9 mars 2023
Cour d'appel de Metz
RG n° 20/01565

3ème Chambre

Texte de la décision

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS













N° RG 20/01565 - N° Portalis DBVS-V-B7E-FKUJ

Minute n° 23/00083





[Adresse 10]

C/

[Adresse 11], S.C.I. [Y]









Jugement Au fond, origine Tribunal d'Instance de METZ, décision attaquée en date du 30 Juillet 2020, enregistrée sous le n° 18/01242



COUR D'APPEL DE METZ



3ème CHAMBRE - TI



ARRÊT DU 09 MARS 2023





APPELANTE :



Madame [L] [O] épouse [H]

[Adresse 1]

[Localité 7]



Représentée par Me Laure-anne BAI-MATHIS, avocat au barreau de METZ

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/001108 du 16/03/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de METZ)





INTIMÉS :



Monsieur [T] [H]

[Adresse 2]

[Localité 6]



Représenté par Me Véronique HEINRICH, avocat au barreau de METZ



Monsieur [E] [H]

[Adresse 4]

[Localité 8]



Représenté par Me Véronique HEINRICH, avocat au barreau de METZ



Madame [I] [H]

[Adresse 4]

[Localité 8]



Représentée par Me Véronique HEINRICH, avocat au barreau de METZ



S.C.I. [Y]

prise en la personne de son représentant légal domicilé audit siège social

[Adresse 9]

[Localité 5]



Représentée par Me Elise SEBBAN, avocat au barreau de METZ





DATE DES DÉBATS : A l'audience publique du 12 Janvier 2023 tenue par Madame GUIOT-MLYNARCZYK, Présidente de Chambre, Magistrat rapporteur qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés et en a rendu compte à la cour dans leur délibéré pour l'arrêt être rendu le 09 Mars 2023



GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Mme Sophie GUIMARAES



COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :





PRÉSIDENT : Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Présidente de Chambre



ASSESSEURS : M. MICHEL, Conseiller

M. KOEHL, Conseiller





ARRÊT : Contradictoire



Rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;



Signé par Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Présidente de Chambre, et par Mme WILD, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.




FAITS ET PROCÉDURE



Par acte sous seing privé du 8 février 2011, la SCI [Y] a consenti un bail à M. [T] [H] et Mme [L] [O] épouse [H] sur une maison d'habitation située [Adresse 3]) moyennant un loyer mensuel de 790 euros et une provision sur charges de 20 euros. Par acte séparé du même jour, M. [E] [H] et Mme [I] [H] se sont portés caution solidaire des engagements des locataires.



Par lettre recommandée du 1er février 2018, M. [T] [H] a demandé à la bailleresse de prendre acte de la résiliation du bail et par lettre recommandée datée du 22 février 2018, Mme [L] [O] a donné congé à effet au 22 mars 2018.



Par actes d'huissier du 23 juillet 2018, la SCI [Y] a fait citer les locataires et les cautions devant le tribunal d'instance de Metz aux fins de les voir condamner solidairement à lui verser des sommes au titre des loyers impayés, des travaux de remise en état de la maison, de la moitié du coût du constat d'état des lieux et des frais irrépétibles.



MM. [T] et [E] [H] et Mme [I] [H] (ci-après les consorts [H]) se sont opposés à ces prétentions et ont sollicité à titre subsidiaire la condamnation de Mme [O] à garantir M. [T] [H] de toutes condamnations prononcées à son encontre et de leur octroyer des délais de paiement.



Mme [O] s'est opposée à l'ensemble de ces demandes sauf à reconnaître devoir 3.835,35 euros au titre de l'arriéré locatif et a sollicité des délais de paiement.



Par jugement du 3 juillet 2020, le tribunal judiciaire de Metz a :

- condamné solidairement Mme [O] et les consorts [H] à payer à la SCI [Y] avec intérêts au taux légal à compter du jugement, les sommes de :

' 3.835,35 euros au titre de l'arriéré locatif

' 147,50 euros au titre du constat d'huissier d'état des lieux de sortie

' 13.262,27 euros au titre des travaux de remise en état, déduction faite du dépôt de garantie

- dit que la SCI [Y] pourra conserver le dépôt de garantie de 790 euros

- accordé à Mme [O] et aux consorts [H] un délai de 24 mois pour s'acquitter de leur dette en 24 mensualités égales, la première devant intervenir dans les deux mois de la notification du jugement

- débouté M. [T] [H] de sa demande en garantie

- débouté les partie de leurs autres demandes

- condamné solidairement Mme [O] et les consorts [H] à payer à la SCI [Y] la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.



