13. Dès lors, le moyen doit être écarté.

14. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille vingt-trois.

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