10 mai 2023
Cour d'appel de Paris
RG n° 20/08426

Pôle 5 - Chambre 3

Texte de la décision

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 3



ARRET DU 10 MAI 2023



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/08426 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB6W3



Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Juin 2020 - Président du Tribunal Judiciaire de PARIS - RG n° 18/12093





APPELANTE



S.A.S. RELAIS DE [Localité 11]

Agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social:

[Adresse 3]

[Localité 2]

Immatriculée au RCS de Paris sous le n° 319 490 538



Représentée par Me Jacques ADAM, avocat au barreau de PARIS, toque : D0781





INTIMEE



S.C.I. DU [Adresse 3]

Prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité au siège social:

[Adresse 1]

[Localité 4]

Immatriculée au RCS de Paris sous le n° 424 308 997



Représentée par Me Pierre TERRYN, avocat au barreau de PARIS, toque : C0842





COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie GIROUSSE, conseillère, chargée du rapport.



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Nathalie RECOULES, présidente

Monsieur Douglas BERTHE, conseiller

Madame Marie GIROUSSE, conseillère



qui en ont délibéré



Greffière, lors des débats : Madame FOULON



ARRÊT :



- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Nathalie RECOULES, présidente et par Madame Laurène BLANCO, greffier à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.




*****



FAITS ET PROCÉDURE



Par acte du 2 juillet 2008, la SCI du [Adresse 3] (la SCI) a donné à bail commercial à la société LE RELAIS DE [Localité 11], un ensemble immobilier situé [Adresse 3], à usage d'hôtel de tourisme, comprenant en outre 5 emplacements de parking, pour une durée de neuf années à compter du 1er juillet 2008 et moyennant un loyer annuel en principal de 108.000 euros pour l'hôtel et de 9.000 euros pour les parkings.



Par acte extrajudiciaire du 22 décembre 2016, la SCI a délivré à la société LE RELAIS DE [Localité 11], un congé avec offre de renouvellement du bail à compter du 1er juillet 2017, moyennant un loyer annuel en principal de 240.000 euros. Le preneur a accepté le principe du renouvellement par acte extrajudiciaire du 20 mars 2017 mais contesté le loyer proposé.



Après avoir notifié un mémoire préalable le 6 juin 2018, la SCI a fait assigner, par acte extrajudiciaire en date du 5 octobre 2018, la société RELAIS DE [Localité 11], devant le juge des loyers commerciaux du tribunal grande instance de Paris (devenu tribunal judiciaire de Paris le 1er janvier 2020) aux fins de voir fixer le loyer du bail renouvelé le 1er juillet 2017 à la somme annuelle en principal de 292.870 euros.



Par jugement mixte du 8 février 2019, le juge des loyers a :

- constaté que par l'effet du congé avec offre de renouvellement délivré le 22 décembre 2016 par la SCI du [Adresse 3], le bail concernant les locaux situés [Adresse 3] s'était renouvelé à compter du 1er juillet 2017 ;

- dit que les règles du plafonnement ne s'appliquaient pas au loyer du bail renouvelé, en application des dispositions de l'article R.145-10 du code de commerce ;

- pour le surplus, avant dire droit au fond, désigné en qualité d'expert Madame [I] [K] avec mission de rechercher la valeur locative des lieux loués à la date de renouvellement.



L'expert a déposé son rapport le 27 novembre 2019 concluant à une valeur locative en renouvellement au 1er juillet 2017, égale à la somme annuelle en principal de 200.000 euros hors taxes et hors charges.



Par jugement du 25 juin 2020, le juge des loyers a :

- fixé à la somme annuelle en principal de 201.434 euros, à compter du 1er juillet 2017, le loyer du bail renouvelé entre d'une part la SCI du [Adresse 3] et d'autre part, la société Le RELAIS DE [Localité 11] pour les locaux situés [Adresse 3] ;

- dit qu'ont couru des intérêts au taux légal sur le différentiel entre le loyer effectivement acquitté et le loyer dû, à compter du 5 octobre 2018 pour les loyers avant cette date, puis à compter de chaque échéance contractuelle pour les loyers échus après cette date ;

- dit n'y avoir lieu à appliquer les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonné l'exécution provisoire de la décision ;

- débouté les parties du surplus de leur demande ;

- ordonné le partage des dépenses par moitié, y compris les frais d'expertise.



Par déclaration du 02 juillet 2020, la société Relais de [Localité 11] a interjeté appel partiel du jugement.