Le premier juge a dit que le décompte produit par la bailleresse, arrêté au 6 juin 2018, faisait état d'un arriéré de 3.835,35 euros incluant les sommes versées par la CAF, que les charges locatives étaient justifiées et qu'en l'absence de jugement de divorce, les locataires restaient solidairement tenus au paiement de cette somme. Sur les cautions, il a considéré que la discordance existant sur les mentions manuscrites portées par l'une d'elles quant à la date de fin de l'engagement relevait d'une erreur matérielle. Il a estimé que le recours à un huissier de justice pour l'établissement de l'état des lieux était nécessaire et a partagé le coût entre les parties. Sur les réparations locatives, il a dit que les locaux étaient en bon état d'usage lors de l'entrée dans les lieux, qu'ils avaient été restitués dans un état de grande saleté et avec des dégradations et, après application de coefficients de vétusté selon les éléments dégradés, il a évalué le montant des réparations dû par les locataires à la somme de 13.262,27 euros après déduction du dépôt de garantie de 790 euros. Il a rejeté l'appel en garantie de M. [H] au motif que la date des dégradations n'était pas connue avec précision et que la demande relevait de la liquidation du régime matrimonial. Enfin, il a fait droit aux demandes de délais de paiement.



Par déclaration déposée au greffe de la cour le 8 septembre 2020 (RG 20/1565), Mme [O] a interjeté appel de toutes les dispositions du jugement à l'exception de celle ayant rejeté la demande en garantie formée à son encontre, en intimant les consorts [H] et la SCI [Y].



Par déclaration déposée au greffe de la cour le 17 septembre 2020 (RG 20/1629), les consorts [H] ont formé appel de toutes les dispositions du jugement à l'exception de celle leur ayant accordé des délais de paiement, en intimant Mme [O] et la SCI [Y].



Par ordonnance du 28 octobre 2021, le conseiller de la mise en état, saisi d'un incident par la SCI [Y], a notamment déclaré recevables l'appel principal formé par les consorts [H] et l'appel incident formé par Mme [O] dans la procédure RG 20/1629 les opposant à la SCI [Y].



Par ordonnance du 23 juin 2022, le conseiller de la mise en état, saisi d'un incident par la SCI [Y], l'a déboutée de sa fin de non recevoir relative à la demande nouvelle des consorts [H],



Par ordonnance du 8 septembre 2022, le conseiller de la mise en état a joint les deux procédures sous le RG 20/1565.



Aux termes de ses dernières conclusions du 3 février 2022, Mme [O] demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée solidairement avec les consorts [H] à payer les sommes de 3.835,35 euros au titre de l'arriéré locatif, de 147,50 euros au titre du constat d'huissier d'état des lieux de sortie, de 13.262,27 euros au titre des travaux de remise en état et de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et de :

- fixer à la somme de 2.635,35 euros le montant de l'arriéré locatif dû par elle

- lui accorder des délais de paiement sur 24 mois pour solder sa dette

- dire et juger que le dépôt de garantie restera acquis au bailleur et débouter la SCI [Y] du surplus de ses demandes au titre des dégradations

- confirmer le jugement en ses dispositions non contestées

- débouter la SCI [Y] de ses demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et la condamner aux frais et dépens des procédures de première instance et d'appel.



Sur l'arriéré locatif, elle soutient être recevable à soutenir que les charges ne sont pas dues faute de justificatifs, que les factures relatives à la taxe sur les ordures ménagères et à l'entretien de la chaudière ne sont pas produites, que les montants portés en compte ne sont pas vérifiables et que la SCI doit être déboutée de sa demande en paiement des charges récupérables à compter du 22 mars 2013 compte tenu de la prescription applicable, de sorte qu'après déduction de la somme de 1.200 euros, le montant dû au titre de l'arriéré s'élève à 2.635,35 euros.



