28 janvier 2023
Cour d'appel de Rouen
RG n° 23/00339

Chambre des Etrangers

Texte de la décision

N° RG 23/00339 - N° Portalis DBV2-V-B7H-JI2P





COUR D'APPEL DE ROUEN



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT





ORDONNANCE DU 28 JANVIER 2023







Nous, Anne-Sophie DE BRIER, Conseillère à la cour d'appel de Rouen, spécialement désignée par ordonnance de la première présidente de ladite cour pour la suppléer dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées,



Assistée à l'audience de M. GEFFROY, Greffier ;



Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;



Vu la requête du Préfet de la Seine-Maritime tendant à voir prolonger pour une durée supplémentaire de trente jours la mesure de rétention administrative qu'il a prise le 26 décembre 2022 à l'égard de Monsieur [M] [Y] [E] né le 18 Octobre 1990 à [Localité 2] (LIBYE) de nationalité Libyenne ;



Vu l'ordonnance rendue le 26 Janvier 2023 à 15 heures 50 par le Juge des libertés et de la détention de ROUEN autorisant le maintien en rétention de Monsieur [M] [Y] [E] pour une durée supplémentaire de trente jours à compter du 25 janvier 2023 à 15 heures 45 jusqu'au 24 février 2023 à la même heure ;



Vu l'appel interjeté par Monsieur [M] [Y] [E], parvenu au greffe de la cour d'appel de Rouen le 26 janvier 2023 à 18 heures 02 ;



Vu l'avis de la date de l'audience donné par le greffier de la cour d'appel de Rouen :

- aux services du directeur du centre de rétention deOissel,

- à l'intéressé,

- au Préfet de la Seine-Maritime,

- à Me Anaïs PICARD-TEKIN, avocat au barreau de ROUEN, choisie en vertu de son droit de suite,

- à M. [G] [F] interprète en langue arabe ;



Vu les dispositions des articles L 743-8 et R 743-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;



Vu la décision prise de tenir l'audience grâce à un moyen de télécommunication audiovisuelle et d'entendre la personne retenue par visioconférence depuis les locaux dédiés à proximité du centre de rétention administrative de [Localité 1] ;



Vu la demande de comparution présentée par Monsieur [M] [Y] [E];



Vu l'avis au ministère public ;



Vu les débats en audience publique, en la présence de M. [G] [F] interprète en langue arabe, expert assermenté, en l'absence du PREFET DE LA SEINE MARITIME et du ministère public ;



Vu la comparution de Monsieur [M] [Y] [E] par visioconférence depuis les locaux dédiés à proximité du centre de rétention administrative de [Localité 1];



Me Anaïs PICARD-TEKIN, avocat au barreau de ROUEN étant présent au palais de justice ;



Vu les réquisitions écrites du ministère public ;



Les réquisitions et les conclusions ont été mises à la disposition des parties ;



L'appelant et son conseil ayant été entendus ;



****



Décision prononcée par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.






****



FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS



M. [M] [Y] [E] a fait l'objet d'un arrêté du 26 décembre 2022 portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination (son pays d'origine ou tout pays pour lequel il établit être légalement admissible), avec interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.



Il a été placé en rétention administrative par arrêté du 26 décembre 2022 notifié ce même jour à 15h45.



Par ordonnnance du 29 décembre 2022, confirmée en appel, le juge des libertés et de la détention a déclaré régulière la décision de placement en rétention et a autorisé la prolongation de celle-ci pour une durée de 28 jours.



Par une ordonnance du 26 janvier 2023, ce juge a autorisé le maintien en rétention pour une durée supplémentaire de 30 jours, décision contre laquelle M. [M] [Y] [E] a formé un recours, sollicitant l'infirmation de l'ordonnance et sa remise en liberté.



A l'appui de son appel, M. [M] [Y] [E] fait valoir :

- un défaut de diligences de l'administration;

- une absence de perspective raisonnable d'éloignement;



A l'audience, l'avocat développe les moyens contenus dans la déclaration d'appel, faisant valoir que les diligences accomplies sont relativement faibles alors que M. [M] [Y] [E] est entre les mains de l'administration depuis longtemps, que M. [M] [Y] [E] n'a rien à voir avec l'Algérie, et que la Lybie, qui n'a pas répondu jusqu'à présent, ne répondra vraisemblablement pas aux sollicitations de la préfecture. L'avocat en déduit que l'éloignement paraît impossible.



