22 mars 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-18.085

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2023:SO00283

Texte de la décision

SOC. / ELECT

OR



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 22 mars 2023




Rejet


M. SOMMER, président



Arrêt n° 283 F-D

Pourvoi n° S 21-18.085

Aide juridictionnelle totale en défense
au profit du syndicat Collectif de défense interentreprises
des salariés engagés transports routiers voyageurs.
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 27 septembre 2021.





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 22 MARS 2023

La société JL international, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° S 21-18.085 contre le jugement rendu le 31 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Melun (contentieux des élections professionnelles), dans le litige l'opposant :

1°/ au syndicat Collectif de défense interentreprises des salariés engagés transports routiers voyageurs, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ au syndicat Fédération générale des transports CFTC, dont le siège est [Adresse 9],

3°/ au syndicat Union départementale CFE CGC, dont le siège est [Adresse 5],

4°/ au syndicat Union solidaires transports, dont le siège est [Adresse 4],

5°/ au syndicat Fédération nationale des transports et de la logistique Force ouvrière UNCP, dont le siège est [Adresse 12],

6°/ au syndicat général des Transports et de la logistique confédération nationale du travail, dont le siège est [Adresse 10],

7°/ au Syndicat autonome des transports SAT, ayant élu domicile chez M. [D] [W], [Adresse 15],

8°/ au syndicat Union nationale des syndicats autonomes transports, dont le siège est [Adresse 14],

9°/ au syndicat Fédération nationale des syndicats de transport CGT, dont le siège est [Adresse 8],

10°/ au syndicat Confédération nationale des travailleurs solidarité ouvrière CNT SO, dont le siège est [Adresse 11],

11°/ au syndicat Union des syndicats anti précarité, dont le siège est [Adresse 7],

12°/ au syndicat Fédération générale des transports et de l'environnement CFDT, dont le siège est [Adresse 13],

13°/à Mme [L] [V], domiciliée [Adresse 3],

14°/ à la direction régionale des entreprises de la concurrence de la consommation du travail d'Ile de France, Union départementale de Seine et Marne, dont le siège est [Adresse 6],

défendeurs à la cassation.

Le syndicat Collectif de défense interentreprises des salariés engagés transports routiers voyageurs a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, quatre moyens de cassation.

Le demandeur au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Sommé, conseiller, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société JL international, de la SCP Melka-Prigent-Drusch, avocat du syndicat Collectif de défense interentreprises des salariés engagés transports routiers voyageurs, après débats en l'audience publique du 1er février 2023 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Sommé, conseiller rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Melun, 31 mai 2021), en vue de la mise en place du comité social et économique, la société JL international (la société) a signé, le 14 décembre 2020, un protocole d'accord préélectoral avec quatre organisations syndicales sur les dix organisations ayant participé à la négociation.

2. Par requête du 15 décembre 2020, le syndicat Collectif de défense interentreprises des salariés engagés des transports routiers de voyageurs (le syndicat C°Dièse) a saisi le tribunal judiciaire de demandes tendant notamment à enjoindre à la société de lui communiquer, sous astreinte, les tableaux portant sur les effectifs complétés par l'affectation professionnelle de chaque conducteur à temps partiel pour identifier son réel coefficient d'emploi afin de procéder à la régularisation du calcul de son équivalent temps plein, annuler le protocole préélectoral signé le 14 décembre 2020 et condamner la société au paiement de dommages-intérêts pour déloyauté et entrave.

Examen des moyens

Sur les deuxième, troisième et quatrième moyens du pourvoi principal


3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le deuxième moyen qui est irrecevable et sur les troisième et quatrième moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Sur le premier moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

4. La société fait grief au jugement de dire que les données qu'elle a communiquées ne permettent pas de vérifier la reprise d'ancienneté des salariés transférés conventionnellement et donc le contrôle de la liste électorale, de conclure à l'absence de communication préalable loyale des documents permettant le contrôle des données chiffrées fournies par l'employeur pour la négociation du protocole préélectoral et d'annuler en conséquence le protocole d'accord en ordonnant à la société de le négocier à nouveau en adressant une convocation aux syndicats dans le délai de quinze jours à compter de la signification de la décision, sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé ce délai et pendant trois mois, alors :

« 1°/ que l'absence de mention dans le registre du personnel de l'ancienneté des salariés transférés conventionnellement ne saurait s'analyser en un agissement déloyal de l'employeur dans la négociation, justifiant l'annulation du protocole préélectoral ; que bien que constatant que le syndicat C°Dièse ne démontrait pas l'existence d'une fraude commise par la société JL international dans la tenue du registre du personnel sur support informatique, le tribunal judiciaire a conclu que l'absence présumée de mention dans ce document de l'ancienneté des salariés transférés conventionnellement s'analysait en un agissement déloyal de l'employeur dans la négociation justifiant l'annulation du protocole préélectoral ; qu'en statuant de la sorte il a d'ores et déjà violé l'article L. 2314-6 du code du travail ;

