13 septembre 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-11.894

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2023:SO00859

Texte de la décision

SOC.

ZB1


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 13 septembre 2023




Cassation partielle


Mme CAPITAINE, conseiller le plus ancien
faisant fonction de président



Arrêt n° 859 F-D

Pourvoi n° N 21-11.894

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme [N].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 10 décembre 2022.


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 13 SEPTEMBRE 2023

Mme [G] [N], domiciliée [Adresse 2], [Localité 4], a formé le pourvoi n° N 21-11.894 contre l'arrêt rendu le 30 octobre 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 8), dans le litige l'opposant à la société Compass Group France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], [Localité 3], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Ala, conseiller référendaire, les observations de la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, avocat de Mme [N], de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la société Compass Group France, après débats en l'audience publique du 20 juin 2023 où étaient présents Mme Capitaine, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Ala, conseiller référendaire rapporteur, Mme Van Ruymbeke, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 octobre 2019), Mme [N] a été engagée en qualité d'agent d'entretien le 22 avril 2003 par la société Sodexho suivant contrat de travail à temps partiel.

2. A compter du 2 août 2006, le contrat de travail a été transféré à la société Compass Group France.

3. Dans le courant de l'année 2010, après avoir été transféré au centre hospitalier de [Localité 5], le contrat a de nouveau été transféré à la société Compass Group France.

4. A compter du 7 janvier 2011, la salariée a fait l'objet de plusieurs arrêts de travail à la suite d'un accident du travail.

5. Le 5 septembre 2012, à la suite d'un nouvel accident du travail, elle a été placée en arrêt pour maladie jusqu'au 20 octobre 2014.

6. Après deux examens médicaux les 6 et 25 février 2015, le médecin du travail a déclaré la salariée inapte à son poste d'employée de restauration.

7. Le 22 mai 2015, elle a été licenciée pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement.

Examen des moyens

Sur le premier moyen


8. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Mais sur le second moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

9. La salariée fait grief à l'arrêt de dire que l'employeur a satisfait à son obligation de reclassement et de la débouter de ses demandes en paiement de l'indemnité compensatrice de préavis, outre congés payés afférents et de l'indemnité spéciale de licenciement, de la condamner au remboursement des sommes versées dans le cadre de l'exécution provisoire au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, alors « que suivant l'article L. 1226-14 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige : ''La rupture du contrat de travail dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article L. 1226-12 ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L. 1234-5 ainsi qu'à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'article L. 1234-9. Toutefois, ces indemnités ne sont pas dues par l'employeur qui établit que le refus par le salarié du reclassement qui lui est proposé est abusif'' ; qu'en refusant de faire droit aux demandes en paiement des indemnités prévues par l'article L. 1226-14 du code du travail au prétexte que Mme [N] aurait refusé l'unique proposition de reclassement qui lui avait été faite sans caractériser le caractère abusif d'un tel refus, la cour d'appel a violé l'article L. 1226-14 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 1226-14 du code du travail et L. 1226-15 du même code dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 :

10. Selon le premier de ces textes, la rupture du contrat de travail dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article L. 1226-12 ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L. 1234-5 ainsi qu'à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'article L. 1234-9. Toutefois, ces indemnités ne sont pas dues par l'employeur qui établit que le refus par le salarié du reclassement qui lui est proposé est abusif.

11. Pour débouter la salariée de ses demandes d'indemnité compensatrice et d'indemnité spéciale de licenciement, l'arrêt retient qu'il ne peut être fait grief à l'employeur de n'avoir pu proposer un seul poste que la salariée a expressément refusé et que celui-ci a rempli loyalement et sérieusement son obligation de reclassement.

12. En statuant ainsi, sans constater le caractère abusif du refus par la salariée du poste proposé, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

13. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation prononcée sur le second moyen, emporte la cassation des chefs de dispositif qui condamnent la salariée au remboursement de sommes versées dans le cadre de l'exécution provisoire au titre de l'indemnité compenstrice de préavis outre congés payés afférents et de l'indemnité spéciale de licenciement, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

14. La cassation prononcée sur le second moyen n'emporte pas la cassation des chefs de dispositifs qui condamnent l'employeur à verser une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter la charge des entiers dépens, justifiés par d'autres condamnations non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mme [N] de ses demandes en paiement d'une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L. 1234-5 du code du travail, outre congés payés afférents, de l'indemnité spéciale de licenciement et condamne Mme [N] au remboursement de sommes à ces titres, l'arrêt rendu le 30 octobre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société Compass Group France aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Compass Group France et la condamne à payer à la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maître la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille vingt-trois.

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