23 mai 2023
Cour d'appel de Chambéry
RG n° 18/02418

1ère Chambre

Texte de la décision

MR/SL





COUR D'APPEL de CHAMBÉRY





Chambre civile - Première section



Arrêt du Mardi 23 Mai 2023





N° RG 18/02418 - N° Portalis DBVY-V-B7C-GDV7



Décision attaquée : Jugement du Tribunal de Grande Instance de BONNEVILLE en date du 09 Novembre 2018





Appelants



Mme [N] [Y] veuve [P], demeurant [Adresse 2]



M. [G] [P], demeurant [Adresse 8]



Représentés par Me Fabrice PAGANELLI, avocat au barreau de CHAMBERY









Intimés



Mme [U] [P] veuve [M] [B]

née le 03 Mai 1950 à [Localité 23], demeurant [Adresse 1]



Représentée par Me Michel FILLARD, avocat postulant au barreau de CHAMBERY Représentée par la SELARL BASTID ARNAUD, avocats plaidants au barreau de BONNEVILLE





Mme [V] [S] [P] épouse [C]

née le 08 Octobre 1951 à [Localité 23], demeurant [Adresse 20]



Représentée par Me Michel FILLARD, avocat postulant au barreau de CHAMBERY Représentée par la SCP JOSEPH MANDROYAN, avocats plaidants au barreau de GRENOBLE





Mme [T] [S] [P]

née le 22 Mai 1964 à [Localité 23], demeurant [Adresse 21]



Représentée par Me Michel FILLARD, avocat postulant au barreau de CHAMBERY

Représentée par la SELARL FAVRE-DUBOULOZ-COFFY, avocats plaidants au barreau de THONON-LES-BAINS





M. [F] [P], demeurant [Adresse 5]



Sans avocat constitué







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Date de l'ordonnance de clôture : 27 Février 2023



Date des plaidoiries tenues en audience publique : 07 mars 2023



Date de mise à disposition : 23 mai 2023





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Composition de la cour :



Audience publique des débats, tenue en double rapporteur, sans opposition des avocats, par Mme Hélène PIRAT, Présidente de Chambre, qui a entendu les plaidoiries, en présence de Mme Myriam REAIDY, Conseillère, avec l'assistance de Sylvie LAVAL, Greffier,



Et lors du délibéré, par :



- Mme Hélène PIRAT, Présidente,



- Mme Inès REAL DEL SARTE, Conseiller,



- Mme Myriam REAIDY, Conseillère,





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Faits et procédure





Mme [N] [Y] et M. [W] [P] se sont mariés le 19 mai 1949 sous le régime de la communauté légale alors applicable.



De leur union sont issus cinq enfants : Mmes [U], [V] et [T] [P], et MM. [G] et [F] [P].



Le 11 janvier 1957, M. [W] [P] a reçu par donation-partage un ensemble immobilier comprenant un ancien chalet, un bâtiment annexe et six hectares de terrain, sis [Adresse 2].



Le 19 août 1957, les époux [P] ont contracté solidairement un crédit destiné à payer la soulte due par M. [W] [P] dans le cadre de cette donation-partage. Ce crédit a été intégralement remboursé par la communauté.



Ce chalet est devenu le domicile conjugal et des travaux y ont été réalisés ; ces travaux ont été financés par la communauté.



Le 14 janvier 1972, M.'[W] [P] a fait donation à sa fille [U], en avancement de part successorale, d'un terrain sis à [Localité 23] et cadastré section F n°[Cadastre 7], avec dispense de rapport en nature et obligation de faire rapport à la succession de la somme de 30'000 francs.



Le 26 mars 1983, Mme [N] [Y] et M. [W] [P] ont fait donation à [F], en avancement de part successorale, d'un terrain sis à [Localité 23] et cadastré section F n°[Cadastre 6].



Le 23 août 2002, M. [W] [P] est décédé, laissant pour lui succéder sa veuve et ses cinq enfants. Il n'avait pas établi de testament.



Mme [N] [Y] a opté pour le quart en pleine propriété de l'ensemble de la succession et a indiqué entendre user de son droit viager de jouissance du domicile conjugal.





Par actes des 9, 12 et 13 janvier 2004, Mme [N] [Y] et MM. [G] et [F] [P] assignaient Mmes [U], [V] et [T] [P] devant le tribunal de grande instance de Bonneville aux fins de compte, liquidation et partage de la succession de feu [W] [P]. L'affaire a été enrôlée sous le n° RG 4/140.





Par jugement du 14 janvier 2005, le tribunal de grande instance de Bonneville a, notamment :



- ordonné la liquidation et le partage de la communauté [Y]-[P] et de la succession de [W] [P] ;



- fixé la date du partage à celle de ce jugement ;



- rejeté la demande d'imputation sur la quotité disponible de la donation consentie à Mme'[U] [P] ;



- ordonné une expertise immobilière.





Par arrêt du 26 septembre 2006 rendu sur appel des défenderesses, la cour d'appel de Chambéry a, notamment :



- fixé la date du partage à la date la plus proche de celle de la jouissance divise ;



- dit que la donation consentie à Mme [U] [P] doit s'imputer sur la quotité disponible ;



- dit que la donation consentie à M. [F] [P] doit s'imputer sur la réserve à concurrence de la moitié du bien reçu ;

- confirmé le jugement entrepris pour le surplus.



