20 avril 2023
Cour d'appel de Bourges
RG n° 22/00218

1ère Chambre

Texte de la décision

SM/RP













































































COPIE OFFICIEUSE

COPIE EXÉCUTOIRE

à :

- Me Malika GERIGNY

- la SCP AVOCATS BUSINESS CONSEILS





LE : 20 AVRIL 2023

COUR D'APPEL DE BOURGES

CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 20 AVRIL 2023



N° - Pages





N° RG 22/00218 - N° Portalis DBVD-V-B7G-DNY6



Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal Judiciaire de BOURGES en date du 27 Janvier 2022





PARTIES EN CAUSE :



I - S.N.C. LA NIMOISE, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social :

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

N° SIRET : 750 559 064



Représentée par Me Malika GERIGNY, avocat au barreau de BOURGES

timbre fiscal acquitté



APPELANTE suivant déclaration du 18/02/2022

INCIDEMMENT INTIMÉE



II - S.A.S. R ET E [L], agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social :

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 352 549 349



Représentée par la SCP AVOCATS BUSINESS CONSEILS, avocat au barreau de BOURGES



timbre fiscal acquitté



INTIMÉE

INCIDEMMENT APPELANTE















20 AVRIL 2023

N° /2







COMPOSITION DE LA COUR :





En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Mars 2023 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. TESSIER-FLOHIC, Président chargé du rapport.





Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :



M.TESSIER-FLOHIC Président de Chambre

M.PERINETTI Conseiller

Mme CIABRINI Conseiller







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GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme MAGIS







***************





ARRÊT : CONTRADICTOIRE





prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.








**************









Exposé :



Selon bail commercial en date du 10 Février 2005, Monsieur [I] a donné en location à la Société R ET E [L], divers locaux sis [Adresse 1] moyennant le paiement d'un loyer annuel de 2.920 € H.T. et hors charges et pour une durée de neuf années à compter du 1er Février 2005 pour se terminer le 31 Janvier 2014.



Lesdits locaux ont été cédés à la Société LA NIMOISE par acte authentique en date du 8 Mars 2013.

Par exploit en date du 23 Octobre 2014, la locataire a sollicité le renouvellement de son bail. Le 7 Octobre 2015, la bailleresse a signifié à sa locataire son acceptation du principe du renouvellement du bail tout en le subordonnant à la fixation d'un nouveau loyer annuel de 29.000 € H.T. et hors charges.

Par courrier en date du 27 Octobre 2015, la locataire a refusé la fixation du nouveau loyer annuel de renouvellement à hauteur du montant proposé.



Par jugement en date du 31 Mars 2016, la juridiction des loyers commerciaux de Bourges a désigné Monsieur [E] en qualité d'expert à l'effet de déterminer le montant de la valeur locative des locaux loués et réservé le sort des dépens.



Par arrêt en date du 1er Décembre 2016, la cour de céans a infirmé cette ordonnance, débouté la Société LA NIMOISE de sa demande de fixation du prix du bail en déplafonnement, fixé le prix du bail renouvelé au 1er Janvier 2015 à la somme de 3.700,50 €, dit que ce nouveau prix sera dû à compter du 7 Octobre 2015 et condamné la Société LA NIMOISE à payer à la Société R ET E [L] la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens de première instance et d'appel.



Par courrier recommandé en date du 26 Janvier 2017, la bailleresse a, par l'intermédiaire de son conseil, notifié l'exercice de son droit d'option à sa locataire.



Sur saisine de la locataire et, par ordonnance en date du 4 Novembre 2019, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Bourges a :

- désigné Monsieur [E] en qualité d'expert à l'effet de déterminer le montant des indemnités dues de part et d'autre (indemnité d'éviction due à la locataire et indemnité d'occupation due à la bailleresse),

- fixé provisoirement le montant de l'indemnité d'occupation due par la locataire au montant du dernier loyer, soit la somme annuelle de 3.700,50 € H.T. et hors charges.



Monsieur [E] a déposé son rapport le 4 Février 2021.



Par jugement en date du 27 Janvier 2022, le tribunal judiciaire de Bourges a :

- reçu la SARL R ET E [L] en ses demandes et l'a dit partiellement bien fondée,

- condamné la SNC LA NIMOISE à payer à la SARL R et E [L], avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la décision :

* indemnité principale : 184 000 €,

* indemnité de remploi : 22.080 €,

* frais de déménagement de meubles : sur justificatif,

* frais de déménagement du coffre-fort sur justificatif (selon le cas, acquisition d'un coffre-fort),

* frais de réinstallation de la boutique : sur justificatif,

* trouble commercial : 19 400 €,

* frais administratifs : 500 € sauf à parfaire,

* perte sur stock : sur justificatif,

* licenciement : sur justificatif,

* indemnité de loyer : sur justificatif,

- dit que les éventuelles indemnités de licenciement du personnel de la SARL R et E [L] n'intégreront pas les sommes pouvant être dues au titre des indemnités de congés payés, de préavis, de fin de carrière et autre indemnités annexes,

- dit que s'agissant des frais devant être pris en charge par la SNC LA NIMOISE sur justificatifs, en cas de désaccord entre les parties sur leur montant, ceux-ci seront arbitrés par le juge saisi à la requête de la partie la plus diligente,

- débouté la SNC LA NIMOISE de sa demande de consignation des sommes allouées à la SARL R et E [L],

