30 janvier 2023
Cour d'appel de Toulouse
RG n° 23/00110

ETRANGERS

Texte de la décision

COUR D'APPEL DE TOULOUSE









Minute 2023/112

N° RG 23/00110 - N° Portalis DBVI-V-B7H-PG7Y



O R D O N N A N C E



L'an DEUX MILLE VINGT TROIS et le 30 janvier à 08h15



Nous , S.DESJARDIN,, magistrat délégué par ordonnance du Premier Président en date du 7 DECEMBRE 2022 pour connaître des recours prévus par les articles L. 743-21 et L.342-12, R.743-10 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.



Vu l'ordonnance rendue le 25 Janvier 2023 à 17H39 par le juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de Toulouse ordonnant le maintien au centre de rétention de :



[G] X SE DISANT [K]

né le 26 Septembre 2001 à [Localité 1] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne



Vu l'appel formé le 26/01/2023 à 09 h 51 par courriel, par Me Doro GUEYE, avocat au barreau de TOULOUSE;







A l'audience publique du 27/01/2023 à 09h30, assisté de K. MOKHTARI, greffier avons entendu :




[G] X SE DISANT [K]

assisté de Me Doro GUEYE, avocat au barreau de TOULOUSE



qui a eu la parole en dernier ;



avec le concours de [I] [N], interprète, qui a prêté serment,



En l'absence du représentant du Ministère public, régulièrement avisé;



En présence de M.[W] représentant la PREFECTURE DE LA HAUTE-GARONNE ;



avons rendu l'ordonnance suivante :



M. [K] [G], de nationalité algérienne, a fait l'objet d'un arrêté du préfet de Haute-Garonne portant obligation de quitter le territoire français le 23 janvier 2023 et a été placé en rétention administrative suivant décision du même jour.



Par requête du 24 janvier 2023, le préfet a sollicité la prolongation pour une durée de 28 jours de son placement en rétention, lequel a été contesté par M. [K] [G] par requête du même jour.



Par ordonnance du 25 janvier 2023, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse a joint les procédures, constaté la régularité de la procédure, déclaré régulière la décision de placement en rétention administrative, rejeté la demande d'assignation à résidence et ordonné la prolongation pour une durée de 28 jours de la rétention de M. [K] [G].



Ce dernier en a interjeté appel par courrier de son conseil reçu au greffe de la cour le 26 janvier 2023 à 9 heures 51.



Il soutient par la voie de son avocat, à l'appui de ses demandes d'infirmation de l'ordonnance et de remise en liberté, que :


la procédure de contrôle et d'interpellation est irrégulière dans la mesure où le contrôle a été opéré dans un lieu de transport en commun qui n'était pas visé par les réquisitions du ministère public et que le procureur de la République a été prévenu de la mesure de garde à vue dans un délai déraisonnable ;

l'arrêté de placement en rétention est entaché d'une insuffisance de motivation, d'un défaut d'examen de sa situation personnelle et d'une erreur manifeste d'appréciation faute de prise en compte de son parcours de mineur isolé et de l'existence d'un domicile connu ;

la prolongation de la mesure de rétention n'est pas justifiée, faute pour l'administration de rapporter la preuve des diligences effectuées pour rendre effectif son départ du territoire français


Subsidiairement, il sollicite le bénéfice de l'assignation à résidence.



Le préfet, représenté à l'audience, a sollicité la confirmation de la décision entreprise en soulignant que le contrôle d'identité à l'origine de l'interpellation du retenu a été réalisé dans le strict cadre de temps et de lieu des réquisitions du procureur de la République de Toulouse en date du 18 janvier 2023. Il ajoute que l'information du parquet de la mesure de rétention a été faite dans un délai raisonnable. Il ajoute que M. [K] [G] ne présente pas de garantie de représentation suffisante



Le ministère public, avisé de la date d'audience, est absent et n'a pas formulé d'observation.




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MOTIVATION :



L'appel est recevable pour avoir été interjeté dans les formes et les délais légaux.



Sur la contestation de la procédure pénale



Aux termes de l'article 78-2 du code de procédure pénale, les officiers de police judiciaire et, sur l'ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire et agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux articles 20 et 21-1° du même code, peuvent inviter à justifier, par tout moyen, de son identité toute personne à l'égard de laquelle existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner

- qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction ;

- ou qu'elle se prépare à commettre un crime ou un délit ;

- ou qu'elle est susceptible de fournir des renseignements utiles à l'enquête en cas de crime ou de délit ;

- ou qu'elle a violé les obligations ou interdictions auxquelles elle est soumise dans le cadre d'un contrôle judiciaire, d'une mesure d'assignation à résidence avec surveillance électronique, d'une peine ou d'une mesure suivie par le juge de l'application des peines ;

- ou qu'elle fait l'objet de recherches ordonnées par une autorité judiciaire.

Sur réquisitions écrites du procureur de la République aux fins de recherche et de poursuite d'infractions qu'il précise, l'identité de toute personne peut être également contrôlée, selon les mêmes modalités, dans les lieux et pour une période de temps déterminés par ce magistrat. Le fait que le contrôle d'identité révèle des infractions autres que celles visées dans les réquisitions du procureur de la République ne constitue pas une cause de nullité des procédures incidentes.



En l'espèce, le procureur de la République de Toulouse, a pris le 18 janvier 2023 des réquisitions écrites, visant l'article 78-2 alinéa 2 du code de procédure pénale, permettant des contrôles d'identité le 23 janvier 2023 de 9 heures à 12 heures, aux fins de constatation d'infractions de maintien irrégulier d'un étranger, d'aide au séjour, de soustraction à une mesure d'assignation à résidence, de vol et de recel dans le secteur du centre-ville nord de [Localité 2], délimité par des axes de circulation qui y sont précisées.



