20 septembre 2023
Cour d'appel de Colmar
RG n° 21/02552

Chambre 1 A

Texte de la décision

MINUTE N° 406/23

























Copie exécutoire à



- Me Guillaume HARTER



- Me Christine LAISSUE STRAVOPODIS





Le 20.09.2023



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A



ARRET DU 20 Septembre 2023



Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 21/02552 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HS5B



Décision déférée à la Cour : 29 Mars 2021 par le Tribunal judiciaire de MULHOUSE - Chambre commerciale



APPELANTE - INTIMEE INCIDEMMENT :



S.A.S. KEY FEATURE prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 2]



Représentée par Me Guillaume HARTER, avocat à la Cour

Avocat plaidant : Me METAYER-MATHIEU, avocat au barreau de PARIS



INTIMES - APPELANTS INCIDEMMENT :



Monsieur [F] [K]

[Adresse 4]



S.A.R.L. HAENGGI ET ASSOCIES prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 3]



Représentés par Me Christine LAISSUE-STRAVOPODIS, avocat à la Cour

Avocat plaidant : Me GOZLAN, avocat au barreau de PARIS



INTIME :



Maître [L] [X] liquidateur de la Société en commandite par actions HOTELIERE CAPI PARIS PTR

[Adresse 1]



non représenté, assigné par voie d'huissier à personne habilitée le 13.08.2021



COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions de l'article 805 modifié du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Mai 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme PANETTA, Présidente de chambre, et Mme ROBERT-NICOUD, Conseillère, un rapport de l'affaire ayant été présenté à l'audience.



Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme PANETTA, Présidente de chambre

M. ROUBLOT, Conseiller

Mme ROBERT-NICOUD, Conseillère

qui en ont délibéré.



Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE



ARRET :

- réputé contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par M. Philippe ROUBLOT, Conseiller, en l'absence de la Présidente de chambre légitimement empêchée, et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.



Vu les assignations délivrées les 1er et 6 juin 2018, par lesquelles la SAS Key Feature, prise en la personne de son représentant légal, M. [W] [P], a fait assigner M. [F] [K], la SARL Haenggi et associés, ci-après également dénommée 'la société Haenggi', et Maître [L] [X], en sa qualité de mandataire liquidateur de la société en commandite par actions société Hôtelière Capi Paris PTR, ci-après également 'la société Hôtelière' ou 'la SCA', devant la chambre commerciale du tribunal de grande instance, devenu le 1er janvier 2020, par application de l'article 95 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 et de ses décrets d'application n° 2019-965 et 2019-966 du 18 septembre 2019, le tribunal judiciaire de Mulhouse,



Vu le jugement rendu le 29 mars 2021, auquel il sera renvoyé pour le surplus de l'exposé des faits, ainsi que des prétentions et moyens des parties en première instance, et par lequel le tribunal judiciaire de Mulhouse a statué comme suit :



'REJETTE les fins de non-recevoir soulevées par la SARL Haenggi et monsieur [K], tirées du défaut de qualité et du défaut d'intérêt à agir de la SAS Key Feature ;

DECLARE recevable l'action de la SAS Key Feature dirigée contre monsieur [F] [K] ;

DEBOUTE la SAS Key Feature de l'ensemble de ses demandes ;

DIT n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SAS Key Feature aux entiers dépens ;

DIT n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire.'



Vu la déclaration d'appel formée par la SAS Key Feature contre ce jugement et déposée le 20 mai 2021,



Vu la constitution d'intimés de M. [F] [K] et de la SARL Haenggi et Associés, en date du 28 juin 2021,



Vu l'assignation délivrée le 13 août 2021 à Me [L] [X], ès qualités,



Vu les dernières conclusions en date du 13 mars 2023, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, et par lesquelles la SAS Key Feature demande à la cour de :



'- CONFIRMER le jugement en ce qu'il a :



o rejeté les fins de non-recevoir soulevées par la SARL Haenggi et M. [K], tirées du défaut de qualité à agir de la SA Key Featye,

o déclaré recevable l'action de la SAS Key Fetaure dirigée contre M. [K] ;



- REFORMER le jugement en ce qu'il a :



o débouté Key Feature de l'ensemble de ses demandes tendant à l'annulation de l'opération ou l'octroi de dommages et intérêts ;

o condamné Key Feature aux entiers dépens.



Statuant à nouveau :



A titre principal :



- JUGER que Key Feature a été démarchée ;



- JUGER que les règles régissant le démarchage bancaire et financier ont été violées ;

- JUGER sinon que Key Feature a été victime d'un dol ou à tout le moins d'une erreur lors de la souscription au capital et de l'avance en compte courant souscrite par Key Feature au profit de Hôtelière Capi Paris PtR ;



- PRONONCER en conséquence soit sur le fondement du démarchage illicite, soit pour dol, ou pour erreur, la nullité de la souscription au capital et de l'avance en compte courant souscrite par Key Feature au profit de Hôtelière Capi Paris PtR, sous la stricte condition que M. [K] et la SARL Haenggi soient tenus solidairement aux restitutions ;



- ORDONNER dès lors la restitution des sommes versées par Key Feature soit 500.000 euros, déduction faite des sommes de 160.000 euros et 100.487 euros déjà remboursées, soit un montant total à restituer par Hôtelière Capi Paris PtR de 239.513 euros ;



- CONDAMNER in solidum M. [K] et la SARL Haenggi au paiement en deniers et quittance de la somme en principal de 239.513 euros avec intérêts légaux que devra restituer Hôtelière Capi Paris PtR au profit de Key Feature, outre 110.000 euros de dommages-intérêts ;