Sur les dégradations locatives, elle expose qu'elle a annulé le premier rendez-vous fixé pour l'état des lieux sans avoir été reconvoquée, que l'immeuble était en 'état d'usage' à l'entrée dans les lieux en février 2011, que les désordres relevés en 2018 ne constituent pas des dégradations mais sont dus à l'usure normale et conteste les sommes réclamées par la SCI au titre des peintures, ponçage des escaliers, vernissage des marches et pose d'un parquet stratifié. Elle précise que les panneaux claustra sur la terrasse étaient cassés et le sol du garage déjà taché à l'entrée, que la SCI [Y] ne verse aux débats que des devis et que la somme de 790 euros versée à titre de dépôt de garantie est suffisante.



Aux termes de leurs dernières conclusions du 15 février 2022, les consorts [H] demandent à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il les a condamnés solidairement avec Mme [O] à payer à la SCI [Y] les sommes de 3.835,35 euros au titre des réparations locatives, 147,50 euros au titre du constat d'huissier d'état des lieux et 13.262,27 euros au titre des travaux de remise en état, dit que la SCI [Y] pourra conserver le dépôt de garantie de 790 euros, débouté M. [T] [H] de sa demande en garantie et les a condamnés solidairement au versement d'une somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et de :

- débouter la SCI [Y] de toutes ses prétentions dirigées à leur encontre

- débouter Mme [O] de toutes ses prétentions dirigées à leur encontre

- subsidiairement, vu le retard de la SCI [Y] dans l'information des cautions concernant l'arriéré locatif, fixer la créance d'arriéré locatif de la SCI [Y] à 50 % des sommes réclamées, soit 1.917,67 euros

- plus subsidiairement confirmer le jugement

- condamner la SCI [Y] aux entiers dépens d'instance et d'appel et à leur verser la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



Ils exposent que les locataires vivent séparément depuis le 28 mai 2017, que le domicile conjugal a été attribué à Mme [O] par ordonnance de non-conciliation du 4 décembre 2017 à charge pour elle d'assumer le loyer et les charges et que la procédure en divorce est actuellement en cours, précisant que M. [T] [H] a adressé un courriel à la société chargée de la gestion de l'immeuble pour l'informer de son départ au 1er juin 2017 et donner son congé à cette date et que les cautions ont envoyé un courrier recommandé à la même société le12 juillet 2017 pour indiquer qu'ils résiliaient leur cautionnement.



Sur l'arriéré locatif, ils soutiennent que la somme réclamée correspond à des loyers et charges uniquement dus par Mme [O] qui avait la jouissance exclusive du domicile conjugal, que la SCI n'a pas pris en compte le congé donné par courriel réitéré par lettre recommandée du 1er février 2018, que M. [H] a précisé prendre en charge la moitié de la dette au 30 juin 2017, que Mme [O] a cumulé les impayés notamment sur la période du 1er octobre 2017 au 1er février 2018 et que son mari a effectué le 28 février 2018 un versement de 400 euros.



Sur l'état des lieux, ils font valoir que M. [T] [H] n'a pas eu connaissance de la convocation de l'huissier adressée à l'ancien domicile conjugal alors que la bailleresse était informée de son départ depuis 2017 et qu'il n'a pas à régler la moitié des frais de l'acte qui lui est inopposable.



Sur les réparations locatives, ils soutiennent que les locaux étaient en bon état lorsque M. [H] les a quittés, que Mme [O] est restée seule sur place avec son nouveau compagnon et est seule responsable des désordres, que les montants réclamés doivent être réduits par application d'un coefficient de vétusté, que la SCI ne produit que des devis et que le montant réel des travaux reste inconnu.



Sur l'engagement de caution, les consorts [H] exposent que la mention manuscrite mentionne une date d'échéance au 28 février 2003, qu'au regard du doute existant sur la date d'échéance l'engagement ne peut être considéré comme à durée déterminée, que les cautions ne peuvent être tenues d'aucune somme au-delà du 12 juillet 2017 et que la SCI doit être déboutée de ses demandes. Ils ajoutent qu'elle ne les a informés du non paiement des loyers que par assignation du 23 juillet 2018 et que ce retard cause aux cautions un préjudice consistant en la perte d'une chance d'empêcher la créance de loyer de s'accroître, lequel est évalué à 50% des sommes dues, à titre de dommages et intérêts.