L'ordonnance de clôture a été prononcée le 23 novembre 2022.



MOYENS ET PRÉTENTIONS



Dans ses dernières conclusions déposées le 21 novembre 2022, la société LE RELAIS DE [Localité 11], appelante, demande à la Cour de :

- infirmer le jugement rendu le 25 juin 2020 en ce qu'il a :

- fixé à la somme annuelle en principal de 201.434 euros, à compter du 1er juillet 2017, le loyer du bail renouvelé entre d'une part la SCI du [Adresse 3] et d'autre part, la société LE RELAIS DE [Localité 11] pour les locaux situés [Adresse 3] ;

- dit qu'ont couru des intérêts au taux légal sur le différentiel entre le loyer effectivement acquitté et le loyer dû, à compter du 5 octobre 2018 pour les loyers avant cette date, puis à compter de chaque échéance contractuelle pour les loyers échus après cette date ;

- ordonné le partage des dépens par moitié, y compris les frais d'expertise ;

- statuant de nouveau,de :

- fixer à la somme de 157.974 € par an, en principal, hors taxes, hors charges, le loyer du bail renouvelé à compter du 1er juillet 2017 pour les locaux sis [Adresse 3] ;

- débouter la SCI [Adresse 3] de ses demandes, fins et conclusions ;

- condamner la SCI [Adresse 3] au paiement d'une somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la SCI [Adresse 3] aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise.



Dans ses dernières conclusions déposées le 15 novembre 2022, la SCI du [Adresse 3] intimée, demande à la Cour de :

- dire la société LE RELAIS DE [Localité 11] mal fondée en son appel ;

- confirmer purement et simplement le jugement entrepris en ce qu'il a fixé le montant du loyer annuel du bail renouvelé au 1er juillet 2017 à la somme de 201.434 euros et fixé le point de départ des intérêts aux légal en résultant ;

- y ajoutant, condamner la société LE RELAIS DE [Localité 11] au paiement du supplément de loyer résultant à sa fixation à 201.434 € au 1er juillet 2017 ;

- infirmant par ailleurs le jugement entrepris ;

- condamner la société LE RELAIS DE [Localité 11] à payer, tant au titre de la procédure de première instance que d'appel une somme de 10.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société LE RELAIS DE [Localité 11] aux entiers dépens de première instance, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire, et d'appel.



En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux conclusions ci-dessus visées pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties.






MOTIFS DE L'ARRÊT



Le jugement mixte du 8 février 2019 a définitivement jugé que le loyer du bail renouvelé au 1er juillet 2017 devait être fixé en application de l'article R.145-10 du code de commerce, selon lequel le loyer du bail renouvelé de locaux monovalents est déterminé selon les usages observés dans la branche d'activité considérée.



Il est d'usage, lorsqu'il s'agit de la fixation du prix du bail d'un hôtel de se référer à la méthode hôtelière actualisée qui consiste à fixer la valeur locative par référence à une recette théorique globale, maximum hors taxes issue de données statistiques du marché relatives à des établissements de catégorie comparable du même secteur géographique, à laquelle sont appliqués successivement, un abattement pour remises à la clientèle et commissions versées aux sites de réservations , un taux d'occupation prenant en compte la catégorie de l'établissement et son implantation puis un pourcentage sur recettes déterminé selon la catégorie et les caractéristiques de l'établissement et le cas échéant, certains abattements pour conditions ou charges exorbitantes du bail ou travaux n'ayant pas fait accession au bailleur. Les recettes annexes (petits déjeuner, parking etc...) sont également valorisées selon une base praticable, auxquelles sont appliquées des taux déterminés selon que ces recettes résultent essentiellement de l'outil immobilier ou du travail de l'exploitant. Il s'agit de calculs normatifs obtenus en fonction des capacités de l'établissement et non en fonction des chiffres effectivement réalisés ou taux appliqués en l'espèce.



Ainsi, pour déterminer la valeur locative du bail en renouvellement au 1er juillet 2017, l'expert judiciaire, Mme [K] a appliqué la méthode hôtelière actualisée, selon les étapes suivantes: en premier lieu, elle a calculé la recette d'hébergement qu'elle a corrigé par l'application d'un taux d'occupation puis de l'abattement au titre des commissions versées aux

OTA (online travel agency) ; en second lieu elle a appliqué le taux de recettes à la recette d'hébergement corrigée obtenue; en troisième lieu, elle a ajouté la valeur locative des recettes annexes afin d'obtenir la valeur locative brute globale. Enfin, elle a procédé à un abattement pour tenir compte des charges exorbitantes de droit commun.