- en l'absence de solidarité stipulée entre Hôtelière Capi Paris PtR et les défendeurs, CONDAMNER uniquement M. [K] et la SARL Haenggi au paiement de la somme de (239.513 + 110.000=) 349.513 euros à titre de dommages-intérêts ;



A titre subsidiaire :



- JUGER que M. [K] et la SARL Haenggi ont agi en qualité de CIF;



- JUGER que M. [K] et la SARL Haenggi ont manqué à leur obligation d'information, de mise en garde et ont délivré une information inexacte ;



En conséquence,



- CONDAMNER in solidum M. [K] et la SARL Haenggi à payer à Key Feature la somme de 260.561 euros au titre de la perte de chance d'effectuer un autre investissement ;



- CONDAMNER in solidum M. [K] et la SARL Haenggi à payer à Key Feature la somme de 57.000 euros au titre du défaut de rentabilité garantie ;



En tout état de cause,



- DEBOUTER M. [K] et la SARL Haenggi de toutes leurs demandes ;



- CONDAMNER in solidum M. [K] et la SARL Haenggi à payer à Key Feature la somme de 27.222 euros au titre du défaut de remploi des sommes investies ;



- CONDAMNER in solidum M. [K] et la SARL Haenggi à Key Feature la somme de 20.000 euros au titre de son préjudice moral ;



- CONDAMNER in solidum M. [K] et la SARL Haenggi à verser à Key Feature la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;



- CONDAMNER in solidum M. [K] et la SARL Haenggi aux entiers dépens de 1ère instance et d'appel'



et ce, en invoquant, notamment :



- sa recevabilité à agir à l'encontre de M. [K], en raison des fautes commises dans ses fonctions de conseil en gestion de patrimoine ou de conseiller en investissements financiers, et subsidiairement comme ayant commis une infraction pénale détachable de ses fonctions de dirigeant,



- la nullité de l'opération d'investissement, à titre principal, en raison d'un démarchage illicite, et à titre subsidiaire, pour erreur provoquée (dol),



- subsidiairement, le manquement des parties intimées, aux obligations, notamment d'information et de mise en garde, incombant aux conseillers en investissement financier (CIF), statut dont ils relevaient, et que la concluante détaille, reprochant aux intimés la délivrance d'informations inexactes, en réfutant toute connaissance de la réalité de la situation du groupe [N] et tout caractère d'investisseur averti de M. [P], président de la société concluante, ces manquements étant constitutifs d'une faute,




- un préjudice en lien avec les manquements et l'acte illicite de démarchage invoqués, ayant privé la concluante de la possibilité d'effectuer ses arbitrages d'investissement en connaissance de cause et d'éviter la réalisation de l'opération litigieuse.



Vu les dernières conclusions en date du 21 février 2023, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, et par lesquelles M. [F] [K] et la SARL Haenggi et Associés demandent à la cour de :



'Vu les articles 31 et 122 du Code de procédure civile,



Rejeter l'appel principal,



Recevoir l'appel incident,



Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré recevable l'action de KEY FEATURE contre Monsieur [K],



Statuant à nouveau,



Débouter en conséquence KEY FEATURE de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions à l'encontre de Monsieur [K],



Vu l'article L.341-1 du Code monétaire et financier,

Vu l'article 1116 (ancien) du Code civil,



Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté KEY FEATURE de ses demandes fondées sur le démarchage illicite, le dol et l'erreur,



Débouter KEY FEATURE de l'ensemble de ses demandes fondées sur le démarchage illicite, le dol et l'erreur,



Vu les articles 1134 et 1147 anciens du Code civil,

Vu l'article L. 541-8-1 du Code monétaire et financier,

Vu les articles 325-3 du RGAMF applicable à l'époque des faits,



Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que HAENGGI et Monsieur [K] n'ont commis aucune faute en lien de causalité avec les préjudices allégués par KEY FEATURE,





Débouter KEY FEATURE de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions à l'encontre

[M] et de Monsieur [K],



Vu l'article 700 du Code de procédure civile,



Condamner KEY FEATURE à verser à HAENGGI et à Monsieur [K] la somme de 10.000 euros chacun au titre des frais irrépétibles, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel'



et ce, en invoquant, notamment :



- l'irrecevabilité de l'action adverse dirigée contre M. [K], pour défaut de qualité à agir, en l'absence de faute détachable des fonctions du dirigeant,



- l'absence de comportement fautif des concluants, à défaut de démarchage effectif ou de vice du consentement, ainsi que de manquement de la société concluante à d'éventuelles obligations de conseil et de mise en garde, ou de s'enquérir des besoins de l'investisseur,



- l'absence de préjudice indemnisable et de lien de causalité entre les prétendues fautes commises par la société concluante et les préjudices allégués.



Vu l'ordonnance de clôture en date du 12 avril 2023,



Vu les débats à l'audience du 17 mai 2023,



Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé, en application de l'article 455 du code de procédure civile, pour l'exposé de leurs moyens et prétentions.






MOTIFS :





La cour rappelle, au préalable, que :



- aux termes de l'article 954, alinéa 3, du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion,



- ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile les demandes des parties tendant à 'dire et juger' ou 'constater', en ce que, hors les cas prévus par la loi, elles ne sont pas susceptibles d'emporter de conséquences juridiques, mais constituent en réalité des moyens ou arguments, de sorte que la cour n'y répondra qu'à la condition qu'ils viennent au soutien de la prétention formulée dans le dispositif des conclusions et, en tout état de cause, pas dans son dispositif mais dans ses motifs, sauf à statuer sur les demandes des parties tendant à 'dire et juger' lorsqu'elles constituent un élément substantiel et de fond susceptible de constituer une prétention (2ème Civ., 13 avril 2023, pourvoi n° 21-21.463).