- dit que la SARL R et E [L] est débitrice à l'égard de la SNC LA NIMOISE des sommes suivantes au titre des loyers ou indemnités d'occupation, outre les charges et taxes :

* du 01/01/2015 au 31/12/2015 : 3700,50 €

* du 01/01/2016 au 31/12/2016 : 6800,56 €

* du 01/01/2017 au 31/12/2017 : 6811,85 €

* du 01/01/2018 au 31/12/2018 : 6946,09 €

* du 01/01/2019 au 31/12/2019 : 7118,64 €

* du 01/01/2020 au 31/12/2020 : 7253,60 €

* du 01/01/2021 au 31/12/2021 : 7362,40 €

- dit que la SARL R et E [L] est tenue de payer à la SNC LA NIMOISE, et au besoin l'y condamne, le différentiel entre le montant des loyers et charges acquittés et les sommes dues à compter du 1er janvier 2015 jusqu'à la date du départ effectif des locaux loués,

- dit que les créances réciproques des parties feront l'objet d'une compensation,

- dit que la SARL R et E [L] sera tenue de restituer la jouissance définitive des locaux loués dans le délai de 3 mois suivant la date de versement de l'indemnité d'éviction et des indemnités accessoires, et à défaut de départ amiable,

- ordonné l'expulsion de la SARL R et E [L] et de tout occupant de son chef des lieux loués, au besoin avec le concours de la force publique et d'un serrurier,

- rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires au présent dispositif,

- condamné la SNC LA NIMOISE à verser la somme de 4000 € à la SARL R ET E [L] au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné la SNC LA NIMOISE aux entiers dépens de l'instance, en ce compris le coût de l'expertise judiciaire.



Par courrier en date du 14 Mars 2022, le conseil de la Société LA NIMOISE a communiqué à celui de la Société R ET E [L] un chèque de règlement de la somme de 206.165,15 €. La Société R ET E [L] a restitué la jouissance définitive des locaux loués à la Société LA NIMOISE le 30 Juin 2022 .



La S.N.C. LA NIMOISE a interjeté appel de cette décision et demande à la cour, dans ses écritures en date du 10 janvier 2023, à la lecture desquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, de :

Déclarer la Société LA NIMOISE recevable en son appel,



Confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

- dit que la Société R ET E [L] est tenue de payer à la Société LA NIMOISE et, au besoin l'y condamne, le différentiel entre le montant des loyers et charges acquittés et les sommes dues à compter du 1" Janvier 2015 jusqu'à la date du départ effectif des locaux loués,

- dit que s'agissant des frais devant être pris en charge par la Société LA NIMOISE sur justificatifs, en cas de désaccord entre les parties sur leur montant, ceux-ci seront arbitrés par le Juge saisi à la requête de la partie la plus diligente,

- dit que les créances réciproques des parties feront l'objet d'une compensation,

- dit que la Société R ET E [L] sera tenue de restituer la jouissance définitive des locaux loués dans le délai de trois mois suivant la date de versement de l'indemnité d'éviction et des indemnités accessoires, et, à défaut de départ amiable :

- et ordonné l'expulsion de la Société R ET E [L] de tous occupants de son chef des lieux loués au besoin avec le concours de la force publique et d'un serrurier,



Réformer le Jugement dont appel en ce qu'il a :

- condamné la Société LA NIMOISE à lui payer à la Société R ET E [L], avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décision :

- indemnité principale 184.000,00 €

- indemnité de remploi 22.080,00 €

- frais de déménagement des meubles sur justificatif

- frais de déménagement du coffre-fort (selon le cas, acquisition d'un coffre-fort) sur justificatif

- frais de réinstallation de la boutique sur justificatif

- trouble commercial 19.400,00 €

- frais administratifs 500,00 €, sauf à parfaire

- perte sur stock sur justificatif

- licenciement sur justificatif

- indemnité de loyer sur justificatif

- dit que les éventuelles indemnités de licenciement du personnel de la Société R ET E [L] n'intégreront pas les sommes pouvant être dues au titre des indemnités de congés payés, de préavis, de fin de carrière et autres indemnités annexes,

- débouté la Société LA NIMOISE de sa demande de consignation des sommes allouées à la Société R ET E [L],

- dit que la Société R ET E [L] est débitrice à l'égard de la Société LA NIMOISE des sommes suivantes au titre des loyers ou indemnités d'occupation, outre les charges et taxes :

' du 1er janvier au 31 décembre 2015 : 3700,50 €

' du 1er janvier au 31 décembre 2016 : 6800,56 €

' du 1er janvier au 31 décembre 2017 : 6811,85 €

' du 1er janvier au 31 décembre 2018 : 6946,09 €

' du 1er janvier au 31 décembre 2019 : 7118,64 €

' du 1er janvier au 31 décembre 2020 : 7253,60 €

' à compter du 1er janvier 2021 : 7362,40 €

- rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires au présent dispositif,

- condamné la Société LA NIMOISE à verser la somme de 4.000,00 € à la Société R ET E [L] au titre des dispositions de l'article 700 du CPC,

- ordonné l'exécution provisoire,

- et condamné la Société LA NIMOISE aux entiers dépens de l'instance, en ce compris le coût de l'expertise judiciaire.





Statuant à nouveau des chefs réformés,

Débouter la Société R ET E [L] de l'ensemble de ses demandes.