Il convient de reprendre la description des locaux et de leur situation résultant du rapport d'expertise, reprise par le jugement déféré et non contestée par les parties.



Il ressort de l'expertise judiciaire que l'ensemble immobilier loué est situé dans le [Localité 2], à un kilomètre de la Gare de [Localité 11] et de la [Adresse 13], dans un quartier résidentiel. Le bien se situe [Adresse 3], artère secondaire à double sens de circulation automobile qui relie la place du [Adresse 7] et qui offre peu de visibilité. Le secteur est desservi par la station [10] située à 300 mètres des locaux, par la station de bus [8] (ligne 86) et le parking [Adresse 9] se situe à 500 mètres. L'expert souligne que plusieurs hôtels concurrents dans la même catégorie quatre étoiles sont mieux placés, aux abords immédiats de la Gare de [Localité 11] ou de la [Adresse 13].



Les locaux sont situés dans un immeuble construit en 1984, élevé sur sous-sol, avec un rez-de-chaussée, trois étages droits, un étage en retrait derrière une terrasse aménagée pour accès à la clientèle de l'hôtel et une toiture-terrasse. L'expert judiciaire souligne que cet immeuble construit pour l'exploitation d'un hôtel est de conception désuète, de standing banal et que la façade carrelée doit être ravalée (carreaux de pâte de verre manquants).

Ces locaux se composent :

- au rez-de-chaussée, en contre-haut de deux marches, de la réception de l'hôtel avec bagagerie et salon/bar, à la suite se trouve un dégagement qui distribue : un bureau, une chambre pour personnes à mobilité réduite (PMR), un bloc sanitaire PMR, un office, un local informatique, un local poubelles et une issue de secours donnant sur le passage [Localité 6] où se situent cinq boxes de stationnement fermés par portes métalliques ;

- au sous-sol, d'un dégagement qui distribue : une salle des petits déjeuners, une cuisine, des blocs sanitaires, des vestiaires, une buanderie/lingerie, un local chaufferie et la cuve à mazout ;

- du premier au troisième étage, d'un dégagement qu distribue sept chambres éclairées sur passage et deux chambres dans le pan coupé de l'immeuble, comprenant toutes une salle de bains;

- au quatrième étage, de six chambres avec terrasses dont cinq éclairées sur passage et une dans le pan coupé de l'immeuble, comprenant toutes une salle de bains;

- au cinquième étage, d'une terrasse accessible à la clientèle et d'un local technique groupe froid.

Les étages sont desservis par un ascenseur qui distribue tous les niveaux du sous-sol au 4 étage, par un escalier principal à quarts tournants qui relie le rez-de-chaussée au 4ème étage, par un escalier secondaire métallique hélicoïdal qui distribue tous les niveaux du 1er sous-sol au 4ème étage et par un escalier secondaire qui relie-le rez-dechaussée au sous-sol.



L'hôtel exploité sous enseigne MERCURE dépendant du groupe ACCOR, classé en quatre étoiles, dispose au total de 34 chambres d'une surface de 16 m² ou 19 m², de type O de 5ème catégorie peut accueillir 68 personnes au titre du public et 7 personnes au titre du personnel.



1.Valeur locative sur la partie hébergement:



1.1.Sur la recette théorique annuelle pour l'hébergement:



Les parties ne contestent pas la recette théorique maximale annuelle pour l'hébergement fixée à 1.613.300 euros hors taxe (130 HT x 34 (chambres) x 365 (jours)) par le jugement déféré, reprenant la valeur proposée par l'expert, lequel retient un prix moyen journalier praticable en 2017, par chambre de 130 euros hors taxes, au vu des données tarifaires du groupe ACCOR et des données KPMG pour l'année 2017 et considérant que l'établissement appartient à la moyenne gamme selon la nomenclature OLAKALA/COMPSET.



1.2.Sur le taux d'occupation



Le jugement déféré a retenu le taux d'occupation de 80% proposé par l'expert. La SCI du [Adresse 3] approuve ce taux.



