21 juin 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-80.317

Chambre criminelle - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2023:CR00815

Titres et sommaires

COUR D'ASSISES - Débats - Président - Appréciation souveraine - Pièces du dossier - Enregistrements sonores, visuels ou audiovisuels - Diffusion

Lorsque, au cours des débats devant la cour d'assises, la cour est saisie de conclusions tendant à la diffusion d'un enregistrement, elle apprécie souverainement si la mesure sollicitée est utile à la manifestation de la vérité. Ainsi, le droit pour l'accusé d'obtenir, s'il le demande, la présentation des pièces à conviction sur le fondement de l'article 341 du code de procédure pénale, n'implique pas le droit à la diffusion des enregistrements sonores, visuels ou audiovisuels, placés sous scellés

Texte de la décision

N° F 22-80.317 F-B

N° 00815


SL2
21 JUIN 2023


REJET


M. BONNAL président,






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 21 JUIN 2023



M. [D] [J] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'assises de la Gironde, en date du 17 décembre 2021, qui, pour viols et violences, aggravés, arrestation et séquestration arbitraire, l'a condamné à treize ans de réclusion criminelle, une interdiction définitive du territoire national, quinze ans d'interdiction de détenir ou porter une arme soumise à autorisation, dix ans d'inéligibilité et une confiscation.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de Mme Leprieur, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [D] [J], et les conclusions de Mme Bellone, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 24 mai 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Leprieur, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. M. [D] [J] a été mis en accusation devant la cour d'assises de la Dordogne des chefs de viols aggravés et délits connexes.

3. Par arrêt pénal du 24 septembre 2020, ladite cour d'assises l'a condamné à douze ans de réclusion criminelle, cinq ans de suivi socio-judiciaire et cinq ans d'interdiction de détenir ou porter une arme soumise à autorisation.

4. L'accusé et le ministère public ont relevé appel de cette décision.

Examen des moyens

Sur les premier et quatrième moyens


5. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.


Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce que, par arrêt incident du 16 décembre 2021, la cour a rejeté les conclusions de la défense qui, s'opposant à ce qu'il soit passé outre aux débats à l'absence du témoin, tendaient au renvoi de l'affaire, alors :

« 1°/ que tout arrêt rendu sur un incident contentieux doit, à peine de nullité, être motivé ; en rejetant la demande de renvoi au motif que la comparution du témoin à une autre session, absent de son domicile pour un motif inconnu et n'ayant pu être localisé le 16 décembre 2021, « demeurerait incertaine », la cour a statué par un motif hypothétique, et violé l'article 593 du code de procédure pénale ;

2°/ que tout accusé a le droit d'interroger ou de faire interroger les témoins à charge et à décharge ; les conclusions faisaient expressément valoir qu'en l'absence de ce témoin, la cause de Monsieur [D] [J] ne saurait être entendue équitablement, ce dernier ne pouvant poser à Monsieur [F] [L] des questions essentielles à sa défense ; en affirmant « qu'au vu des résultats de l'instruction orale à laquelle il a été procédé, l'audition de ce témoin n'est pas indispensable à la manifestation de la vérité », la cour ne justifie pas mieux sa décision dès lors que cette nécessité ne peut être appréciée qu'au vu des questions qui seront posées au témoin et de ses réponses, ce que la juridiction ne connaissait pas quand elle a écarté la nécessité de cette audition ; la cour a statué par un motif inopérant et violé l'article 593 du code de procédure pénale, ensemble l'article 6, § 3, d) de la Convention européenne des droits de l'homme. »

Réponse de la Cour

7. Pour rejeter la demande de renvoi présentée par la défense en raison de l'absence d'un témoin, l'arrêt incident du 16 décembre 2021 relève que les investigations entreprises pour le localiser sont demeurées vaines et que la cour se trouve dans l'impossibilité d'assurer sa comparution.

8. Les juges en déduisent que la nécessité de juger l'accusé dans un délai raisonnable s'oppose à ce que l'affaire soit renvoyée à une autre session, à laquelle la comparution du témoin demeurerait incertaine.

9. La cour ajoute qu'au vu des résultats de l'instruction orale à laquelle il a été procédé, l'audition de ce témoin n'est pas indispensable à la manifestation de la vérité.

10. En l'état de ces énonciations, dénuées de caractère hypothétique, la cour, qui a souverainement apprécié qu'au vu de l'instruction orale à laquelle il avait été procédé, l'audition de ce témoin n'apparaissait pas nécessaire à la manifestation de la vérité, a justifié sa décision, sans méconnaître les textes visés au moyen.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

11. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce que, par arrêt incident du 17 décembre 2021, la cour a, rejetant la demande de visionnage avant la clôture des débats des vidéos du passage à l'hôtel de l'accusé et de la partie civile, décidé que ne seront projetées que les photographies tirées de cet enregistrement, alors :

« 1°/ que tout arrêt rendu sur un incident contentieux doit, à peine de nullité, être motivé ; en rejetant la demande de visionnage formulée au cours des débats, au motif que le complément d'information sollicité est tardif, sans constater une impossibilité technique de procéder à ce visionnage à l'audience avant la clôture des débats ni exposer en quoi la demande serait tardive, l'arrêt ne satisfait pas aux exigences de l'article 593 du code de procédure pénale ;

2°/ qu'en retenant que « la cour est en mesure de s'assurer que le complément d'information sollicité est (…) inutile à la manifestation de la vérité » mais « qu'en revanche, et pour satisfaire au principe de la demande formée par la défense, la cour décide que seront projetées les photographies cotées Dl 15 tirées de l'enregistrement vidéo du passage à l'hôtel de l'accusé et de la victime partie civile », la cour, qui s'est contredite, a derechef violé l'article 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

12. Pour rejeter la demande, adressée à la cour et tendant au visionnage de vidéos placées sous scellés, l'arrêt incident du 17 décembre 2021 retient que l'instruction à l'audience a permis la complète audition de l'accusé, des témoins et des experts et que la cour est en mesure de s'assurer que le complément d'information sollicité est non seulement tardif mais également inutile à la manifestation de la vérité.

13. L'arrêt ajoute qu'en revanche, et pour satisfaire au principe de la demande formée par la défense, seront projetées les photographies tirées de l'enregistrement vidéo dont il est demandé le visionnage.

14. En l'état de ces énonciations, et abstraction faite d'un motif erroné mais surabondant relatif au caractère tardif de la demande, la cour a justifié sa décision.

15. En effet, la cour, saisie de conclusions tendant à la diffusion d'un enregistrement, apprécie souverainement si la mesure sollicitée est utile à la manifestation de la vérité.

16. Ainsi, le droit pour l'accusé d'obtenir, s'il le demande, la présentation des pièces à conviction sur le fondement de l'article 341 du code de procédure pénale, n'implique pas le droit à la diffusion des enregistrements sonores, visuels ou audiovisuels, placés sous scellés.

17. Le moyen doit dès lors être écarté.

18. Par ailleurs, la procédure est régulière et la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la cour et le jury.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-et-un juin deux mille vingt-trois.

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