L'expert immobilier désigné, M. [J], a rendu son rapport le 10 mars 2008 et l'instance a été reprise.





Par jugement du 11 mai 2010, le tribunal de grande instance de Bonneville a, notamment :



- donné acte aux parties de leur accord sur la description, la situation des biens, et la valeur de ceux-ci au jour du dépôt du rapport d'expertise, soit 10'968 955'euros ;



- dit que la succession doit récompense à la communauté à hauteur de 2'463'866'euros dont 127'400'euros au titre des travaux sur la ferme et 2'336'466'euros au titre du remboursement du prêt en règlement de la soulte en partage ;



- dit que la succession a un droit de reprise de 5 534'euros ;



- dit que Mme [N] [P] a un droit de reprise de 1 562'euros ;



- évalué le terrain donné à Mme [U] [M]-[B] à la somme de 660'000'euros ;



- dit que le rapport dû par M. [F] [P] pour la donation en avancement d'hoirie de 1983 est de 163 567'euros ;



- dit que le droit viager au logement de Mme [N] [P] s'évalue à la somme de 1'198'000'euros ;



- débouté M. [X] [P], Mme [N] [P] et M. [F] [P] de leur demande de partage en deux blocs ;



- dit que Mme [N] [P] pourra exercer ses droits en priorité sur la ferme ;



- débouté M. [F] [P] de sa demande d'attribution préférentielle ;



- renvoyé les parties devant le notaire liquidateur aux fins d'établissement de lots ou de licitation et d'établissement de l'état liquidatif.





Par arrêt du 4 octobre 2011 rendu après appel des défenderesses, la cour d'appel de Chambéry a, notamment :



- commis le président de la chambre interdépartementale des notaires des Savoie ou son représentant pour procéder aux opérations de partage et de liquidation de la communauté ayant existé entre les époux [Y]-[P], et de la succession de M. [W] [P] ;



- corrigé l'erreur matérielle contenue dans le jugernent et dit qu'il évalue le droit viager au logement de Mme [P] à 198'000'euros et non 1'198'000'euros ;



- confirmé le jugement en ce qu'il a débouté M. [F] [P] de sa demande d'attribution préférentielle ;



- dit que Mme [N] [P] a droit à une reprise de 1 562'euros ;



- évalué le bien donné à Mme [U] [P] à 660'000'euros ;



- rejeté la demande de partage en deux blocs ;



- débouté les demandeurs de leurs demandes de partage provisionnel des frais d'expertise et d'attribution d'une provision à Mme [N] [P] ;



- débouté celle-ci de sa demande de dommages et intérêts ;



- débouté les mêmes de leur demande de condamnation de Mme [U] [P] à payer des intérêts de retard et indemniser un prejudice économique pour empiètement ;



- débouté les mêmes de leur demande de condamnation des appelantes à indemniser leur mère d'un préjudice économique ;



- constaté que Mme [T] [P] doit rapporter la somme de 10'000'euros ;



- dit que les intérêts sur les rapports des sommes dues seront calculés par le notaire commis au moment de l'établissement de l'état liquidatif ;



- dit que le droit d'habitation de Mme [N] [P] doit s'exercer sur le seul logement et ses dépendances, à l'exclusion de tout autre élément immobilier et notamment du gîte ;



- sur les évaluations immobilières, récompenses et rapports relatifs à des immeubles, ordonné une nouvelle expertise confiée finalement à MM. [R] et [A].



Me [K] [H], notaire à [Localité 24] a été désignée pour procéder aux opérations de compte, liquidation et partage.



M. [A], a rendu son rapport le 27 mars 2013.





Par arrêt du 18 février 2014, la cour d'appel a réformé partiellement et complété le jugement du 11 mai 2010 en ce sens que :



- le rapport dû par M. [F] [P] à la succession de son père pour la donation de 1983 s'élève à 255'865'euros ;



- la valeur des immeubles composant la succession de [W] [P] a été fixée à 17'085'274'euros dont 5'413'600'euros pour la parcelle AT[Cadastre 14], valeur composée de 1 400 000'euros pour le chalet et 4'013'600'euros pour le reste du terrain ;



- le jugement a été confirmé pour le surplus, particulièrement en ce qu'il a dit que la communauté des époux [W] [P]-[N] [Y] a deux créances de récompenses de 2 336 466 euros et 127 400 euros contre les biens propres de [W] [P], qu'elle doit récompense de 5 534 euros à la succession de [W] [P] et une autre de 1 562 euros à Mme [N] [P] ;



- Mme [T] [P] doit à l'indivision les intérêts au taux légal sur 10'000'euros à compter du 2 mai 2003 ;



- les parties appelantes ont été déboutées de leur demande d'intégration dans les comptes d'indivision des loyers des gîtes ;



- les parties ont été renvoyées devant le notaire pour parfaire les comptes d'indivision et poursuivre la liquidation du partage.



Le 9 octobre 2015, Me [K] [H] a établi un procès-verbal de dires qu'elle a transmis le 29 octobre 2015 accompagné de deux projets d'état liquidatif fondés sur deux hypothèses distinctes :



- «'hypothèse 1'» : réévaluation du montant des récompenses en fonction de l'évolution du marché immobilier ;

- «'hypothèse 2'» : maintien du montant des récompenses telles que fixées par l'arrêt du 18 février 2014.



