21 septembre 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-25.187

Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2023:C200872

Titres et sommaires

INDEMNISATION DES VICTIMES D'INFRACTION - Indemnité - Montant - Fixation - Prestations et sommes mentionnées à l'article 706-9 du code de procédure pénale - Prestation de compensation du handicap - Justificatif annuel - Obligation (non)

Viole les articles 706-3, 706-9 et 706-10 du code de procédure pénale la cour d'appel qui subordonne le versement de la rente qu'elle alloue, au titre de l'assistance par une tierce personne, à la production annuelle, par la victime, d'une attestation justifiant qu'elle ne perçoit pas la prestation de compensation du handicap (PCH)

RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Dommage - Réparation - Indemnité - Montant - Fixation - Eléments pris en considération - Prestation de compensation du handicap (PCH) - Justificatif annuel - Obligation (non)

FONDS DE GARANTIE - Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions - Indemnisation - Offre - Montant - Fixation - Prestations et sommes mentionnées à l'article 706-9 du code de procédure pénale - Prestation de compensation du handicap - Justificatif annuel - Obligation (non)

INDEMNISATION DES VICTIMES D'INFRACTION - Indemnité - Montant - Fixation - Prestations et sommes mentionnées à l'article 706-9 du code de procédure pénale - Définition - Exclusion - Cas - Allocation compensatrice attribuée au titre de la tierce personne

Texte de la décision

CIV. 2

FD



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 21 septembre 2023




Cassation partielle
sans renvoi


Mme LEROY-GISSINGER, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 872 F-B

Pourvoi n° M 21-25.187




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21 SEPTEMBRE 2023

1°/ M. [V] [I],

2°/ [C] [I],

3°/ [G] [I],

ces deux derniers représentés par leur père M. [V] [I],

tous trois domiciliés [Adresse 1],

ont formé le pourvoi n° M 21-25.187 contre l'arrêt rendu le 8 novembre 2021 par la cour d'appel de Cayenne (chambre civile), dans le litige les opposant au Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions, dont le siège est [Adresse 2], défendeur à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Ittah, conseiller référendaire, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. [V] [I], de [C] et [G] [I], représentés par leur père M. [V] [I], de la SARL Delvolvé et Trichet, avocat du Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions, après débats en l'audience publique du 20 juin 2023 où étaient présents Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Ittah, conseiller référendaire rapporteur, Mme Isola, conseiller, et M. Carrasco, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Cayenne, 8 novembre 2021) et les productions, M. [I] a été victime, le 28 mai 2012, d'une agression par arme à feu.

2. L'auteur des faits a été condamné par un tribunal correctionnel.

3. M. [I], agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentant légal de ses enfants mineurs, [G] et [C] [I], a saisi une commission d'indemnisation des victimes d'infractions (CIVI) afin que ses préjudices et ceux de ses enfants soient indemnisés par le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions (le FGTI).

Examen des moyens

Sur le premier moyen


4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Mais sur le second moyen

Enoncé du moyen

5. M. [I] fait grief à l'arrêt de dire que le versement de la rente trimestrielle est subordonné à la production tous les ans, au plus tard le 1er décembre et pour la première fois le 1er décembre 2019, au FGTI d'une attestation de la collectivité territoriale de Guyane et de la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH) de Guyane indiquant qu'il n'a perçu aucune somme au titre de la prestation de compensation du handicap ou, le cas échéant, le montant réglé au titre de cette prestation pour l'année écoulée alors « que la commission tient compte des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d'autres débiteurs au titre du préjudice qu'elle est tenue d'indemniser ; qu'il incombe à celui qui demande l'exécution d'une obligation de la prouver ; qu'il revient donc au fonds qui prétend imputer sur la rente qu'elle sert à la victime, le montant de la prestation de compensation du handicap, d'établir qu'elle a perçu cette prestation ; qu'en imposant néanmoins à M. [I] la production annuelle d'une attestation de la collectivité territoriale mentionnant soit la non-perception de la prestation de compensation du handicap, soit le montant perçu à ce titre, la cour d'appel a violé les articles 706-9 du code de procédure pénale, et 1353 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 706-3, 706-9 et 706-10 du code de procédure pénale :

6. Selon le premier de ces textes, sous certaines conditions, toute personne ayant subi un préjudice résultant de faits volontaires ou non qui présentent le caractère matériel d'une infraction peut obtenir la réparation intégrale des dommages qui résultent des atteintes à la personne.

7. Selon le deuxième, la CIVI tient compte, dans le montant des sommes allouées à la victime au titre de la réparation de son préjudice, des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d'autres débiteurs au titre du même préjudice.

8. Aux termes du troisième, lorsque la victime, postérieurement au paiement de l'indemnité, obtient, du chef du même préjudice, une des prestations ou indemnités visées à l'article 706-9, le fonds peut demander à la commission qui l'avait accordée d'ordonner le remboursement total ou partiel de l'indemnité ou de la provision.

9. Il s'en déduit que le versement d'une rente au titre de l'assistance par une tierce personne ne peut être subordonnée à la production annuelle, par la victime, auprès du FGTI, d'une attestation justifiant qu'elle ne perçoit pas la prestation de compensation du handicap (PCH).

10. Pour allouer à M. [I] une rente trimestrielle et viagère d'un certain montant, en réparation du préjudice d'assistance par une tierce personne permanente, mais en subordonner le versement à la production, par cette victime, au FGTI, chaque année, d'une attestation précisant si, pour l'année écoulée, elle a, ou non, reçu des versements au titre de la PCH, l'arrêt énonce que la justification de l'absence de perception de cette prestation doit permettre de vérifier que l'indemnisation correspond exactement au préjudice réel.

11. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que M. [I] ne percevait pas la PCH au jour où elle statuait, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

12. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

13. La cassation prononcée, par voie de retranchement, n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, mais seulement en ce qu'il dit que le versement de la rente allouée en réparation du poste de l'assistance par une tierce personne future est subordonné à la production tous les ans, au plus tard le 1er décembre et pour la première fois le 1er décembre 2019, au Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions, d'une attestation de la Collectivité territoriale de Guyane et de la MDPH de Guyane indiquant que M. [I] n'a perçu aucune somme au titre de la prestation de compensation du handicap ou, le cas échéant, indiquant le montant réglé à ce même titre, pour l'année écoulée, l'arrêt rendu le 8 novembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Cayenne ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions à payer à M. [I], agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentant légal de ses enfants mineurs [G] et [C] [I], la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un septembre deux mille vingt-trois.

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