28 mars 2023
Cour d'appel de Rennes
RG n° 21/03816

3ème Chambre Commerciale

Texte de la décision

3ème Chambre Commerciale





ARRÊT N° 163



N° RG 21/03816 - N° Portalis DBVL-V-B7F-RYLR













S.A.S. NBR



C/



S.A. FC [8]



































Copie exécutoire délivrée



le :



à :

Me PRENEUX

Me RENAUDIN







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 28 MARS 2023





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,

Assesseur : Madame Fabienne CLEMENT, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère, rapporteur





GREFFIER :



Madame Julie ROUET, lors des débats, et Madame Lydie CHEVREL, lors du prononcé,





DÉBATS :



A l'audience publique du 03 Janvier 2023





ARRÊT :



Contradictoire, prononcé publiquement le 28 Mars 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats, le délibéré annoncé au 04 Avril 2023 ayant été avancé pour être rendu ce jour





****





APPELANTE :



La société GROUPE ROYER, immatriculée au RCS de Rennes sous le numéro 309 742 492, venant aux droits de la société NBR (radiée depuis le 21 janvier 2022) suite à la transmission universelle de son patrimoine à son associé unique la société Groupe Royer, dont le siège social est situé [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représentée par Me Stéphanie PRENEUX de la SELARL BAZILLE, TESSIER, PRENEUX, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Olivia KLEIN de la SELARL HAROLD AVOCATS IV, Plaidant, avocat au barreau de NANTES, substituée par Me Cyril TOURNADE, avocat au barreau de NANTES







INTIMÉE :



S.A. FC [8], société anonyme sportive professionnelle, immatriculée au RCS de NANTES sous le numéro 388 113 276, représentée par Monsieur [T] [I] [X], en sa qualité de président du conseil d'administration-directeur général

[Adresse 5]

[Localité 4]



Représentée par Me Muriel LE FUSTEC de la SELARL ARTLEX II, Plaidant, avocat au barreau de NANTES

Représentée par Me Jean-paul RENAUDIN de la SCP GUILLOU-RENAUDIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Carole COUSON-WARLOP de la SELARL ARTLEX II, Plaidant, avocat au barreau de NANTES







La société FC [8] est une société qui a comme activité notamment la gestion et l'animation des activités de la section de football professionnel du Football Club de [8].



Le FC [8] distribue à travers son réseau de distribution, sa collection de produits officiels revêtus de sa marque et de son logo, à savoir une boutique officielle située au Stade de [7] et une boutique en ligne accessible sur son site internet.



La Société NBR est spécialisée dans le commerce de gros d'habillement et de chaussures.

Elle diffuse la marque NEW BALANCE, qui entretient des relations suivies avec le sport en général.



Le 24 novembre 2017, les sociétés FC [8] et NBR ont conclu un contrat de partenariat d'équipementier et de merchandising.



Aux termes de ce contrat, FC [8] s'est engagé à s'approvisionner exclusivement auprès de NBR en équipements sportifs. Ceci aussi bien pour ses clients que pour son staff et ses joueurs de l'équipe professionnelle masculine.



A ce titre NBR s'est engagé à livrer au FC [8], pour chaque saison sportive pendant la durée du contrat, une dotation d'équipements de base.



Pour bénéficier de la notoriété et de la visibilité du Club FC [8], celui-ci a autorisé NBR à apposer sur les équipements sa marque seule ou avec la marque NBR sur ses produits, sur les matériels du club (panneau de stade, affiches, logos sur les bancs de touche et à différents endroits du stade [7] ....), sur les supports médiatiques du club: billets, bus, site internet, calendriers, agendas, posters etc...



Par ailleurs, la société FC [8] s'est aussi engagée à faire porter les équipements NBR à ses joueurs et au staff pendant les matchs, entraînements et échauffements.



Enfin, la société FC [8] devait fournir à la société NBR des places définies contractuellement lors des matchs.



En contrepartie, la société NBR était tenue de verser au FC [8] la somme de 700.000€ HT pour chaque saison sportive allant du ler Juillet de l'année N au 30 Juin de l'année N+l.

Cette somme était payable en échéances égales: 1er juillet, 1er octobre, 1er janvier, 1er avril.



Le contrat était conclu pour deux saisons sportives du ler Juillet 2018 au 30 Juin 2020.

Par avenant du 17 janvier 2020 les parties se sont accordées pour fixer le terme du contrat au 31 mai 2020.



En raison de la pandémie COVID la saison sportive 2020 a été chaotique et 10 matchs du Championnat de France de Football n'ont pu avoir lieu.



Par un second avenant du 26 mai 2020 les parties se sont accordées pour prolonger le contrat jusqu'au 30 juillet 2020.



Les trois premières échéances de la saison sportive 2019-2020 ont été payées mais pas celle du 1er avril 2020, ceci au motif que la société NBR s'est prévalue de l'épidémie de COVID et de la réduction des matchs et donc de sa visibilité commerciale, et de la réduction de ses activités, la contraignant à réduire ses dépenses.



Le FC [8] n'a pas accepté cette position, le COVID l'ayant également impacté et la visibilité de la marque ne dépendant pas que des matchs.