Si le constat des éléments objectifs, déduits de circonstances extérieures à la personne, de nature à faire apparaître sa qualité d'étranger, doit précéder le contrôle des titres de séjour intervenu sur le fondement de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un tel constat n'a pas à être préalable au contrôle d'identité effectué en application de l'article 78-2 du code de procédure pénale, mais peut résulter de celui-ci.

Ils ne sont pas davantage tenus de caracteriser le comportement de la personne controlee des lors qu'ils interviennent dans les circonstances de temps et de lieu des requisitions.



M. [K] [G], a fait l'objet d'un contrôle d'identité le 23 janvier 2023 à 11 heures à la station de métro Jeanne d'Arc située au niveau de la place Jeanne d'Arc, lieu expressément visé par les réquisitions du procureur de la République.



Il a alors indiqué se nommé [C] [S], dit être de nationalité marocaine et être dépourvu de document officiel permettant d'établir son identité et sa situation de séjour ou de circulation sur le territoire national.



Le procureur de la République a en outre été avisé de la mesure de retenue à 11 heures 46, soit moins d'une heure après le début du contrôle. Ce délai ne saurait être regardé comme déraisonnable au regard des dispositions des articles 63 I, alinéa 2 et 78-3 du code de procédure pénale.



La décision entreprise doit en conséquence être confirmée sur la régularité de la procédure.





Sur la contestation de l'arrêté de placement en rétention administrative



En application de l'article L741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision.

Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3.



Aux termes de l'article L612-3 le risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :

1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;

2° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;

3° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;

4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;

5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ;

6° L'étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l'un des États avec lesquels s'applique l'acquis de Schengen, fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par l'un des États ou s'est maintenu sur le territoire d'un de ces États sans justifier d'un droit de séjour ;

7° L'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou a fait usage d'un tel titre ou document ;

8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5.



En l'espèce, la décision de placement en rétention cite les textes applicables à la situation de M. [K] [G] et énonce les circonstances de fait qui justifient l'application de ces dispositions.



Elle précise en effet que l'intéressé ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, ni avoir demandé un titre de séjour, qu'il a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français et qu'il s'est d'ailleurs soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement.



Le préfet n'est pas tenu de faire état dans sa décision de tous les éléments de la situation personnelle de l'étranger dès lors que les motifs qu'il retient suffisent à justifier le placement en rétention au regard des critères légaux, étant souligné que les circonstances doivent être appréciées au vu des éléments dont il disposait au jour de sa décision.



L'arrêté préfectoral querellé comporte ainsi les motifs de droit et de fait suffisants et le grief tiré d'une insuffisance de motivation, d'un défaut d'examen de la situation personnelle et d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.



M. [K] [G] a en outre pu être regardé comme ne présentant pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à l'obligation de quitter le territoire dès lors qu'il s'est soustrait à deux reprises à des arrêtés portant assignation à résidence prises successivement les 12 août 2021 et 28 avril 2022, versés à la procédure, qu'il a tenté de dissimuler sa véritable identité en déclarant se nommer [C] [S] et qu'il ne justifie pas d'un domicile stable.



C'est donc sans méconnaître le principe de proportionnalité et de nécessité et en procédant à un examen de la situation de l'étranger que la décision de placement en rétention a été prise.





Sur la prolongation de la rétention



En application de l'article L741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet.



En l'espèce, l'administration a formulé des saisines aux autorités consulaires nécessaires à la mise en 'uvre de la mesure d'éloignement et en justifie.



En conséquence, au stade actuel de la mesure de rétention administrative qui débute, et alors que les perspectives raisonnables d'éloignement doivent s'entendre comme celles pouvant être réalisées dans le délai maximal de 60 jours de la rétention applicable à l'étranger, il ne peut être affirmé que l'éloignement de l'appelant ne pourra avoir lieu avant l'expiration de ce délai.



La prolongation de la rétention administrative est donc justifiée.





Sur l'assignation à résidence :



Aux termes de l'article L 743-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le juge des libertés et de la détention peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives.

L'assignation à résidence ne peut être ordonnée par le juge qu'après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance d'exécution.

Lorsque l'étranger s'est préalablement soustrait à l'exécution d'une décision mentionnée à l'article L. 700-1, à l'exception de son 4°, l'assignation à résidence fait l'objet d'une motivation spéciale.



L'appréciation de l'opportunité d'accorder cette mesure, qui ne saurait non plus être automatique, suppose que les éléments de la procédure ne laissent pas apparaître un risque de non-exécution de la mesure d'éloignement.



En l'espèce, l'appelant n'est pas titulaire d'un passeport en original et en cours de validité. Il ne justifie pas d'une résidence effective certaine et stable. Enfin, il s'est soustrait à deux reprises à des mesures d'assignation à résidence et a clairement manifesté sa volonté de ne pas retourner dans son pays.



Dans ces conditions, une assignation à résidence constituerait un risque sérieux de non-exécution de la mesure d'éloignement et la demande sera rejetée.





La décision déférée sera en conséquence confirmée en toutes ses dispositions.



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PAR CES MOTIFS

Statuant par ordonnance mise à disposition au greffe après avis aux parties,



Confirmons l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention de Toulouse le 25 janvier 2023,



Disons que la présente ordonnance sera notifiée à la préfecture, à M. [K] [G] ainsi qu'à son conseil et communiquée au ministère public.









LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE







K. MOKHTARI .S.DESJARDIN.

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