L'instance a été reprise sous le n° RG 16/41.





Pendant le cours de la mise en état, plusieurs décisions judiciaires ont été rendues :



- Le 17 juin 2016, le juge aux affaires familiales saisi en référé, par Mme [N] [Y] à laquelle se sont joints MM. [F] et [G] [P], de plusieurs demandes dont une demande de condamnation de Mmes [U], [V] et [T] [P] à payer à Mme [N] [Y] la somme provisionnelle de 6'156'577'euros au titre de son droit de récompense due par la succession à la communauté, a déclaré le juge aux affaires familiales comme le juge des référés incompétents pour connaître de la procédure engagée au profit du tribunal de grande instance de Bonneville et a renvoyé le dossier au président du tribunal de grande instance de Bonneville.



- Par ordonnance du 27 juin 2016, le juge de la mise en état a ordonné une médiation. Cette mesure a été renouvelée par ordonnance du 17 novembre suivant.



- Par ordonnance du 19 octobre 2017, le président du tribunal de grande instance de Bonneville a, notamment, ordonné une avance en capital sur les droits de Mme [N] [Y] dans l'indivision post communautaire et successorale consécutive au décès de M. [W] [P] à concurrence de 50'000'euros, somme à remettre à l'intéressée par le notaire par prélèvement sur les fonds disponibles de l'indivision.



- Par ordonnance du même jour, la même juridiction a, notamment, autorisé Mme [N] [Y] et M. [G] [P] à passer seuls l'acte de vente au profit de la société DCB international portant sur les lots A, B et D, d'un ensemble immobilier divisé en nature de parcelles de terrain à bâtir figurant au cadastre de la commune de [Localité 23], [Adresse 22]» sous les numéros AT [Cadastre 9], [Cadastre 10], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 13], [Cadastre 15], AV[Cadastre 16], [Cadastre 17], [Cadastre 4] et [Cadastre 3] pour une superficie totale de 15'765 m², au prix de 11'590'000'euros hors taxes et hors droits d'enregistrement, aux conditions du compromis déjà signé par eux les 27 janvier et 1er février 2017.



Cependant, le permis de construire sollicité a été refusé par arrêté du 21 novembre 2017 et la vente projetée n'a finalement pas eu lieu.



Par jugement rendu le 9 novembre 2018, le tribunal de grande instance de Bonneville a :



- déclaré irrecevables les demandes suivantes formées par Mme [N] [Y] veuve [P] et MM. [G] et [F] [P] :

« - dire et juger que la récompense de 2'463 866 euros (valeur décès) doit être réévaluée à la date de la jouissance divise qui est la date la plus proche possible du partage ;

- écarter par conséquent « l'hypothèse 2 : récompenses arrêtées par la CA Chambéry 18/02/14'» du projet de partage établi par Me [K] [H], comme contraire aux règles de droit applicables ;

- dire et juger que seule «'l'hypothèse 1 réévaluation des récompenses » du projet de partage établi par Me [H], peut être retenue ;

- dire que « l'hypothèse 1 réévaluation des récompenses'» du projet de partage établi par Me'[K] [H], notaire, doit être rectifiée sur les points portés dans les tableaux rectificatifs portant les numéros de pièces 118, 119 et 120 et plus particulièrement les points suivants :

- actif de communauté (page 17) : 2'463'866'euros (au lieu de 2'458'332'euros) ;

- sous total de l'actif de communauté (page 17) : 2'540'903,94'euros (au lieu de 2'535'369,94'euros) ;

- passif de communauté (page 17) : 25 421 euros (au lieu de 7682 euros) ;

- actif net de communauté : 2'515'482,94'euros (au lieu de 2'527'687,94'euros) ;

- moitié de l'actif net de communauté revenant à la succession : 1'257'741,47'euros (au lieu de 1'263'843,97'euros) ;

- actif de succession : 4 885 267,09 euros (au lieu de 4 885 835,59 euros) ;

- passif de succession : 2 464 776 euros (au lieu de 2 512 153,66 euros) ;

- actif net de succession : 2 420 491,09 euros (au lieu de 2 373 681,93 euros) ;

- droits du conjoint survivant : 443 096,24 euros (au lieu de 166 920,20 euros) ;

- actif de succession (page 18) : 4 885 267,09 euros (au lieu de 4 885 835,59 euros) ;

- passif de succession : 2 464 776 euros (au lieu de 2 512 153,66 euros) ;

- actif net de succession : 2 420 491,09 euros (au lieu de 2 373 681,93 euros) ;

- droits du conjoint survivant (page 20) 443 096,24 euros (au lieu de 166 920,20 euros) ;

- valeur reconstituée du patrimoine d'origine (page 23) : 19 245 734'euros (au lieu de 17'464'055 euros) ;

- récompense : 12 830 489'euros (au lieu de 11 642 703'euros) ;

- actif de communauté reconstitué pour le partage : 13 092 307,46 euros (au lieu de 11'904'521,38 euros) ;

- actif net de communauté (page 24) : 13 085 211,46 euros (au lieu de 11 897 425,38 euros) ;

- moitié revenant à la succession : 6'542 605,73 euros (au lieu de 5 948 712,69 euros) ;

- actif de succession reconstitué pour le partage (page 24) : 25 733 800,06 euros (au lieu de 24 004 583,33 euros) ;

