15 février 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-21.981

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2023:SO00157

Texte de la décision

SOC.

CH9



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 15 février 2023




Cassation partielle


Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 157 F-D

Pourvoi n° B 21-21.981




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 15 FÉVRIER 2023

La société Saint Jean industries, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° B 21-21.981 contre l'arrêt rendu le 1er juillet 2021 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale C), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [J] [W], domicilié [Adresse 3],

2°/ à Pôle emploi, dont le siège est [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

M. [W] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le demandeur au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Barincou, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Saint Jean industries, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [W], après débats en l'audience publique du 4 janvier 2023 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Barincou, conseiller rapporteur, Mme Grandemange, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 1er juillet 2021), M. [W], engagé en avril 2009 par la société Saint Jean industries, a été nommé, par avenant du 24 mai 2011, directeur d'usine sur le site [Localité 5] puis s'est vu confier une délégation de pouvoirs et de responsabilité en matière d'hygiène et de sécurité pour ce site.

2. Le 21 octobre 2017, il a été convoqué à un « entretien de recadrage » puis une rupture conventionnelle a été envisagée entre les parties.

3. Par courrier du 30 novembre 2017, le salarié a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement qui lui a été notifié par lettre du 15 décembre 2017.

4. Contestant ce licenciement, le salarié a saisi la juridiction prud'homale.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi incident, ci-après annexé


5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Sur le moyen du pourvoi principal, pris en ses première et deuxième branches

Enoncé du moyen

6. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner, en conséquence, à payer au salarié une somme à titre de dommages-intérêts, de le condamner à lui verser diverses sommes au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents et de l'indemnité conventionnelle de licenciement et de lui ordonner de rembourser à Pôle emploi des indemnités de chômage payées au salarié dans la limite de six mois en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, alors :

« 1°/ que, si la lettre de licenciement fixe les limites du litige concernant le motif de la rupture du contrat de travail, l'employeur est en droit, en cas de contestation, d'invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ce motif ; que, pour dire le licenciement du salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a notamment énoncé que « le grief selon lequel le salarié n'aurait pas ''réagi pour informer l'instance représentative du personnel des mesures mises en oeuvre au titre du plan d'action prédéfini'' qui lui a été adressé par le CHSCT le 7 décembre 2017, doit être écarté comme non visé à la lettre de licenciement » ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'elle constatait que la lettre de licenciement reprochait au salarié ''une absence ou une tardiveté de réaction aux demandes et interpellations du CHSCT'', ce dont il résultait que l'employeur était en droit d'expliciter ce grief suffisamment précis pour être matériellement vérifiable par la circonstance que l'intéressé n'avait pas informé le CHSCT des mesures mises en oeuvre au titre du plan d'action prédéfini qui lui avait adressé le 7 décembre 2017, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 ;

2°/ que, si la lettre de licenciement fixe les limites du litige concernant le motif de la rupture du contrat de travail, l'employeur est en droit, en cas de contestation, d'invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ce motif ; que, pour dire le licenciement du salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a notamment énoncé que ''l'employeur se prévaut également de deux accidents dont a été victime M. M. les 30 mai et 1er août 2017 dans les mêmes circonstances et sur le même poste de travail et d'un courriel du CHSCT en date du 12 octobre 2017 se plaignant de ce que ses plans d'action n'avaient pas été pris en compte'' mais que ''ce grief, non visé à la lettre de licenciement, doit être écarté'' ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'elle constatait que la lettre de licenciement reprochait au salarié une ''absence de démarche pour inverser la dégradation en matière de sécurité au travail en 2017 qui s'est traduite par une augmentation du nombre d'accidents du travail sur le site de [Localité 4]'' et encore ''une absence de mesures visant à faire respecter les règles de sécurité'', ce dont il résultait que l'employeur était en droit d'expliciter ce grief suffisamment précis pour être matériellement vérifiable par la circonstance qu'un salarié de l'établissement avait subi deux accidents dans les mêmes circonstances, sur le même poste et à quelques semaines seulement d'intervalle, et ce, en dépit des plans d'actions préconisés par le CHSCT qui n'avaient pas été pris en considération par le salarié responsable du respect des règles de sécurité, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1232-6 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 :

7. Si la lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables, l'employeur est en droit, en cas de contestation, d'invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ce motif.

