9 février 2023
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
RG n° 19/12160

Chambre 3-3

Texte de la décision

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-3



ARRÊT AU FOND

DU 09 FEVRIER 2023



N° 2023/23













Rôle N° RG 19/12160 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEVJK







SARL ALPHA PROMOTIONS





C/



[N] [E]

SARL AB CONSEIL





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Romain CHERFILS



Me Roselyne SIMON-THIBAUD









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 24 Juin 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 2018F00774.





APPELANTE



SARL ALPHA PROMOTIONS, agissant poursuite et diligences de ses représentants légaux

dont le siège social est sis [Adresse 3]



représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée de Me Roxane LOUBET, avocat au barreau de VALENCE substituant Me Didier CHAMPAUZAC, avocat au barreau de VALENCE, plaidant





INTIMES



Maître [N] [E], ès qualités de Commissaire à l'exécution du plan de la SARL AB CONSEIL, désigné à ces fonctions par jugement du Tribunal de Commerce de Marseille en date du 07 décembre 2019

demeurant [Adresse 1]



défaillant



SARL AB CONSEIL, agissant poursuites et diligences de son Gérant,

dont le siège social est sis [Adresse 2]



représentée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE













*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR





L'affaire a été débattue le 22 Novembre 2022 en audience publique devant la cour composée de :





Madame Valérie GERARD, Première Présidente de chambre, magistrat rapporteur

Madame Gwenael KEROMES, Présidente de chambre

Madame Françoise PETEL, Conseillère







qui en ont délibéré.



Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.



Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe, après prorogation, le 09 Février 2023.







ARRÊT



Défaut,



Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 Février 2023,



Signé par Madame Valérie GERARD, Première Présidente de chambre et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.




***

























































EXPOSÉ DU LITIGE





Les faits, la procédure et les moyens des parties ont été exposés dans l'arrêt n°2022/170 du 5 mai 2022, auquel il est expressément renvoyé, qui a ordonné la réouverture des débats et invité les parties à s'expliquer sur l'exigibilité du paiement sollicité par la SARL AB Conseil et, le cas échéant, à produire l'acte d'acquisition du terrain par la SARL Alpha Promotions.





Dans ses dernières conclusions notifiées et déposées le 17 novembre 2022 , auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, la SARL Alpha Promotions demande à la cour de :

- réformer le jugement dont appel et statuant à nouveau,

in limine litis,

- prononcer la nullité de l'assignation introductive d'instance, délivrée le 13 mars 2018, par la société AB Conseil, par devant le tribunal de commerce de Marseille,

- rejeter toutes autres demandes,

à titre subsidiaire,

- juger que l'assignation introductive d'instance, délivrée le 13 mars 2018, par la société AB Conseil, par devant le tribunal de commerce de Marseille est irrecevable.

- juger irrecevables les demandes de la société AB Conseil,

- rejeter toutes autres demandes,

à titre très subsidiaire,

- juger que le contrat « d'assistance » du 20 Mars 2015, invoqué par la société AB Conseil est nul et de nul effet,

- débouter la société AB Conseil de l'intégralité de ses demandes, fins, conclusions, et appel incident,

- rejeter les demandes de la société AB Conseil.

à titre très infiniment subsidiaire,

- débouter la société AB Conseil de l'intégralité de ses demandes, fins, conclusions et appel incident.

- rejeter les demandes de la société AB Conseil.

à titre encore plus subsidiaire,

- limiter, dans les plus larges proportions, les demandes de la société AB Conseil,

- dire que les éventuelles condamnations ne pourront être prononcées que hors taxes, la société AB Conseil étant une société commerciale.

en tout état de cause,

- condamner la SARL AB Conseil à payer à SARL Alpha Promotions la somme de 4 500 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile.

- condamner la SARL AB Conseil en tous les dépens, ceux d'appels distraits au profit de Maître Romain Cherfils, membre de la SELARL Lexavoue Aix-en-Provence, avocats associés, aux offres de droit.





Dans ses dernières conclusions notifiées et déposées le 2 novembre 2022, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, la SARL AB Conseil demande à la cour de :

- confirmer le jugement du 24 juin 2019 en ce qu'il a condamné Alpha Promotions au paiement de la somme de 84 000 euros à titre principal outre 1 500 euros en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile,

- le réformer pour le surplus et condamner Alpha Promotions au paiement de la somme de 15 000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive,



- condamner Alpha Promotions au paiement de la somme de 30 000 euros en vertus de l'article 700 du Code de procédure civile.





M. [N] [E] a été assigné, à domicile, en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de la SARL AB Conseil, mais n'a pas comparu.






