15 février 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-10.540

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2023:SO00182

Texte de la décision

SOC. / ELECT

AF1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 15 février 2023




Rejet


M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 182 F-D

Pourvoi n° M 22-10.540




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 15 FÉVRIER 2023

1°/ Le syndicat Sud santé sociaux de l'Isère, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ M. [M] [L], domicilié [Adresse 3],

ont formé le pourvoi n° M 22-10.540 contre le jugement rendu le 6 janvier 2022 par le tribunal judiciaire de Grenoble (chambre civile 4.5, contentieux des élections professionnelles), dans le litige les opposant à la congrégation la Maison de retraite du [4], dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bérard, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat du syndicat Sud santé sociaux de l'Isère et de M. [L], de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la congrégation la Maison de retraite du [4], après débats en l'audience publique du 5 janvier 2023 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Bérard, conseiller rapporteur, Mme Sommé, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Grenoble, 6 janvier 2022), par lettre du 1er octobre 2019, le syndicat Sud santé sociaux (le syndicat) a informé la congrégation la Maison de retraite du [4] (l'employeur), qui gère un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, de la désignation de M. [L] (le salarié) en qualité de représentant de section syndicale.

2. Soutenant que la condition d'effectif de l'entreprise n'était pas remplie, l'employeur a saisi, le 14 octobre 2021, le tribunal judiciaire d'une demande d'annulation de la désignation du salarié.

Examen du moyen

Énoncé du moyen

3. Le syndicat et le salarié font grief au jugement de prononcer l'annulation de la désignation du salarié en qualité de représentant de section syndicale, alors :

« 1°/ qu'en application de l'article L. 1111-2 du code du travail qui fixe les modalités de calcul de l'effectif de l'entreprise, lequel doit être d'au moins 50 salariés pendant douze mois consécutifs pour désigner un représentant de section syndicale, les salariés titulaires d'un contrat à durée déterminée sont pris en compte dans cet effectif à due proportion de leur temps de présence au cours de douze mois précédents et sont exclus du décompte des effectifs lorsqu'ils remplacent un salarié absent ou dont le contrat de travail est suspendu ; qu'ayant constaté des irrégularités tenant aux motifs de recours des contrats à durée déterminée conclus par l'EHPAD du [4] et en jugeant cependant que la requalification de ces contrats liée aux motifs de recours ne modifie pas le quantum des effectifs, le tribunal judiciaire a violé les articles L. 1111-2, L. 1242-1, L. 1242-2, 1°, et L. 2142-1-1 du code du travail ;

2°/ qu'en cas de contestation par l'organisation syndicale de l'effectif de l'entreprise ou de l'établissement permettant d'y constituer une section syndicale et de désigner un représentant de celle-ci, il appartient à l'employeur de faire la preuve d'un effectif inférieur à celui permettant la désignation d'un représentant syndical et au juge de vérifier tous les éléments de nature à calculer l'effectif ; qu'en l'espèce, le syndicat Sud santé sociaux a fait valoir que l'inspection du travail avait dénoncé la situation irrégulière de salariés embauchés en contrat à durée déterminée au regard du motif de recours de ces contrats ; qu'en se bornant à constater que l'EHPAD du [4] aurait rapporté la preuve d'un effectif inférieur à 50 salariés par la production du journal de paie et du journal des entrées et sorties du personnel sans vérifier le bien-fondé des motifs de recours des contrat à durée déterminée au motif inopérant que seul le conseil de prud'hommes aurait une telle compétence, le tribunal judiciaire qui a méconnu son office a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1111-2, L. 1242-1, L. 1242-2, 1°, et L. 2142-1-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

4. Selon l'article L. 2142-1-1, alinéa 1er, du code du travail chaque syndicat qui constitue, conformément à l'article L. 2142-1, une section syndicale au sein de l'entreprise ou de l'établissement d'au moins cinquante salariés peut, s'il n'est pas représentatif dans l'entreprise ou l'établissement, désigner un représentant de la section pour le représenter au sein de l'entreprise ou de l'établissement.

