8 juin 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-17.735

Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2023:C200590

Titres et sommaires

PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Surendettement - Commission de surendettement - Mesures recommandées - Décision leur conférant force exécutoire - Défaillance du débiteur - Effets - Report du point de départ du délai de forclusion

Il résulte des articles L. 311-52, alinéa 2, du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 et L. 331-7 du même code, dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014, que la décision par laquelle la commission de surendettement recommande l'adoption de mesures de désendettement n'étant pas au nombre des événements visés à l'article L. 311-52 précité, le point de départ du délai de forclusion est reporté, dans ce cas, au premier incident de paiement non régularisé intervenu après la décision du juge conférant force exécutoire aux mesures

PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Crédit à la consommation - Défaillance de l'emprunteur - Action - Délai de forclusion - Point de départ - Date du premier incident de paiement non régularisé

Texte de la décision

CIV. 2

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 8 juin 2023




Cassation


Mme MARTINEL, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 590 F-B

Pourvoi n° M 21-17.735







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 8 JUIN 2023


M. [X] [F], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° M 21-17.735 contre l'arrêt rendu le 8 avril 2021 par la cour d'appel de Lyon (6e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société [3], société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ au GIE [4], groupement d'intérêt économique dont le siège est [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Cardini, conseiller référendaire, les observations de la SCP Doumic-Seiller, avocat de M. [F], de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société [3] et du GIE [4], et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 18 avril 2023 où étaient présents Mme Martinel, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Cardini, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 8 avril 2021), et les productions, la société [3] a consenti à M. [F] trois crédits à la consommation qui ont fait l'objet d'incidents de paiements non régularisés en juillet et août 2014.

2. M. [F] a saisi, le 12 novembre 2014, une commission de surendettement des particuliers qui, le 15 janvier 2015, a déclaré sa demande recevable et établi des mesures recommandées consistant en un plan provisoire de vingt-quatre mois sur la base d'une capacité de remboursement mensuel de 1 365 euros, destiné à permettre la vente de son bien immobilier.

3. M. [F] a contesté ces mesures le 2 juin 2016 et, par jugement du 22 février 2018, rectifié le 5 juillet 2018, le juge d'un tribunal d'instance a établi un nouveau plan prévoyant le remboursement des sommes dues à la société [3] en 157 versements mensuels, après un moratoire de neuf mois.

4. Par acte du 8 mars 2019, M. [F] a assigné le GIE [4] et la société [3] aux fins de constatation de la forclusion et de remboursement des sommes payées en application du plan de désendettement.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

5. M. [F] fait grief à l'arrêt de confirmer, par substitution de motifs, le jugement rendu le 12 décembre 2019 l'ayant débouté de l'intégralité de ses demandes, alors « que l'arrêt constate que M. [F] a contesté le rééchelonnement recommandé par la commission de surendettement le 2 juin 2016 et que par jugement du 22 février 2018, le juge d'instance, saisi de ladite contestation, a établi un nouveau plan ; qu'il en résulte que le premier rééchelonnement proposé par la commission n'était pas opposable à M. [F], aucun plan conventionnel de redressement n'ayant été accepté par le débiteur ou adopté avant le jugement du 22 février 2018, intervenu après l'expiration du délai de forclusion de deux ans ayant commencé à courir à compter des premiers incidents de paiement de juillet et août 2014 ; que dès lors, en retenant que la décision de rééchelonnement de la commission intervenue avant juin 2016 « a mis à néant l'existence du point de départ du délai de forclusion de juillet et août 2014 », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, en violation de l'article L. 311-37 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, applicable en l'espèce. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 311-52, alinéa 2, du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 et l'article L. 331-7 du même code, dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 :

6. Aux termes du premier de ces textes, lorsque les modalités de règlement des échéances impayées ont fait l'objet d'un réaménagement ou d'un rééchelonnement, le point de départ du délai de forclusion est le premier incident non régularisé intervenu après le premier aménagement ou rééchelonnement conclu entre les intéressés ou après adoption du plan conventionnel de redressement prévu à l'article L. 331-6 ou après décision de la commission imposant les mesures prévues à l'article L. 331-7 ou la décision du juge de l'exécution homologuant les mesures prévues à l'article L. 331-7-1.

7. Selon le second, lorsque les mesures prévues par le présent article sont combinées avec tout ou partie de celles prévues par les articles L. 331-7-1 et L. 331-7-2, l'ensemble de ces mesures n'est exécutoire qu'à compter de l'homologation de ces dernières par le juge.

8. Il en résulte que la décision par laquelle la commission de surendettement recommande l'adoption de mesures de désendettement n'étant pas au nombre des événements visés à l'article L. 311-52 précité, le point de départ du délai de forclusion est reporté, dans ce cas, au premier incident de paiement non régularisé intervenu après la décision du juge conférant force exécutoire aux mesures.

9. Pour confirmer le jugement, l'arrêt retient que la cour d'appel n'est pas en mesure de connaître la date à laquelle le rééchelonnement des paiements des dettes a été recommandé par la commission, mais que, le jugement du 22 février 2018 précisant que M. [F] a contesté ce rééchelonnement le 2 juin 2016, celui-ci est donc intervenu avant juin 2016, et donc avant la fin du premier délai de forclusion de deux ans à compter de juillet et août 2014. Il en déduit que, à l'époque du premier rééchelonnement fixé par la commission, l'action en paiement de la société [3] n'était pas forclose et que la décision de la commission a mis à néant l'existence du point de départ du délai de forclusion de juillet et août 2014.

10. Il ajoute que, saisi d'une contestation, le juge d'instance a procédé, par décision du 22 février 2018, à un nouveau rééchelonnement et que, M. [F] affirmant respecter le paiement des mensualités prévues par ce nouveau plan, aucun incident de paiement non régularisé ne peut à ce jour être relevé comme point de départ du délai de forclusion, de sorte que l'action en paiement n'est pas forclose.

11. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 avril 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon autrement composée ;

Condamne le GIE [4] et la société [3] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par le GIE [4] et la société [3] et les condamne à payer à M. [F] la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit juin deux mille vingt-trois.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.