15 mars 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-18.869

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2023:CO00215

Titres et sommaires

BOURSE - Autorité des marchés financiers (AMF) - Retrait obligatoire - Seuil - Appréciation - Date - Détermination - Date de la décision se prononçant sur la conformité du retrait obligatoire

Il résulte de la combinaison de l'article L. 433-4, II, du code monétaire et financier et des articles 237-2 et 237-3 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers (AMF) que la condition de seuil du retrait obligatoire, énoncée par le premier texte, s'apprécie à la date de clôture de l'offre publique. Il s'ensuit que seule la décision par laquelle l'AMF déclare conforme le retrait obligatoire ou, le cas échéant, en fixe la date de mise en oeuvre a pour objet et pour effet de constater que la condition de seuil du retrait obligatoire est légalement remplie. Le fait que la décision de conformité du projet d'offre publique énonce que cette condition était remplie à la date du dépôt du projet d'offre est, dès lors, sans portée. L'actionnaire minoritaire qui estime que la condition de seuil du retrait obligatoire n'est pas remplie doit, par conséquent, contester non pas la décision de l'AMF déclarant conforme le projet d'offre publique, mais la décision de cette autorité se prononçant sur la conformité du retrait obligatoire ou, le cas échéant, la décision par laquelle elle fixe la date de mise en oeuvre de ce retrait

BOURSE - Autorité des marchés financiers (AMF) - Retrait obligatoire - Seuil - Appréciation - Date - Détermination - Date de la décision de conformité du projet d'offre publique (non)

Texte de la décision

COMM.

FB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 15 mars 2023




Rejet


M. VIGNEAU, président



Arrêt n° 215 F-B

Pourvoi n° Q 22-18.869








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 15 MARS 2023

La société BBDE, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Q 22-18.869 contre l'arrêt rendu le 12 mai 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 7), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Bel, société anonyme,

2°/ à la société Unibel, société anonyme,

ayant toutes deux leur siège [Adresse 3],

3°/ à l'Autorité des marchés financiers, dont le siège est [Adresse 2],

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Ducloz, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société BBDE, de la SAS Hannotin Avocats, avocat des sociétés Bel et Unibel, de la SCP Ohl et Vexliard, avocat de l'Autorité des marchés financiers, et l'avis de M. Lecaroz, avocat général, à la suite duquel le président a demandé aux avocats s'ils souhaitaient présenter des observations complémentaires, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Ducloz, conseiller rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, M. Lecaroz, avocat général, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 mai 2022) et les productions, la société anonyme Bel, dont les actions sont admises aux négociations sur le marché réglementé Euronext [Localité 4], est contrôlée par le concert composé du groupe familial Fiévet-Sauvin, de la Société industrielle commerciale et de participation, sa filiale à 100 %, et de la société Unibel.

2. Le 22 octobre 2021, la société Unibel a déposé auprès de l'Autorité des marchés financier (AMF) un projet d'offre publique de retrait accompagné d'un projet de note d'information, lequel énonçait que la condition de seuil du retrait obligatoire étant réunie, l'offre publique de retrait visant les actions de la société Bel serait immédiatement suivie d'un retrait obligatoire visant la totalité des actions non apportées à l'offre, moyennant une indemnisation en numéraire de 550 euros par action, égale au prix proposé pour les besoins de l'offre et déterminée sur le fondement d'une évaluation multicritères.

3. Par une décision n° 221C3580 du 22 décembre 2021, l'AMF a déclaré conforme le projet d'offre publique de retrait visant les actions de la société Bel. Il était précisé, au point 1 de cette décision, que « l'initiateur, qui remplit d'ores et déjà les conditions de détention relatives au retrait obligatoire (les actions détenues par les actionnaires minoritaires représentant moins de 10 % du capital et des droits de vote de la société Bel), a demandé à l'Autorité des marchés financiers de procéder au retrait obligatoire dès la clôture de l'offre publique de retrait, en application des articles 237-1 à 237-3 du règlement général [de l'AMF] ».

4. L'offre a eu lieu du 24 décembre 2021 au 10 janvier 2022.

5. Le 11 janvier 2021, l'AMF a annoncé qu'à l'issue de l'offre, la société Unibel détenait 97,41 % du capital et 83,33 % des droits de vote de la société Bel.

6. Le 12 janvier 2022, l'AMF a dit que les conditions du retrait obligatoire prévues aux articles L. 433-4, II, du code monétaire et financier et 237-1 à 237-3 de son règlement général étaient réunies et a fixé la mise en œuvre de ce retrait au 25 janvier suivant, au prix net de tout frais de 550 euros par action.

