19 avril 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-24.655

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2023:SO00405

Texte de la décision

SOC.

CH9



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 19 avril 2023




Cassation partielle sans renvoi


Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 405 F-D

Pourvoi n° G 21-24.655




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 19 AVRIL 2023

1°/ L'AGS, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ l'UNEDIC, association, dont le siège est [Adresse 2], agissant en qualité de gestionnaire de l'AGS, élisant domicile au Centre de gestion et d'études AGS CGEA de Rennes, [Adresse 3],

ont formé le pourvoi n° G 21-24.655 contre l'arrêt rendu le 15 janvier 2021 par la cour d'appel de Rennes (8e chambre prud'homale), dans le litige les opposant :

1°/ à M. [I] [U], domicilié [Adresse 1],

2°/ à M. [W] [X], domicilié [Adresse 4], en qualité de liquidateur de la société Le Blue Night,

défendeurs à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Pietton, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de l'AGS, de l'UNEDIC CGEA de Rennes, après débats en l'audience publique du 7 mars 2023 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Pietton, conseiller rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 15 janvier 2021), M. [U] a été engagé en qualité d'agent d'accueil par la société Le Blue Light (la société), par contrat de travail à durée déterminée à temps partiel pendant la période allant du 1er février 2015 au 20 février 2016.

2. Par jugement du 5 mai 2015, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'égard de cette société, convertie en liquidation judiciaire par jugement du 28 juin 2016, M. [X] étant désigné liquidateur judiciaire.

3. Le 29 juillet 2016, le salarié a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la requalification de son contrat de travail en contrat à durée indéterminée à temps plein et la fixation au passif de la société de sommes correspondant à l'indemnité de requalification, aux rappels de salaire et de congés payés afférents et à des indemnités de rupture du contrat de travail.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. L'AGS et l'UNEDIC CGEA de Rennes font grief à l'arrêt de dire que l'assurance mentionnée à l'article L. 3253-6 du code du travail couvre les sommes dues au salarié ainsi qu'il suit : les rappels de salaires afférents à la période du 1er février 2015 au 20 février 2016 en application de l'article L. 3253-8 1°, les créances résultant de la rupture intervenue le 20 février 2016, en application de l'article L. 3253-8 2° a), alors « que l'article L. 3253-8 5° a) du code du travail dispose que lorsque le tribunal prononce la liquidation judiciaire, l'AGS garantit dans la limite d'un montant maximal correspondant à un mois et demi de travail, les sommes dues au cours de la période d'observation ; qu'il est constant que la procédure de redressement judiciaire de la société avait été ouverte le 5 mai 2015 et que la période d'observation avait débuté à cette date et que la liquidation judiciaire avait été prononcée le 28 juin 2016 ; que les créances de salaires réclamées par le salarié, en ce qu'elles étaient comprises entre le 5 mai 2015 et le 20 février 2016 relevaient du régime de garantie prévu à l'article L. 3253-8 5° a) du code du travail ; qu'en énonçant, pour écarter cette disposition, que la rupture du contrat de travail du salarié était intervenue le 20 février 2016, antérieurement au prononcé de la liquidation judiciaire, la cour d'appel a violé par fausse application l'article L. 3253-8 1°, ensemble l'article L. 3253-8 5° a) du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3253-8 1° et 5° du code du travail :

5. Selon ce texte, d'une part, l'assurance mentionnée à l'article L. 3253-6 du code du travail couvre les sommes qui sont dues aux salariés à la date du jugement d'ouverture de toute procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, d'autre part, cette assurance couvre, lorsque le tribunal prononce la liquidation judiciaire, dans la limite d'un montant maximal correspondant à un mois et demi de travail, les sommes dues au cours de la période d'observation.

6. L'arrêt retient que les rappels de salaire correspondant à la période du 6 mai 2015 au 20 février 2016, sont garantis par l'assurance mentionnée à l'article L. 3253-6 pendant la période d'observation qui a débuté le 5 mai 2015 et jusqu'à la rupture du contrat intervenue le 20 février 2016, soit avant le prononcé de la liquidation judiciaire. Il ajoute qu'en effet, la limite de la garantie à un mois et demi de travail prévue par l'article L. 3253-8 5° a) du code du travail ne s'applique que lorsque le tribunal a prononcé la liquidation judiciaire, soit en l'espèce, qu'à compter du 28 juin 2016 alors qu'à cette date, le contrat de travail était déjà rompu, de telle sorte que la limite prévue ne s'applique pas.

7. En statuant ainsi, alors, d'une part, que la liquidation judiciaire ne constituait pas l'ouverture d'une procédure mais la continuation de la procédure collective ouverte par le prononcé du redressement judiciaire le 5 mai 2015 et, d'autre part, qu'elle constatait que la créance de rappel de salaire correspondant à la période du 5 mai 2015 au 20 février 2016 était due pendant la période d'observation de la procédure de redressement judiciaire, convertie en liquidation judiciaire, ce dont il résultait que seule la limitation de garantie à un mois et demi de travail de l'article L. 3253-8 5° du code du travail était applicable, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

8. La cassation du chef de dispositif critiqué par le moyen n'emporte pas cassation du chef de dispositif de l'arrêt ni en ce qu'il dit que l'assurance mentionnée à l'article L. 3253-6 du code du travail couvre les sommes dues au salarié au titre des rappels de salaire afférents à la période du 1er février 2015 au 4 mai 2015 en application de l'article L. 3253-8 1° du code du travail ni condamnant le liquidateur judiciaire, ès qualités, aux dépens, justifié par la fixation de créances, non remise en cause.

9. Sur suggestion de l'AGS et de l'UNEDIC CGEA de Rennes, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

10. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

11. Il convient de dire que la créance de rappel de salaire pour la période du 5 mai 2015 au 20 février 2016 sera couverte par la garantie de l'AGS dans la limite d'un montant maximal correspondant à un mois et demi de travail.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que l'assurance mentionnée à l'article L. 3253-6 du code du travail couvre les sommes dues à M. [U] au titre des rappels de salaire afférents à la période du 5 mai 2015 au 20 février 2016, l'arrêt rendu le 15 janvier 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi de ce chef ;

DIT que la créance de rappel de salaire pour la période du 5 mai 2015 au 20 février 2016 sera couverte par la garantie de l'AGS dans la limite d'un montant maximal correspondant à un mois et demi de travail ;

Condamne M. [U] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'AGS et l'UNEDIC CGEA de Rennes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf avril deux mille vingt-trois.

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