En outre, en application de l'article 954, précité, en son dernier alinéa, la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.







Sur la recevabilité de l'action de la société Key Feature dirigée contre M. [F] [K] :



La cour rappelle qu'aux termes de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.



En application de l'article 31 du même code, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.



En outre, en vertu de l'article L. 223-22 du code de commerce, les gérants sont responsables, individuellement ou solidairement, selon le cas, envers la société ou envers les tiers, soit des infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux sociétés à responsabilité limitée, soit des violations des statuts, soit des fautes commises dans leur gestion.



Et l'article L. 341-17 du code monétaire et financier, dans sa version applicable à la cause, dispose que : 'Tout manquement aux lois, règlements et obligations professionnelles applicables au démarchage bancaire ou financier commis par les personnes mentionnées aux 1°, 3° et 5° de l'article L. 341-3 et à l'article L. 341-4 est sanctionné dans les conditions prévues, selon leur nature ou leurs activités, aux articles L. 612-39, L. 621-15 et L. 621-17'.



En l'espèce, les parties intimées soutiennent que la société Key Feature ne démontrerait pas que M. [K], dont elle entendrait voir engager la responsabilité en tant que un dirigeant tiers au contrat la liant à la société Haenggi, aurait commis une faute détachable de ses fonctions qui lui soit imputable personnellement, soit une 'faute intentionnelle d'une particulière gravité, incompatible avec l'exercice normal des fonctions sociales', l'appelante affirmant, au contraire, selon elles, qu'il aurait engagé sa responsabilité personnelle 'en raison des fautes commises dans ses fonctions', outre qu'il ressortirait de l'ensemble de la documentation précontractuelle ou contractuelle qu'il aurait bien agi en cette qualité, à l'exclusion de toute intervention personnelle de l'intéressé ; ce à quoi la partie appelante entend objecter que M. [K], qui aurait personnellement conseillé l'opération litigieuse à M. [P], serait susceptible d'engager sa responsabilité personnelle en raison des fautes commises dans ses fonctions de conseil en gestion de patrimoine ou de conseiller en investissements financiers (CIF), soumis au respect de règles de bonne conduite et à la souscription d'une assurance, sans préjudice de la responsabilité de sa société, outre qu'il aurait, à titre subsidiaire, commis une faute pénale intentionnelle, en l'espèce un démarchage bancaire et financier prohibé par l'article L. 341-17 du code monétaire et financier, par essence détachable des fonctions du gérant.



Sur ce, la cour observe que si, comme il a été rappelé, la partie appelante soutient que M. [K] serait intervenu à titre personnel, il n'est pas démontré que cette intervention aurait été indépendante du cadre de la société Haenggi et Associés, mentionnée en en-tête ou par apposition de son timbre humide, accompagnant la mention de M. [K] comme conseiller, des documents pré-contractuels ou du bulletin de souscription, et donc que M. [K] serait intervenu en son nom propre et non en celui de la société précitée.



Pour autant, c'est à bon droit que le premier juge a fait observer que 'la société Key Feature agit à l'encontre de monsieur [K] à raison de la violation des dispositions du code monétaire et financier, laquelle violation est constitutive d'une infraction réprimée par les dispositions de l'article L 341-17 du même code'.



En ce sens, les demandes de la société Key Feature dirigées contre M. [K] seront donc déclarées recevables, mais seulement en ce qu'elles sont fondées sur l'existence d'un manquement aux règles du démarchage financier, ce qui emporte, sous cette réserve, confirmation de la décision entreprise, cela impliquait, notamment, l'irrecevabilité de ces demandes en ce qu'elles sont fondées sur les conséquences de la nullité pour dol ou d'un manquement à l'obligation de mise en garde, fondements indépendants des règles spécifiques régissant le démarchage et qui résultent, en particulier, de l'application des articles L. 341-1 et suivants du code monétaire et financier.



Sur la demande principale en nullité de la souscription au capital et de l'avance en compte courant souscrite par Key Feature au profit de la société Hôtelière Capi Paris PtR :



Sur le démarchage illicite :



Il sera rappelé que l'article L. 341-1 du code monétaire et financier, dans sa rédaction applicable à l'espèce, dispose que :



'Constitue un acte de démarchage bancaire ou financier toute prise de contact non sollicitée, par quelque moyen que ce soit, avec une personne physique ou une personne morale déterminée, en vue d'obtenir, de sa part, un accord sur :



1° La réalisation par une des personnes mentionnées au 1° de l'article L. 341-3 d'une opération sur un des instruments financiers énumérés à l'article L. 211-1 ;



2° La réalisation par une des personnes mentionnées au 1° ou au 4° de l'article L. 341-3 d'une opération de banque ou d'une opération connexe définies aux articles L. 311-1 et L. 311-2;



3° La fourniture par une des personnes mentionnées au 1° de l'article L. 341-3 d'un service d'investissement ou d'un service connexe définis aux articles L. 321-1 et L. 321-2 ;



4° La réalisation d'une opération sur biens divers mentionnée à l'article L. 550-1 ;



5° La fourniture par une des personnes mentionnées au 3° de l'article L. 341-3 d'une prestation de conseil en investissement prévu au I de l'article L. 541-1.



Constitue également un acte de démarchage bancaire ou financier, quelle que soit la personne à l'initiative de la démarche, le fait de se rendre physiquement au domicile des personnes, sur leur lieu de travail ou dans les lieux non destinés à la commercialisation de produits, instruments et services financiers, en vue des mêmes fins.



