19 avril 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-25.221

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2023:SO00427

Titres et sommaires

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - licenciement - nullité - effets - réintégration - dispense - impossibilité matérielle absolue de réintégrer - cas - inaptitude constatée plusieurs années auparavant (non)

Le fait pour un salarié, dont le licenciement a été déclaré nul en application de l'article L. 1152-3 du code du travail, d'avoir subi un harcèlement moral au sein de l'entreprise n'est pas de nature à le priver de son droit à réintégration, dès lors que l'employeur ne justifie pas que la réintégration du salarié est matériellement impossible. La cour d'appel a pu décider qu'au jour où elle a statué, cette impossibilité n'était pas caractérisée par une inaptitude constatée plusieurs années auparavant par le médecin du travail

Texte de la décision

SOC.

CH9



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 19 avril 2023




Rejet


M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 427 F-B

Pourvoi n° Y 21-25.221




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 19 AVRIL 2023

La société Onepoint, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 21-25.221 contre deux arrêts rendus les 27 janvier 2021 (pôle 6, chambre 9) et 7 octobre 2021 (pôle 6, chambre 5) par la cour d'appel de Paris, dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [Y] [K], domicilié [Adresse 3],

2°/ à Pôle emploi, dont le siège est direction régionale Ile-de-France, [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bérard, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Onepoint, de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. [K], après débats en l'audience publique du 8 mars 2023 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Bérard, conseiller rapporteur, M. Rinuy, conseiller, Mme Roques, avocat général référendaire, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Déchéance partielle du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 27 janvier 2021, examinée d'office

1. Conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, avis a été donné aux parties qu'il est fait application de l'article 978 du code de procédure civile.

2. Le salarié s'est pourvu en cassation contre l'arrêt du 27 janvier 2021 en même temps qu'il s'est pourvu contre l'arrêt du 7 octobre 2021, mais aucun des moyens contenus dans le mémoire n'est dirigé contre le premier arrêt.

3.Il y a donc lieu de constater la déchéance du pourvoi en ce qu'il est formé
contre l'arrêt du 27 janvier 2021.

Faits et procédure

4. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 7 octobre 2021), M. [K] a été engagé en qualité d'ingénieur commercial par la société I2S devenue Vision it group aux droits de laquelle vient la société Onepoint (la société) par un contrat de travail à durée indéterminée du 1er janvier 2001. Il a été nommé par le conseil d'administration en qualité de directeur général délégué non-administrateur à compter du 4 décembre 2008.

5. Le 6 avril 2017, le salarié a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

6. Ayant initialement saisi la juridiction prud'homale le 13 juin 2016 de demandes au titre d'un harcèlement moral, le salarié a demandé l'annulation de son licenciement, sa réintégration et le paiement d'une indemnité d'éviction.

Examen des moyens

Sur le premier moyen


7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Sur le second moyen

Enoncé du moyen

8. La société fait grief à l'arrêt d'ordonner la réintégration du salarié, de surseoir à statuer sur ses demandes tendant à voir fixer la moyenne de ses douze derniers mois de salaire à 14 333 euros et de condamner la société à lui payer une indemnité égale au montant de la rémunération brute qui aurait dû lui être versée entre le jour de son licenciement du 6 avril 2017, et le jour de sa réintégration effective, soit 14 333 euros par mois, et sur la demande de la société tendant à voir ordonner en cas de réintégration la déduction des revenus que le salarié a tirés d'une autre activité et le revenu de remplacement qui lui a été servi pendant cette période allant de son licenciement à sa réintégration et la remise des documents en justifiant, alors :

« 1°/ qu'une impossibilité de réintégration est caractérisée lorsque le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement est jugé nul en raison de l'imputabilité de l'inaptitude à un harcèlement moral ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-3 et L. 1226-2 du code du travail ;

2°/ que le juge, tenu de motiver sa décision, ne peut statuer par voie de simple affirmation ; qu'en affirmant péremptoirement que l'avis d'inaptitude étant intervenu le 2 février 2017, l'état de santé de M. [K] avait nécessairement évolué depuis, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

9. Lorsque le licenciement est nul, le salarié doit être, s'il le demande, réintégré dans son emploi ou un emploi équivalent, demande à laquelle l'employeur est tenu de faire droit sauf s'il justifie d'une impossibilité de procéder à cette réintégration.

10. La cour d'appel, après avoir retenu exactement que l'existence du harcèlement moral à l'origine de l'inaptitude du salarié ayant conduit à la nullité du licenciement ne constitue pas une impossibilité de réintégration, a pu décider qu'au jour où elle a statué, cette impossibilité n'était pas, par ailleurs, caractérisée par une inaptitude constatée le 2 février 2017.

11. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CONSTATE la déchéance du pourvoi formé contre l'arrêt n° 18/08606 rendu
le 27 janvier 2021 par la cour d'appel de Paris ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Onepoint aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Onepoint et la condamne à payer à M. [K] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf avril deux mille vingt-trois.

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