Aux termes de ses dernières conclusions du 22 décembre 2022, la SCI [Y] demande à la cour de :

- déclarer irrecevables toutes les demandes des consorts [H] dirigées à son encontre en l'absence d'appel provoqué à son encontre

- débouter Mme [O] de toutes ses prétentions

- débouter les consorts [H] de toutes leurs prétentions dirigées à son encontre

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions

- condamner solidairement Mme [O] et les consorts [H] aux entiers dépens et au paiement de la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



Sur l'arriéré locatif, elle fait valoir que l'autorisation de résidence séparée ne met pas fin à la solidarité entre époux, que la séparation de fait et l'attribution provisoire du logement sont sans conséquence et qu'en application de l'article 262 du code civil, les époux demeurent tenus solidairement au paiement des loyers jusqu'à la transcription d'un jugement de divorce, ajoutant que la procédure de divorce est toujours en cours. Elle indique produire un décompte des sommes dues et versées depuis le début de la location faisant apparaître un arriéré locatif de 3.835,35 euros. Sur les charges, elle rappelle qu'il lui appartenait seulement de tenir les justificatifs à la disposition des locataires, lesquels n'ont formé aucune demande avant l'introduction de la procédure, et précise produire aux débats les décomptes de charges et un relevé récapitulatif détaillé depuis l'entrée dans les lieux.



Sur le cautionnement, la SCI [Y] expose que l'erreur de plume relative à la durée n'affecte que l'un des engagements, que l'intention commune des parties était de signer un acte de caution solidaire jusqu'au 28 février 2023 et non jusqu'au 28 février 2003, ce qui n'aurait aucun sens puisque l'acte de caution aurait pris fin avant d'avoir été signé, que la nullité de l'acte de caution ne peut être prononcée que si le non respect des mentions obligatoires est suffisamment significatif et ne résulte pas, comme en l'espèce, d'une simple erreur matérielle. Elle souligne que dans sa réponse à la lettre de résiliation de l'engagement de caution, le gestionnaire de l'immeuble a rappelé à M. et Mme [E] [H] qu'ils s'étaient engagés jusqu'au 28 février 2023 et que dans la mention manuscrite figurant dans l'acte de caution, ceux-ci ont expressément indiqué que la résiliation prendrait effet au terme du contrat de location. Elle en déduit que l'acte de caution a suivi le sort du contrat de bail et que les cautions restent tenues par leur engagement. Elle conteste la perte de chance alléguée alors que les cautions ont été informées dès le 5 juillet 2017 de l'existence d'impayés et connaissaient parfaitement la situation de leur fils et de son épouse.



Sur le réparations locatives, la bailleresse soutient que Mme [O] n'a pas honoré deux rendez-vous fixés pour établir amiablement l'état des lieux, que l'huissier justice l'a convoquée en vain à son adresse et que compte tenu des diligences entreprises, le procès-verbal d'état des lieux lui est opposable, de même que pour M. [T] [H] en application de l'article 220 du code civil, de sorte qu'ils doivent supporter la moitié du coût du procès-verbal établi par huissier. Elle ajoute que les réparations relèvent de ce même article, que le locataire ne démontre pas que les dégradations ont été commises après son départ et que l'engagement des cautions porte également sur les réparations locatives et autres indemnités dues au bailleur dans la limite de 58.320 euros. Elle soutient que les dégradations relevées ne sont pas seulement le fait de l'usure et la vétusté, que la maison a été dévastée et présente d'importantes dégradations affectant notamment les murs, les escaliers, les parquets, les menuiseries, que les désordres, qui selon Mme [O] seraient préexistants à la location, ne sont pas mentionnés dans l'état des lieux d'entrée, que les locaux sont réputés avoir été délivrés en bon état, que le coût total des réparations s'élève à 18.452,18 euros après déduction du dépôt de garantie de 790 euros et que les factures sont produites aux débats. Enfin, elle s'oppose formellement aux délais de paiement.



L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 janvier 2022.




MOTIFS DE LA DÉCISION :



Sur la recevabilité des demandes



L'appel provoqué peut émaner de l'intimé à l'encontre d'une partie présente en première instance et non intimée en appel.



Il est relevé que dans la procédure RG 20/1565, Mme [O] a intimé toutes les parties visées au jugement et que dans la procédure RG 20/1629, les consorts [H] ont également intimé toutes les parties de première instance, de sorte que l'ensemble des parties ayant été attrait à la procédure d'appel, il n'y a pas lieu à appel provoqué à l'encontre de la SCI [Y], intimée dans les deux procédures dès l'acte d'appel. En conséquence les demandes dirigées contre elles sont recevables.