- passif de succession reconstitué pour le partage: 13 063 989,08 euros (au lieu de 11'876'203'euros) ;

- actif net de succession: 12 669 810,98'euros (au lieu de 12 128 380,33 euros) ;

- compte d'administration (page 25) ;

- passif de communauté reconstitué pour le partage : 25 421 euros (au lieu de 878 893,12 euros)';

- passif de succession reconstitué pour le partage (page 26) : 1 142 613,40 euros (au lieu de 535 330,81 euros) ;

- passif total compte d'administration : 1 168 034,40 euros (au lieu de 1'414 223,93 euros) ;

- total encaissements : 727 677,24 euros (au lieu de 718 606,02 euros) ;

- somme à rapporter à la masse partageable : - 386 647,22 euros (au lieu de - 667 883,29'euros)';

- masse à partager ;

- actif (page 27) : 18 486 301,47 euros (au lieu de 17 360 049 euros) ;

- masse partageable : 18 099 654,25 euros (au lieu de 16 692 165,7l euros) ;

- droits masse à partager [N] : 3 167 452,75 euros (au lieu de 3 032 095,08 euros) ;

- passifs à charge [N] : 254 606,98 euros (au lieu de 683 140,90 euros) ;

- droits masse à partager enfant : 1 900 471,65 euros (au lieu de 1 819 257,05 euros) ;

- passifs à charge enfant (communs pour 3 sur 5) : 184 552,89 euros (au lieu de 146'216,61'euros)';

- dire que l'acte de partage de la succession de M. [W] [P] doit être établi en intégrant ces modifications » ;



- rejeté les demandes formulées par Mmes [T] [P] et [V] [P] épouse [C] aux fins de sursis à statuer ;



- rejeté la demande d'expertise formulée par Mme [U] [P] épouse [M]-[B]';



- rejeté la demande aux fins de remplacement de Me [K] [H] ;



- rejeté les demandes d'attribution de divers biens immobiliers formulées par Mme'[U] [M]-[B], à l'exception de celles qui sont satisfaites dans le projet d'acte liquidatif annexé par Me [K] [H] à son procès-verbal de dires du 9 octobre 2015 sous la désignation d'« hypothèse 2'» ;



- homologué pour le surplus le projet d'acte liquidatif annexé par Me [K] [H] à son procès-verbal de dires du 9 octobre 2015 sous la désignation d'« hypothèse 2'» ;



- rejeté la demande aux fins de voir les parties renvoyées devant le notaire pour signature de l'acte de partage ;



- rejeté la demande indemnitaire formulée par Mme [V] [P] épouse [C] ;



- fait masse des dépens, dit qu'ils seront employés en frais privilégiés de partage et que chacune des parties en supportera la charge à hauteur de ses droits dans la succession ;



- condamné Mme [N] [Y] veuve [P] et M. [G] [P] à verser la somme de 5000'euros (cinq mille euros) à Mme [T] [P] sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;



- condamné Mme [N] [Y] veuve [P] et MM. [G] et [F] [P] à verser les sommes de 5000 euros (cinq mille euros) à Mme [V] [P] épouse [C] et 3000'euros (trois mille euros) à Mme [U] [P] épouse [M]-[B] ;



- rejeté la demande d'exécution provisoire de la présente décision.



Le tribunal a retenu que :



' la cour d'appel a fixé clairement, sans condition ni réserve, le montant des créances de récompenses de la communauté des époux [W] [P]-[N] [Y] sur les biens propres de [W] [P] à hauteur de 2'463'866'euros ;



' la réévaluation judiciaire du montant des récompenses se heurte à l'autorité de la chose jugée par l'arrêt de la cour d'appel de Chambéry en date du 18 février 2014, de sorte que les demandes s'appuyant sur le projet d'état liquidatif désigné comme l'« hypothèse 1'» seront déclarées irrecevables ;



' Mmes [T] [P] et [V] [P] épouse [C] demandent à la juridiction de surseoir à statuer, pour l'une « jusqu'à pleine connaissance de la valeur du patrimoine indivis'» pour l'autre « jusqu'à la vente de l'article 6'», c'est à dire des parcelles répertoriées sous ce numéro dans le projet d'état liquidatif, force est de constater que ces demandes ne prévoient qu'un terme dont la date de réalisation est inconnue, voire hypothétique ;



' les conclusions comme les pièces versées aux débats par les parties n'apportent aucune autre information, et en particulier aucune donnée chiffrée, concernant l'éventuelle fluctuation de la valeur des biens relevant de l'indivision successorale depuis la dernière expertise, ni même concernant la consistance exacte des biens visés, dès lors, Mme'[U] [P] n'établit ni l'existence, ni l'actualité d'une telle fluctuation, ni même son caractère certain pour l'avenir';



' il résulte de la lecture du procès-verbal de dires que ceux-ci ne contiennent que très peu de points susceptibles de constituer des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile, ainsi, les seules prétentions identifiables de Mme [U] [P] épouse [M]-[B] sont des demandes d'attribution à elle-même de : « la totalité des (...) parcelles AV[Cadastre 18] et AV[Cadastre 19]'», « du terrain sur la parcelle AV[Cadastre 3]'», « la ferme avec 1135m² de terrain, en indivision avec (ses) soeurs'», « partie des terres agricoles et des bois'» ;