De nombreuses discussions ont eu lieu entre les parties, et le FC [8] a accepté d'adresser à la société NBR un avoir de 58.304 euros HT à valoir sur sa facture de 175.000 euros HT du 1er avril 2020.

Pour aurant le solde de la facture n'a pas été payé.



Par acte du 21 octobre 2020, le FC [8] a assigné la société NBR devant le juge des référés aux fins d'obtenir le paiement du solde de sa facture du 1er avril, soit la somme de 116.696 euros HT.

Reconventionnellement, la société NBR a demandé le paiement de la somme de 62.193,60 euros TTC représentant des équipements livrés au club mais non payés.





Par ordonnance du 20 mai 2021, le juge des référés du tribunal de commerce de Rennes a:

- dit n'y avoir lieu à référé et renvoyé les parties à se pourvoir,

- débouté les parties de toutes leurs demandes,

- rejeté les demandes de frais irrépétibles,

- condamné la demanderesse aux dépens.





Appelante de cette ordonnance, la société GROUPE ROYER, venant aux droits de la société NBR, par conclusions du 30 novembre 2022, a demandé que la Cour:

- infirme l'ordonnance de référé rendue par le Président du Tribunal de commerce de Rennes le 20 mai 2021 mais uniquement en ce qu'elle a été déboutée de sa demande en paiement à titre provisionnel de ses factures impayées et de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile;

Statuant à nouveau :

- condamne la société FC [8] à verser à la société GROUPE ROYER, à titre provisionnel la somme en principal de 62.193,60 euros TTC au titre des factures n°6208590, 6210752, 6211978 et 6215854 augmentée :

. des intérêts légaux de retard courant à compter de la date de la mise en demeure du 7 août 2020,

. des pénalités de retard au taux contractuel annuel de 15% dues à compter de l'échéance de chacun des quatre factures impayées,

. d'une indemnité pour frais de recouvrement de 40 euros par facture impayée, soit 160 euros au total,

- confirme l'ordonnance de référé rendue par le Président du Tribunal de commerce de Rennes le 20 mai 2021 en ce qu'elle a rejeté la demande de provision formulée par le CLUB du FC [8] au titre de la dotation financière ;

- rejette l'ensemble des demandes, fins et conclusions de la société FC [8] ;

- condamne la société FC [8] à verser à la société GROUPE ROYER la somme de 6.000 euros au titre des frais de l'article 700 du Code de procédure civile de première instance et 10.000 euros au titre des frais de l'article 700 du Code de procédure civile supportés en appel,

- condamne la société FC [8] aux dépens d'appel.





Par conclusions du 28 novembre 2022, la société FC [8] a demandé que la Cour:

- infirme l'ordonnance déférée en ce qu'elle 1'a déboutée de ses prétentions au paiement de sa facture, à la compensation des sommes dues de part et d'autre, au paiement de frais irrépétibles,

statuant à nouveau:

- condamne la société GROUPE ROYER à lui verser à titre provisionnel, la somme de 116.696 euros HT, augmentée des intéréts de retard dus à compter du 3 juin 2020, des pénalités de retard au taux égal à trois fois le taux d'intérêt légal dues à compter de l'échéance de la facture, de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement de 40 euros ;

- rejette toutes les demandes de la société GROUPE ROYER,

- prononce la compensation entre la somme de 116.696 euros HT, augmentée des intérêts de retard dus à compter du 3 juin 2020, des pénalités de retard au taux égal à trois fois le taux d'intérêt legal dues à compter de l'échéance de la facture, de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement de 40 euros, avec la somme de 51.828 euros HT correspondant au montant des factures n°62085 90, n°6210752, n°62l1978, et n°6215854 de la société GROUPE ROYER impayées, augmentées des intéréts légaux de retard dus à compter du 7 août 2020, des pénalités de retard au taux contractuel de l5% dues à compter de l'échéance de chaque facture et de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement de 40 euros pour chaque facture impayée ;

A titre subsidiaire,

- confirme l'ordonnance de référé du Président du Tribunal de commerce de Rennes dans l'ensemble de ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté la société FC [8] de sa demande au titre de Particle 700 du Code de procedure civile ;

En tout état de cause,

- condamne la société GROUPE ROYER à payer à la société FC [8] la somme de 24.755,52 euros sur le fondement de Particle 700 du Code de procedure civile ainsi qu'aux entiers dépens.






MOTIFS DE LA DECISION:



En vertu des dispositions de l'article 873 du code de procédure civile, le président du tribunal de commerce, statuant en référés, peut accorder une provision au créancier dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable.



La demande principale, soit celle du FC [8]:



L'examen de la convention conclue entre la société NBR et le FC [8] démontre que l'équipementier (NBR) doit au club ([6]) une rémunération annuelle fixe de 700.000 euros HT.

Dans la convention, l'année est dénommée SAISON SPORTIVE et s'étend du 1er juillet au 30 juin.



La rémunération fixe annuelle est payable par quart le 1er juillet, le 1er octobre, le 1er janvier et le 1er avril; ce découpage n'est qu'une simple modalité de paiement et les quatre parts égales ne rémunèrent pas l'exécution du contrat sur telle ou telle partie de l'année.