M. [M] [Y] [E] indique vouloir sortir.



M. le préfet de la Seine-Maritime n'a pas fait parvenir d'observations.



Le dossier a été communiqué au parquet général qui, par conclusions écrites non motivées du 27 janvier 2023, sollicite la confirmation de la décision.




MOTIVATION DE LA DECISION



Sur la recevabilité de l'appel



Il résulte des énonciations qui précédent que l'appel interjeté par Monsieur [M] [Y] [E] à l'encontre de l'ordonnance rendue le 26 Janvier 2023 par le juge des libertés et de la détention de Rouen est recevable.



Sur le fond



Aux termes de l'article L 741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile 'un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration doit exercer toute diligence à cet effet'.



En application de l'article L. 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le juge des libertés et de la détention peut être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention pour une nouvelle période d'une durée maximale de trente jours :

1° En cas d'urgence absolue ou de menace d'une particulière gravité pour l'ordre public ;

2° Lorsque l'impossibilité d'exécuter la décision d'éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l'intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l'obstruction volontaire faite à son éloignement ;

3° Lorsque la décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison :

a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l'exécution de la décision d'éloignement ;

b) de l'absence de moyens de transport.



Il en résulte que le préfet doit justifier se trouver dans l'un de ces cas et avoir accompli des diligences pour organiser le départ de l'étranger.



La préfecture justifie, depuis la dernière prolongation de la mesure de rétention, avoir de nouveau sollicité le consul de Lybie aux fins d'identification de M. [M] [Y] [E] en vue de la délivrance d'un laissez-passer (courriel du 6 janvier 2023, courriel du 23 janvier 2023), cela alors même qu'elle n'a aucun pouvoir de contrainte sur les autorités consulaires étrangères et qu'il ne peut donc être attendu d'elle de procéder à des relances.



Elle justifie également de l'obtention d'un rendez-vous auprès des services consulaires d'Algérie le 3 janvier 2023, dont il n'est pas contesté qu'il a eu lieu, ainsi que cela ressort du courriel du 6 janvier 2023 par lequel la préfecture demande au consulat d'Algérie s'il est disposé, après cette audition, à délivrer un laissez-passer.



Elle justifie enfin avoir sollicité un rendez-vous auprès du consulat de Tunisie, par courriels du 12 janvier 2023 puis du 23 janvier 2023.



Un laissez-passer ou tout autre document de voyage ne peut être délivré que dès lors que la nationalité et donc l'identité de l'intéressé a été formellement établie. En l'état d'une personne dépourvue de pièce d'identité, et connue sous différentes identités (M. [M] [Y] [E] alias [P] [D]), les recherches propres à identifier l'origine et la nationalité de celle-ci sont incontournables et retardent d'autant la délivrance du titre de voyage. C'est donc de manière pertinente que la préfecture sollicite les différents consulats ci-dessus évoqués, et ce faisant, justifie tant de l'accomplissement des diligences nécessaires pour justifier un maintien en rétention que des conditions juridiques nécessaires à une deuxième prolongation de la rétention.

Il est précisé à cet égard que l'appréciation des diligences requises n'a pas à tenir compte de la période d'incarcération ayant précédé le placement en rétention, l'administration n'ayant aucune obligation d'exercer des diligences avant ce placement.

Des perspectives raisonnables d'éloignement existent dès lors que la préfecture recherche auprès de différents pays, qui n'ont pas répondu négativement, à établir l'identité et la nationalité de M. [M] [Y] [E].



Il en résulte que la décision du JLD est confirmée.



PAR CES MOTIFS :



Statuant publiquement, par ordonnance réputée contradictoire et en dernier ressort,



Déclare recevable l'appel interjeté par Monsieur [M] [Y] [E] à l'encontre de l'ordonnance rendue le 26 Janvier 2023 par le juge des libertés et de la détention de Rouen, prolongeant la mesure de rétention administrative le concernant pour une durée supplémentaire de trente jours ;



Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions.





Fait à Rouen, le 28 Janvier 2023 à 17 heures 27.







LA GREFFIERE, LA CONSEILLÈRE,

















NOTIFICATION



La présente ordonnance est immédiatement notifiée contre récépissé à toutes les parties qui en reçoivent une expédition et sont informées de leur droit de former un pourvoi en cassation dans les deux mois de la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.

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