23 mai 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-84.474

Chambre criminelle - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2023:CR00521

Titres et sommaires

GEOLOCALISATION - Officier de police judiciaire - Pouvoirs - Délégation de sa mission ou d'opérations techniques - Officiers ou agents compétents - Détermination

Il résulte des articles 706-95-17, alinéa 1, et 230-32, dernier alinéa, du code de procédure pénale que le magistrat compétent peut, pour la mise en place d'une mesure de sonorisation ou de géolocalisation incluant la réalisation des opérations techniques d'installation, d'utilisation et de retrait du dispositif, désigner tout officier de police judiciaire. Cet officier de police judiciaire peut confier l'exécution de sa mission à des officiers ou agents de police judiciaire placés sous son autorité. Le magistrat compétent ou l'officier de police judiciaire commis par lui tiennent encore des articles 706-95-17, alinéa 2, et 230-36 du code de procédure pénale la faculté de requérir tout agent qualifié d'un des services, unités ou organismes limitativement énumérés à l'article D. 15-1-5 du même code pour procéder auxdites opérations techniques

Texte de la décision

N° Z 22-84.474 FS-B N° 00521



ECF 23 MAI 2023


REJET


M. BONNAL président,



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 23 MAI 2023


M. [W] [Z] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 30 juin 2022, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de blanchiment, infractions aux législations sur les armes et sur les stupéfiants, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure.

Par ordonnance du 17 octobre 2022, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de Mme Thomas, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [W] [Z], et les conclusions de M. Croizier, avocat général, après débats en l'audience publique du 28 mars 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Thomas, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, MM. Maziau, Seys, Dary, conseillers de la chambre, M. Violeau, Mme Merloz, M. Michon, conseillers référendaires, M. Croizier, avocat général, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. M. [W] [Z] a été mis en examen le 11 octobre 2021 des chefs précités.

3. Le 7 avril 2022, il a déposé une requête en annulation de trois commissions rogatoires prescrivant la géolocalisation de deux véhicules et la sonorisation de l'un d'eux.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la requête en disant qu'il n'y a pas de cause de nullité jusqu'à la cote D4633, alors :

« 1°/ que sont irrégulières les commissions rogatoires autorisant la mise en place d'un dispositif technique ayant pour objet, sans le consentement des intéressés et à leur insu, la géolocalisation d'une personne ou d'un véhicule et la sonorisation effectuée en vue de la captation, de la fixation, la transmission et l'enregistrement des paroles prononcées à titre privé ou confidentiel dans des lieux ou véhicules privés ou publics ou de l'image de ces personnes, qui n'ont pas été délivrées à l'un des services, unités et organismes qualifiés, strictement et limitativement énumérés par l'article D. 15-1-5 du code de procédure pénale ; qu'en l'espèce, les trois commissions rogatoires du juge d'instruction en vue de procéder à la géolocalisation d'un véhicule Clio, les autres en matière de géolocalisation et sonorisation d'un autre véhicule Clio, ont été délivrées par le juge d'instruction au directeur du service départemental de la sécurité publique du Var qui ne fait pas partie des organismes qualifiés au sens de l'article D. 15-1-5 ; la circonstance selon laquelle les commissions rogatoires dont s'agit ont été exécutées par des officiers de police judiciaire du commissariat de police de [Localité 1], dépendant administrativement de la direction départementale de la sécurité publique du Var, ne saurait valider les commissions rogatoires litigieuses et les actes subséquents dans la mesure où ces commissions rogatoires sont radicalement et foncièrement irrégulières pour avoir été données à un organe ne relevant pas des services territoriaux de police judiciaire au sens dudit article D. 15-1-5 du code de procédure pénale et donc incompétent en violation de l'article D. 151-5 du code de procédure pénale, des articles 230-32, ensemble 706-95-17 et 706-96 du code de procédure pénale ;

2°/ que toute ingérence d'une autorité publique dans l'exercice du droit au respect de la vie privée doit faire l'objet d'un contrôle judiciaire efficace de nature à garantir sa stricte nécessité, et être confié à des services ou organismes qualifiés spécialement autorisés dans le cadre strict d'une commission rogatoire exécutée sous le contrôle du juge d'instruction ; qu'en l'espèce, seul le service départemental de la sécurité publique du Var, qui ne constitue pas l'un des organismes habilités au sens de l'article D. 15-1-5 du code de procédure pénale, ayant été destinataire des commissions rogatoires, l'exécution subséquente de la mesure par des officiers de police judiciaire des services territoriaux, qui n'ont pas été eux-mêmes désignés par le juge d'instruction, ne saurait légitimer la mission dévolue par le juge d'instruction à un service incompétent ; qu'ainsi la nullité desdites commissions rogatoires et des actes subséquent était encourue de plus fort et les textes susvisés ont été méconnus. »

Réponse de la Cour

5. Il résulte des articles 706-95-17, alinéa 1, et 230-32, dernier alinéa, du code de procédure pénale que le magistrat compétent peut désigner tout officier de police judiciaire aux fins de mettre en place une mesure de sonorisation ou de géolocalisation. La mise en place de la mesure inclut les opérations techniques d'installation, d'utilisation et de retrait du dispositif.

6. Cet officier de police judiciaire peut confier l'exécution de sa mission à des officiers ou agents de police judiciaire placés sous son autorité.

7. Le magistrat compétent ou l'officier de police judiciaire requis ou commis par lui tiennent encore des articles 706-95-17, alinéa 2, et 230-36 du code de procédure pénale la faculté de requérir tout agent qualifié d'un des services, unités ou organismes limitativement énumérés à l'article D. 15-1-5 dudit code, pour procéder aux opérations techniques précitées.

8. En toute hypothèse, il doit apparaître dans les pièces de la procédure la mention du service auquel appartient l'agent ayant procédé auxdites opérations.

9. En l'espèce, c'est à tort que la chambre de l'instruction a estimé que seuls les services, unités et organismes placés sous l'autorité ou la tutelle du ministre de l'intérieur ou du ministre de la défense énumérés à l'article D. 15-1-5 susvisé peuvent procéder à l'installation et au retrait des dispositifs de sonorisation et de géolocalisation en temps réel.

10. C'est également à tort qu'elle a retenu que la brigade des stupéfiants du commissariat de police de [Localité 1] est un service territorial de police judiciaire au sens de la même disposition, alors que cette brigade est un service relevant de la direction centrale de la sécurité publique, non incluse dans la liste.

11. L'arrêt n'encourt cependant pas la censure.

12. En effet, le juge d'instruction pouvait délivrer les commissions rogatoires litigieuses au directeur de la direction départementale de sécurité publique du Var, service ne figurant pas dans la liste susvisée. Cet officier de police judiciaire commis, à défaut d'instructions spécifiques du magistrat mandant, pouvait décider de la réalisation des opérations techniques par des agents de la brigade des stupéfiants relevant de son autorité, et, comme tels, n'appartenant pas davantage à des services inclus dans la liste.

13. Le moyen est en conséquence écarté.

14. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mai deux mille vingt-trois.

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