Aux termes du contrat, la rémunération fixe est versée par la société NBR 'en contrepartie de son statut d'équipementier officiel'.



Le statut d'équipementier officiel conduit le FC [8] à devoir exécuter certaines obligations:

- acheter auprès de l'équipementier son équipement et ne pas s'approvisionner chez un concurrent,

- accorder à l'équipementier le droit exclusif de fabriquer les produits portant son logo et y placer la marque du club, placer le logo de l'équipementier sur une liste de vêtements définis,

- faire porter les produits 'logotés' par les joueurs et le staff lors des entraînements, échauffements, et compétitions auxquels participera le club,

- accorder à l'équipementier le droit de faire figurer son logo sur l'intégralité de supports de visibilité et sonores définis par le contrat (programmes, billets, pochettes de billets, bus, réseaux sociaux, posters, calendriers, agendas)

- accorder lors de matchs disputés par l'équipe professionnelle des places à des emplacements contractuellement définis (tribune etc ...),

- autorisation pour l'équipementier d'organiser pour ses clients six opérations de relations publiques dans les locaux du club, en présence d'un nombre minimum de joueurs, ainsi que trois showrooms.



Il doit être relevé que cette rémunération annuelle fixe peut être réduite, et même le contrat résilié, si le club devait changer de division.



Pour la saison ayant commencé le 1er juillet 2019, la société NBR a payé trois des quatre acomptes contractuellement prévus.



L'acompte en litige est celui qui aurait dû être payé au 1er avril 2020, sachant que le FC [8] a accepté de le réduire d'un tiers environ (58.304 euros HT) en considération des prestations non fournies pendant la période de confinement.

Le club a versé aux débats un tableau dans lequel il a détaillé les prestations exécutées au cours de la saison litigieuse, en attribuant une valeur à chacune d'entre elle.

La difficulté est que la convention ne donne aucune valeur particulière à telle ou telle obligation mise à la charge du club.



La société NBR considère pour sa part que le simple fait que 10 matchs sur 38 aient été annulés démontre que la contrepartie offerte par le club ne permet pas de considérer comme due l'intégralité de la rémunération fixée au contrat.

Elle considère que sans matchs, la visibilité prévue au contrat, qui est la contrepartie de la redevance, ne lui est offerte que marginalement.



Le FC [8] se prévaut d'avoir, durant la période du confinement, particulièrement travaillé son image sur les réseaux sociaux, en permettant au logo NBR d'apparaître à de multiples reprises.

Cette allégation est contestée par la société NBR au moyen de constats d'huissiers, selon lesquels le nombre de publication du FC [8] aurait en fait été inférieur au nombre prévalant quand les matchs ont réellement lieu, et selon lesquels son logo n'aurait pas été systématiquement mis en valeur par le club, n'apparaissant pas sur un pourcentage élevé de 'post'.



Il est constant qu'en raison du confinement du printemps 2020, une partie des prestations prévues à la convention n'a pas été exécutée conformément à ce qui représentait la volonté des parties lorsqu'elles ont conclu leur convention.



Les conséquences à en tirer excèdent la compétence du juge des référés, d'autant qu'aucune des parties n'évoque les dispositions des articles 1218 et 1351 du code civil, qui éventuellement s'appliqueraient au litige, et qu'au surplus, elles ont prolongé le contrat par avenant alors même que les difficultés d'exécution étaient connues.



L'ordonnance est confirmée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référés sur le paiement du solde restant dû de la redevance annuelle fixée par la convention des parties.





La demande reconventionnelle de la société GROUPE ROYER:



La demande est relative à des équipements livrés au FC [8] durant le premier trimestre de l'année 2020, ayant fait l'objet de quatre factures 06208590 - 06210752 - 06211978 - et 06215854, pour un montant total de 62.193,60 euros TTC.



Le FC [8] ne méconnaît pas devoir le prix de ces équipements et est donc condamné au paiement de cette somme.



Compte tenu des circonstances de l'espèce, il appartiendra au juge du fond de dire si outre l'intérêt légal, des pénalités contractuelles de retard, contractuelles ou forfaitaires, doivent recevoir application.



La provision de 62.193,60 euros TTC portera donc intérêts au taux légal à compter du 07 août 2020, date de la mise en demeure.





Sur les frais et les dépens:



Le FC [8], qui succombe, supportera la charge des dépens d'appel.



Les demandes formées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile sont rejetées.





PAR CES MOTIFS:



La Cour,



Infirme l'ordonnance déférée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référés sur la demande de provision de la société GROUPE ROYER.



Statuant à nouveau:



Condamne la société FC [8] à payer à la société GROUPE ROYER venant aux droits de la société NBR une provision de 62.193,60 euros TTC portant intérêts au taux légal à compter du 07 août 2020.



Confirme pour le solde l'ordonnance déférée.



Dit n'y avoir lieu à référés sur le surplus des demandes.



Condamne la société FC [8] aux dépens d'appel.



Rejette les demandes formées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.





LE GREFFIER LE PRESIDENT

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