La société LE RELAIS DE [Localité 11] propose un taux de 77%. Elle fait valoir qu'il convient de prendre en considération les statistiques relatives aux hôtels 4 étoiles et non celles relatives aux hôtels de moyenne gamme ; que si le prix praticable en l'espèce est plus bas que le prix moyen praticable pour les hôtels 4 étoiles parisiens de 141,70 € selon la source KPMG relevant un taux d'occupation de 77,70 % pour ces hôtels, c'est en raison de sa situation géographique secondaire, soumise à la concurrence d'hôtels de même catégorie mieux placés ainsi que du caractère désuet et du standing banal du bâtiment qui doit être ravalé, caractéristiques entraînant un manque d'attractivité mais ne permettant pas de susciter une meilleure fréquentation, de sorte qu'il convient de se référer au taux d'occupation applicable aux hôtels 4 étoiles ; que la source communiquée par l'expert concerne les hôtels de moyenne gamme et non les 4 étoiles.



Au regard des caractéristiques de l'établissement énumérées ci-dessus, des tarifs observés sur le site ACCOR, du fait que la classification des hôtels en nombre d'étoiles a perdu de sa pertinence dans l'évaluation immobilière, le poids des critères non immobilier s'étant accru, l'expert a considéré à juste titre qu'il convenait de considérer qu'il s'agit d'un établissement de moyenne gamme selon la nomenclature OLAKALA/COMPSET, laquelle relève en 2017, pour cette gamme, dans la zone [Adresse 5] de [Localité 14] un prix moyen de 128 € et un taux d'occupation de 84 %.



Par ailleurs, les données statistiques figurant sur le rapport d'expertise amiable effectué par M. [N] à la demande de la bailleresse, mentionnent en 2017 s'agissant de MKG pour un hôtel de moyenne gamme dans le secteur [Localité 12] Bercy-Tolbiac un prix moyen de 125 € et un taux d'occupation de 83,6% et s'agissant de Deloitte In Extenso pour les hôtels milieux de gamme un prix moyen de 131 € et un taux d'occupation de 81,1 %, s'agissant de l'office du tourisme un taux d'occupation moyen pour [Localité 12] des hôtels 4 étoiles et 4 étoiles luxe de 75,30%.



Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, le jugement déféré a considéré à juste titre, comme l'expert, qu'il n'y avait pas lieu d'appliquer le taux d'occupation de 77% relevé par KPMG pour les hôtels de 4 étoiles de l'ensemble de [Localité 12] et qu'il convenait de tenir compte des données relevées par les sources statistiques pour le secteur géographique en cause pour les hôtels de moyenne gamme (84 et 83,6%) en les minorant de quatre points pour prendre en considération qu'il s'agit d'un hôtel 4 étoiles pour retenir un taux d'occupation 80%.



1.3.Sur l'abattement pour commissions:



Le jugement déféré a retenu l'abattement de 10% proposé par l'expert. La SCI du [Adresse 3] approuve ce taux car les commissionnements ne s'appliquent que sur une partie du chiffre d'affaires.



La société LE RELAIS DE [Localité 11] conteste ce taux et sollicite l'application d'un taux de 12 %. Elle fait notamment valoir que les éléments comptables de l'hôtel font ressortir un taux de commission entre 12 et 13 % ; que selon les analyses publiées les taux des prestataires sont rarement inférieurs à 18% généralement entre 12 et 15% voire 30%; qu'en l'espèce, les tours opérateurs et les OTA représentent 58% des réservations lesquelles sont donc soumises à commission.



L'approche de la méthode hôtelière est normative et impose donc de déterminer le taux applicable en fonction de ce que l'hôtel est capable de réaliser au regard de ses caractéristiques, de sorte qu'il ne convient pas de se fonder sur les éléments comptables de l'hôtel pour déterminer l'abattement, ces éléments pouvant simplement servir d'information. Pour la même raison, il n'y a pas lieu de tenir compte du fait que l'hôtel bénéficie de la centrale de réservation du réseau ACCOR allègeant le recours aux OTA.



Selon l'attestation établie par la société LE RELAIS DE [Localité 11] le 8 novembre 2019, pour l'année 2017, 61% des chambres ont été vendues par Web dont 16% par des Tours Opérateurs. C'est donc à juste titre que l'expert a considéré qu'il convenait de retenir un coût de commissionnement statistique de l'ordre de 17% mais de le corriger en fonction de la part du chiffre d'affaires provenant des réservations en ligne. Pour une part de l'ordre de 60%, on obtient un abattement d'environ 10% (17%X60%), montant qui apparaît justifié au regard des caractéristiques de l'hôtel et qu'il convient de retenir.