5. Aux termes de l'article L. 1111-2, 2°, du même code, les salariés titulaires d'un contrat de travail à durée déterminée, les salariés titulaires d'un contrat de travail intermittent, les salariés mis à la disposition de l'entreprise par une entreprise extérieure qui sont présents dans les locaux de l'entreprise utilisatrice et y travaillent depuis au moins un an, ainsi que les salariés temporaires, sont pris en compte dans l'effectif de l'entreprise à due proportion de leur temps de présence au cours des douze mois précédents. Toutefois, les salariés titulaires d'un contrat de travail à durée déterminée et les salariés mis à disposition par une entreprise extérieure, y compris les salariés temporaires, sont exclus du décompte des effectifs lorsqu'ils remplacent un salarié absent ou dont le contrat de travail est suspendu, notamment du fait d'un congé de maternité, d'un congé d'adoption ou d'un congé parental d'éducation.

6. Si les salariés engagés à durée déterminée peuvent seuls agir devant le juge prud'homal en vue d'obtenir la requalification de leurs contrats en contrats à durée indéterminée, les syndicats ont qualité pour demander au tribunal judiciaire, juge de l'élection, que les contrats de travail soient considérés comme tels s'agissant des intérêts que cette qualification peut avoir en matière d'institutions représentatives du personnel et des syndicats, notamment pour la détermination des effectifs de l'entreprise.

7. Ayant constaté que l'employeur rapportait la preuve que l'effectif de l'entreprise, sur la période d'octobre 2020 à octobre 2021, avait été en moyenne, salariés extérieurs inclus, de 44,64 salariés équivalents temps plein (ETP), avec des fluctuations allant de 38,38 (plus 2,45 ETP salariés extérieurs) à 44,44 salariés (plus 2,45 ETP salariés extérieurs) et fait ressortir que s'ajoutaient à cet effectif deux salariés en contrat à durée déterminée à la suite de l'injonction, le 4 mars 2021, faite à l'employeur par l'inspection du travail, de requalifier ces contrats en contrats à durée indéterminée, en sorte que le seuil de cinquante salariés n'avait pas été atteint sur la période de référence, le tribunal, qui n'était pas saisi d'une demande tendant à considérer comme des contrats à durée indéterminée d'autres contrats de travail à durée déterminée, en a déduit à bon droit que la désignation du salarié en qualité de représentant de section syndicale devait être annulée.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze février deux mille vingt-trois.


MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour le syndicat Sud santé sociaux de l'Isère et M. [L]

Les exposants font grief au jugement attaqué d'AVOIR prononcé l'annulation de la désignation de M. [L] en qualité de représentant de la section syndicale du syndicat Sud Santé Sociaux de l'Isère au sein de la Maison de retraite du [4] ;

1°- ALORS QU'en application de l'article L. 1111-2 du code du travail qui fixe les modalités de calcul de l'effectif de l'entreprise, lequel doit être d'au moins 50 salariés pendant douze mois consécutifs pour désigner un représentant de section syndicale, les salariés titulaires d'un contrat à durée déterminée sont pris en compte dans cet effectif à due proportion de leur temps de présence au cours de douze mois précédents et sont exclus du décompte des effectifs lorsqu'ils remplacent un salarié absent ou dont le contrat de travail est suspendu ; qu'ayant constaté des irrégularités tenant aux motifs de recours des contrat à durée déterminée conclus par l'EHPAD du [4] et en jugeant cependant que la requalification de ces contrats liée aux motifs de recours ne modifie pas le quantum des effectifs, le tribunal judiciaire a violé les articles L. 1111-2, L. 1242-1, L. 1242-2 l et L. 2142-1-1 du code du travail ;

2°- ALORS QU'en cas de contestation par l'organisation syndicale de l'effectif de l'entreprise ou de l'établissement permettant d'y constituer une section syndicale et de désigner un représentant de celle-ci, il appartient à l'employeur de faire la preuve d'un effectif inférieur à celui permettant la désignation d'un représentant syndical et au juge de vérifier tous les éléments de nature à calculer l'effectif ; qu'en l'espèce, le syndicat Sud Santé Sociaux a fait valoir que l'inspection du travail avait dénoncé la situation irrégulière de salariés embauchés en contrat à durée déterminée au regard du motif de recours de ces contrats ; qu'en se bornant à constater que l'EHPAD du [4] aurait rapporté la preuve d'un effectif inférieur à 50 salariés par la production du journal de paie et du journal des entrées et sorties du personnel sans vérifier le bien-fondé des motifs de recours des contrat à durée déterminée au motif inopérant que seul le conseil de prud'hommes aurait une telle compétence, le tribunal judiciaire qui a méconnu son office a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1111-2, L. 1242-1, L. 1242-2 l et L. 2142-1-1 du code du travail.

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