Sur l'arriéré locatif



Aux termes des dispositions de l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989, le locataire est tenu de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus.



Il résulte de l'article 23 de la même loi que les charges récupérables peuvent donner lieu au versement de provisions et doivent dans ce cas, faire l'objet d'une régularisation annuelle. Les demandes de provisions sont justifiées par la communication des résultats antérieurs arrêtés lors de la précédente régularisation. Un mois avant cette régularisation, le bailleur communique au locataire le décompte par nature de charges. Durant six mois à compter de l'envoi de ce décompte, les pièces justificatives sont tenues à la disposition du locataire.



Il se déduit de ces dispositions que si les charges peuvent donner lieu au versement de provisions, elles doivent faire l'objet d'une régularisation annuelle et être justifiées par le bailleur.



Si Mme [O] invoque dans ses conclusions la prescription de la demande en paiement des charges récupérables à compter du 22 mars 2013, il est relevé que ne figure au dispositif de ses conclusions aucune fin de non recevoir tirée de la prescription, de sorte que la cour n'a pas à statuer sur la prescription alléguée, par application de l'article 954 du code de procédure civile.



Le décompte détaillé produit par la bailleresse fait état d'un arriéré de loyers et charges de 3.835,35 euros pour la période du 1er août 2013 au 22 mars 2018, les charges apparaissant sous la forme d'une provision mensuelle de 20 euros sans mention de régularisation sur la période. C'est à tort que le premier juge a dit que les charges étaient justifiées alors que la seule production d'un récapitulatif est insuffisante, que la réalité des montants portés en compte n'est établie par aucune pièce en l'absence de factures ou d'avis d'imposition pour la taxe d'ordures ménagères et que la bailleresse ne justifie pas avoir adressé aux locataires la régularisation annuelle prévue par la loi depuis le début du contrat de bail. En conséquence, la SCI [Y] doit être déboutée de sa demande relative aux provisions sur charges et il convient de déduire de l'arriéré locatif la somme totale de 1.120 euros. S'agissant des loyers, il n'est justifié d'aucun autre règlement que ceux figurant sur le décompte de la bailleresse. En conséquence, l'arriéré locatif s'élève à la somme de 2.715,35 euros.



Il résulte de l'article 220 du code civil que le loyer du logement familial, dette ménagère, oblige chacun des époux solidairement. Cette solidarité ne cesse, même en cas de congé régulièrement donné par l'un des copreneurs, qu'à la date d'expiration du bail ou lorsqu'il s'agit d'époux se séparant en cours d'exécution du bail, à la date de transcription du jugement sur les registres d'état civil.



En l'espèce, le fait que M. [T] [H] a quitté le logement en mai 2017 et que la jouissance du domicile conjugal a été attribuée à son épouse par ordonnance de non conciliation du 4 décembre 2017 est sans emport sur la solidarité conventionnelle expressément prévue au contrat de bail (article XI 'solidarité indivisibilité') et sur la solidarité légale en l'absence de jugement de divorce et de sa transcription sur les registres d'état civil. Il est tout aussi inopérant de soutenir qu'il a donné congé au 1er juin 2017, un tel congé n'étant pas de nature à mettre un terme à l'obligation légale de solidarité entre les époux. Il s'ensuit que les locataires sont solidairement redevables de la somme de 2.715,35 euros au titre des loyers impayés.



Sur les engagements des cautions, l'ancien article 2288 du code civil applicable au litige, dispose que celui qui se rend caution d'une obligation, se soumet envers le créancier à satisfaire cette obligation, si le débiteur n'y satisfait pas lui même. Selon l'ancien article 22-1 de la loi du 6 juillet 1989 applicable au litige, lorsque le cautionnement d'obligations résultant d'un contrat de location ne comporte aucune indication de durée ou lorsque la durée du cautionnement est stipulée indéterminée, la caution peut le résilier unilatéralement. La résiliation prend effet au terme du contrat de location, qu'il s'agisse du contrat initial ou d'un contrat reconduit ou renouvelé, au cours duquel le bailleur reçoit notification de la résiliation. La personne qui se porte caution fait précéder sa signature de la reproduction manuscrite du montant du loyer et des conditions de sa révision tels qu'ils figurent au contrat de location, de la mention manuscrite exprimant de façon explicite et non équivoque la connaissance qu'elle a de la nature et de l'étendue de l'obligation qu'elle contracte et de la reproduction manuscrite de l'alinéa précédent.