Fixer le montant de l'indemnité principale d'éviction due à la Société R ET E [L] à hauteur de la somme de 31.700,00 €.

Fixer le montant de l'indemnité de trouble commercial due à la Société R ET E [L] à hauteur de la somme de 15.067,00 €.

Fixer le montant des frais de déménagement dus à la Société R ET E [L] à hauteur de la somme de 2.848,00 €.

Juger qu'il n'y a pas lieu à remboursement d'indemnités de licenciement au profit de la Société R ET E [L].

Fixer le montant de l'indemnité de frais administratifs due à la Société R ET E [L] à hauteur de la somme de 500,00 €.

Fixer le montant de l'indemnité d'occupation annuelle due par la Société R ET E [L] à la Société LA NIMOISE, à compter du 1 er Janvier 2015 jusqu'à la date de son départ effectif des locaux loués, selon les modalités suivantes :

- 11.484,55€, outre taxes et charges en sus, du 1er Janvier au 31 Décembre 2015,

- 11.469,73€, outre taxes et charges en sus, du 1er Janvier au 31 Décembre 2016,

- 11.488,78€, outre taxes et charges en sus, du 1er Janvier au 31 Décembre 2017,

- 11.723,72€, outre taxes et charges en sus, du 1er Janvier au 31 Décembre 2018,

- 12.006,29€, outre taxes et charges en sus, du 1er Janvier au 31 Décembre 2019,

- 12.233,82€, outre taxes et charges en sus, du 1er Janvier au 31 Décembre 2020,

- 12.244,40€, outre taxes et charges en sus, du 1er Janvier au 31 Décembre 2021.



Partager les entiers dépens de première instance et d'appel par moitié entre les parties, en ce compris le coût de l'expertise de Monsieur [E], distraits au profit de Me Malika GERIGNY, Avocat au Barreau, sous sa due affirmation de droit.



La S.A.S R ET E [L], intimée et appelante à titre incident, demande pour sa part à la cour dans ses conclusions du 5 janvier 2023, à la lecture desquelles il est pareillement renvoyé pour plus ample exposé des moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, de :



DECLARER l'appel irrecevable et en tout cas mal fondé.

CONSTATER que la SAS E et R [L] vient aux droits de la SARL E et R [L],

INFIRMER partiellement le jugement rendu le 27 janvier 2022 par le Tribunal judiciaire de BOURGES en ce qu'il a :

- condamné la SNC LA NIMOISE à payer à la SARL R et E [L], avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la décision :

* indemnité de remploi : 22.080 €

* frais de déménagement de meubles : sur justificatif

* frais de déménagement du coffre-fort (selon le cas, acquisition d'un coffre-fort) : sur justificatif

* frais de réinstallation de la boutique : sur justificatif

* trouble commercial : 19.400 €

- dit que la SARL R et E [L] est débitrice à l'égard de la SNC LA NIMOISE des sommes suivantes au titre des loyers ou indemnités d'occupation, outre les charges et taxes :

* du 01/01/2015 au 31/12/2015 : 3700,50 €

* du 01/01/2016 au 31/12/2016 : 6800,56 €

* du 01/01/2017 au 31/12/2017 : 6811,85 €

* du 01/01/2018 au 31/12/2018 : 6946,09 €

* du 01/01/2019 au 31/12/2019 : 7118,64 €

* du 01/01/2020 au 31/12/2020 : 7253,60 €

* du 01/01/2021 au 31/12/2021 : 7362,40 €



Statuant à nouveau,

CONDAMNER la SNC LA NIMOISE à payer à la SAS R et E [L], avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, les sommes suivantes :

- indemnité de remploi : 27.900,00 € ;

- frais de déménagement des meubles : 2.100,00 € ;

- frais de déménagement du coffre-fort : 748,00 € ;

- frais de réinstallation de la boutique : 77.560,72 € ;

sauf à parfaire sur présentation de nouveaux justificatifs.

- trouble commercial : 33.149, 00 €.

FIXER l'indemnité d'occupation à la somme de 3.700 € annuels pour la période du 7 octobre 2015 au 31 décembre 2021,

CONFIRMER le jugement rendu le 27 janvier 2022 par le Tribunal judiciaire de BOURGES en ses dispositions non critiquées par la SAS R et E [L] sauf à substituer la SAS E et R [L] venant aux droits de la SARL E ET R [L],

DEBOUTER la S.N.C LA NIMOISE de l'ensemble de ses demandes,

CONDAMNER la S.N.C LA NIMOISE à verser à la S.A.S R et E [L] la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

CONDAMNER la S.N.C LA NIMOISE aux entiers dépens, lesquels seront recouvrés par la SCP ABC ' Me Hervé RAHON, avocat, selon les dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.



Par conclusions du 11 janvier 2023, la S.A.S R ET E [L], a sollicité le rejet des écritures prises la veille à 10h55 par la SNC LA NIMOISE.



Cette dernière demande à la cour, par écritures du 12 janvier 2023, de débouter la Société E ET E [L] de sa demande de rejet des conclusions notifiées par la Société LA NIMOISE le 10 Janvier 2023 et, à titre subsidiaire, d'écarter des débats les conclusions notifiées le 5 Janvier 2023 par la Société R ET E [L] .



L'ordonnance de clôture est intervenue le 10 janvier 2023.