L'activité de démarchage bancaire ou financier est exercée sans préjudice de l'application des dispositions particulières relatives à la prestation de services d'investissement, à la réalisation d'opérations de banque et de services de paiement et à la réalisation d'opérations sur biens divers, ainsi que des dispositions de l'article 66-4 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques.'



L'article L. 341-2 du même code, dans sa rédaction applicable au litige, dispose, pour sa part, que :



'Les règles concernant le démarchage bancaire ou financier ne s'appliquent pas :



1° Aux prises de contact avec les investisseurs qualifiés définis à l'article L. 411-2 et avec les personnes morales dont le total du bilan, le chiffre d'affaires, le montant des actifs gérés, les recettes ou les effectifs sont supérieurs à un seuil fixé par décret ;

2° Aux prises de contact dans les locaux des personnes mentionnées à l'article L. 341-3, sauf lorsque ces personnes sont contractuellement liées, en vue de la commercialisation d'instruments financiers et de produits d'épargne, aux sociétés exploitant des magasins de grande surface visés par l'article L. 752-1 du code de commerce et aux articles L. 212-7 et L. 212-8 du code du cinéma et de l'image animée, et que leurs locaux sont implantés dans les locaux de ces magasins ;



3° Aux démarches dans les locaux professionnels d'une personne morale à la demande de cette dernière ;



4° Aux prises de contact avec des personnes morales, lorsqu'elles portent exclusivement sur les services visés au 4 de l'article L. 321-2 ;



5° Lorsque la personne visée est déjà cliente de la personne pour le compte de laquelle la prise de contact a lieu, dès lors que l'opération proposée correspond, à raison de ses caractéristiques, des risques ou des montants en cause, à des opérations habituellement réalisées par cette personne ;



6° Aux démarches effectuées, pour le compte d'un établissement de crédit ou d'une société de financement, en vue de proposer un contrat de financement de biens ou de prestations de services répondant aux conditions prévues à la section 9 du chapitre 1er du titre 1er du livre III du code de la consommation, ou constituant une location-vente ou une location avec option d'achat visées à l'article L. 311-2 dudit code. Il en va de même lorsque ces contrats sont destinés aux besoins d'une activité professionnelle ;



7° Sans préjudice des dispositions prévues au 6°, aux démarches effectuées pour le compte d'un établissement de crédit ou d'une société de financement en vue de proposer des contrats de financement de ventes à tempérament ou de location aux personnes, physiques ou morales, autres que celles visées au 1°, à la condition que le nom de l'établissement ou de la société prêteur et le coût du crédit ou de la location soient mentionnés, sous peine de nullité ;



8° Aux démarches effectuées sur le lieu de vente, pour le compte d'un établissement de crédit, d'une société de financement, d'un établissement de monnaie électronique fournissant des services de paiement permettant l'octroi de crédit ou d'un établissement de paiement, en vue de proposer des crédits visés au titre Ier du livre III du code de la consommation ;



9° Aux conventions conclues entre les personnes mentionnées au 1° de l'article L. 341-3, à l'exception des sociétés de capital-risque, pour la distribution de produits, la réalisation d'une opération ou la fourniture d'un service, mentionnés à l'article L. 341-1, à l'exception des dispositions mentionnées à l'article L. 341-6. ;



10° Aux démarches effectuées, pour le compte d'un établissement de paiement ou d'un établissement de monnaie électronique fournissant des services de paiement permettant l'octroi de crédit en vue de proposer un contrat de financement de biens ou de prestations de services répondant aux conditions prévues à la section 5 du chapitre 1er du titre Ier du livre III du code de la consommation ;



11° A la diffusion auprès des personnes physiques ou morales d'une simple information publicitaire, à l'exclusion de tout document contractuel ou précontractuel, quel que soit le support.'











En l'espèce, la société Key Feature entend, tout d'abord, soutenir qu'elle aurait été l'objet d'un démarchage, d'une part car M. [K] aurait pris l'initiative de proposer à M. [P] l'investissement litigieux, d'autre part car M. [K] se serait rendu au domicile de M. [P] pour l'inciter à réaliser l'investissement litigieux, lui remettant, lors de sa visite, la brochure [N], vantant les mérites de l'opération, ce qui devait le conduire, à la suite d'un courrier de la société Haenggi préconisant expressément l'investissement, à signer le bulletin de souscription renseigné au nom de M. [K]. Contestant toute antériorité des documents précontractuels, elle invoque l'absence d'incidence, en tout état de cause, d'une lettre de mission préalable ou de la personne à l'origine de la sollicitation, ou même d'une présentation, encore floue, de l'investissement, réfutant également toute incidence de la nature des relations entre les intéressés, de même que la portée de la clause type exclusive de démarchage, présente dans le bulletin qu'il était nécessaire de signer pour souscrire à l'investissement, s'agissant, de surcroît, d'un contrat signé entre Key Feature et [N] auquel Haenggi est tiers, et cette clause, valant, tout au plus, présomption d'absence de démarchage, et ce alors que les violations des règles régissant le démarchage relève de l'ordre public de direction.