1.4.Sur le taux sur recette hébergement:



Rappelant que les normes applicables en matière d'hôtels de la catégorie en cause varient de 15 à 18% et que meilleure est la catégorie de l'hôtel, plus faible est le taux sur recettes puisque la prestation immobilière est d'importance moindre que celle des prestations de confort dans les catégories plus élevées, l'expert propose un taux sur recette de 17%. En réponse au dire de la bailleresse, l'expert expose que si la juridiction suivait le raisonnement difficilement compréhensible de cette dernière sollicitant un supplément de loyer au titre de la jouissance de la toiture-terrasse, la valeur locative serait à ajuster en majorant d'un demi-point le taux sur la recette hébergement pour tenir compte de cet avantage d'utilisation limitée dans l'année.



Le jugement déféré relève qu'à la signature du bail, la terrasse ne faisait pas partie des lieux donnés à bail, que la faculté offerte d'utiliser la terrasse sans contrepartie financière n'emportait pas renonciation du bailleur de se prévaloir de cette mise à disposition lors de la fixation du loyer du bail en renouvellement. Au regard de l'ensemble des caractéristiques de l'hôtel, y compris de l'existence de la toiture terrasse librement accessible d'une capacité d'accueil limitée à 19 personnes permettant à la clientèle de disposer aux beaux jours d'un espace solarium, le jugement déféré a retenu un taux sur recette de 17,5%. La SCI du [Adresse 3] demande la confirmation de ce taux de 17,5% en soulignant que la toiture-terrasse constitue un élément de valorisation dont elle n'a jamais renoncé à se prévaloir et fait valoir que nonobstant le classement 4 étoiles ses caractéristiques et les tarifs observés permettent de considérer que l'établissement relève de la moyenne gamme selon la nomenclature OKAKALA COMSET.



La société LE RELAIS DE [Localité 11] conteste le taux proposé et demande de retenir un taux de 15% aux motifs notamment qu'il s'agit d'un hôtel 4 étoiles classique ayant des chambres spacieuses et des équipements de confort important ; que la bailleresse a renoncé définitivement à la prise en compte de la terrasse dans la fixation du loyer ; qu'il s'agit d'un accès et non d'une exploitation commerciale de cet espace qui ne génère aucune recette ; que l'augmentation de standing résultant de cet accès ne doit pas fonder une augmentation du pourcentage sur recette; que s'agissant d'une prestation ponctuelle elle ne pourrait qu'augmenter tout au plus la valeur locative de 1% ; que le taux d'effort résultant de la valeur locative proposée démontre que le taux de recette appliqué n'est pas conforme aux données de l'exploitation.



L'affirmation, au demeurant non démontrée, relative au taux d'effort n'est pas pertinente dès lors que l'approche est normative.



Le bail du 2 juillet 2008 stipule que 'la toiture terrasse de l'immeuble n'est pas utilisée et n'est pas affectée à l'exploitation de l'hôtel exploité dans les lieux. Si le preneur souhaite utiliser la toiture terrasse pour les besoins de son exploitation, il devra préalablement informer le bailleur de l'utilisation qu'il souhaite en faire et le bailleur ne s'opposera pas à cette utilisation et ne réclamera pas un supplément de loyer pour autant que son architecte confirme que cette utilisation est compatible (...)'. Il n'en résulte pas que cette toiture terrasse ne faisait pas partie des locaux loués puisque c'est l'ensemble immobilier qui est loué, toiture comprise, mais il en résulte que la locataire est autorisée sous certaines conditions à en permettre désormais l'accès à la clientèle. Il n'en résulte pas non plus que la bailleresse a renoncé à la prise en compte de cet accès donné à la clientèle pour la fixation du loyer lors du renouvellement du bail.



L'appelante observe à juste titre que cette toiture terrasse n'est pas génératrice de recette puisqu'il s'agit simplement d'un libre accès donné à la clientèle.



Il ressort notamment du rapport d'expertise qu'il s'agit d'une surface recouverte d'un gazon artificiel et de mobilier de jardin en teck à proximité du local technique et du groupe froid donnant également sur cette terrasse, dont l'accès est limité à 19 personnes. Cet accès ne présente de réel intérêt qu'aux beaux jours. Il convient de considérer que l'avantage relativement limité de cet espace commun est d'ores et déjà pris en considération dans l'évaluation faite ci-dessus du prix moyen praticable fixé au regard des caractéristiques des lieux. Il ne justifie pas une prise en compte spécifique dans la fixation du taux sur recettes d'hébergement.