Sur quoi :



I) sur la demande de la S.A.S. R et E [L] tendant au rejet des conclusions notifiées par la S.N.C. LA NIMOISE le 10 janvier 2023 :



Selon l'article 15 du code de procédure civile, les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense.



Au cas d'espèce, il est constant que le conseiller de la mise en état avait fixé un calendrier de procédure prévoyant la notification des conclusions de l'appelante au plus tard le 2 novembre 2022 et des conclusions de l'intimée au plus tard le 6 janvier 2023 ainsi qu'une ordonnance de clôture le 10 janvier 2023 avec une audience le 8 mars 2023 à 14 heures.



L'ordonnance de clôture ayant été rendue par le conseiller de la mise en état le 10 janvier 2023 à 11h29, les conclusions notifiées par la S.N.C. LA NIMOISE le même jour à 10h55 présentent manifestement un caractère tardif plaçant la S.A.S. R et E [L] dans l'impossibilité matérielle de pouvoir y répliquer utilement.



Il conviendra, en conséquence, d'écarter des débats les conclusions notifiées par la S.N.C. LA NIMOISE le 10 janvier 2023, la cour ne statuant qu'au visa des conclusions de cette dernière en date du 1er novembre 2022.



Il sera observé que la S.A.S. R et E [L], conformément au calendrier de procédure fixé par le conseiller de la mise en état le 1er août 2022, qui lui imposait de conclure avant le 6 janvier 2023, a déposé des conclusions le 5 janvier 2023, laissant ainsi un temps suffisant à l'appelante pour y répliquer avant l'ordonnance de clôture du 10 janvier 2023, de sorte que la demande subsidiaire formée par la S.N.C. LA NIMOISE et tendant à écarter des débats les conclusions de la S.A.S. R et E [L] en date du 5 janvier 2023 devra nécessairement être rejetée.





II) sur le fond :



Il sera rappelé, à titre liminaire, que la S.A.S. R et E [L], dont l'activité consiste en la « fabrication d'articles de joaillerie et bijouterie », est titulaire depuis le 30 janvier 1996 d'un droit au bail sur le local commercial situé [Adresse 1], dont la S.N.C. LA NIMOISE a fait l'acquisition par acte authentique du 8 mars 2013. Le bail initial, prévoyant un loyer annuel de 2920 € hors-taxes, a été renouvelé le 30 janvier 2005.



La S.A.R.L. R et E [L] a sollicité le renouvellement du bail aux mêmes conditions par acte extrajudiciaire du 23 octobre 2014, la S.N.C. LA NIMOISE lui adressant une offre de renouvellement le 7 octobre 2015 avec un loyer évalué à 29000€ hors taxes et hors charges par an.



La S.A.R.L. R et E [L] a refusé la fixation du loyer ainsi proposé et, par décision du 31 mars 2016, le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Bourges a ordonné une mesure d'expertise afin d'apprécier le bien-fondé de la demande d'augmentation du loyer.



Selon arrêt du 1er décembre 2016, la cour de céans, infirmant ladite décision, a débouté la S.N.C. LA NIMOISE de sa demande de fixation du prix du bail en déplafonnement, a fixé le prix du bail renouvelé au 1er janvier 2015 à la somme de 3700,50 € et a dit que ce nouveau prix serait dû à compter du 7 octobre 2015.



Par courrier recommandé en date du 26 janvier 2017, la S.N.C. LA NIMOISE a notifié à la S.A.R.L. R et E [L] l'exercice de son droit d'option, refusant ainsi le renouvellement du bail venu à expiration le 31 décembre 2014, et sollicitant par ailleurs une indemnité d'occupation à effet au 1er janvier 2015.



La S.A.R.L. R et E [L] a contesté les évaluations de l'indemnité d'occupation par un courrier du 27 janvier 2017.



Selon ordonnance du 4 novembre 2019, le juge de la mise en état a ordonné une mesure d'expertise judiciaire confiée à Monsieur [E] afin de donner tous éléments d'appréciation s'agissant de la fixation de l'indemnité d'éviction et de l'indemnité d'occupation.



L'expert judiciaire a procédé à ses opérations et a déposé son rapport le 4 février 2021.



La S.A.R.L. R et E [L], devenue une société par actions simplifiée selon décision en assemblée générale extraordinaire du 8 mars 2021, a libéré les locaux considérés le 30 juin 2022.



Il convient d'examiner, successivement, les différents chefs du jugement critiqués par les parties, dans le cadre de l'appel principal interjeté par la S.N.C. LA NIMOISE ainsi que dans le cadre de l'appel incident de la S.A.S. R et E [L].



A) sur l'indemnité d'éviction :



Selon l'article L 145 ' 14 du code de commerce, « le bailleur peut refuser le renouvellement du bail. Toutefois, le bailleur doit, sauf exceptions prévues aux articles L 145 ' 17 et suivants, payer au locataire évincé une indemnité dite d'éviction égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement. Cette indemnité comprend notamment la valeur marchande du fonds de commerce, déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, ainsi que des frais et droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur, sauf dans le cas où le propriétaire fait la preuve que le préjudice est moindre ».



1) l'indemnité principale :



Le locataire évincé est fondé à solliciter une indemnité principale de remplacement qui doit être égale à la valeur marchande du fonds de commerce disparu.

Dans l'hypothèse d'un possible transfert du fonds de commerce sans conséquences notables sur la clientèle, le locataire doit percevoir une indemnité de déplacement.