7. Soutenant que la condition de seuil du retrait obligatoire fixée à l'article L. 433-4, II, du code monétaire et financier n'était pas remplie, la société BBDE, actionnaire minoritaire de la société Bel, a, le 31 décembre 2021, formé un recours contre la décision de l'AMF du 22 décembre 2021.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en ses deuxième, troisième, cinquième et sixième branches, et sur le second moyen, ci-après annexés


8. En application de l'article 014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Sur le premier moyen, pris en ses première et quatrième branches

Enoncé du moyen

9. La société BBDE fait grief à l'arrêt de rejeter le recours formé à l'encontre de la décision n° 221C3580 de l'AMF de conformité du projet d'offre publique de retrait visant les actions de la société Bel et de la condamner aux dépens ainsi qu'à payer aux sociétés Bel et Unibel une somme globale de 100 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, alors :

« 1°/ qu'en retenant que "l'AMF n'a pas, dans la décision attaquée, déclaré conforme le retrait obligatoire mais s'est prononcée uniquement sur la conformité de l'offre publique de retrait", cependant que, dans sa décision de conformité du 22 décembre 2021, l'AMF avait retenu que "l'initiateur qui remplit d'ores et déjà les conditions de détention relatives au retrait obligatoire (les actions détenues par les actionnaires minoritaires représentant moins de 10 % du capital et des droits de vote de la société BEL) a demandé à l'AMF de procéder au retrait obligatoire dès la clôture de l'offre publique de retrait, en application des articles 237-1 [à] 237-3 du règlement général", en apposant en outre son visa sur une note de la société Bel qui comportait un rapport concluant à l'équité du prix proposé, "y compris en considération du retrait obligatoire intervenant à l'issue de l'offre publique", la cour d'appel a dénaturé ladite décision de conformité, en violation du principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ;

4°/ que, lorsqu'elle est saisie en ce sens d'une demande de l'initiateur, l'AMF se prononce sur la conformité de la demande de retrait obligatoire lors de l'examen de la conformité du projet d'offre publique de retrait ; qu'en retenant néanmoins que le constat fait par l'AMF selon lequel l'initiateur remplissait d'ores et déjà, à la date du dépôt du projet d'offre, la condition de seuil relative au retrait obligatoire était sans portée, dès lors que le seuil du retrait obligatoire s'apprécie à la date de clôture de l'offre publique, quand, saisie a cette fin, l'AMF devait se prononcer sur la demande de retrait obligatoire formulée lors du dépôt de l'offre publique de retrait, la cour d'appel a violé l'article 237-2 du règlement général de l'AMF. »

Réponse de la Cour

10. Selon l'article L. 433-4, II, du code monétaire et financier, le règlement général de l'AMF fixe les modalités selon lesquelles, à l'issue de toute offre publique et dans un délai de trois mois à l'issue de la clôture de cette offre, les titres non présentés par les actionnaires minoritaires, dès lors qu'ils ne représentent pas plus de 10 % du capital et des droits de vote, sont transférés aux actionnaires majoritaires à leur demande.

11. Selon l'article 237-2 du règlement général de l'AMF, lors du dépôt du projet d'offre, l'initiateur fait connaître à l'AMF s'il a l'intention de demander la mise en œuvre du retrait obligatoire une fois l'offre terminée et en fonction de son résultat.

12. Selon l'article 237-3 de ce règlement, l'AMF se prononce sur la conformité du projet de retrait obligatoire, sauf lorsque le retrait obligatoire comporte le règlement en numéraire proposé lors de la dernière offre et qu'il fait suite à une offre publique pour laquelle l'autorité a disposé de l'évaluation multicritères mentionnée au II, 2, de l'article L. 433-4 du code monétaire et financier et du rapport de l'expert indépendant mentionné à l'article 261-1 du règlement général de l'AMF. Dans cette hypothèse, l'AMF publie la date de mise en œuvre du retrait obligatoire.

13. Il résulte de la combinaison de ces textes que la condition de seuil du retrait obligatoire, énoncée par le premier d'entre eux, s'apprécie à la date de clôture de l'offre publique.

14. Il s'ensuit que seule la décision par laquelle l'AMF déclare conforme le retrait obligatoire ou, le cas échéant, en fixe la date de mise en œuvre a pour objet et pour effet de constater que la condition de seuil du retrait obligatoire est légalement remplie. Le fait que la décision de conformité du projet d'offre publique énonce que cette condition était remplie à la date du dépôt du projet d'offre est, dès lors, sans portée.

15. Par conséquent, l'actionnaire minoritaire qui estime que la condition de seuil du retrait obligatoire n'est pas remplie, doit contester non pas la décision de l'AMF déclarant conforme le projet d'offre publique, mais la décision de cette autorité se prononçant sur la conformité du retrait obligatoire ou, le cas échéant, la décision par laquelle elle fixe la date de mise en œuvre de ce retrait.