La société Haenggi et M. [K] font, pour leur part, valoir que seules s'appliqueraient les dispositions relatives au démarchage en cas de prise de contact non sollicitée, les dispositions relatives au lieu du démarchage ne concernant pas les personnes morales, de sorte qu'il ne pourrait y avoir de démarchage illicite à domicile. Ils entendent également invoquer une chronologie exclusive, selon eux, de tout démarchage. Ainsi, MM. [P] et [K] entretenaient-ils des relations amicales marquées par des visites régulières à leurs domiciles respectifs, et M. [P] aurait reçu dès le 27 octobre 2015 une documentation sur le placement, avant de visiter l'hôtel le 17 décembre 2015, la société Key Feature étant alors informée des conditions d'investissement, tant en capital qu'en compte courant, puis ayant formalisé, dès le 21 décembre 2015, toute la documentation préalable. Les intimés ajoutent que la société Key Feature a elle-même reconnu, dans le bulletin de souscription, n'avoir fait l'objet d'aucun démarchage, ce dont M. [P], lui-même conseiller en gestion patrimoniale, n'aurait pu ignorer la portée.



Ceci rappelé, la cour relève que si la société Key Feature entre bien dans le champ d'application des règles régissant le démarchage en cas de prise de contact non sollicitée, c'est à bon droit que le premier juge a retenu que, s'agissant d'une personne morale, elle ne relevait pas des dispositions régissant le démarchage 'au domicile de la personne, sur son lieu de travail ou dans les lieux non destinés à la commercialisation de produits, instruments et services financiers' applicables, certes, quelle que soit la personne à l'initiative de la démarche, mais seulement lorsque la personne démarchée est un particulier, ainsi que cela ressort de la rédaction de la disposition en cause, étant rappelé que les dispositions de l'article L. 341-2 précité excluent, en outre, l'application des règles relatives au démarchage aux démarches dans les locaux professionnels d'une personne morale à la demande de cette dernière.



Pour le reste, il n'est pas démontré, au vu des éléments versés aux débats à hauteur d'appel, que la société Key Feature aurait été l'objet d'une prise de contact non sollicitée en vue d'obtenir la souscription de l'investissement litigieux, dans les conditions prévues à l'article L. 341-1 précité, le seul fait que M. [K] ait 'parlé' de l'investissement en cause à M. [P], comme cela ressort d'un courriel du 27 octobre 2015, n'étant pas en lui-même constitutif d'une telle prise de contact, pas davantage que le fait de lui adresser une documentation relative à cet investissement, alors même que, comme l'a relevé le premier juge, il apparaît que M. [P] évoque lui-même avoir sollicité M. [K] pour obtenir des conseils sur un placement de court terme, sans qu'il ne soit, par ailleurs, établi qu'il aurait pris contact, pas davantage que la société Haenggi, avec M. [P] ou la société Key Feature sans leur assentiment.



En conséquence, la décision entreprise sera confirmée en ce qu'elle a débouté la société Key Feature de sa demande en nullité fondée sur l'existence d'un démarchage illicite.



Sur le vice du consentement :



L'article 1110 du code civil dispose, dans sa rédaction applicable à l'espèce, que l'erreur n'est une cause de nullité de la convention que lorsqu'elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l'objet.



La partie qui invoque l'erreur doit établir qu'elle n'aurait pas contracté ou aurait contracté à d'autres conditions si elle n'avait pas commis cette erreur.



Par ailleurs, aux termes de l'article 1116 du code civil, dans sa version applicable à la cause, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté.



Il ne se présume pas et doit être prouvé.



À ce titre, si la société Key Feature entend voir prononcer la nullité de la souscription litigieuse 'sous la stricte condition que M. [K] et la SARL Haenggi soient tenus solidairement aux restitutions', il résulte des conclusions auxquelles est parvenue la cour sous l'angle de l'examen de la recevabilité des demandes dirigées contre M. [K] que ce dernier ne saurait, en tout état de cause, être tenu des restitutions résultant d'une nullité pour vice du consentement indépendamment de l'existence de violations des règles du démarchage.



La société Key Feature entend voir annuler la souscription en cause pour 'pour erreur provoquée par les défendeurs', désormais intimés, invoquant, en premier lieu, une erreur sur la substance de son engagement, exposant qu'elle pensait, sans que le bulletin de souscription n'ait infirmé sa croyance sur ce point, investir dans un hôtel, actif tangible et clairement désigné dans la documentation lui ayant été remise, et de nature à garantir la sécurité de son investissement, alors qu'elle aurait, en réalité, investi dans une société détenant une créance de compte courant d'associé sans aucune garanti, dépourvue de tout actif immobilisé, les murs ayant été 'logés' dans une autre entité, et ne lui ayant, ensuite, pas permis d'être désintéressé comme créancier gagé dans le cadre de la procédure collective. Elle réfute avoir été en mesure de comprendre la réalité de cette situation, contestant l'argumentation adverse notamment quant à sa compréhension de l'objet de la société Hôtelière, qu'elle qualifie de volontairement large, et quant à sa connaissance du principe de la mutualisation des investissements, compte tenu de son intérêt particulier manifesté pour l'hôtel Pont Royal, dans le cadre d'un investissement sans risque.



Elle invoque, en second lieu, une erreur provoquée, les prospectus et plaquettes délivrées par le groupe [N] ayant, selon elle, contribué à vicier son consentement en laissant croire qu'il s'agissait de refinancer un actif immobilier, tandis que la société Haenggi et M. [K] auraient également activement, et de manière décisive, concouru, par les informations trompeuses transmises, leur silence et leur mise en scène, et notamment la visite de l'hôtel, à laisser croire que la société dont la concluante devenait associée détenait des actifs tangibles. Elle entend, à ce titre, notamment souligner que l'intermédiaire serait directement intéressé au contrat en cause en tant que partie à un autre contrat appartenant au même groupe contractuel lui offrant commission en cas de souscription.