2°/ qu'en concluant de la seule absence de mention dans le registre du personnel de la reprise d'ancienneté d'une unique salariée, Mme [V], l'absence de mention de la reprise d'ancienneté de tous les salariés transférés conventionnellement, quant aucune pièce transmise par les syndicats ne permettait de supposer que tel aurait été réellement le cas, le tribunal a violé de plus fort l'article L. 2314-6 du code du travail. »

Réponse de la Cour

5. Aux termes de l'article L. 2314-18 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2022-1598 du 21 décembre 2022, sont électeurs l'ensemble des salariés âgés de seize ans révolus, travaillant depuis trois mois au moins dans l'entreprise et n'ayant fait l'objet d'aucune interdiction, déchéance ou incapacité relative à leurs droits civiques.

6. Les mentions qui doivent figurer obligatoirement sur la liste électorale des salariés travaillant dans l'entreprise sont l'âge, l'appartenance à l'entreprise et l'ancienneté dans celle-ci qui déterminent la qualité d'électeur et permettent le contrôle de la régularité des listes électorales.

7. L'employeur, tenu dans le cadre de la négociation préélectorale à une obligation de loyauté, doit fournir aux syndicats participant à cette négociation, sur leur demande, les éléments nécessaires au contrôle de l'effectif de l'entreprise et de la régularité des listes électorales.

8. Après avoir relevé que les parties convenaient que l'essentiel de l'activité de la société provenait de l'obtention de marchés soumis à l'accord du 7 juillet 2009, modifié par l'accord du 3 juillet 2020, relatif à la garantie d'emploi et à la poursuite des relations de travail en cas de changement de prestataire dans le transport interurbain de voyageurs, emportant transfert des contrats de travail des salariés affectés sur ces chantiers et qu'en application de cet accord le nouveau prestataire devait reprendre l'ancienneté du salarié au moment du transfert, le tribunal a constaté que Mme [V], salariée transférée le 20 mars 2020, apparaissait dans le registre unique du personnel sans reprise de son ancienneté au 25 septembre 2017 et que les pièces communiquées par l'employeur ne permettaient pas de vérifier la reprise d'ancienneté des salariés transférés conventionnellement.

9. En l'état de ces constatations, le tribunal a pu en déduire que l'employeur avait manqué à son obligation de loyauté, en sorte que le protocole d'accord préélectoral devait être annulé.

10. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le moyen du pourvoi incident

Enoncé du moyen

11. Le syndicat C°Dièse fait grief au jugement de le débouter de sa demande de communication sous astreinte des fonctions et missions réellement exercées par les conducteurs aux fins de distinguer les conducteurs intermittents des conducteurs à temps partiel, alors « que le tribunal judiciaire, juge de l'action en matière d'élections professionnelles, compétent pour fixer l'effectif de l'entreprise à prendre en compte pour l'élection, l'est également par voie d'exception pour déterminer la nature du contrat de travail des salariés et en tirer les conséquences pour le calcul des effectifs ; que pour débouter le syndicat C°Diese de sa demande de communication de documents relatifs à l'affectation professionnelle des salariés permettant de déterminer s'ils relevaient du contrat de travail intermittent ou du contrat de travail à temps partiel et, le cas échéant, de les comptabiliser dans les effectifs à hauteur de la durée minimale annuelle de temps de travail à temps partiel, le tribunal judiciaire a retenu qu' ''il n'appart[enait] pas au juge du contentieux électoral de procéder à [d]es reclassifications'' et qu'il devait uniquement rechercher la durée effective de travail réalisée par chacun des salariés, nonobstant la durée minimale annuelle de temps de travail ; qu'en statuant ainsi, le tribunal a méconnu l'étendue de sa compétence, en violation des articles 49 du code de procédure civile et L. 1111-2 du code du travail. »

Réponse de la Cour

12. Le tribunal qui, après avoir exactement retenu qu'en application de l'article L. 1111-2 du code du travail, la durée du travail devait être prise en considération pour le calcul du nombre de sièges à pourvoir au sein du comité social et économique à hauteur d'un équivalent temps plein pour chaque salarié à temps complet, à due proportion de leur temps de présence au cours des douze derniers mois précédents pour les salariés intermittents et en divisant la somme totale des horaires inscrits dans leurs contrats de travail par la durée légale ou la durée conventionnelle de travail pour les salariés à temps partiel, a fait ressortir que la différence de classification conventionnelle entre les conducteurs accompagnateurs de transport spécialisé de personnes handicapées et/ou à mobilité réduite à temps partiel et les conducteurs en période scolaire effectuant les mêmes prestations selon contrat de travail intermittent, invoquée par le syndicat C°Dièse à l'appui de sa demande de communication de pièces, était sans portée sur la détermination de l'effectif de l'entreprise, n'encourt pas le grief du moyen.

13. Le moyen ne peut donc être accueilli.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois, tant principal qu'un incident ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mars deux mille vingt-trois.

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