30 janvier 2023
Cour d'appel d'Amiens
RG n° 21/04051

2EME PROTECTION SOCIALE

Texte de la décision

ARRET

N°128





[T] [B]





C/



CPAM [Localité 3] [Localité 4]













COUR D'APPEL D'AMIENS



2EME PROTECTION SOCIALE





ARRET DU 30 JANVIER 2023



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N° RG 21/04051 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IF75 - N° registre 1ère instance : 21/01099



JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE (Pôle Social) EN DATE DU 29 juin 2021





PARTIES EN CAUSE :





APPELANT





Monsieur [R] [P] [T] [B]

[Adresse 2]

[Localité 3]





Assisté par Me François PARRAIN de l'AARPI ANGLE DROIT AVOCATS, avocat au barreau de LILLE, vestiaire : 0287











ET :





INTIME





La CPAM [Localité 3] [Localité 4], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 4]







Représentée et plaidant par Mme [O] [V] dûment mandatée









DEBATS :



A l'audience publique du 22 Septembre 2022 devant Mme Elisabeth WABLE, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 Janvier 2023.



GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Marie-Estelle CHAPON





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :



Mme Elisabeth WABLE en a rendu compte à la Cour composée en outre de:



Mme Elisabeth WABLE, Président,

Mme Graziella HAUDUIN, Président,

et Monsieur Renaud DELOFFRE, Conseiller,



qui en ont délibéré conformément à la loi.





PRONONCE :



Le 30 Janvier 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Elisabeth WABLE, Président a signé la minute avec Mme Marie-Estelle CHAPON, Greffier.




*

* *



DECISION



Vu le jugement rendu le 29 juin 2021 par lequel le pôle social du tribunal judiciaire de Lille, statuant dans le litige opposant M. [R] [P] [T] [B] à la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 3] [Localité 4] (la CPAM), a :



- déclaré le recours formé par M. [R] [P] [T] [B] recevable mais mal fondé,

- débouté M. [R] [P] [T] [B] de ses demandes,

- condamné M. [R] [P] [T] [B] aux dépens,



Vu l'appel de ce jugement relevé par M. [R] [P] [T] [B] le 28 juillet 2021,



Vu les conclusions visées le 22 septembre 2022, soutenues oralement à l'audience, par lesquelles M. [R] [P] [T] [B] prie la cour de :



- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré son recours recevable mais mal fondé, l'a débouté de ses demandes et l'a condamné aux dépens,



statuant à nouveau

- à titre principal, ordonner à la CPAM d'instruire sa demande de reconnaissance de maladie professionnelle relative à la lombosciatique chronique sur le fondement de la procédure prévue par les alinéas 4 et 5 de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale,

- à titre subsidiaire, désigner un expert avec la mission habituellement donnée par la Cour pour qu'il se prononce sur la condition de désignation de la maladie dans le tableau n°98 des maladies professionnelles,

- ordonner que les frais d'expertise soient pris en charge par la CPAM de [Localité 3] [Localité 4],

- en tout état de cause, annuler la décision de la commission de recours amiable du 26 novembre 2020,

- annuler la décision de la CPAM de [Localité 3] [Localité 4] du 10 septembre 2020,

- juger que la maladie qu'il a déclarée le 18 mars 2020 est une maladie professionnelle,

- condamner la CPAM de [Localité 3] [Localité 4] aux dépens.



Vu les conclusions visées le 22 septembre 2022, soutenues oralement à l'audience, par lesquelles la CPAM de [Localité 3] [Localité 4] prie la cour de :



- à titre principal, confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

- débouter M. [R] [P] [T] [B] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- confirmer le refus de prise en charge de la pathologie de M. [R] [P] [T] [B] au titre de la législation professionnelle,

- condamner M. [R] [P] [T] [B] aux éventuels dépens de l'instance,

- à titre subsidiaire, si la Cour estime, par extraordinaire, que M. [R] [P] [T] [B] était bien atteint de la pathologie désignée dans le tableau 98, il lui appartiendra de renvoyer devant la caisse pour l'examen des autres conditions du tableau,




***



SUR CE LA COUR,



Le 18 mars 2020, M. [R] [P] [T] [B] a effectué auprès de la CPAM une déclaration de maladie professionnelle , faisant état de lombosciatalgies chroniques et y a joint un certificat médical initial de même date constatant sur sa personne: «  tendinopathie des épaules, coxarthrose droite + lésions méniscales bilatérales+lombosciatique chronique ».



Par courrier en date du 10 septembre 2020, la CPAM a notifié à M. [R] [P] [T] [B] une décision de refus de prise en charge de la maladie déclarée au motif que les conditions réglementaires prévues par le tableau n°98 n'étaient pas remplies en l'absence de conflit disco-radiculaire.



Contestant cette décision, M. [R] [P] [T] [B] a saisi la commission de recours amiable qui a rejeté sa contestation, puis le pôle social du tribunal judiciaire de Lille, lequel, par jugement dont appel, l'a débouté de ses demandes.



[R] [P] [T] [B] conclut à l'infirmation du jugement déféré et à ce qu'il soit fait injonction à la caisse d'instruire sa demande en appliquant la procédure complémentaire des 4eme et 5eme alinéas de l'article L 461-1 du code de la sécurité sociale.