' sa demande d'attribution des parcelles cadastrées section AV n°[Cadastre 18] et [Cadastre 19] est satisfaite dans le projet d'état liquidatif retenu ;



' sa demande d'attribution de «'la ferme'», qui vise très vraisemblablement le bâtiment sis [Adresse 2] ayant constitué l'ancien domicile conjugal, se heurte au droit à l'attribution préférentielle de Mme [N] [Y], conjoint survivant qui y résidait au moment du décès ;



' ses demandes d'attribution d'une «'partie de la parcellé cadastrée section AV n°[Cadastre 3]'»'et d'une «'partie des terres agricole et bois'» seront rejetées, leur imprécision et leur absence totale de motivation ne permettant pas d'y faire droit ;



' il résulte de ce qui précède que le projet d'état liquidatif désigné sous l'appellation d'«'hypothèse 2'» sera homologué dans son intégralité ;



' les demandeurs visent au soutien de leur demande de remplacement du notaire l'article 1371 alinéa 2 du code de procédure civile, qui cependant n'est applicable qu'au juge commis et non au notaire ;



' il est indéniable que la durée de la procédure et les nombreux incidents l'ayant émaillée n'ont pu qu'entraîner une dégradation des conditions de vie de Mme [V] [P] épouse [C], cependant, elle n'apporte pas la preuve que ces circonstances résulteraient spécifiquement d'un comportement fautif des demandeurs, alors que chacune des parties, elle y compris, y a participé en formulant des demandes d'expertise ou de sursis à statuer ou en interjetant appel des décisions rendues.





Par déclaration au Greffe en date du 19 décembre 2018, Mme [N] [Y] et M. [G] [P] interjetaient appel de ce jugement en toutes ses dispositions.









Prétentions des parties





Par dernières écritures en date 26 janvier 2023, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, Mme [N] [Y] et M. [G] [P] sollicitaient l'infirmation du jugement déféré et demandaient à la cour de :



- réformer le jugement rendu le 9 novembre 2018 par le tribunal de grande instance de Bonneville,



- dire et juger que les demandes fondée sur « l'hypothèse 1 réévaluation des récompenses'» de Me [H] sont recevables et ne contreviennent pas à l'autorité de chose jugée, en retenant que l'application des articles 829 et 1476 du code civil aboutit à une recherche de la valeur au jour de la jouissance divise des récompenses, et en jugeant que les valeurs contenues dans l'arrêt du 18 février 2014 ne bénéficient pas de l'autorité de chose jugée, à défaut de fixation dans cet arrêt de la date de jouissance divise';



- dire et juger que la récompense de 2'463'866'euros (valeur décès) doit être réévaluée à la date de la jouissance divise qui est la date la plus proche possible du partage ;



- écarter par conséquent « l'hypothèse 2 : récompenses arrêtées par la cour d'appel de Chambéry 18/02/14 » du projet de partage établi par Me [K] [H], comme contraire aux règles de droit applicables ;



- dire et juger que seule «l'hypothèse 1 réévaluation des récompenses » du projet de partage établi par Me [H], peut être retenue ;



- dire que « l'hypothèse 1 réévaluation des récompenses » du projet de partage établi par Me'[K] [H], notaire, doit être rectifiée sur les points portés dans les tableaux rectificatifs portant les numéros de pièces 118, 119 et 120 et plus particulièrement les points suivants :

- actif de la communauté (page 17) : 2'463'866'euros (au lieu de 2'458'332'euros) ;

- sous total de l'actif de communauté (page 17) : 2'540'903,94'euros (au lieu de 2'535'369,94'euros) ;

- passif de communauté (page 17) : 25 421 euros (au lieu de 7682 euros) ;

- actif net de communauté : 2'515'482,94'euros (au lieu de 2'527'687,94 euros) ;

- moitié de l'actif net de communauté revenant à la succession : 1'257'741,47'euros (au lieu de 1'263'843,97'euros) ;

- actif de succession : 4 885 267,09 euros (au lieu de 4 885 835,59 euros) ;

- passif de succession : 2 464 776 euros (au lieu de 2 512 153,66 euros) ;

- actif net de succession : 2 420 491,09 euros (au lieu de 2 373 681,93 euros)

- droits du conjoint survivant : 443 096,24 euros (au lieu de 166 920,20 euros)

- actif de succession (page 18) : 4 885 267,09 euros (au lieu de 4 885 835,59 euros) ;

- passif de succession : 2 464 776 euros (au lieu de 2 512 153,66 euros) ;

- actif net de succession : 2 420 491,09 euros (au lieu de 2 373 681,93 euros)

- droits du conjoint survivant (page 20) 443 096,24 euros (au lieu de 166 920,20 euros);

- valeur reconstituée du patrimoine d'origine (page 23) : 19 245 734'euros (au lieu de 17 464 055 euros) ;

- récompense : 12 830 489'euros (au lieu de 11 642 703'euros) ;

- actif de communauté reconstitué pour le partage : 13 092 307,46 euros (au lieu de11'904 521,38 euros) ;

- actif net de communauté (page 24) : 13 085 211,46 euros (au lieu de 11 897 425,38 euros) ;

- moitié revenant à la succession : 6'542 605,73 euros (au lieu de 5 948 712,69 euros) ;

- actif de succession reconstitué pour le partage (page 24) : 25 733 800,06 euros (au lieu de 24 004 583,33 euros) ;

