13 avril 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-23.334

Première chambre civile - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2023:C100264

Titres et sommaires

CAUTIONNEMENT - Caution - Recours contre le débiteur principal - Recours personnel - Exercice - Procédure de surendettement - Opposabilité des mesures rendues exécutoires par le juge de l'exécution - Information de la caution par la commission

Il résulte de la combinaison des articles L. 331-3, II, alinéa 4, L. 331-7-1 et L. 331-8 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, que la caution, personne morale, qui est devenue personnellement créancière du débiteur par le règlement de la créance initiale effectué au cours de la procédure de surendettement, peut se voir opposer les mesures rendues exécutoires par le juge de l'exécution à l'égard de la créance cautionnée, si la caution a été avisée par la commission

Texte de la décision

CIV. 1

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 13 avril 2023




Cassation


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 264 FS-B

Pourvoi n° X 21-23.334




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 13 AVRIL 2023

1°/ Mme [I] [W],

2°/ M. [E] [L],

tous deux domiciliés [Adresse 1],

ont formé le pourvoi n° X 21-23.334 contre l'arrêt rendu le 24 juin 2021 par la cour d'appel de Bordeaux (1re chambre civile), dans le litige les opposant à la société Crédit logement, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Dumas, conseiller référendaire, les observations de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de Mme [W] et de M. [L], de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société Crédit logement, et l'avis de M. Salomon, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 mars 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Dumas, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, MM. Hascher, Bruyère, Ancel, conseillers, Mmes Kloda, Champ, Robin-Raschel, conseillers référendaires, M. Salomon, avocat général, et Mme Vignes, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 24 juin 2021), le 18 septembre 2006, la Société générale (la banque) a consenti à M. [L] et Mme [W] un prêt dont la société Crédit logement (la caution) s'est portée caution.

2. En avril 2011, M. [L] a saisi une commission de surendettement des particuliers, qui a mis en place un plan conventionnel de redressement.

3. Le 22 juillet 2014, il a de nouveau saisi la commission, qui, le 3 février 2015, a recommandé l'effacement total de dettes dont celle de la banque.

4. Le 5 mars 2015, la caution a payé à la banque le solde du prêt.

5. Un jugement du 10 décembre 2015 a homologué les mesures recommandées.

6. La caution a assigné M. [L] et Mme [W] en paiement.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

7. M. [L] fait grief à l'arrêt de le condamner, solidairement avec Mme [W], à payer à la caution la somme de 16 525,66 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 juin 2015, alors « que la commission, qui constate que le remboursement d'une ou plusieurs dettes du débiteur principal est garanti par un cautionnement, informe la caution de l'ouverture de la procédure de sorte que, dûment informée de l'existence de la procédure de surendettement, le plan de surendettement fixé à l'issue de celle-ci lui est opposable, peu important qu'elle n'y ait pas participé ; qu'en se bornant à énoncer que le plan de surendettement dont M. [L] avait fait l'objet n'était pas opposable à la caution dès lors qu'elle n'avait pas participé à la procédure, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la commission de surendettement n'avait pas informé la caution de l'ouverture de la procédure de surendettement de sorte que la mesure d'effacement de la dette de la banque, fixée dans le plan de surendettement, lui était opposable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 331-3 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 331-3, II, alinéa 4, L. 331-7-1 et L. 331-8 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 :

8. Aux termes du premier de ces textes, lorsque la commission constate que le remboursement d'une ou plusieurs dettes du débiteur principal est garanti par un cautionnement, elle informe la caution de l'ouverture de la procédure. La caution peut faire connaître par écrit à la commission ses observations.

9. Selon le deuxième, lorsque la commission de surendettement constate, sans retenir son caractère irrémédiable, l'insolvabilité du débiteur caractérisée par l'absence de ressources ou de biens saisissables de nature à permettre d'apurer tout ou partie de ses dettes et rendant inapplicables les mesures prévues à l'article L. 331-7, elle peut recommander l'effacement partiel des créances. Celles de ces créances dont le prix a été payé au lieu et place du débiteur par la caution ou le coobligé, personnes physiques, ne peuvent faire l'objet d'un effacement.

10. Selon le troisième, les mesures recommandées en application de l'article L. 331-7-1 et rendues exécutoires par le juge de l'exécution en application de l'article L. 332-1 ne sont pas opposables aux créanciers dont l'existence n'aurait pas été signalée par le débiteur et qui n'en auraient pas été avisés par la commission.

11. Il résulte de la combinaison de ces textes que la caution, personne morale, qui est devenue personnellement créancière du débiteur par le règlement de la créance initiale effectué au cours de la procédure de surendettement, peut se voir opposer les mesures rendues exécutoires par le juge de l'exécution à l'égard de la créance cautionnée, si la caution a été avisée par la commission.

12. Pour condamner M. [L] à payer une certaine somme à la caution, l'arrêt retient que le plan de surendettement n'est pas opposable à la caution qui n'a pas participé à cette procédure.

13. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la caution avait été avisée par la commission de l'ouverture de la procédure, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Et sur le deuxième moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

14. M. [L] et Mme [W] font grief à l'arrêt d'ordonner la capitalisation des intérêts, alors « que la règle édictée par l'ancien article L. 312-23 du code de la consommation, selon laquelle aucune indemnité ni aucun coût autres que ceux mentionnés aux articles L. 312-21 et L. 312-22 du même code ne peuvent être mis à la charge de l'emprunteur en cas de défaillance prévue par ces articles, fait obstacle à l'application de la capitalisation des intérêts prévue par l'article 1154, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; qu'en énonçant que la capitalisation était de droit lorsque les conditions de l'article 1154 du code civil étaient réunies, les seules conditions posées par ce texte étant que la demande en ait été judiciairement formée et qu'il s'agisse d'intérêts dus pour une année entière, la cour d'appel a violé l'ancien article L. 312-23 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi 93-949 annexe JORF du 27 juillet 1993, applicable au litige, ensemble l'article 1154 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 312-23 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, et l'article 1154 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :

15. La règle édictée par le premier de ces textes, selon lequel aucune indemnité ni aucun coût autres que ceux qui sont mentionnés aux articles L. 312-21 et L. 312-22 du code de la consommation ne peuvent être mis à la charge de l'emprunteur dans les cas de remboursement par anticipation d'un prêt immobilier ou de défaillance prévus par ces articles, fait obstacle à l'application de la capitalisation des intérêts prévue par le second texte.

16. L'arrêt prononce la capitalisation des intérêts pour Mme [W] au titre d'un prêt qu'il qualifie d'immobilier.

17. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux autrement composée ;

Condamne la société Crédit logement aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Crédit logement et la condamne à payer à M. [L] et Mme [W] la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize avril deux mille vingt-trois.

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