En l'espèce, le fait que la mention manuscrite apposée par l'une des cautions indique que l'engagement prend fin le '28 février 2003" et non le 28 février 2023 procède d'une simple erreur matérielle, dès lors que cette date est antérieure de plusieurs années au contrat de bail et à l'engagement de caution, comme justement relevé par le premier juge. La mention erronée n'est pas de nature à induire une méconnaissance quelconque, ni une mauvaise compréhension de son auteur sur la nature et l'étendue de son engagement, en particulier sa durée jusqu'au 28 février 2023 puisqu'elle est précédée dans l'acte par deux paragraphes précisant expressément d'une part que son signataire 'déclare se porter caution solidaire (...) jusqu'au 28 février 2023" et d'autre part qu'il recopie de sa main la mention selon laquelle 'il se porte caution (...) jusqu'à la date du 28 février 2023". En conséquence, l'erreur purement matérielle de date ne permet pas de considérer l'engagement des cautions comme à durée indéterminée et la dénonciation par les cautions de leur engagement par lettre du 12 juillet 2017 est inopérante, étant en tout état de cause rappelé que même à durée indéterminée l'engagement ne peut être dénoncé avant la fin du bail. Il s'ensuit que les cautions se sont valablement engagées à garantir les sommes dues au bailleur jusqu'au 23 février 2023 et ne peuvent soutenir être libérées de leurs engagements à compter du 12 juillet 2017.



Il résulte de l'ensemble de ces éléments que Mme [O] et les consorts [H] doivent être condamnés solidairement à payer à la SCI [Y] la somme de 2.715,35 euros au titre des loyers impayés avec intérêts au taux légal à compter du 30 juillet 2020, date du jugement déféré. Le jugement déféré est infirmé.



Sur le coût du procès-verbal d'état des lieux



Selon l'article 3-2 de la loi du 6 juillet 1989, si l'état des lieux ne peut être établi amiablement et contradictoirement, il est établi par un huissier de justice, sur l'initiative de la partie la plus diligente, à frais partagés par moitié entre le bailleur et le locataire.



Il résulte des pièces figurant au dossier et des explications des parties que la bailleresse a fixé un rendez-vous à Mme [O] pour réaliser amiablement l'état des lieux de sortie, que celle-ci a annulé le rendez-vous le jour-même, ces circonstances caractérisant l'impossibilité prévue à l'article 3-2 précité et justifiant le recours à un huissier de justice. Concernant M. [T] [H], il n'est justifié d'aucune démarche pour établir amiablement l'état des lieux alors que la bailleresse connaissait sa nouvelle adresse, de sorte qu'il n'a pas à supporter le coût du constat d'huissier.



En conséquence le jugement est infirmé en ce qu'il a condamné M. [T] [H], solidairement avec Mme [O] et les cautions, à payer la somme de 147,50 euros au titre du coût du procès-verbal d'état des lieux de sortie, le jugement étant confirmé pour le surplus.



Sur les réparations locatives



Il résulte des dispositions combinées des articles 1731 du code civil et 7 de la loi du 6 juillet 1989 (paragraphes c et d), qu'il appartient au locataire de prendre à sa charge les réparations locatives à moins qu'elles ne soient occasionnées par vétusté, malfaçon, vice de construction, cas fortuit ou force majeure et de répondre des dégradations et pertes qui surviennent pendant la durée de la location dans les locaux sauf à prouver une cause étrangère ou la faute du bailleur.



Il ressort de l'état des lieux établi contradictoirement par les parties le 25 février 2011 que lors de la prise de possession par les locataires, les locaux étaient pour l'essentiel en bon état, hormis les murs et plafonds de certaines pièces qui étaient seulement 'en bon état d'usage' (hall d'entrée, cuisine, salon, dégagement, chambre 1 et 2). Le procès-verbal d'état des lieux dressé par huissier le 12 avril 2018 révèle que lors de sa restitution, la maison était dans un état de grande saleté et présentait des désordres affectant notamment les murs, les planchers, les éléments de menuiseries.



Le caractère non contradictoire de ce procès-verbal n'empêche pas la SCI [Y] d'invoquer l'existence de désordres tels que décrits dans le procès-verbal régulièrement versé aux débats et soumis à la discussion des parties, étant observé que les constatations de l'huissier sont corroborées par les photographies annexées à l'acte et que les locataires ne discutent pas la réalité de ces constatations mais uniquement leur cause ou leur imputabilité.