MOTIFS



- Sur la nullité de l'assignation :



L'appelante soutient que l'assignation délivrée le 13 mars 2018, postérieurement au placement en redressement judiciaire de la SARL AB Conseil, est affectée d'une irrégularité de fond, non régularisée, puisque la SARL AB Conseil ne pouvait agir seule et devait être assistée de son mandataire judiciaire, Me [E], en application des dispositions de l'article L. 622-20 du Code de commerce. Elle conclut à titre principal à l'annulation de l'assignation et à titre subsidiaire à son irrecevabilité, faute pour la SARL AB Conseil d'avoir qualité à agir.



La SARL AB Conseil rappelle qu'elle a toujours été représentée par son gérant en exercice qui a seul la qualité de la représenter et que, s'agissant d'une procédure dans laquelle elle est en demande, aucun texte n'impose la présence aux débats de Me [E].



Si l'article L. 622-20 du Code de commerce, invoqué par l'appelante, dispose que le mandataire judiciaire désigné par le tribunal a seul qualité pour agir au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers, l'article L. 622-3 de ce même code, rendu applicable au redressement judicaire par l'article L. 631-14, dispose que le débiteur continue à exercer sur son patrimoine les actes de disposition et d'administration, ainsi que les droits et actions qui ne sont pas compris dans la mission de l'administrateur.



La SARL AB Conseil, qui rappelle justement qu'aucun administrateur n'a été désigné avec une mission de représentation ou d'assistance dans le cadre de son redressement judiciaire, pouvait par conséquent agir seule en recouvrement d'une créance.



Le plan ayant été désormais adopté, la SARL AB Conseil est in bonis et peut toujours agir seule dans la mesure où le recouvrement de cette créance n'a pas d'incidence sur le plan.



Pour les mêmes raisons exposées ci-dessus, l'assignation n'est pas plus irrecevable et la SARL AB Conseil a qualité pour agir en paiement à l'encontre de la SARL Alpha Promotions sans l'assistance de son mandataire judiciaire ou du commissaire au plan.



- Sur la nullité du contrat conclu entre les parties :



La SARL Alpha Promotion, qui fait valoir que les premiers juges ont dénaturé les clauses du contrat, fait d'abord valoir que les demandes de l'intimée sont irrecevables conformément au principe de l'estoppel, et soutient ensuite que ce contrat est nul pour contrevenir aux dispositions d'ordre public de la loi dite Hoguet du 2 janvier 1970, en ce qu'il prévoit en son article 2 des prestations de négociations immobilières sans mandat écrit, numéroté, et enregistré sur un registre spécial, sans être titulaire d'une carte d'agent immobilier et sans disposer ni d'une garantie financière ni d'une assurance. Elle ajoute que l'intimée a reconnu se livrer à des prestations de négociations immobilières dans son assignation ce qui constitue un aveu judiciaire.



La SARL AB Conseil réplique qu'il n'existe nulle contradiction dans ses prétentions, qu'elle n'a jamais exercé l'activité d'agent immobilier et ne s'est jamais présentée comme telle, y compris dans le cadre de l'opération litigieuse, qu'elle a mis en relation l'agent immobilier par l'intermédiaire duquel la vente a été régularisée et la SARL Alpha Promotions, même s'il est exact qu'elle a joué un rôle dans la détermination du prix avant la signature de la promesse et que son activité n'est pas soumise à la loi du 2 janvier 1970.



En premier lieu, comme le souligne la SARL AB Conseil, les prétentions de cette dernière n'ont jamais été modifiées et ne sont pas contradictoires entre elles puisqu'elle réclame uniquement le paiement d'une facture d'un montant de 84 000 euros TTC émise en exécution d'un contrat souscrit le 20 mars 2015. L'éventuelle variation dans l'énoncé des moyens au soutien de cette prétention ne constitue pas une violation du principe de l'estoppel.



En second lieu, contrairement à ce que soutient l'appelante, la mission confiée à la SARL AB Immobilier dans le contrat du 20 mars 2015 est exclusive de tout mandat et prévoit uniquement des missions d'assistance de la SARL Alpha Promotions dans la conduite de son projet.

Par ailleurs, s'il ne peut être contesté que la SARL AB Conseil est intervenue dans le cadre des négociations entre le vendeur du terrain, représenté par l'agence immobilière Muller-Becou et la SARL Alpha Promotions, cette assistance, occasionnelle, de l'acquéreur ne peut être considérée comme une activité exercée à titre habituel en violation des dispositions de la loi du 2 janvier 1970 dite loi Hoguet. C'est donc exactement que le tribunal de commerce de Marseille a déclaré le contrat licite.