En réplique, les parties intimées contestent tant l'existence d'un élément matériel du dol que d'une intention dolosive, c'est-à-dire de la diffusion d'informations sciemment mensongères, émanant, de surcroît, du cocontractant ou de son représentant (l'effet relatif des contrats étant invoqué, en l'absence de qualité de représentant ou courtier des concluants), ainsi que de son caractère déterminant, les circonstances mêmes de l'investissement démentant, selon elles, la croyance en un investissement direct dans un hôtel, et l'objet étant, à leur sens, bien conforme à la réalité de l'investissement souscrit, et l'information donnée par la société Haenggi parfaitement claire et dénuée d'ambiguïté, sur l'affectation des fonds, de même qu'elles réfutent toute erreur déterminante sur les qualités essentielles du cocontractant ou de la chose ou prestation due, en l'absence de démonstration suffisante du caractère déterminant de l'investissement direct dans les murs d'un hôtel. Elles ajoutent, à titre surabondant, que le fait que la société Hôtelière ne soit pas propriétaire de l'hôtel n'aurait rien changé aux perspectives de remboursement de l'investissement, dès lors que, dans le cadre de la reprise, le sort du remboursement des investisseurs aurait été traité collectivement et de manière égalitaire par pôle.



Cela étant, la cour observe que, s'il a été indiqué à la société Key Feature dont le gérant, M. [P], est un professionnel de l'investissement et de la gestion financière, que son investissement avait pour objet de refinancer la dette liée à l'acquisition de l'hôtel Pont Royal, il ne s'en déduit pas que la société dans laquelle il devait investir en tant qu'associé était, pour autant propriétaire des murs, aucun des éléments tant précontractuels que contractuels versés aux débats en appel ne permettant de déduire que la société Key Feature ait entendu faire de l'acquisition ou de la détention, par la société dont elle entendait acquérir des parts, une condition essentielle de son consentement, ni même qu'elle ait été induite en erreur sur ce point, alors même qu'il était indiqué, dans le bulletin de souscription, que l'objet de la société était l'exploitation directe ou indirecte de fonds de commerce d'établissement hôtelier, même s'il y est précisé que 'les montants souscrits pourront être affectés à l'acquisition de tout autre hôtel, murs et fonds', étant par ailleurs relevé que la société Key Feature ne démontre pas s'être renseignée sur la situation de l'immeuble ou sa valorisation.



Dans ces conditions, la cour estime que le premier juge a fait une juste analyse des faits de la cause, appliqué à l'espèce les règles de droit qui s'imposaient et pertinemment répondu aux moyens des parties pour la plupart repris en appel. À ces justes motifs que la cour approuve, il convient encore d'ajouter que la partie appelante ne démontre, en tout état de cause, aucune intention dolosive de la part de son cocontractant, à savoir respectivement en l'espèce, les sociétés Hôtelière et [N], pas davantage qu'elle n'établit l'existence d'une entente ou d'une connivence entre ces dernières et la société Haenggi.



Partant, le jugement entrepris sera également confirmé de ce chef.



Sur la demande subsidiaire en paiement de dommages-intérêts :



S'agissant d'une demande relevant de la mise en cause de l'obligation d'information et de conseil du CIF, il sera, au préalable, rappelé que cette demande n'est recevable qu'en ce qu'elle met en cause la société Haenggi et non M. [K], en l'absence de faute invoquée, à ce titre, dans le cadre de la réglementation sur le démarchage, aucun autre manquement détachable de ses fonctions de gérant n'étant invoqué, dans la mesure où il sera rappelé qu'il n'est pas démontré qu'il soit intervenu à titre personnel, mais uniquement sous couvert de la société Haenggi.



Cela étant, la cour rappelle qu'en application de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, le conseiller en gestion de patrimoine ou prestataire de services d'investissement est tenu d'une obligation d'information et de conseil envers son client quant aux caractéristiques de l'investissement et des choix à effectuer.

Par ailleurs, l'article L. 541-8-1 du code monétaire et financier dispose :



' Les conseillers en investissements financiers doivent :



1° Se comporter avec loyauté et agir avec équité au mieux des intérêts de leurs clients ;



2° Exercer leur activité, dans les limites autorisées par leur statut, avec la compétence, le soin et la diligence qui s'imposent au mieux des intérêts de leurs clients, afin de leur proposer une offre de services adaptée et proportionnée à leurs besoins et à leurs objectifs ;



3° Être dotés des ressources et procédures nécessaires pour mener à bien leurs activités et mettre en 'uvre ces ressources et procédures avec un souci d'efficacité ;



4° S'enquérir auprès de leurs clients ou de leurs clients potentiels, avant de formuler un conseil mentionné au I de l'article L. 541-1, de leurs connaissances et de leur expérience en matière d'investissement, ainsi que de leur situation financière et de leurs objectifs d'investissement, de manière à pouvoir leur recommander les opérations, instruments et services adaptés à leur situation. Lorsque les clients ou les clients potentiels ne communiquent pas les informations requises, les conseillers en investissements financiers s'abstiennent de leur recommander les opérations, instruments et services en question ;



5° Communiquer aux clients d'une manière appropriée, la nature juridique et l'étendue des éventuelles relations entretenues avec les établissements promoteurs de produits mentionnés au 1° de l'article L. 341-3, les informations utiles à la prise de décision par ces clients ainsi que celles concernant les modalités de leur rémunération, notamment la tarification de leurs prestations.



Ces règles de bonne conduite sont précisées par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers.



Les codes de bonne conduite mentionnés à l'article L. 541-4 doivent respecter ces prescriptions qu'ils peuvent préciser et compléter.'