- passif de succession reconstitué pour le partage: 13 063 989,08 euros (au lieu de 11 876 203,00 euros) ;

- actif net de succession: 12 669 810,98'euros(au lieu de 12 128 380,33 euros)

- compte d'administration (page 25) ;

- passif de communauté reconstitué pour le partage : 25 421 euros (au lieu de 878 893,12 euros)';

- passif de succession reconstitué pour le partage (page 26) : 1 142 613,40 euros (au lieu de 535 330,81 euros) ;

- passif total compte d'administration : 1 168 034,40 euros (au lieu de 1'414 223,93 euros) ;

- total encaissements : 727 677,24 euros (au lieu de 718 606,02 euros) ;

- somme à rapporter à la masse partageable : - 386 647,22 euros (au lieu de - 667 883,29'euros)';

- masse à partager ;

- actif (page 27) : 18 486 301,47 euros (au lieu de 17 360 049 euros) ;

- masse partageable : 18 099 654,25 euros (au lieu de 16 692 165,7l euros) ;

- droits masse à partager [N] : 3 167 452,75 euros (au lieu de 3 032 095,08 euros) ;

- passifs à charge [N] : 254 606,98 euros (au lieu de 683 140,90 euros)

- droits masse à partager enfant : 1 900 471,65 euros (au lieu de 1 819 257,05 euros) ;

- passifs à charge enfant (communs pour 3 sur 5) : 184 552,89 euros (au lieu de 146 216,61'euros)';



- dire que l'acte de partage de la succession de M. [W] [P] doit être établi en intégrant ces modifications et qu'il devra comprendre le remboursement des frais de conservation du bien à [N] et [G] [P], en application des articles 815-2 alinéa 3, 815-12 et 815-13 du code civil ;



- dire que M. [G] [P] sera indemnisé par l'indivision pour avoir supporté seul les frais des autorisations d'urbanisme et des travaux nécessaires à sauvegarder la constructibilité du lot D, dans les termes de l'article 815-13 du code civil, soit «'eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l'aliénation'», et en tenant compte de la conservation de la valeur du terrain au montant de 400 000 euros et de la construction réalisée ;



- dire et juger que les réévaluations pourront être basées sur les valeurs vénales des parcelles vendues ou ayant fait l'objet d'une licitation ;



- dire et juger qu'il sera tenu compte du préjudice de 6'331'349'euros subi par l'indivision pour l'article deux et les lots A, B et C du fait de Mmes [U], [T] et [V] [P] dans les comptes de partage ;



- dire et juger que les sommes restant dues par Mme [U] [M]-[B] au titre de la licitation du 30 mars 2018 au jour du partage feront l'objet d'une compensation avec les sommes versées dans le cadre du partage ;



- débouter Mmes [U] [M]-[B], [V] [C] et [T] [P] de leurs demandes fins et conclusions, notamment de leurs demandes d'indemnisation ;



- débouter les intimées de leur demande d'expertise judiciaire ou de sursis à statuer ;



- renvoyer en conséquence les parties devant Me [H] pour, après les rectifications sollicitées, signer l'acte de partage ;



- condamner Mmes [U] [M]-[B], [V] [C] et [T] [P] à payer chacune à Mme [N] [P] et M. [G] [P] la somme de 6000'euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;



- dire que les entiers dépens de première instance et d'appel seront employés en frais privilégiés de liquidation et partage.







Par dernières écritures en date du 21 février 2023, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, Mme [T] [P] sollicitait de la cour de :



- débouter Mme [N] [P] et M. [G] [P] de leur appel ;



- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Bonneville le 9 novembre 2018 en ce qu'il a :

- reconnu l'autorité de la chose jugée de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Chambéry le 18 février 2014 ;

- fixé les récompenses dans la liquidation de la communauté et de la succession à 2'336'460 euros et 127 400 euros dus à la communauté contre les biens propres de M. [W] [P], de 5534'euros dus par la communauté à la succession et une autre de 1562 euros à Mme'[N] [P] ;

- homologué l'hypothèse n° 2 concernant la liquidation du régime matrimonial et de la succession résultant du procès-verbal de difficultés dressé par Me [H], notaire désigné par la cour ;

- dit irrecevable l'ensemble des demandes de Mme [N] [P] et de MM. [F] et [G] [P] concernant les rectifications alléguées de comptes sur l'hypothèse n°1, écartées par le tribunal ;

- confirmé la désignation de Me [H], notaire à [Localité 24] à qui sera renvoyée l'affaire sur la continuité des opérations de partage sur la base de l'arrêt à intervenir ;

- condamné Mme [N] [P] et M. [G] [P] au paiement de la somme de 5000'euros au bénéfice de Mme [T] [P] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;



- débouter les appelants de l'homologation de l'hypothèse n°1 ;



- dire irrecevable, et en tout état de cause l'en débouter, les demandes indemnitaires formulées par M. [G] [P] et sa mère à hauteur d'appel ;



- débouter M. [G] [P] de sa demande d'attribution de lot D pour une valeur de 400'000'euros';



- le débouter de sa demande de dommages et intérêts de 6 331'349'euros ;



- condamner en outre à hauteur d'appel M. [G] [P] et Mme [N] [P] à la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;



- les condamner aux dépens qui seront distraits au bénéfice de Me Michel Fillard, avocat au barreau de Chambéry.









