12 juillet 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 23-11.621

Première chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2023:C100535

Texte de la décision

CIV. 1

CF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 12 juillet 2023




Cassation


Mme AUROY, conseiller doyen faisant fonction de président



Arrêt n° 535 F-D

Pourvoi n° H 23-11.621

Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de M. [T].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 17 avril 2023.


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 JUILLET 2023

Le département de la Haute-Vienne, dont le siège est conseil départemental de la Haute-Vienne, aide sociale à l'enfance, [Adresse 1], a formé le pourvoi n° H 23-11.621 contre l'arrêt rendu le 2 décembre 2022 par la cour d'appel de Limoges (chambre spéciale des mineurs), dans le litige l'opposant :

1°/ au procureur général près la cour d'appel de Limoges, domicilié en son parquet général, cour d'appel de Limoges, [Adresse 2],

2°/ à M. [H] [T], domicilié [Adresse 5],

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Fulchiron, conseiller, les observations de Me Bardoul, avocat du département de la Haute-Vienne, de la SCP Zribi et Texier, avocat de M. [T], après débats en l'audience publique du 27 juin 2023 où étaient présents Mme Auroy, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Fulchiron, conseiller rapporteur, Mme Antoine, conseiller, et Mme Layemar, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Limoges, 2 décembre 2022), M. [H], se disant né le [Date naissance 3] 2006 à [Localité 4] (Guinée), a saisi le juge des enfants en vue de son placement à l'aide sociale à l'enfance.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

2. Le conseil départemental de la Haute-Vienne fait grief à l'arrêt de lui confier M. [H] jusqu'à sa majorité, de dire que les droits de visite des parents sont réservés, de dire qu'il y a lieu de verser les prestations familiales auxquelles le mineur ouvre droit au service gardien, de dire que celui-ci adressera au juge un rapport à l'échéance de la mesure, de lui déléguer l'autorité parentale nécessaire à la réalisation des actes concernant la santé, la scolarité, les loisirs et l'ouverture d'un compte bancaire avec usage d'une carte de retrait sans découvert au profit de M. [H] et de rejeter ses demandes tendant à ordonner des mesures d'instruction complémentaires, alors « que les actes publics établis par une autorité étrangère et destinés à être produits devant les juridictions françaises doivent au préalable, sauf convention internationale contraire, être légalisés pour y produire effet ; que le juge ne peut ainsi retenir qu'un acte d'état civil dressé en Guinée, pays pour lequel aucune convention internationale ne prévoit une dispense de légalisation, n'ayant pas été légalisé fait foi au sens de l'article 47 du code civil ; qu'en retenant pour se fonder sur des actes non légalisés que la légalisation par les autorités guinéennes en France des documents d'état civil n'est pas l'une des conditions exigées par l'article 47 du code civil pour faire foi des éléments d'état civil qu'il contient, en l'occurrence de la date de naissance de l'intéressé, et ne peut donc avoir à elle seule comme conséquence d'exclure un mineur du dispositif de protection de l'enfance, la cour d'appel a violé l'article 47 du code civil, ensemble l'article 16 paragraphe 2 de la loi du 23 mars 2019 et l'article 1er du décret n° 2020-1370 du 10 novembre 2020. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 16 II de la loi n° 2019-22 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, les articles 1, 2 et 4 du décret n° 2020-1370 du 10 novembre 2019 relatif à la légalisation des actes publics établis par une autorité étrangère, alors applicables, et l'article 47 du code civil :

3. Il résulte des trois premiers de ces textes que, sauf engagement international contraire, les actes de l'état civil établis par les officiers de l'état civil à l'étranger et destinés à être produits en France doivent être légalisés pour y produire effet.

4. En application du quatrième, les actes publics guinéens sont, par exception, légalisés par l'ambassadeur ou le chef de poste consulaire de Guinée en résidence en France.

5. Pour confier M. [H] à l'aide sociale à l'enfance jusqu'à sa majorité, l'arrêt retient que la légalisation par les autorités guinéennes en France des documents d'état civil n'est pas l'une des conditions exigées par l'article 47 du code civil pour faire foi des éléments d'état civil qu'il contient, en l'occurrence de la date de naissance de l'intéressé, et ne peut donc avoir à elle seule comme conséquence d'exclure un mineur du dispositif de protection de l'enfance.

6. En statuant ainsi, alors que les actes de l'état civil guinéens non légalisés ne peuvent bénéficier de la présomption de force probante attachée aux actes de l'état civil établis à l'étranger par l'article 47 du code civil, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 décembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ;

Condamne M. [H] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille vingt-trois.

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