En conclusion de son rapport, l'expert judiciaire propose une indemnité principale, basée sur la valeur marchande du fonds d'un montant de 184 000 € dans l'hypothèse d'un transfert du fonds de commerce avec perte de clientèle, et une indemnité principale de 31 700 €, basée sur la valeur du droit au bail, dans l'hypothèse d'un transfert du fonds sans perte de clientèle.

Pour conclure, à cet égard, à l'existence d'une simple indemnité de déplacement, la S.N.C. LA NIMOISE soutient que la S.A.S. R et E [L] a fait le choix de déplacer son fonds de commerce dans une grange située sur sa propriété à [Localité 4], et cite les termes suivants de l'ouvrage « traité des baux commerciaux » : « si le bailleur établit que le fonds peut être transféré et l'exploitation poursuivie sans perte significative de clientèle (ce peut être le cas des activités de groupe, de celles qui ont une clientèle professionnelle, des fonds à forte notoriété ou des activités sans visibilité ou d'entreprises ayant exclusivement une activité de vente sur Internet) ou plus simplement parce qu'il est possible de déplacer le fonds à proximité, le locataire ne sera pas indemnisé de la perte de son fonds de commerce qu'il va conserver, mais seulement du préjudice subi, consistant pour l'essentiel dans la perte de ses avantages locatifs, c'est-à-dire de la valeur de son droit au bail, qui résulte de multiples facteurs (emplacement et consistance des locaux, équipements, économie de loyer, etc.) ».

La S.N.C. LA NIMOISE propose, dans ces conditions, de fixer l'indemnité principale d'éviction devant revenir à la S.A.S. R et E [L] au montant de la valeur du droit au bail retenue par l'expert judiciaire, en l'occurrence 31 700 €.

Il ne saurait, toutefois, être admis que l'activité de joaillerie-bijouterie que la S.A.R.L. R et E [L] a exercée depuis le 30 janvier 1996 dans une des rues les plus commerçantes du centre de ville de [Localité 2], la [Adresse 1], puisse être poursuivie « sans perte significative de clientèle » dans une grange située, en dehors de toute zone commerciale, dans la commune de [Localité 4]. Selon les termes de l'article de doctrine précité, ladite activité ne saurait aucunement être assimilée à des « activités de groupe, ayant une clientèle professionnelle, des fonds à forte notoriété ou des activités sans visibilité ou des entreprises ayant exclusivement une activité de vente sur Internet ».

La demande formée par la S.N.C. LA NIMOISE en cause d'appel tendant à la limitation de l'indemnité principale d'éviction devant revenir à sa locataire au seul montant de la valeur du droit au bail ne pourra donc qu'être rejetée.

C'est en conséquence à juste titre que le tribunal a retenu une indemnité principale d'éviction d'un montant de 184 000 €, conformément à la proposition de l'expert judiciaire résultant de la moyenne des trois méthodes de calcul figurant dans son rapport (méthode par EBE, méthode par EBE retraité, méthode par chiffre d'affaires), somme au demeurant sensiblement analogue à celle résultant du rapport de Madame [X], expert immobilier auprès de la cour d'appel de Limoges (180 000 €, pièce numéro 15 du dossier de l'intimée).



2) les indemnités accessoires :



a) l'indemnité de remploi :



L'expert rappelle, à cet égard, en page 28 de son rapport, que : « l'indemnité de remploi est destinée à couvrir les frais et droits de mutation à régler pour l'acquisition d'un fonds ou d'un droit au bail de même valeur. Ceux-ci peuvent varier de 10 % à 16 % du montant de l'indemnité, selon les cas. Ces frais comprennent les droits de mutation et débours, ainsi que les frais d'actes, de négociation ou d'agence, lesquels sont variables. Ils ne sont pas dus lorsque le preneur n'a pas procédé à sa réinstallation ».

L'expert propose de retenir des frais de l'ordre de 15 % de l'indemnité d'éviction, soit : 184 000 € x 15 % = 27 600 €.

Le premier juge a retenu un taux de 12 %, ainsi que cela avait été proposé par Madame [X] dans le rapport sollicité par la S.A.S. R et E [L] mentionné supra.

La S.N.C. LA NIMOISE ne rapportant pas la preuve, qui lui incombe, que la S.A.S. R et E [L] avait fait le choix de se réinstaller dans des locaux lui appartenant ' cette dernière contestant être propriétaire de l'immeuble situé à [Localité 4] sur lequel se situe la grange dans laquelle elle s'est réinstallée ' il ne saurait être fait droit à la demande de l'appelante tendant au rejet complet de l'indemnité sollicitée à ce titre.

Le taux de 12 % retenu par le premier juge correspond à une proportion couramment utilisée en cette matière et permet de parvenir à une juste appréciation du montant de l'indemnité de remploi destinée à couvrir les frais et droits de mutation à régler pour l'acquisition d'un fonds ou d'un droit au bail de même valeur.

La décision de première instance devra donc être confirmée en ce qu'elle a fixé ladite indemnité à : 184 000 € x 12 % = 22 080 €.



b) les frais de réinstallation :



' Frais de déménagement et frais relatifs au coffre-fort :

Dans la décision dont appel du 27 janvier 2022, le premier juge avait condamné la S.N.C. LA NIMOISE à verser à la S.A.S. R et E [L] les frais de déménagement des meubles, les frais de déménagement du coffre-fort et, selon le cas, d'acquisition d'un nouveau coffre-fort, sur justificatifs et dans une limite de prix devant être arbitrée par le juge en cas de désaccord des parties sur le montant de ce poste d'indemnisation.