Par dernières écritures notifiées par RPVA en date du 27 février 2023, Mme [U] [P] veuve [M]-[B] prétend au :



- débouté Mme [N] [P] et M. [G] [P] de leur appel, et voir confirmer le jugement du 9 novembre 2018 ;



- condamnation de Mme [Y] veuve [P] et M. [P] à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;



- rejet des demandes de nouvelle expertise des terrains compte tenu des ventes et offres d'achat intervenues ;



- déclaration d'irrecevabilité des demandes de rectification et demandes indemnitaires de Mme [Y] veuve [P] et M. [P], comme étant nouvelles en appel, subsidiairement à leur rejet;



- rejet de la demande d'attribution du lot n°2 de 400 000 euros de M. [G] [P] ;



- rejet de la demande de dommages et intérêts à hauteur de 6 331 349 euros, aucune faute commise par la concluante n'étant démontrée ;



- condamnation de Mme [Y] veuve [P] et M. [G] [P] au paiement de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;



- emploi des dépens en frais privilégiés de partage.









Par dernières écritures notifiées par RPVA en date du 23 février 2023, Mme [V] [P] épouse [C] sollicite de la cour de :



- statuer ce que de droit sur la recevabilité quant à la forme de l'appel de Mme [N] [Y] veuve [P] et de M. [G] [P] à l'encontre du jugement entrepris, et le déclarer mal fondé ;



- confirmer le jugement en ce qu'il a, au nom de l'autorité de la chose jugée, déclaré irrecevables leurs demandes basées sur l'hyptohèse 1 'réévaluation des récompenses' et telles que présentées dans le dispositif de leurs conclusions d'appel ;



- rejeter les demandes tendant à intégrer dans l'acte de partage les modifications apportées par les appelants, ainsi que le remboursement des frais de conservation du bien, formulées en application des articles 815-2 alinéa 3, 815-12 et 815-13 du code civil ;



- rejeter la demande d'indemnisation de M. [G] [P] par l'indivision pour avoir supporté seul les frais des autorisations d'urbanisme et des travaux nécessaires à sauvegarder la constructibilité du lot D, dans les termes de l'article 815-13 du code civil 'eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l'aliénation', et en tenant compte de la conservation de la valeur du terrain au montant de 400 000 euros et de la construction réalisée ;



- déclarer prescrites les demandes de réparation concernant la perte de constructibilité de l'article 2, et la perte de l'investisseur DBC International ;



- au surplus, déclarer irrecevables car nouvelles en appel toutes demandes d'indemnisation ;



- subsidiairement, si la cour venait à les recevoir, les déclarées mal fondées et encore plus subsidiairement réduire dans de notables proportions l'indemnité de 6 331 349 euros réclamée par les appelants, et ce, au nom de l'équité ;



- accueillir l'appel incident de Mme [C] ;



- renvoyer les parties devant Me [H] pour que, sans modifier le montant des récompenses, elle reprenne le projet hypothèse 2 en tenant compte de l'évolution de la valeur des biens immobiliers, de leur vente et des conséquences qui en résultent pour les attributions,



- condamner Mme [N] [Y] veuve [P] et M. [G] [P] à payer solidairement à Mme [V] [C] la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral subi du fait de ces multiples et inombrables procédures ;



- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Mme [N] [Y] veuve [P], M. [G] [P] et M. [F] [P] à payer à Mme [V] [C] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;



- y ajoutant, condamner Mme [Y] veuve [P] et M. [G] [P] à payer chacun à Mme [C] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;



- emploi des dépens en frais privilégiés de partage.







Une ordonnance en date du 27 février 2023 clôture l'instruction de la procédure.





Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère aux conclusions visées par le greffe et développées lors de l'audience, ainsi qu'à la décision entreprise.












MOTIFS ET DECISION







I- Sur l'autorité de chose jugée de l'évaluation des récompenses





L'article 480 du code de procédure civile dispose que le jugement qui tranche en son dispositif tout ou partie du principal, ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche, le principal devant s'entendre comme l'objet du litige tel que déterminé par l'article 4 du même code.



Ce moyen constitue une fin de non-recevoir selon l'article 122 du même code.



L'article 1469 du code civil fixe le mode d'évaluation des récompenses entre les époux et la communauté de biens existante entre eux du temps du mariage, mais n'est pas d'ordre public, et supporte par exemple des aménagements conventionnels (1ère Civ. 28 juin 1983, pourvoi n°81-12.926).



L'article 1473 du code civil fait courir le point de départ des intérêts portant sur une récompense due par la communauté ou à la communauté du jour de la dissolution, ou du jour de la liquidation lorsque la récompense est égale au profit subsistant.



Les décisions de jurisprudence citées par les appelants (1ère Civ. 8 avril 2009, pourvoi 07-21.561) conditionnent l'autorité de chose jugée attachée aux valeurs des biens à partager à la fixation de la date de la jouissance divise, et ne concernent pas les montants des récompenses prises en compte par Me [H] dans son projet d'acte liquidatif. Il n'est en outre pas allégué que les expertises judiciaires réalisées par M. [J] et M. [A] étaient insuffisantes, et les juges du fond, déjà saisis en raison du désaccord des héritiers d'une demande tendant à l'évaluation de la récompense, ont mis définitivement fin au litige sur ce point dans leur pouvoir souverain d'appréciation (1ère Civ. 10 février 1976, pourvoi 73-14.126).