8. Pour condamner l'employeur à payer au salarié des dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que doivent être écartés comme non visés par la lettre de licenciement, d'une part, le grief selon lequel le salarié n'aurait pas réagi pour informer l'instance représentative du personnel des mesures mises en oeuvre au titre du plan d'action prédéfini, qui lui a été adressé par le CHSCT le 7 décembre 2017 et, d'autre part, le grief par lequel l'employeur imputait au salarié deux accidents dont avait été victime un salarié les 30 mai et 1er août 2017 dans les mêmes circonstances et sur le même poste de travail, en faisant état d'un courriel du CHSCT en date du 12 octobre 2017 se plaignant de ce que ses plans d'action n'avaient pas été pris en compte.

9. En se déterminant ainsi, alors que la lettre de licenciement invoquait une absence de démarche pour inverser la dégradation en matière de sécurité au travail en 2017, une absence de mesures visant à faire respecter les règles de sécurité et une absence ou une tardiveté de réaction aux demandes et interpellations du CHSCT et qu'il lui incombait, en conséquence, de se prononcer sur les éléments avancés par l'employeur pour en justifier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

REJETTE le pourvoi incident ;

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute M. [W] de ses demandes de production de justificatifs comptables, d'expertise et de sursis à statuer, l'arrêt rendu le 1er juillet 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;

Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon autrement composée ;

Condamne M. [W] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze février deux mille vingt-trois.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat aux Conseils, pour la société Saint Jean industries, demanderesse au pourvoi principal

La société Saint-Jean Industries fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de M. [W] est sans cause réelle et sérieuse et, en conséquence, de l'AVOIR condamnée à payer à M. [J] [W] la somme de 82 700 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il l'a condamnée à verser au salarié les sommes de 62 036,34 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 6 203,63 € au titre des congés payés afférents au préavis, et 62 036,34 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement et de lui AVOIR ordonné de rembourser à Pôle emploi des indemnités de chômage payées à M. [J] [W] dans la limite de six mois en application de l'article L. 1235-4 du code du travail ;

1°) ALORS QUE, si la lettre de licenciement fixe les limites du litige concernant le motif de la rupture du contrat de travail, l'employeur est en droit, en cas de contestation, d'invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ce motif ; que, pour dire le licenciement de M. [J] [W] dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a notamment énoncé que « le grief selon lequel le salarié n'aurait pas "réagi pour informer l'instance représentative du personnel des mesures mises en oeuvre au titre du plan d'action prédéfini" qui lui a été adressé par le CHSCT le 7 décembre 2017, doit être écarté comme non visé à la lettre de licenciement » ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'elle constatait que la lettre de licenciement reprochait au salarié « une absence ou une tardiveté de réaction aux demandes et interpellations du CHSCT », ce dont il résultait que l'employeur était en droit d'expliciter ce grief suffisamment précis pour être matériellement vérifiable par la circonstance que l'intéressé n'avait pas informé le CHSCT des mesures mises en oeuvre au titre du plan d'action prédéfini qui lui avait adressé le 7 décembre 2017, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 ;

2°) ALORS QUE, si la lettre de licenciement fixe les limites du litige concernant le motif de la rupture du contrat de travail, l'employeur est en droit, en cas de contestation, d'invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ce motif ; que, pour dire le licenciement de M. [J] [W] dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a notamment énoncé que « l'employeur se prévaut également de deux accidents dont a été victime M. [T] les 30 mai et 1er août 2017 dans les mêmes circonstances et sur le même poste de travail et d'un courriel du CHSCT en date du 12 octobre 2017 se plaignant de ce que ses plans d'action n'avaient pas été pris en compte » mais que « ce grief, non visé à la lettre de licenciement, doit être écarté » ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'elle constatait que la lettre de licenciement reprochait au salarié une « absence de démarche pour inverser la dégradation en matière de sécurité au travail en 2017 qui s'est traduite par une augmentation du nombre d'accidents du travail sur le site de [Localité 4] » et encore « une absence de mesures visant à faire respecter les règles de sécurité », ce dont il résultait que l'employeur était en droit d'expliciter ce grief suffisamment précis pour être matériellement vérifiable par la circonstance qu'un salarié de l'établissement avait subi deux accidents dans les mêmes circonstances, sur le même poste et à quelques semaines seulement d'intervalle, et ce, en dépit des plans d'actions préconisés par le CHSCT qui n'avaient pas été pris en considération par le salarié responsable du respect des règles de sécurité, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 ;

