5 avril 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-11.469

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2023:CO00263

Titres et sommaires

IMPOTS ET TAXES - Procédure (règles communes) - Election de domicile chez un avocat - Notification des actes de la procédure chez cet avocat

Dès lors que l'administration fiscale, ou l'administration des douanes statuant en matière fiscale, a été avisée de l'élection de domicile du redevable au cabinet de son avocat, celle-ci doit y adresser les documents relatifs à la procédure suivie

Texte de la décision

COMM.

CH.B



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 5 avril 2023




Cassation


M. VIGNEAU, président



Arrêt n° 263 F-B

Pourvoi n° A 21-11.469




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 5 AVRIL 2023

La société Halal Foodservice, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° A 21-11.469 contre l'arrêt rendu le 7 décembre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 10), dans le litige l'opposant au directeur régional des douanes et droits indirects de [Localité 5] Est, domicilié Recette régionale de [Localité 4], [Adresse 2], agissant sous l'autorité de la directrice générale des douanes et droits indirects, défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, cinq moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Daubigney, conseiller, les observations de la SCP Krivine et Viaud, avocat de la société Halal Foodservice, de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur régional des douanes et droits indirects de [Localité 5] Est, agissant sous l'autorité de la directrice générale des douanes et droits indirects, après débats en l'audience publique du 14 février 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Daubigney, conseiller rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 7 décembre 2020), la société Halal Foodservice (la société) réalise un commerce de gros, demi-gros et détail, de produits alimentaires et de tous produits, matières premières, marchandises non réglementées, destiné essentiellement aux petits commerces de restauration rapide.

2. Considérant que la société était redevable de la taxe spéciale sur la commercialisation d'eaux et de certaines boissons sucrées ou édulcorées, l'administration des douanes lui a notifié un procès-verbal d'infractions puis lui a adressé un avis de mise en recouvrement (AMR).

3. Après le rejet de sa réclamation, la société a assigné l'administration des douanes en annulation de l'AMR et de la décision de rejet.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en ses quatrième, cinquième, sixième, septième, huitième et neuvième branches, et les deuxième, troisième, quatrième et cinquième moyens


4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Mais sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

5. La société fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement du 24 janvier 2019 et, statuant à nouveau, de confirmer l'AMR du 19 novembre 2014 et de rejeter ses demandes, alors « que la notification de l'AMR comporte l'envoi au redevable, soit au lieu de son domicile, de sa résidence ou de son siège, soit à l'adresse qu'il a lui-même fait connaître au service compétent de la direction générale des finances publiques ou au service des douanes et droits indirects compétent, de l' "ampliation" prévue à l'article R.* 256-3 du livre des procédures fiscales ; qu'en énonçant, par motifs adoptés, que la direction des douanes avait valablement pu envoyer l'AMR "au siège social de la Sasu Halal Foodservice, soit au [Adresse 3] à [Localité 6]", indiqué sur l'extrait K bis de cette entité, sans rechercher si, comme le soutenait la société Halal Foodservice, celle-ci "avait pris soin sur tous les actes de procédure et correspondances adressés par l'administration des douanes de se domicilier expressément chez son conseil et fondé de pouvoir M. [Y], qui en avait au préalable expressément informé le service", et que, "dans ses deux réponses faites le 5 juin 2014", M. [Y] avait précisé en première page de chacun de ces deux documents que les sociétés Eurohalal Foodservice et Halal Foodservice avaient élu "tou[te]s deux, domicile en [s]on cabinet pour les suites de la présente", la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article R.* 256-6 du livre des procédures fiscales. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 6 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 et R.* 256-6 du livre des procédures fiscales :

6. Selon le premier de ces textes, les avocats peuvent assister et représenter autrui devant les administrations publiques, sous réserve des dispositions législatives et réglementaires. Selon le second, la notification de l'AMR est faite soit au lieu du domicile du redevable, de sa résidence ou de son siège, soit à l'adresse qu'il a lui-même fait connaître au service compétent de la direction générale des finances publiques ou au service des douanes et droits indirects compétent.

7. Il en résulte que, dès lors que l'administration fiscale ou l'administration des douanes statuant en matière fiscale a été avisée de l'élection de domicile du redevable au cabinet de son avocat, celle-ci doit y adresser les documents relatifs à la procédure suivie.

8. Pour dire que la notification de l'AMR à la société était régulière, l'arrêt retient que celle-ci avait été réalisée à l'adresse indiquée sur l'extrait K bis de la société, qui est celle de son siège social, et que si l'administration de la poste a indiqué que la société n'était pas domiciliée à l'adresse indiquée, il appartenait à la société d'aviser cette dernière administration ou l'administration des douanes de son changement d'adresse.

9. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la société n'avait pas élu domicile au cabinet de son avocat, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 décembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne le directeur régional des douanes et droits indirects de [Localité 5]-Est, agissant sous l'autorité de la directrice générale des douanes et droits indirects, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par le directeur régional des douanes et droits indirects de [Localité 5]-Est, agissant sous l'autorité de la directrice générale des douanes et droits indirects, et le condamne à payer à la société Halal Foodservice la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille vingt-trois.

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