16. L'arrêt retient que le constat, fait par l'AMF dans la décision du 22 décembre 2021 déclarant conforme le projet d'offre publique de retrait, selon lequel l'initiateur remplissait d'ores et déjà cette condition à la date du dépôt dudit projet, est sans portée sur son appréciation de la conformité de l'offre publique de retrait, et que l'AMF n'a pas, dans cette décision, déclaré conforme le retrait obligatoire mais s'est prononcée uniquement sur la conformité de l'offre publique de retrait.

17. La cour d'appel a exactement déduit de ces constatations et appréciations, sans dénaturer la décision de l'AMF du 22 décembre 2021 déclarant conforme le projet d'offre publique, que ce n'est que par une décision ultérieure du 12 janvier 2022, fixant la date de mise en œuvre du retrait obligatoire, que cette autorité a constaté que la condition de seuil du retrait obligatoire était remplie et que, dès lors, les moyens de la société BBDE, relatifs à cette condition, dirigés contre la décision du 22 décembre 2021, étaient inopérants.

18. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société BBDE aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société BBDE et la condamne à payer aux sociétés Bel et Unibel la somme globale de 3 000 euros et à l'Autorité des marchés financiers la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mars deux mille vingt-trois.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour la société BBDE.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

La société BBDE fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté le recours formé à l'encontre de la décision n° 221C3580 de l'Autorité des marchés financiers de conformité du projet d'offre publique de retrait visant les actions de la société Bel et de l'AVOIR condamnée aux dépens ainsi qu'à payer aux sociétés Bel et Unibel une somme globale de 100 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

1°) ALORS QU'en retenant que « l'AMF n'a pas, dans la décision attaquée, déclaré conforme le retrait obligatoire mais s'est prononcée uniquement sur la conformité de l'offre publique de retrait » (arrêt, p. 17, § 107), cependant que dans sa décision de conformité du 22 décembre 2021, l'Autorité des marchés financiers avait retenu que « l'initiateur qui remplit d'ores et déjà les conditions de détention relatives au retrait obligatoire (les actions détenues par les actionnaires minoritaires représentant moins de 10 % du capital et des droits de vote de la société BEL) a demandé à l'Autorité des marchés financiers de procéder au retrait obligatoire dès la clôture de l'offre publique de retrait, en application des articles 237-1 237-3 du règlement général » (décision de conformité du 22 décembre 2021, p. 1, al. 4), en apposant en outre son visa sur une note de la société Bel qui comportait un rapport concluant à l'équité du prix proposé, « y compris en considération du retrait obligatoire intervenant à l'issue de l'offre publique », la cour d'appel a dénaturé ladite décision de conformité, en violation du principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ;

2°) ALORS QUE dans ses observations déposées devant la cour d'appel, l'Autorité des marchés financiers exposait que, par décision du 21 décembre 2021 publiée le 22 décembre 2021 (décision faisant l'objet du recours), elle avait prononcé « la conformité d'une offre publique de retrait initiée par la société Unibel visant les actions Bel » et qu'« à l'issue de cette offre, un retrait obligatoire sera[it] mis en oeuvre », qu'elle concluait, « sur le grief tiré de la prétendue violation des conditions de mise en oeuvre du retrait obligatoire », que ce grief devait être écarté car la « condition de mise en oeuvre d'un retrait obligatoire » était remplie et que, « comme indiqué dans la décision de conformité contestée, les actions visées par l'offre et donc non détenues par l'initiateur de l'offre ou a contrario détenues par les actionnaires minoritaires représentent 4,54 % du capital et 3,71 % des droits de vote théoriques, soit pas plus de 10 % du capital et des droits de vote de la société Bel » et qu'« en conséquence, la cour ne pourra que constater que l'AMF a fait une exacte application de la législation en considérant, au moment où elle a statué sur la conformité de l'offre publique de retrait initiée par la société Unibel visant les actions Bel, que les conditions de retrait des actions Bel prévues au 1° du II de l'article L. 433-4 du code monétaire et financier étaient d'ores et déjà réunies » (observations, p. 12, in fine) ; qu'en retenant néanmoins que « l'AMF n'a[vait] pas, dans la décision attaquée, déclaré conforme le retrait obligatoire mais s'est prononcée uniquement sur la conformité de l'offre publique de retrait » (arrêt, p. 17, § 107), la cour d'appel a dénaturé les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE le juge doit respecter le principe de la contradiction ; qu'en retenant que « l'AMF n'a pas, dans la décision attaquée, déclaré conforme le retrait obligatoire mais s'est prononcée uniquement sur la conformité de l'offre publique de retrait » (arrêt, p. 17, § 107), sans inviter les parties à présenter leurs observations sur ce moyen qu'elle relevait d'office, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