À ce titre, la société appelante entend invoquer l'irrespect des règles gouvernant l'entrée en relation d'un CIF avec son client, en particulier le caractère tardif de la signature du document d'entrée en relation et de la lettre de mission, sans incidence de la clause de style contenue dans le document 'd'entrée en information', ainsi qu'un manquement à la délivrance de l'écrit justifiant les différentes propositions, constitué d'une seule lettre ne mentionnant qu'une proposition dont la précision est critiquée, manquements au Règlement de l'AMF constitutifs selon elle d'une faute délictuelle, qui aurait incité insidieusement M. [P] a réalisé l'investissement litigieux, puisqu'il n'aurait pas eu d'autres choix proposés et qu'il devait investir rapidement le produit de la vente de sa société de gestion forestière et ce, 'afin de bénéficier du régime fiscal de faveur neutralisant l'imposition des plus-values.'



Elle invoque également la délivrance, par le CIF, d'informations trompeuses, toujours en violation du Règlement général de l'AMF, faute, en particulier, d'alerter M. [P] sur le fait que l'hôtel qu'il a visité ne fait pas partie de l'actif de la société dans laquelle il lui est proposé d'investir, bien au contraire, outre que le placement ne présenterait, contrairement aux informations remises, aucune garantie, ni rentabilité réelle, ni performance, et que les documents omettraient d'indiquer les risques associés à l'investissement, sans que le CIF n'ait émis de réserve sur la véracité des propos émis dans la documentation, et sans que la société Haenggi ne puisse s'exonérer de sa faute en se fondant sur d'autres documents, la lettre de préconisation insistant, en outre sur la tangibilité de l'actif, tandis qu'il était encore fait référence à l'hôtel dans la convention de compte courant et le bulletin de souscription.

Elle dénonce également l'insuffisance de l'information sur les risques attachés à l'opération proposée, en l'absence de vérification du modèle économique proposé, et en particulier de la situation du groupe [N], et d'information délivrée à ce titre, les risques étant mentionnés en termes généraux, et la pertinence des documents produits par la partie adverse sur le groupe étant contestée, faute de données financières suffisantes, et d'analyse critique, même sommaire, par le CIF, de la communication commerciale du groupe, tout en contestant l'incidence de la qualité d'investisseur averti de M. [P] en matière d'information, et en dénonçant la violation du choix de l'investisseur fondé sur l'aversion au risque et la disponibilité. Enfin, il est reproché au CIF de ne pas avoir respecté l'obligation mise à sa charge de préciser, de manière suffisamment détaillée, l'existence, le montant et le mode de calcul de la rémunération qui lui a été versée par [N].



Enfin, il est fait reproche à M. [K] personnellement la commission d'actes de démarchage illicite.



En réponse, la société Haenggi et M. [K], soutenant que le CIF est tenu d'une obligation de moyen lié à la nature et à l'aléa de la prestation, cette obligation étant de nature variable selon le profil du client, notamment s'agissant de l'obligation de mise en garde, et limitée dans le temps comme s'arrêtant à la date de la souscription, outre que l'obligation d'information et de conseil comporteraient des limites excluant l'absence d'obtention du résultat escompté, et rappelant les règles spécifiques applicables au CIF et excluant toute obligation de détection de fraudes commises par des tiers, conteste toute commission de faute, dont la preuve ne serait pas rapportée par la partie adverse.



Ils font, ainsi, valoir que les documents prévus par le Règlement général de l'AMF auraient été remis à la société Key Feature, dans le respect de la chronologie prévue par le texte, et en tenant compte de la volonté clairement exprimée par cette société d'investir dans le produit '[N]', tout en exposant que seule la question du niveau d'information, et non le respect des obligations réglementaires, seraient en cause dans le cadre d'un débat sur la responsabilité civile.



Ils affirment, ensuite, avoir satisfait à leur obligation d'information sur les risques du produit, tout en précisant que les difficultés, résultant de fautes de gestion, du groupe [N], dont la fiabilité aurait été suffisamment démontrée par les rapports de KPMG, se seraient révélées ultérieurement à l'investissement, et sans qu'il ne relève du CIF d'analyser la capacité d'une société à honorer ses dettes financières, l'argumentation adverse étant, sur ce point, qualifiée d'anachronique ou reposant sur des éléments, qu'ils détaillent, qui seraient indifférents à leur responsabilité, la qualité d'investisseur averti dispensant, en outre, le CIF de toute mise en garde particulière quant au risque de l'investissement.



Ils contestent encore tout manquement à l'obligation de s'enquérir des besoins de l'investisseur, lequel ne pourrait se déduire du seul fait que l'opération n'aurait pas généré les résultats escomptés.



Ils réfutent, par ailleurs, la délivrance d'informations trompeuses sur la nature du produit, l'appelante ayant bien acquis, conformément au bulletin de souscription, dont les termes seraient clairs et dépourvus d'ambiguïté, des actions au capital d'une société en commandite par actions, dont l'objet est l'exploitation directe ou indirecte de fonds de commerce d'établissement hôtelier, et ayant reçu toutes les informations en possession de la société Haenggi sur la nature de la SCA et sur les risques encourus, alors même que la détention de l'actif serait sans incidence sur le traitement financier des créanciers tel qu'il serait intervenu à la reprise des actifs du groupe [N]. Ils ajoutent que c'est seulement en matière de commercialisation de parts ou d'actions d'OPCVM que s'appliquerait le principe selon lequel lorsqu'une documentation ne répond pas aux exigences des dispositions légales qui la régissent, l'obligation d'information qui pèse sur le professionnel ne peut être considérée comme remplie par la remise d'un autre document.

Ils affirment, enfin, que l'appelante a été informée des modalités de la rémunération du conseiller, ajoutant que le fait de percevoir une commission même élevée, en rémunération d'une prestation n'est pas de nature à elle seule à caractériser une situation de dépendance.