La S.A.S. R et E [L], qui a restitué les lieux loués le 30 juin 2022, produit en cause d'appel une facture de 748 € TTC (pièce numéro 47 de son dossier) en date du 27 juin 2022 au titre du transfert du coffre-fort équipant les lieux antérieurement loués.

Il conviendra donc de réformer le jugement entrepris sur ce point et de condamner la S.N.C. LA NIMOISE à verser à la S.A.S. R et E [L] la somme de 748 € au titre du coût du transfert du coffre-fort.

S'agissant des frais de déménagement réclamés par la S.A.S. R et E [L], l'expert judiciaire a rappelé, en page 28 de son rapport, que « le coût du déménagement est à la charge du bailleur si le locataire se réinstalle, ce montant est justifié sur devis ».

Dans le dernier état de ses écritures, l'intimée justifie (pièce numéro 61 de son dossier) d'une facture numéro 142616 d'un montant de 2100 € TTC établie par les établissements TESSIOT le 20 juin 2022 au titre d'un déménagement du mobilier de la «boutique LANTHIEZ» [Adresse 1] à [Localité 2], d'un volume de 38 m³, à destination de «Nerigny, [Localité 4]». Les critiques formées par la S.N.C. LA NIMOISE s'agissant de la production d'un simple devis et non d'une facture acquittée au titre des frais de déménagement allégués apparaissent donc inopérantes et, réformant également la décision sur ce point, la cour condamnera donc la S.N.C. LA NIMOISE à verser à la S.A.S. R et E [L] la somme de 2100 €, dûment justifiée, au titre des frais de déménagement des meubles.



' Travaux d'aménagement, d'équipement et de mise aux normes d'une nouvelle boutique :

Le premier juge a condamné la S.N.C. LA NIMOISE à indemniser la S.A.S. R et E [L] des frais que celle-ci devra engager pour l'aménagement et la mise aux normes de ses nouveaux locaux, la somme allouée devant être déterminée sur production de justificatifs dans une limite arbitrée par le juge en cas de désaccord des parties.

Il convient de rappeler que les frais d'aménagement du local peuvent être retenus s'ils correspondent aux aménagements semblables à ceux que le locataire perd et à condition qu'ils consistent en des frais qui ne sont pas déjà couverts par l'indemnité principale et qui procèdent, en conséquence, de la nécessité d'aménagements spécifiques. En conséquence, les frais de réinstallation prévus à l'article L 145 ' 14 du code de commerce précité ne sauraient correspondre au coût d'une réhabilitation totale des nouveaux locaux, mais seulement à l'aménagement et à l'adaptation de ces derniers, permettant la reprise de l'activité du locataire selon les modalités déjà constatées dans les locaux objet de l'éviction.

Au soutien de la demande formée à ce titre, sollicitant l'octroi de la somme de 77 560,72 € au titre des frais de réinstallation de la boutique, la S.A.S. R et E [L] verse aux débats neuf factures (pièces numéros 53 et 54 puis 65 à 69 de son dossier) qu'elle indique avoir acquittées entre le 12 juillet et le 22 décembre 2022, outre deux devis (pièces numéros 50 et 52), dont le coût total s'élève à 77 560,72 €.

L'examen de ces devis et factures permet de constater que nombre d'entre eux ne concernent nullement des aménagements spécifiques à l'activité de bijouterie joaillerie exercée par la S.A.S. R et E [L], mais sont relatifs à des travaux d'aménagement classiques d'un bâtiment et dépourvus de toute spécificité. Il en est ainsi, notamment, des devis et factures faisant référence à des « travaux maçonnerie ' rénovation bâtiment annexe ».

Ne peuvent être considérés comme des travaux relatifs à des aménagements spécifiques à l'activité professionnelle de l'intimée que les devis et factures suivants :

' facture 04020013 de la société d'électricité générale STE F-ELEC pour la somme de 6318,69 €, en ce que cette facture est relative à des travaux de modification ou de création d'un réseau électrique permettant l'installation d'un système d'alarme avec câblage des caméras et des radars nécessaires (pièce numéro 66)

' devis numéro 230522458236 établi le 7 juin 2022 par la société S255 pour un montant de 9174 €, en ce que celui-ci prévoit l'installation d'un système d'alarme avec centrale Siemens, système vidéo, enregistreur numérique et caméras infrarouge, nécessaire à l'activité professionnelle exercée par la S.A.S. R et E [L] en raison de la valeur de son stock (pièce numéro 52)

' facture 2022/10/18 de la société CAZIN en date du 31 octobre 2022 pour un montant de 238,70 € TTC, relative au scellement au mortier béton de trois équerres dans un mur pour « soutien du futur plan de travail ».