Contrairement à ce que soutient Mme [O], les désordres relevés par l'huissier ne procèdent pas de la seule vétusté mais caractérisent de véritables dégradations (fenêtre cassée de la cuisine, portes brisées ou enfoncées, poignées de porte manquantes ou détériorées, enrouleurs et sangles de volet brisés, état de saleté des locaux et de la terrasse, leur encombrement par les objets abandonnés par les occupants, mauvais état des sols du garage et de la buanderie), étant observé que ces désordres ne sont pas préexistants à la location comme allégué puisque l'état des lieux d'entrée évoque des sols en bon état avec des taches à l'entrée alors que le procès-verbal de sortie fait état d'un sol jonché de taches notamment d'huile et de coulures et une descente de garage souillée d'huile. Il en découle que les locataires doivent répondre de l'intégralité de ces désordres, notamment M. [T] [H] qui s'est engagé solidairement avec Mme [O] pour l'exécution des obligations du bail (article XI) et qui ne démontre pas que les dégradations seraient postérieures à son départ.



Pour les autres désordres affectant les murs, plafonds, planchers, escaliers et meuble de la salle de bains, en l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et des droits des parties en estimant qu'ils ne sont pas seulement imputables aux locataires mais aussi à la vétusté pour une occupation des lieux pendant 7 ans et en appliquant des coefficients de vétusté de 50% pour les dégradations affectant les murs et plafonds et de 25% pour celles relatives aux planchers, escaliers et menuiseries dont la durée de vie est plus longue.



Sur le montant des réparations, il est rappelé que l'indemnisation du bailleur n'est pas subordonnée à l'exécution des réparations locatives et, au regard des éléments d'appréciation dont dispose la cour, les sommes portées en compte dans les devis correspondent à une juste appréciation des coûts tels qu'habituellement pratiqués. Sur la base de ces devis, les montants à la charge des locataires ressortent à 3.841,20 euros (6.002,40 - 50% de vétusté + 840) pour les travaux de nettoyage, débarras, revêtement et peinture des murs et plafonds, et à 6.591,36 euros (8.788,48 - 25% de vétusté) pour les prestations de ponçage des escaliers, changement du parquet et remplacement du meuble de la salle de bains. En revanche, le coût de remplacement des panneaux claustra sur la terrasse (825 euros) ne peut être imputé aux locataire dès lors que l'état des lieux d'entrée mentionne sur ce point 'un panneau style claustra en bois plié au milieu HS - pannes cassées' et il en est de même du changement de la porte balcon en quincaillerie (418 euros) dont il n'est pas fait état dans le procès-verbal de constat de sortie. Les réparations ou le remplacement des autres éléments de menuiseries dont la dégradation ou la disparition est entièrement imputable aux locataires, sont évaluées conformément au devis produit, à la somme de 2.376 euros.



Les réparations locatives à la charge des appelants s'élèvent au total à la somme de 12.808,56 euros dont il convient de déduire le dépôt de garantie de 790 euros, soit la somme de 12.018,56 euros. En conséquence le jugement est infirmé et Mme [O] et les consorts [H] sont condamnés solidairement à payer à la SCI [Y] la somme de 12.018,56 euros, étant observé que l'engagement de caution prévoit expressément la garantie des obligations des locataires pour le paiement des réparations locatives.



La décision déférée est en revanche confirmée en ce qu'elle a dit que la SCI [Y] pourra conserver le dépôt de garantie de 790 euros.



Sur le défaut d'information des cautions



Il résulte de l'ancien article 1147 (devenu article 1231-1) du code civil applicable au litige, que l'inexécution par le débiteur d'une obligation contractuelle donne lieu à l'allocation de dommages et intérêts lorsque ce manquement a causé un dommage à son cocontractant.



Si aucune obligation légale n'impose au bailleur d'informer la caution de la défaillance du locataire, celui-ci n'en est pas moins tenu d'un devoir de loyauté en vertu duquel il doit s'abstenir de tout comportement de nature à porter préjudice à la caution.





