22 mars 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-21.315

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2023:SO00276

Texte de la décision

SOC.

CZ



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 22 mars 2023




Rejet


Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 276 F-D

Pourvoi n° C 21-21.315




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 22 MARS 2023

1°/ L'AGS, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ L'UNEDIC, dont le siège est [Adresse 2], association déclarée, agissant en qualité de gestionnaire de l'AGS, élisant domicile au centre de gestion et d'études AGS CGEA Île-de-France Est, [Adresse 1],

ont formé le pourvoi n° C 21-21.315 contre l'arrêt rendu le 17 juin 2021 par la cour d'appel d'Amiens (5e chambre prud'homale), dans le litige les opposant :

1°/ à M. [Z] [F], domicilié [Adresse 3],

2°/ à M. [M] [L], domicilié [Adresse 4], pris en qualité de liquidateur de la société Pav environnement,

défendeurs à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Pietton, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de l'AGS, et de l'UNEDIC-CGEA Île-de-France Est, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [F], après débats en l'audience publique du 31 janvier 2023 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Pietton, conseiller rapporteur, Mme Grandemange conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 17 juin 2021) M. [F] a été engagé en qualité de technicien commercial le 1er juin 2011 par la société Pav environnement.

2. Cette société a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire, ouverte le 17 juillet 2017, la société Contant-Cardon étant désignée en qualité d'administrateur judiciaire avec mission d'assister la société et le salarié a été désigné en qualité de représentant des salariés.

3. Par lettre remise en main propre le 1er juin 2018, le salarié a été licencié pour faute grave, sans l'assistance de l'administrateur judiciaire.

4. Par un jugement du 9 juillet la procédure de redressement judiciaire a été convertie en liquidation judiciaire, la société [L]-Hazane étant désignée en qualité de liquidateur.

5. Contestant cette rupture, le salarié a saisi la juridiction prud'homale pour être notamment reconnu créancier de diverses sommes à titre de dommages-intérêts et d'indemnités de rupture.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

6. L'AGS et l'UNEDIC-CGEA Île-de-France Est font grief à l'arrêt de dire le licenciement du salarié nul, de fixer la créance du salarié au passif de la liquidation judiciaire de la société Pav environnement à diverses sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement illicite, d'indemnité pour violation du statut protecteur, d'indemnité de préavis, de congés payés sur préavis, d'indemnité de licenciement, de rappel de prime de treizième mois et de prime d'ancienneté et d'avoir retenu l'opposabilité de la décision à l'UNEDIC CGEA Île-de-France Est, alors :
« 1°/ que l'ouverture de la procédure collective emporte dessaisissement du débiteur ; que la notification d'un licenciement postérieurement à l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ne constitue pas un acte de gestion courante et ne peut être accompli par le débiteur sans l'assistance de l'administrateur judiciaire ; qu'un tel licenciement est inopposable à la procédure collective et à l'AGS ; qu'il n'était pas contesté en l'espèce que le licenciement de M. [F] avait été notifié par une lettre remise en main propre le 1er juin 2018 signée par le seul gérant tandis que la procédure de redressement judiciaire était ouverte depuis le 17 juillet 2017 ; qu'en disant cependant sa décision opposable à l'UNEDIC CGEA Île-de-France Est, la cour d'appel a violé les articles L. 622-1 III, L. 631-14 du code de commerce, ensemble l'article L. 3253-8 du code du travail ;

2°/ que le licenciement notifié par le débiteur sans l'assistance de l'administrateur judiciaire chargé d'une mission d'assistance est inopposable à la procédure collective et à l'AGS ; que l'AGS avait fait valoir qu'à la date du licenciement de M. [F], soit le 1er juin 2018, la société se trouvait en période d'observation postérieurement à l'ouverture du redressement judiciaire et que la Selarl Ph. Contant-B. Cardon avait été désignée en qualité d'administrateur avec mission d'assistance ; que le jugement du tribunal de commerce de Meaux du 17 juillet précise que la mission d'assistance de l'administrateur judiciaire concerne tous les actes de gestion et de disposition ; qu'en ne vérifiant pas si la mission confiée à l'administrateur judiciaire n'imposait pas que le licenciement soit notifié par le dernier ou à tout le moins, conjointement avec le débiteur pour pouvoir être opposable à la procédure collective et à l'AGS, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 622-1 III, L. 631-14 du code de commerce, ensemble l'article L. 3253-8 du code du travail. »