Soit un total de 15 731, 39 € qui sera ainsi octroyé à la S.A.S. R et E [L] à titre d'indemnité pour travaux d'aménagement et d'équipement de la nouvelle boutique, la décision entreprise devant être réformée de ce chef.



c) indemnité pour trouble commercial :



L'expert judiciaire a rappelé, en page 28 de son rapport, que l'indemnité au titre du trouble commercial correspondait au préjudice résultant de l'interruption des activités durant le déménagement et la réinstallation ou à défaut de l'arrêt de l'exploitation. Selon la méthode couramment utilisée en la matière, l'expert, prenant pour base 15 jours de chiffre d'affaires hors taxes moyen réalisé sur 300 jours sur les années 2017 ' 2018 ' 2019, a proposé une indemnité pour trouble commercial d'un montant de : (388 254 € / 300 jours) x 15 jours = 19 412 €. C'est en conséquence par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a retenu une indemnité arrondie à 19 400 € à ce titre. La décision de première instance devra donc être confirmée de ce chef.



d) indemnité pour frais administratifs et de résiliation de contrat :



La somme de 500 € octroyée par le premier juge au titre des formalités juridiques et comptables à accomplir n'est pas discutée par la S.N.C. LA NIMOISE dans le cadre de son appel.



e) indemnité pour perte de stock :



Il est constant que le stock perdu doit être indemnisable à hauteur de la marge perdue en raison d'une vente bradée de celui-ci. L'expert judiciaire avait retenu (p.29 de son rapport) que le stock de la S.A.S. R et E [L] s'élevait à 273 796 € à la date du 30 septembre 2020. Estimant que la perte n'était pas quantifiable en l'état, il avait placé celle-ci « en mémoire » en conclusion de son rapport. L'intimée justifie (pièces numéros 58 à 62 son dossier) avoir procédé à la vente bradée de son stock en raison de la fermeture de l'atelier de la [Adresse 1]. Selon attestation de son expert-comptable KPMG en date du 4 janvier 2023 (pièce numéro 70), la perte de valeur sur stock liée à la liquidation de celui-ci s'élève à 40 935 €, somme qui devra donc revenir à l'intimée ' la décision de première instance étant réformée sur ce point.



f) frais de licenciement :



Selon l'expert judiciaire, l'intimée « emploie deux personnes : Madame [Z] [L] en tant que vendeuse, une salariée comptable à temps partiel depuis le 10 mai 2016 » (page 29 du rapport).

La S.A.S. R et E [L] produit (pièce numéro 55) la lettre de démission de Madame [N], comptable, à effet au 30 juin 2022 au soir, et indique par ailleurs dans ses écritures qu'[Z] [L] est décédée.

L'indemnisation, un temps sollicitée, des frais de licenciement du personnel de l'intimée apparaît dès lors sans objet.



g) indemnité de double loyer :



L'expert rappelle que cette indemnité a pour objet la réparation du préjudice subi par le locataire qui doit supporter cumulativement pendant une certaine période, du fait du déménagement et éventuellement l'aménagement de nouveaux locaux, deux loyers, l'un au titre des locaux à libérer, l'autre au titre des locaux pris à bail. Le premier juge a condamné la S.N.C. LA NIMOISE à verser cette indemnité sur justificatifs. Il convient de constater que dans ses dernières écritures, la S.A.S. R et E [L], qui a pourtant restitué les lieux loués le 30 juin 2022, ne justifie aucunement de la situation dans laquelle elle se serait trouvée de supporter ainsi cumulativement la charge de deux loyers. La demande formée à ce titre ne pourra, dans ces conditions, qu'être rejetée, et la décision de première instance réformée sur ce point.



B) sur l'indemnité d'occupation :



Selon l'article L 145 ' 28 du code de commerce, « aucun locataire pouvant prétendre à une indemnité d'éviction ne peut être obligé de quitter les lieux avant de l'avoir reçue. Jusqu'au paiement de cette indemnité, il a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clauses du contrat de bail expiré. Toutefois, l'indemnité d'occupation est déterminée conformément aux dispositions des sections 6 et 7, compte tenu de tous éléments d'appréciation (') ».

Il convient de rappeler que par un arrêt du 1er décembre 2016, la cour de céans a dit qu'un nouveau bail avait pris effet entre les parties à la date du 1er janvier 2015, fixant à 3700,50 € le montant du loyer annuel.

Il est constant que par courrier du 27 octobre 2015, la S.N.C. LA NIMOISE a accepté le renouvellement du bail moyennant un loyer annuel de 29 000 € hors-taxes, qui a été refusé par l'intimée. C'est en conséquence à juste titre qu'en application des articles L 145 ' 10 et L 145 ' 11 du code de commerce, le premier juge a dit que l'indemnité d'occupation avait débuté le 1er janvier 2016 et que, pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2015, le loyer de 3700,50 € était dû.

L'expert judiciaire, préconisant un taux de précarité de 10 %, a retenu une indemnité d'occupation annuelle de 8160 € pour l'année 2020. Il précise, en page 30 de son rapport, que ladite indemnité a été calculée sur la base de l'évaluation de la valeur locative selon le calcul figurant en pages 26 et 27 de son rapport, c'est-à-dire après synthèse des éléments de commercialité et étude des prix couramment pratiqués dans le voisinage.