C'est donc par une exacte appréciation des circonstances de la cause que le premier juge a estimé que l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du tribunal de grande instance de Bonneville du 11 mai 2010 et à l'arrêt définitif du 18 février 2014 de la cour d'appel de Chambéry s'oppose à ce que soient remises en cause l'évaluation des récompenses dues par la succession de [W] [P] à la communauté.



Enfin, de façon superfétatoire, il doit être rappelé que la partie seule responsable du retard pris dans les opérations de partage, en usant systématiquement de la voie d'appel et multipliant les procédures n'est pas en droit de se plaindre de la fixation d'une date de jouissance divise lointaine par rapport à la date du partage (1ère Civ. 4 mai 1953). Ainsi, il y a lieu de constater que Mme [N] [Y] et M. [G] [P], sont à l'origine de nombreuses procédures, depuis l'arrêt de 2014 et le projet de partage de Me [H] de 2015 :

- jugement du juge aux affaires familiales du 17 juin 2016, sur assignation de l'appelante du 31 juillet et du 7 août 2015,

- ordonnance statuant en la forme des référés du 15 mars 2018, sur assignation des appelants des 13 et 16 février 2016,

- ordonnance statuant en la forme des référés du 13 juin 2019, sur assignation des appelants des 10, 20 et 22 mars 2019,

de sorte qu'ils ne peuvent prétendre à voir rediscuter un point tranché définitivement par la cour d'appel et permettant d'avancer dans les opérations de partage au seul motif qu'un laps de temps important s'est écoulé.



Il sera donc retenu que l'hypothèse n°2 établie par le notaire, intégrant dans ses calculs les montants des récompenses arrêtées dans les décisions judiciaires du 11 mai 2010 et confirmées par arrêt du 18 février 2014 doit être validée, en écartant l'hypothèse n°1 et les multiples corrections auxquelles prétendent M. [G] [P] et Mme [N] [Y] veuve [P], qui deviennent de ce fait, sans objet. Pour autant, l'homologation ne peut être prononcée en l'état, dans la mesure où la consistance des biens à partager a été modifiée, par une vente du 31 mai 2021 à un tiers, et par une licitation au bénéfice de Mme [M]-[B]. Cette transformation d'une partie des biens immobiliers à partager en liquidités devrait faciliter la création de lots et leur attribution dans l'acte de partage à établir.







II- Sur la demande d'indemnisation et d'attribution d'un bien de M. [G] [P]





L'article 564 du code de procédure civile dispose 'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.'



La demande de M. [G] [P] de se voir rembourser des frais de 'préservation de la constructibilité' d'une partie des biens immobiliers de la succession, ou encore d'attribution d'un bien, est présentée pour la première fois en appel, ce que Mme [M]-[B] a soulevé, de sorte que son irrecevabilité doit être retenue.





III- Sur la demande indemnitaire de Mme [C]





Mme [C] formule une demande de réparation d'un préjudice moral, sur le fondement de l'article 1240 du code civil, mais ne fournit aucun élément justifiant de la dégradation de sa santé mentale ou de sa situation financière en lien avec les multiples procédures introduites par Mme [N] [P] et M. [G] [P], qui ont émaillé les 20 dernières années.



C'est donc à l'issue d'une analyse pertinente, exhaustive, exempte d'insuffisance que le premier juge a rejeté la demande d'indemnisation de Mme [C].







IV- Sur les demandes accessoires





Mme [N] [P] et M. [G] [P] sont à l'origine de nombreuses procédures au cours de ce partage, ce qui justifie qu'ils soient condamnés à supporter les dépens, outre les frais de procédure de leurs copartageantes à hauteur de 3 000 euros pour chacune d'entre elles.











PAR CES MOTIFS





La cour, statuant publiquement, par décision réputée contradictoire,





Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a homologué le projet d'acte liquidatif annexé par Maître [K] [H] à son procès-verbal de dires du 9 octobre 2015 sous la désignation d'hypothèse 2,



Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a homologué le projet d'acte liquidatif annexé par Maître [K] [H] à son procès-verbal de dires du 9 octobre 2015 sous la désignation d'hypothèse 2,



Renvoie les parties devant Me [H] pour reprendre le projet d'acte liquidatif selon l'hypothèse 2, intégrant les montants de récompenses fixées dans le jugement du tribunal de grande instance de Bonneville du 11 mai 2010 et confirmées dans l'arrêt définitif du 18 février 2014 de la cour d'appel de Chambéry, et en tenant compte des ventes immobilières intervenues postérieurement au projet,



Y ajoutant,





Déclare irrecevables les demandes indemnitaires et d'attribution d'un bien immobilier de M. [G] [P],



Condamne Mme [N] [Y] veuve [P] et M. [G] [P] aux dépens de l'instance,



Condamne Mme [N] [Y] veuve [P] et M. [G] [P] à payer à Mme [T] [P], à Mme [V] [C] et à Mme [U] [M]-[B] la somme de 3 000 euros pour chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.







Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,



et signé par Hélène PIRAT, Présidente et Sylvie LAVAL, Greffier.





Le Greffier, La Présidente,



































































Copie délivrée le 23 mai 2023

à

Me Fabrice PAGANELLI

Me FILLARD













Copie exécutoire délivrée le 23 mai 2023

à

Me Fabrice PAGANELLI

Me FILLARD

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