8 juin 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-13.855

Troisième chambre civile - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2023:C300397

Titres et sommaires

EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE - Indemnité - Immeuble - Terrain - Terrain à bâtir - Qualification - Possibilité de construction - Appréciation - Projet de révision du plan de prévention des risques porté à la connaissance de la commune ou du groupement compétent - Absence d'influence

Pour apprécier la condition de constructibilité de la zone où est située la parcelle expropriée et la qualifier de terrain à bâtir, le juge de l'expropriation ne peut se fonder sur un projet de révision du plan de prévention des risques porté à la connaissance de la commune ou du groupement compétent par les services de l'Etat, mais non approuvé ni annexé au plan local d'urbanisme

Texte de la décision

CIV. 3

JL


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 8 juin 2023




Cassation


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 397 FS-B

Pourvoi n° Q 22-13.855




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 8 JUIN 2023

La société publique locale La Fabrique de Bordeaux Métropole (la SPL), dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Q 22-13.855 contre l'arrêt rendu le 27 janvier 2022 par la cour d'appel de Bordeaux (chambre des expropriations), dans le litige l'opposant à Mme [C] [M], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Djikpa, conseiller référendaire, les observations de la SCP Melka-Prigent-Drusch, avocat de la société publique locale La Fabrique de Bordeaux Métropole, et l'avis de Mme Vassalo, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 18 avril 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Djikpa, conseiller référendaire rapporteur, M. Delbano, conseiller doyen, Mme Farrenq-Nési, M. Boyer, Mme Abgrall, conseillers, M. Zedda, Mmes Brun, Vernimmen, Rat, conseillers référendaires, Mme Vassallo, premier avocat général, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. L'arrêt attaqué (Bordeaux, 27 janvier 2022) fixe les indemnités revenant à Mme [M] à la suite de l'expropriation, au profit de la société publique locale La Fabrique de Bordeaux Métropole (la SPL), d'une parcelle lui appartenant.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses première, deuxième, quatrième à sixième branches


2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

3. La SPL fait grief à l'arrêt de fixer comme il le fait les indemnités d'expropriation revenant à Mme [M], alors « que la qualification de terrains à bâtir, au sens du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, est réservée aux terrains qui, à la date de référence, sont situés dans un secteur désigné comme constructible au sens des documents d'urbanisme et sont desservis par une voie d'accès et des réseaux suffisants ; qu'en qualifiant de terrain à bâtir la partie du terrain détachée de la construction et en déniant à l'expropriante la possibilité de se prévaloir de l'inconstructibilité du terrain à la date de référence compte tenu du classement de la parcelle en zone rouge inconstructible du plan de prévention des risques d'inondations à cette date, en se fondant sur le porter à connaissance du 20 juillet 2016 selon lequel la parcelle allait passer en zone verte lors de la révision du plan, quand ce porter à connaissance, qui n'alertait pas sur un accroissement du risque, ne pouvait être pris en considération et remettre en cause les dispositions toujours en vigueur du plan de prévention des risques, la cour d'appel a violé l'article L. 322-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, ensemble les articles L. 562-4 du code de l'environnement et L. 32-2 du code de l'urbanisme. »


Réponse de la Cour

Vu l'article L. 322-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique :

4. Selon ce texte, la qualification de terrains à bâtir est réservée aux terrains qui, un an avant l'ouverture de l'enquête prévue à l'article L. 1 ou, dans le cas prévu à l'article L. 122-4, un an avant la déclaration d'utilité publique, sont, quelle que soit leur utilisation, situés dans un secteur désigné comme constructible par un plan d'occupation des sols, un plan local d'urbanisme, un document d'urbanisme en tenant lieu ou par une carte communale, ou bien, en l'absence d'un tel document, situés dans une partie actuellement urbanisée d'une commune.

5. Pour qualifier de terrain à bâtir une bande de terrain détachée de la parcelle expropriée, l'arrêt retient que, si elle est située en zone rouge du plan de prévention des risques d'inondation (PPRI), ce dernier est en cours de révision et les services de l'Etat, par « porter à connaissance » du 20 juillet 2016, classent la parcelle litigieuse en zone verte du PPRI, soit en zone de faible aléa à l'inondation et qu'il convient de tenir compte de cette information antérieure à la date de référence.

6. En statuant ainsi, alors que le projet de révision du plan de prévention des risques naturels porté à la connaissance de la métropole n'avait pas eu pour effet de modifier la teneur du plan de prévention des risques naturels approuvé, classant la parcelle expropriée en zone inconstructible, qui seul était annexé au plan local d'urbanisme, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;

Condamne Mme [M] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société publique locale La Fabrique de Bordeaux Métropole ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit juin deux mille vingt-trois.

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