Au regard de l'ensemble des caractéristiques de l'établissement déjà énumérées ci-dessus, du fait que, nonobstant l'attribution de 4 étoiles, l'hôtel relève de la moyenne gamme, il convient de retenir le taux de 17% proposé par l'expert.



Il ressort de ces éléments que la valeur locative d'hébergement s'élève à 197.468 € soit:

- prix moyen praticable: 130 €X34 chambres X 365 jours= 1.613.300 €

- taux d'occupation 80% X 1.613.300 €= 1.290.640 €

- abattement pour commissions 90% X 1.290.640 €= 1.161.576 €

- taux sur recette 17% X 1.161.576 € =197.468 €



2. Valeur locative sur recttes annexes:



2.1. Sur la recette petit déjeuner:



Le jugement dit n'y avoir lieu à retenir une valeur à ce titre. La locataire demande la confirmation de cette décision qui n'est pas discutée par la bailleresse.



2.2. Sur la recette parking:



Le jugement reprend la valeur de 8.760 € proposée par l'expert en appliquant un taux d'occupation de 80% et un taux de recette de 50% non contestés par la bailleresse. La locataire expose que les taux retenus ne sont pas conformes au regard de la réalité du bénéfice, la recette effective anuelle étant de 14.099 €, que l'accès aux cinq boxes fermés génére des contraintes pour le personnel, qu'il existe la concurrence d'un parking public à proximité. Elle propose un montant de 3.372 € avec un taux d'occupation de 77% et un taux de recette de 10%.



Compte tenu du petit nombre de parking et s'agissant de recettes directement liées à l'outil immobilier, l'évaluation étant normative, les taux proposés et le montant proposés par l'expert sont justifiés et seront retenus.



3. Sur la valeur locative retenue:



Les parties s'accordent avec le jugement déféré en ce qu'il a retenu, comme l'expert, une correction de 5% pour charges exorbitantes de droit commun. Ce montant sera retenu, soit une valeur locative de :(197.468 € +8.760 € ) X95%= 195.916 € .



Pour le surplus, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit qu'ont couru des intérêts au taux légal sur le différentiel entre le loyer effectivement acquitté et le loyer dû, à compter du 5 octobre 2018, date de l'assignation, pour les loyers dus avant cette date, puis à compter de chaque échéance contractuel pour les loyers échus après cette date.



4. Sur la demande de condamnation au paiement d'un supplément de loyer



La compétence du juge des loyers commerciaux résultant de l'article R145-23 du code de commerce est exclusive du prononcé d'une condamnation, de sorte que le prononcé d'une condamnation excède les pouvoirs de la cour d'appel statuant sur l'appel d'une décision de ce juge.



Il convient donc de débouter la SCI du [Adresse 3] de sa demande aux fins de voir condamner la société LE RELAIS DE [Localité 11] au paiement du supplément de loyer résultant de sa fixation au 1er juillet 2017.



5. Sur les autres demandes



Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à condamner les parties en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, débouté les parties du surplus de leurs demandes et ordonné le partage des dépens par moitié, y compris les frais d'expertise.



L'équité commande de rejeter les demandes formées par les parties en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel.



La SCI du [Adresse 3] qui succombe partiellement sera condamnée aux dépens de la procédure d'appel.



PAR CES MOTIFS



La cour,



INFIRME PARTIELLEMENT le jugement rendu le 25 juin 2020 par le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Paris ;



Le réforme en ce qu'il a fixé à la somme annuelle en principal de 201.434 €, à compter du 1er juillet 2017, le loyer du bail renouvelé entre d'une part la SCI du [Adresse 3] et d'autre part, la société LE RELAIS DE [Localité 11] pour les locaux situés [Adresse 3] ;



Statuant à nouveau,



Fixe à la somme annuelle en principal de 195.916 €, à compter du 1er juillet 2017, le loyer du bail renouvelé entre d'une part la SCI DU [Adresse 3] et d'autre part, la société LE RELAIS DE [Localité 11] pour les locaux situés [Adresse 3] ;



Confirme pour le surplus le jugement déféré du 25 juin 2020 ;



Y ajoutant,



Déboute la SCI du [Adresse 3] de sa demande aux fins de voir condamner la société LE RELAIS DE [Localité 11] au paiement du supplément de loyer résultant de sa fixation au 1er juillet 2017 ;



Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ;



Condamne la SCI du [Adresse 3] aux dépens de la procédure d'appel avec distraction au profit de Maître J. Adam, avocats conformément à l'article 699 du code de procédure civile.





LE GREFFIER LA PRESIDENTE

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