3°) ALORS QUE l'employeur peut toujours prononcer un licenciement disciplinaire sur le fondement de faits fautifs datant de plus de deux mois au jour de la convocation du salarié à l'entretien préalable, lorsque le même comportement fautif du salarié a persisté ou s'et répété à l'intérieur de ce délai ; que pour écarter le grief tendant à « une absence de procédure d'intervention lors de dysfonctionnements ayant conduit l'inspection du travail à relever un procès-verbal à l'encontre de la société par courrier du 13 novembre 2017 », la cour d'appel a retenu que « s'agissant de l'accident du 23 août 2017 qui s'est produit sur un îlot robotisé dit Gauss 2, il est acquis qu'il a donné lieu, antérieurement au procès-verbal de l'inspection du travail du 13 novembre 2017 visé à la lettre de licenciement, à un rapport d'enquête de l'inspectrice du travail en date du 30 août 2017 reçu par l'employeur le 4 septembre 2017 » et que « ce rapport relevait déjà l'absence de notice, fiche de procédure d'intervention lors de dysfonctionnements de cette machine ce qui constituait une infraction à l'article R. 4323-15 dont il rappelait les termes, de sorte que la faute imputée au salarié était connue de l'employeur depuis plus de deux mois à la date d'introduction de la procédure de licenciement et que le grief est prescrit » ; qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants tirés de la connaissance qu'aurait eue l'employeur des faits en cause plus de deux mois avant l'engagement de la procédure disciplinaire, sans rechercher si, postérieurement au rapport d'enquête de l'inspectrice du travail, M. [W] avait édicté la fiche de procédure d'intervention dont l'absence constitue l'infraction prévue par l'article R. 4323-15 du code du travail et si, à défaut, l'employeur n'était pas bien-fondé à lui reprocher son inertie en la matière ayant conduit l'inspectrice du travail, in fine, à dresser procès-verbal constatant l'existence d'une infraction pénale caractérisée par le fait d'avoir permis qu'un salarié puisse intervenir sur une opération de maintenance sans qu'aucune disposition particulière n'ait été prise pour préserver sa santé et sa sécurité conformément à l'article R. 4323-15 du code du travail, l'employeur justifiant à cet égard dudit procès-verbal du 13 novembre 2017, de sa transmission au procureur de la République du tribunal de grande instance de Villefranche-sur-Saône et de l'amende correctionnelle qui lui avait été en conséquence infligée à ce titre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1332-4 du code du travail ;

4°) ALORS QUE l'employeur peut toujours prononcer un licenciement disciplinaire sur le fondement de faits fautifs datant de plus de deux mois au jour de la convocation du salarié à l'entretien préalable, lorsque le même comportement fautif du salarié a persisté ou s'et répété à l'intérieur de ce délai ; qu'en énonçant encore, à ce titre, que « le courriel de Mme [S], responsable HSE, en date du 19 octobre 2017, invoqué par l'employeur comme preuve de l'inertie du salarié suite à cet accident, démontre au contraire que des mesures correctives avaient été prises dans le cadre d'un plan d'action dès le 31 août suite aux observations de l'inspectrice du travail », cependant qu'il ressortait des propres constatations de l'arrêt que l'inspectrice du travail ayant finalement décidé de dresser procès-verbal pour infraction aux dispositions de l'article R. 4323-15 du code du travail, les mesures prétendument correctives prises par le salarié étaient insuffisantes, ou à tout le moins impropres à faire cesser l'infraction, en sorte que le manquement du salarié présentait toujours un caractère continu à la date du licenciement et que l'employeur pouvait, en conséquence, s'en prévaloir à l'appui du licenciement disciplinaire, la cour d'appel a violé l'article L. 1332-4 du code du travail

5°) ALORS, subsidiairement, QU'en statuant comme elle l'a fait, sans expliquer en quoi les prétendues mesures correctives prises par le salarié auraient été de nature à faire cesser l'infraction aux dispositions de l'article R. 4323-15 du travail, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1332-4 du code du travail ;