Cela étant, la cour rappelle la nature aléatoire attachée à un placement financier, fût-il pourvu d'un risque limité, comme le rappelle, d'ailleurs, le rapport de préconisation remis à l'investisseur et signé par lui, ce qui implique, ainsi que l'a justement rappelé le premier juge, que le CIF ne soit tenu que d'une obligation de moyen, de sorte que sa responsabilité ne saurait être mise en cause au seul motif que l'investissement se serait révélé finalement défaillant ou n'aurait pas permis à l'investisseur de réaliser le rendement escompté.



Dans ce cadre, si le CIF est tenu, aux termes des textes régissant cette activité, d'un certain nombre d'obligations qui ont été rappelées ci-avant, il n'en demeure pas moins que le préjudice dont la société Key Feature demande réparation est celui qui découle d'un manquement à une obligation d'information ou de conseil tenant à l'absence de fiabilité et de sécurité du placement et non pas celui qui résulterait de l'inobservation des règles spécifiques à l'activité de conseiller en investissements financiers et dont le défaut ne peut causer à lui seul un préjudice et par-là engager la responsabilité du professionnel, le premier juge ayant, en conséquence, et par des motifs qu'il y a lieu d'approuver, justement retenu qu'aucune faute contractuelle n'était constituée de ce chef, et sans qu'au demeurant, le fondement délictuel ne puisse être invoqué dans le même cadre des relations entre les parties.



Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que la société Key Feature a reçu, de la société Haenggi, avant de régulariser sa souscription de l'investissement, une documentation sur le groupe [N], un rapport de préconisation et les statuts de la SCA Hôtelière Capi Paris PtR dans laquelle elle devait devenir associée, la documentation précisant bien l'objet de l'investissement, à savoir le refinancement de la dette liée à l'acquisition de l'hôtel Pont Royal, sans que la société Key Feature n'établisse qu'elle aurait été informée de ce que la SCA aurait été elle-même propriétaire des murs, la référence, dans la lettre de préconisation, à un modèle économique reposant sur l'achat de murs et de fonds de commerce, et à un actif tangible, à savoir l'hôtel Pont Royal n'étant pas à cet égard suffisant au regard de l'objet social tel qu'il vient d'être rappelé et pouvait, de surcroît, être compris par M. [P], gérant de la société Key Feature et investisseur averti.



En outre, la société Key Feature n'établit pas la préexistence de risques financiers ou de signaux de nature à susciter l'interrogation du CIF sur la viabilité du produit proposé, ni à tout le moins la connaissance que pouvait en avoir, au moment de la souscription, même un professionnel de l'investissement, au vu, notamment, et au-delà même des connaissances disponibles pour le grand public et entretenant une réputation favorable du groupe, des éléments comptables ou financiers dont il pouvait alors disposer, et tels qu'ils sont versés aux débats, sans être lui-même un professionnel de l'audit et de la comptabilité, et ce alors que l'investisseur a été suffisamment informé, en des termes tenant compte de la spécificité du domaine d'activité en cause et de la forme de la société, notamment, des risques principaux attachés à son investissement.



Au regard de ce qui précède, il n'apparaît pas, non plus, suffisamment démontré que la société Haenggi, qui n'était pas, en tout cas contractuellement, tenue d'émettre de proposition alternative, de surcroît compte tenu de l'intérêt manifesté par M. [P] pour l'investissement en cause, aurait manqué à ses obligations d'information et de conseil au regard des objectifs d'investissement de la société Key Feature tels qu'ils sont rappelés dans le document de préconisation, signé des deux parties, à savoir la valorisation à court terme de la trésorerie issue de la vente de la société propriété de Key Feature, à un rendement élevé et avec une solution de diversification.





S'agissant enfin de l'information reçue, par la société Key Feature, sur la rémunération de la société Haenggi, elle n'induit aucune faute de cette dernière, à défaut, pour l'appelante, d'établir en quoi ces modalités auraient été de nature à faire naître une situation de connivence ou de dépendance entre la société Haenggi et le groupe [N] ou ses sociétés.



Et concernant le grief, concernant M. [K], tiré d'un démarchage illicite, il sera écarté au regard des conclusions auxquelles est parvenue la cour, sur cette question telle qu'examinée sous l'angle de la validité de la convention de souscription.



Sur les dépens et les frais irrépétibles :



La SAS Key Feature, succombant pour l'essentiel, sera tenue des dépens de l'appel, par application de l'article 696 du code de procédure civile, outre confirmation du jugement déféré sur cette question.



L'équité commande en outre de mettre à la charge de l'appelante une indemnité de procédure pour frais irrépétibles de 2 000 euros au profit de chacun des intimés, tout en disant n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de l'appelante, et en confirmant les dispositions du jugement déféré de ce chef.





P A R C E S M O T I F S





La Cour,



Confirme le jugement rendu le 29 mars 2021 par le tribunal judiciaire de Mulhouse, chambre commerciale, sauf en ce qu'il a déclaré recevable l'action de la société Key Feature à l'encontre de M. [F] [K],



Statuant à nouveau du chef de demande infirmé et y ajoutant,



Déclare les demandes de la SAS Key Feature à l'encontre de M. [F] [K] recevables, seulement en ce qu'elles sont fondées sur l'existence d'un manquement aux règles du démarchage financier,



Condamne la SAS Key Feature aux dépens de l'appel,



Condamne la SAS Key Feature à payer à la SARL Haenggi et Associés la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,



Condamne la SAS Key Feature à payer à M. [F] [K] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,



Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la SAS Key Feature.



La Greffière : Le Conseiller :

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