En l'espèce, il est relevé au regard du décompte locatif que, si pendant des années les locataires ont été débiteurs d'un arriéré, leurs versements ont toujours été réguliers de sorte que le montant des sommes dues a peu fluctué. En outre, la SCI [Y] justifie avoir informé les cautions le 17 juillet 2017 du montant de l'arriéré, sans réaction de leur part. Enfin, l'existence d'un préjudice subi par celles-ci du fait d'un manquement ou d'un retard de la bailleresse quant à son devoir d'information n'est pas établie, de sorte que M. et Mme [E] [H] sont mal fondés à invoquer une faute de la SCI pour voir limiter leur condamnation, étant observé qu'ils ne forment au dispositif de leurs conclusions, aucune demande de paiement de dommages et intérêts.



Sur les autres dispositions du jugement



Selon l'article 954 du code de procédure civile, les conclusions d'appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation, ainsi qu'un bordereau récapitulatif des pièces annexé. La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.



Si les consorts [H] ont formé appel de la disposition du jugement ayant rejeté l'appel en garantie de M. [T] [H] à l'encontre de Mme [O], il est constaté que ne figure au dispositif de leurs conclusions d'appel aucune demande de condamnation de Mme [O] à le garantir de toutes condamnations, de sorte que la cour n'a pas à statuer de ce chef et ne peut que confirmer la disposition ayant rejeté cette prétention.



Sur les délais de paiement, il est relevé que le dispositif des conclusions de la SCI [Y] ne contient aucune demande tendant à voir rejeter les demandes de délais de paiement et conclut à la confirmation du jugement en toutes ses dispositions, de sorte que la disposition du jugement ayant accordé des délais de paiement aux appelants est confirmée.



Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens



Les dispositions du jugement sur les frais irrépétibles et les dépens sont confirmées.



Mme [O] et les consorts [H], parties perdantes, devront supporter les dépens d'appel et il n'y a pas lieu en équité de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en appel.



PAR CES MOTIFS



LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,



DÉCLARE recevables les demandes de M. [T] [H], M. [E] [H] et Mme [I] [H] à l'encontre de la SCI [Y] ;



CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a :

- condamné solidairement Mme [L] [O] épouse [H], M. [E] [H] et Mme [I] [H] à payer à la SCI [Y] la somme de 147,50 euros au titre du constat d'huissier d'état des lieux de sortie, avec intérêts au taux légal à compter du jugement

- dit que la SCI [Y] pourra conserver le dépôt de garantie de 790 euros

- débouté M. [T] [H] de sa demande de garantie

- accordé à M. [T] [H], Mme [L] [O] épouse [H], M. [E] [H] et Mme [I] [H] un délai de 24 mois pour s'acquitter de leur dette en 24 mensualités égales, la première devant intervenir dans les deux mois de la notification du jugement

- condamné solidairement M. [T] [H], Mme [L] [O] épouse [H], M. [E] [H] et Mme [I] [H] à payer à la SCI [Y] la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;



L'INFIRME en ce qu'il a condamné solidairement M. [T] [H], Mme [L] [O] épouse [H], M. [E] [H] et Mme [I] [H] à payer à la SCI [Y] les sommes de 3.835,35 euros au titre de l'arriéré locatif et de 13.262,27 euros au titre des travaux de remise en état, déduction faite du dépôt de garantie, et a condamné M. [T] [H] à payer à la SCI [Y] la somme de 147,50 euros au titre du constat d'huissier d'état des lieux de sortie et statuant à nouveau,



DEBOUTE la SCI [Y] de sa demande formée à l'encontre de M. [T] [H] pour le paiement de la somme de 147,50 euros au titre du coût du constat d'huissier d'état des lieux de sortie;



CONDAMNE solidairement M. [T] [H], Mme [L] [O] épouse [H], M. [E] [H] et Mme [I] [H] à payer à la SCI [Y] la somme de 2.721,16 euros au titre de l'arriéré de loyers, avec intérêts au taux légal à compter du 30 juillet 2020 ;



CONDAMNE solidairement M. [T] [H], Mme [L] [O] épouse [H], M. [E] [H] et Mme [I] [H] à payer à la SCI [Y] la somme de 12.018,56 euros au titre des réparations locatives, avec intérêts au taux légal à compter du 30 juillet 2020 ;



Y ajoutant,



DEBOUTE les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile en appel ;



CONDAMNE in solidum M. [T] [H], Mme [L] [O] épouse [H], M. [E] [H] et Mme [I] [H] aux dépens d'appel.







La Greffière La Présidente de chambre

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