Réponse de la Cour

7. Le licenciement disciplinaire, qui n'est pas un acte de gestion courante, prononcé sans l'assistance de l'administrateur judiciaire chargé d'assister le débiteur pour tous les actes de gestion est inopposable à la procédure collective, sauf s'il est ratifié par l'administrateur ou le liquidateur.
8. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er , et 1015 du code de procédure civile, l'arrêt, qui a constaté que le liquidateur avait adopté, à l'occasion du contentieux prud'homal, la même position que l'employeur et ne s'était pas prévalu de l'inopposabilité du licenciement à la procédure collective, ce dont il résultait qu'il avait implicitement ratifié le licenciement, se trouve légalement justifié en ce qu'il fixe la créance du salarié au passif de la liquidation judiciaire de la société Pav environnement à diverses sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul, d'indemnité pour violation du statut protecteur, d'indemnité de préavis, de congés payés sur préavis, d'indemnité de licenciement, de rappel de prime de treizième mois et de prime d'ancienneté et rappelle que la décision est opposable à l'UNEDIC-CGEA Île-de-France Est.

PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'AGS et l'UNEDIC-CGEA Île-de-France Est aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'AGS et de l'UNEDIC-CGEA Île-de-France Est et les condamne à payer à M. [F] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mars deux mille vingt-trois.


MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour l'AGS, l'UNEDIC-CGEA Île-de-France Est
L'Ags et l'Unedic - CGEA IDF EST font grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit le licenciement de M. [F] nul, d'avoir fixé la créance de M. [F] au passif de la liquidation judiciaire de la Sarl Pav environnement aux sommes de 22 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement illicite, de 24 504,90 euros à titre d'indemnité pour violation du statut protecteur, de 7 001,40 euros à titre d'indemnité de préavis, de 700,14 euros à titre de congé payés sur préavis, de 6 272,08 euros à titre d'indemnité de licenciement, de 8 907,50 euros à titre de rappel de prime de 13e mois et de 3 327,64 euros à titre de prime d'ancienneté et d'avoir retenu l'opposabilité de la décision à l'Unedic CGEA IDF Est ;
1) ALORS QUE l'ouverture de la procédure collective emporte dessaisissement du débiteur ; que la notification d'un licenciement postérieurement à l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ne constitue pas un acte de gestion courante et ne peut être accompli par le débiteur sans l'assistance de l'administrateur judiciaire ; qu'un tel licenciement est inopposable à la procédure collective et à l'AGS ; qu'il n'était pas contesté en l'espèce que le licenciement de M. [F] avait été notifié par une lettre remise en main propre le 1er juin 2018 signée par le seul gérant tandis que la procédure de redressement judiciaire était ouverte depuis le 17 juillet 2017 ; qu'en disant cependant sa décision opposable à l'Unedic CGEA Ile de France est, la cour d'appel a violé les articles L. 622-1III, L. 631-14 du code de commerce, ensemble l'article L. 3253-8 du code du travail ;
2) ALORS QUE subsidiairement, le licenciement notifié par le débiteur sans l'assistance de l'administrateur judiciaire chargé d'une mission d'assistance est inopposable à la procédure collective et à l'AGS ; que l'AGS avait fait valoir qu'à la date du licenciement de M. [F], soit le 1er juin 2018, la société se trouvait en période d'observation postérieurement à l'ouverture du redressement judiciaire et que la Selarl Ph. Contant - B. Cardon avait été désignée en qualité d'administrateur avec mission d'assistance ; que le jugement du tribunal de commerce de Meaux du 17 juillet 2017 précise que la mission d'assistance de l'administrateur judiciaire concerne tous les actes de gestion et de disposition ; qu'en ne vérifiant pas si la mission confiée à l'administrateur judiciaire n'imposait pas que le licenciement soit notifié par le dernier ou à tout le moins, conjointement avec le débiteur pour pouvoir être opposable à la procédure collective et à l'AGS, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 622-1 III, L. 631-14 du code de commerce, ensemble l'article L. 3253-8 du code du travail.

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