Il devra être remarqué, à cet égard, que les indemnités d'occupation réclamées par la S.N.C. LA NIMOISE sont basées sur un avis de valeur rédigé le 9 avril 2015 par Madame [D], expert près la cour d'appel d'Aix-en-Provence, laquelle retient un prix au mètre carré moyen de 350 €, ce qui ne correspond ni aux exemples chiffrés de l'expert judiciaire ' lequel préconise une valeur unitaire de 250 € ' ni aux termes du courrier rédigé le 5 février 2016 par Maître [U], notaire à [Localité 2], lequel indique notamment : « sur la valeur locative de votre local : les prétentions de votre propriétaire quant au loyer sont totalement déraisonnables et ne correspondent en aucun cas aux loyers des biens équivalents pour lesquels j'ai été dernièrement amené à rédiger soit un bail soit un renouvellement, d'autant plus que (') l'état général du bâtiment ne permet pas l'utilisation totale des lieux loués (manque d'entretien évidentde la part du bailleur) » (pièce numéro 18 du dossier de la S.A.S. R et E [L]).

Il résulte par ailleurs du procès-verbal de constat d'huissier établi le 4 avril 2019 (pièce numéro 33 du même dossier) que les locaux dont s'agit présentent un état de vétusté incontestable, l'huissier de justice ayant notamment constaté, s'agissant du grenier, que le sol était constitué « d'un plancher vétuste qui a tendance à s'affaisser au centre de la pièce, dans le passage ; un trou apparaît au centre de ce passage, plusieurs tuiles percées laissent apparaître le jour (') la fenêtre, en simple vitrage, et les boiseries sont dégradées et maintenues par une planche (') des traces d'infiltrations sont apparentes sur les murs, les retours de la fenêtre comportent de multiples fissures (') les tomettes sont vétustes et couvertes de gravats (') » et, s'agissant du premier étage à usage de bureaux et d'atelier : « des traces d'infiltrations apparaissent sur la cloison sous fenêtre ; sur la cloison, le plâtre est décollé par plaques entières, les boiseries extérieures de la fenêtre sont dégradées, rongées, de même que les boiseries de l'appui de fenêtre ; des morceaux de plâtre et de pierre se sont décrochés et reposent sur l'appui de fenêtre extérieure ; de cette fenêtre, on constate des débris d'ardoises qui se sont décrochés et tombés sur la couverture en fibrociment d'une pièce aménagée à l'étage inférieur (') ». Au vu de ces éléments, c'est à juste titre que le premier juge a retenu qu'il y avait lieu d'appliquer un abattement de précarité au taux de 20 % et a ainsi jugé à bon droit que la S.A.S. R et E [L] était débitrice à l'égard de la S.N.C. LA NIMOISE des sommes suivantes :

' du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2015 : 3700,50 €

' du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2016 : 6800,56 €

' du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2017 : 6811,85 €

' du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2018 : 6946,09 €

' du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2019 : 7118,64 €

' du 1er janvier 2020 au 31 décembre 2020 : 7253,60 €

' du 1er janvier 2021 au 31 décembre 2021 : 7362,40 €.

La décision de première instance devra donc être confirmée de ce chef.



3) sur les autres demandes :



La S.N.C. LA NIMOISE, qui succombe en la majorité de ses demandes, sera tenue aux entiers dépens d'appel et devra, par ailleurs, verser à la S.A.S. R et E [L] une indemnité au titre des frais irrépétibles que celle-ci a dû exposer devant la cour que l'équité commande de fixer, en application de l'article 700 du code de procédure civile, à la somme de 2500 €.





PAR CES MOTIFS :



La cour



' Ecarte des débats les conclusions notifiées par la S.N.C. LA NIMOISE le 10 janvier 2023 et rejette la demande subsidiaire formée par celle-ci et tendant à écarter des débats les conclusions de la S.A.S. R et E [L] en date du 5 janvier 2023



' Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la S.N.C. LA NIMOISE était tenue de verser à la S.A.S. R et E [L], sur justificatifs, des frais de déménagement des meubles, des frais de déménagement du coffre-fort ou, selon le cas, acquisition d'un coffre-fort, des frais de réinstallation de la boutique, une indemnité pour perte de stock, des indemnités de licenciement qui n'intégreront pas les sommes pouvant être dues au titre des indemnités de congés payés, de préavis, de fin de carrière et autres indemnités annexes, ainsi qu'une indemnité de double loyer et en ce qu'il a dit qu'en cas de désaccord entre les parties sur leur montant, lesdits frais seraient arbitrés par le juge saisi à la requête de la partie la plus diligente





Et, statuant à nouveau sur ses seuls chefs réformés,



' Condamne la S.N.C. LA NIMOISE à verser à la S.A.S. R et E [L] les sommes suivantes :

' 748 € au titre du transfert du coffre-fort

' 2100 € au titre des frais de déménagement des meubles

' 15 731, 39 € au titre des frais de réinstallation de la boutique

' 40 935 € au titre de la perte sur stock



' Constate que la demande formée au titre des éventuelles indemnités de licenciement est sans objet



' Déboute la S.A.S. R et E [L] de sa demande formée au titre de l'indemnité de double loyer



' Confirme, sur le surplus, le jugement entrepris, sauf à préciser que la S.A.S R et E [L] vient aux droits de la S.A.R.L. R et E [L]



' Rejette toutes autres demandes, plus amples ou contraires



' Condamne la S.N.C. LA NIMOISE à verser à la S.A.S. R et E [L] une indemnité de 2500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'appel et dit qu'il pourra être fait application des dispositions de l'article 699 du même code.







L'arrêt a été signé par M. TESSIER-FLOHIC, Président et par Mme MAGIS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.





Le Greffier, Le Président,







S.MAGIS M. TESSIER-FLOHIC

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