6°) ET ALORS QUE, pour dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a enfin retenu que « M. [W] établit en outre qu'il devait faire face à des situations sur lesquelles il n'avait pas de prise à savoir : - la forte croissance, en particulier de l'usinage, sur le site de [Localité 4] engendrant une désorganisation de l'activité ainsi que cela ressort d'un courriel du dirigeant, M. [O] en date du 6 juillet 2017 ; - le recours massif aux emplois intérimaires dont le nombre, 190 à fin 2017, correspondait à près de la moitié de l'effectif du site (qui était de 395) ainsi que cela ressort du procès-verbal de la réunion du comité d'entreprise du 23 octobre 2017 ; - le sous-dimensionnement du site de [Localité 4] ainsi que cela ressort d'un article du journal de l'entreprise de mars 2017 présentant un projet d'agrandissement du secteur logistique et de création d'un nouveau bâtiment pour l'usinage, d'un article de presse en date du 16 mars 2017 et d'une note d'information en date du 27 juin 2017 relatifs aux difficultés de stationnement, de courriels du mois de mai 2017 faisant état de problèmes de vestiaires et du 17 novembre 2017 faisant état de problèmes de stockage avec nécessité de mise en place de chapiteaux entre deux quais de déchargement » ; qu'en statuant ainsi, cependant que la forte croissance du site de [Localité 4], voire la désorganisation de son activité, le recours massif à des travailleurs intérimaires ou encore le sous-dimensionnement du site de [Localité 4] engendrant des difficultés de stationnement, des problèmes de vestiaires ou encore la nécessité de mettre en place des chapiteaux entre deux quais de chargement n'étaient en rien de nature à justifier les carences répétées du salarié en matière de prévention des accidents de travail et de protection de la santé et de la sécurité des salariés, ni son inertie face aux interpellations du CHSCT et aux préconisations de l'inspection du travail, la cour d'appel, qui a derechef statué par des motifs inopérants, a violé les articles L. 1234-1 et L. 1234-5 du code du travail et de l'article L. 1234-9 du code du travail en sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017.

Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. [W], demandeur au pourvoi incident

M. [W] fait grief à l'arrêt attaqué, confirmatif de ce chef, de l'AVOIR débouté de ses demandes de production de justificatifs comptables sous astreinte, d'expertise comptable et de sursis à statuer sur le rappel de primes sur objectifs dû.

1° ALORS QUE lorsque le calcul de la rémunération du salarié dépend d'éléments détenus par l'employeur, celui-ci est tenu de les produire en vue d'une discussion contradictoire ; que pour débouter le salarié de sa demande de production des justificatifs comptables nécessaires au calcul de sa prime sur objectifs, la cour d'appel a estimé, par motifs propres, que « l'employeur produit une attestation de son expert-comptable qui certifie que les calculs ayant servi de base à la détermination de la prime sur objectifs sont conformes aux règles comptables et à l'avenant au contrat de travail de M. [W] en date du 28 juillet 2015. Il est ainsi suffisamment établi que le salarié a été rempli de ses droits et il ne saurait y avoir lieu à ordonner la production de justificatifs comptables complémentaires » et, par motifs adoptés, que « la demande ainsi formulée par M. [W] ne repose sur aucune demande au fond » ; qu'en statuant ainsi, quand le salarié est en droit de s'assurer personnellement du respect des critères de détermination de la rémunération variable stipulés par son contrat de travail et qu'il incombe au juge de déterminer si le salarié a été rempli de ses droits, la cour d'appel a violé l'article 1353 du code civil.

2° ALORS QUE si une clause du contrat de travail peut prévoir une variation de la rémunération, c'est à la condition qu'elle soit fondée sur des éléments objectifs indépendants de la seule volonté de l'employeur ; qu'en déboutant le salarié de sa demande tendant à ce qu'une expertise soit ordonnée afin de reconstituer l'« earnings before interest, taxes, depreciation and amortization » (EBITDA) réel du site de [Localité 4] en tenant compte des frais anormalement non refacturés à des sociétés filiales et calculer le montant des primes d'objectifs qu'il aurait dû percevoir, motifs pris que « la décision concernant les frais des filiales est une décision de gestion qui relève du pouvoir de direction de l'employeur et que le salarié n'est pas fondé à remettre en cause » quand il résultait de ses constations que la variation de la rémunération dépendait de la seule volonté de l'employeur en diminuant unilatéralement l'EBITDA par la prise en charge des frais de sociétés filiales, la cour d'appel a violé l'article 1103 du code civil.

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