4°) ALORS QUE lorsqu'elle est saisie en ce sens d'une demande de l'initiateur, l'Autorité des marchés financiers se prononce sur la conformité de la demande de retrait obligatoire lors de l'examen de la conformité du projet d'offre publique de retrait ; qu'en retenant néanmoins que le constat fait par l'Autorité des marchés financiers selon lequel l'initiateur remplissait d'ores et déjà, à la date du dépôt du projet d'offre, la condition de seuil relative au retrait obligatoire était sans portée, dès lors que le seuil du retrait obligatoire s'apprécie à la date de clôture de l'offre publique (arrêt, p. 17, § 107), quand saisie à cette fin, l'Autorité des marchés financiers devait se prononcer sur la demande de retrait obligatoire formulée lors du dépôt de l'offre publique de retrait, la cour d'appel a violé l'article 237-2 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers ;

5°) ALORS QUE l'article 15 de la directive 2004/25/CE du 21 avril 2004 impose à l'actionnaire majoritaire à l'initiative de l'offre de retrait obligatoire de détenir plus de 90 % du capital et plus de 90 % des droits de vote de la société ; qu'en refusant d'annuler la décision de l'Autorité des marchés financiers qui lui était déférée, bien que l'Autorité ait relevé que l'initiateur qui détenait 95,46 % du capital et 82,22 % des droits de vote seulement, « rempli[ssait] d'ores et déjà les conditions de détention relatives au retrait obligatoire (les actions détenues par les actionnaires minoritaires représentant moins de 10 % du capital et des droits de vote de la société BEL) » (décision du 22 décembre 2021, p. 1), cependant que l'article L. 433-4, II, du code monétaire et financier, qui prévoit que le retrait obligatoire peut être mis en oeuvre dès lors que les actionnaires minoritaires ne représentent pas plus de 10 % du capital et des droits de vote, devait être interprété conformément à la directive européenne ce dont il résultait que les seuils de détention du capital et des droits de vote devaient être appréciés du chef des actionnaires majoritaires, et non des minoritaires, la cour d'appel a méconnu l'article L. 433-4, II, du code monétaire et financier tel qu'il doit être interprété conformément à l'article 15 de la directive 2004/25/CE du 21 avril 2004 ;

6°/ ALORS QU'en toute hypothèse, un particulier peut se prévaloir des dispositions d'une directive pour solliciter l'annulation d'une autorisation consentie par une autorité administrative à un tiers ; qu'en refusant d'annuler la décision de l'Autorité des marchés financiers qui lui était déférée, bien que l'Autorité ait relevé que l'initiateur qui détenait 95,46 % du capital et 82,22 % des droits de vote seulement, « rempli[ssait] d'ores et déjà les conditions de détention relatives au retrait obligatoire (les actions détenues par les actionnaires minoritaires représentant moins de 10 % du capital et des droits de vote de la société BEL)» définies par l'article L. 433-4, II, du code monétaire et financier (décision du 22 décembre 2021, p. 1), cependant que l'article 15 de la directive 2004/25/CE du 21 avril 2004 impose a l'offrant de détenir « des titres représentant au moins 90 % du capital assorti de droits de vote et 90 % des droits de vote de la société visée », ce dont il résulte que les dispositions de droit national contraires devaient être laissées inappliquées au profit du droit de l'Union, la cour d'appel a violé le principe de primauté du droit de l'Union et l'article 15 de la directive 2004/25/CE du 21 avril 2004.

SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

La société BBDE fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté le recours formé à l'encontre de la décision n° 221C3580 de l'Autorité des marchés financiers de conformité du projet d'offre publique de retrait visant les actions de la société Bel et de l'AVOIR condamnée aux dépens ainsi qu'à payer aux sociétés Bel et Unibel une somme globale de 100 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

ALORS QUE la cour d'appel saisie d'un recours contre une décision de l'Autorité des marchés financiers déclarant conforme une offre de retrait public doit prendre en considération la situation au regard de laquelle doivent être appréciées les conditions de l'offre ; qu'en refusant de se prononcer sur le moyen par lequel la société BBDE faisait valoir que la société Bel avait volontairement détourné les règles applicables au rachat d'actions afin d'évincer les actionnaires minoritaires, au motif qu'il ne lui appartenait pas, dans le cadre de cet examen de conformité, de se prononcer, aux lieu et place des juridictions compétentes, sur un contournement par la société cible des dispositions du droit des sociétés, quand il lui appartenait d'examiner s'il existait des éléments de nature à faire naître un doute sérieux sur le caractère frauduleux ou illicite de la situation en considération de laquelle l'offre et la demande d'autorisation de l'offre étaient formulées et devaient être jugées conformes, la cour d'appel a méconnu son office, en violation de l'article 4 du code civil.

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