- Sur l'exécution du contrat :

La SARL Alpha Promotions soutient que l'intimée n'a effectué aucune des missions mentionnées au contrat, qu'elle se prévaut en réalité de missions effectuées antérieurement à la conclusion du contrat pour une société Côté Sud Promotion.



La SARL AB Conseil réplique que la facture a été établie conformément au contrat signé, que l'opération a été réalisée sur une initiative de la dirigeante de la SARL AB Conseil et qu'elle a assisté l'appelante dans l'organisation de la signature de la promesse de vente. Elle ajoute qu'elle n'a perçu aucune rémunération relative à la mise en relation, le contrat étant postérieur à la signature de la promesse de vente et portant sur des prestations de montage d'opération effectuées entre la promesse et la régularisation de la vente.



Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.



Le contrat signé le 20 mars 2015 stipule que la mission débutera « ce jour » pour s'achever à la signature de l'acte authentique d'acquisition du terrain.

La promesse de vente sous signatures privées a été régularisée entre le vendeur du terrain et la SARL Alpha Promotions les 10 et 16 juillet 2014.

L'article 4 « honoraires et frais » stipule quant à lui qu'en contrepartie des missions assumées par la SARL AB Conseil dans le cadre du présent contrat, cette dernière percevra une rémunération de 70 000 euros HT payable le jour de l'acquisition du terrain.



Sur ce point, la SARL AB Conseil fait valoir que la vente a effectivement été réalisée suite à ses diligences et que l'acte de vente du 10 décembre 2016 mentionne en qualité d'acquéreur la société Nove F Properties, également gérée par M. [O] [K], lequel en est le bénéficiaire actif. Elle ajoute que la SARL Alpha Promotions a transféré le permis de construire dont elle bénéficiait à la société Nova F Properties.





La SARL Alpha Promotions fait valoir que l'acquisition n'a jamais été réalisée à son profit et qu'elle ne peut être assimilée à la société Nova F Properties nonobstant l'identité d'associé ou de bénéficiaire actif sauf à nier le principe de l'autonomie des personnes morales.

Elle soutient également que la SARL AB Conseil ne prouve pas avoir exécuté les obligations qui lui incombaient.



La mission de la SARL AB Conseil est fixée à l'article 2 de la convention :

- assistance à la SARL Alpha Promotions dans ses relations avec l'ensemble des intervenants extérieurs,

- intervention éventuelle lors de négociations avec les riverains de l'opération,

- fourniture d'informations complètes et constante au propriétaire foncier,

- information sur la nature et le montant des participations ou taxes pouvant grever l'opération,

- assistance lors d'éventuelles opérations de diagnostic ou fouilles archéologiques,

- direction des négociations nécessaires pour l'acquisition du terrain avec le propriétaire.



La plupart des documents produits par la SARL AB Conseil sont antérieurs à la conclusion du contrat d'assistance et effectués dans un autre cadre que celui défini par le contrat, à savoir l'assistance de la SARL Alpha Promotions pour l'acquisition du terrain.

Il en va ainsi de la négociation du prix du terrain litigieux, dont le prix a été effectivement ramené de 430 000 à 370 000 euros en 2014, donc antérieurement au contrat susvisé.

Ce contrat ne fait pas état d'actes antérieurs à sa conclusion, stipulant expressément au contraire qu'il prenait effet à compter de sa signature pour expirer à la signature de la vente. Il n'est pas plus justifié de l'obligation d'informer complètement et constamment la SARL Alpha Promotions pendant la durée du montage, ni d'une quelconque assistance dans l'aspect dépollution du terrain, la SARL AB Conseil s'étant bornée à fournir une étude qui lui avait été remise gracieusement par la société candidate au rachat du terrain antérieurement.

Les pièces produites sont dès lors insuffisantes à démontrer l'exécution de ses obligations par la SARL AB Conseil.

Au surplus, le contrat ayant été conclu entre la SARL AB Conseil et la SARL Alpha Promotions, sans que soit prévue une faculté de substitution de cette dernière, la conclusion de la vente par une autre société, fût-elle composée du même associé lequel en serait également le bénéficiaire effectif, ne justifie pas, en application de l'effet relatif des contrats, l'application de la rémunération prévue contractuellement.



Le jugement déféré est infirmé en toutes ses dispositions et la SARL AB Conseil déboutée de toutes ses demandes dirigées contre la SARL Alpha Promotions.





PAR CES MOTIFS





La cour statuant par arrêt de défaut



Infirme en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Marseille du 24 juin 2019,



Statuant à nouveau,



Déboute la SARL AB Conseil de toutes ses demandes,





Condamne la SARL AB Conseil aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile,



Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SARL AB Conseil à payer à la SARL Alpha Promotions la somme de deux mille euros.



LE GREFFIER LE PRESIDENT

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.