Il soutient que ses activités professionnelles de peintre chargé en outre de missions diverses l'ont amené à solliciter son dos durant des journées entières, et que la pathologie dont il souffre présente un lien direct et essentiel avec son activité professionnelle.



Il oppose qu'il n'a aucunement précisé le tableau de maladie professionnelle applicable à sa pathologie et que la caisse a unilatéralement décidé d'instruire la demande sur le fondement du tableau n°98 des maladies professionnelles, visant la maladie suivante:  « sciatique par hernie discale L4-L5 ou L5-S1 avec atteinte radiculaire de topographie concordante »



Il estime que la reconnaissance de maladie professionnelle pouvait être recherchée sur le fondement de l'article L. 461-1 alinéa 4 du code de la sécurité sociale, que la caisse devait recueillir l'avis du médecin conseil sur le taux d'incapacité permanente causé par sa lombosciatique chronique et le cas échéant saisir un Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles (CRRMP), ce qu'elle n'a pas fait.



A titre subsidiaire, M. [T] [B] indique qu'aucun document médical ne fait mention d'une hernie discale, qu'il est permis de douter du fondement de l'instruction de la maladie au titre du tableau n°98, que l'affection présentée s'apparente à une pathologie non désignée dans un tableau, et qu'il y a lieu d'ordonner une expertise médicale .



La CPAM de [Localité 3] [Localité 4] conclut à titre principal à la confirmation de la décision entreprise et au bien-fondé de sa décision de refus de prise en charge de la maladie déclarée.



Elle se réfère à l'avis du médecin conseil selon lequel la condition réglementaire du tableau n°98 n'est pas remplie, en l'absence de conflit disco-radiculaire au vu du compte-rendu d'IRM lombaire du 11 janvier 2020.



Elle ajoute que l'instruction de la maladie sur le fondement du tableau n°98 a été mise en 'uvre en tenant compte de la mention d'une lombosciatique chronique dans le certificat médical initial et de la profession de menuisier-peintre-poseur de l'assuré.



La caisse observe en outre que seule une pathologie non visée dans un tableau peut faire l'objet d'une instruction au titre d'une maladie hors tableau, que dès lors que l'interessé a déclaré une lombosciatique chronique, elle ne pouvait instruire ce dossier qu'au titre du tableau n°98 qui encadre expressément ce type de pathologie.



Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des prétentions et moyens.



***



* Sur les demandes d'annulation des décisions de la CPAM et de la commission de recours amiable :



Si les articles L. 142-4, R. 142-1 et R. 142-10-1 du code de la sécurité sociale subordonnent la saisine du pôle social du tribunal judiciaire à la mise en 'uvre préalable d'un recours non contentieux devant la commission de recours amiable instituée au sein du conseil d'administration de chaque organisme social, ces dispositions réglementaires ne confèrent pas pour autant compétence à la juridiction judiciaire pour statuer sur le bien-fondé de cette décision ou de la décision initiale de refus de prise en charge, qui revêtent un caractère administratif.



Il y a donc lieu de débouter M. [T] [B] de ses demandes d'annulation des décisions de refus de prise en charge de la CPAM et de la commission de recours amiable.



* Sur le bien fondé du refus prise en charge de la maladie déclarée au titre de la législation professionnelle et la demande d'expertise :



Aux termes de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale : « ...est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladie professionnelle et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.



Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée de l'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime.



Peut également être reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée par un tableau des maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle ci ou une incapacité permanente d'un taux évalué dans les conditions de l'article L. 434-2 et au moins égal à un pourcentage déterminé.



Dans les cas mentionnés aux deux précédents alinéas, la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles.... ».



En l'espèce, M. [T] [B] a déclaré des « lombosciatalgies chroniques » sur la base du certificat médical initial constatant une « lombosciatique chronique ».



Si aucun tableau de maladie professionnelle n'a été précisé par le médecin rédacteur du certificat médical initial du 18 mars 2020, il ressort de la fiche de concertation médico-administrative que le médecin conseil a instruit la demande de reconnaissance sur le fondement du tableau n°98 relatif à la maladie « sciatique par hernie discale L4-L5 ou L5-S1 avec atteinte radiculaire de topographie concordante » en se basant notamment sur un compte rendu d'IRM lombaire du 11 janvier 2020.

Le médecin conseil, ainsi qu'il le précise par note du 22 juin 2022, a déterminé le tableau applicable au regard des éléments du dossiers connus à ce stade, étant observé qu'il ne peut être procédé à une instruction hors tableau que si la pathologie n'est pas désignée par un tableau de maladies professionnelles.

Or, il ressort du questionnaire assuré maladie professionnelle, que M. [T] [B] a indiqué devoir porter seul et sans outils de levage des machines pouvant peser jusqu'à 90 kilogrammes. Les lombosciatiques chroniques dont souffre M. [T] [B] ont été causées selon lui, par la manutention de charges lourdes ce qui n'est pas contesté par les parties.



La pathologie présentée par M. [T] [B], à savoir une lombosciatique chronique causée selon lui par la manutention de charges lourdes, entre ainsi dans le cadre du tableau n°98 intitulé « affections chroniques du rachis lombaire provoquées par la manutention manuelle de charges lourdes ».



Il en résulte que la demande de reconnaissance du caractère professionnel de la pathologie présentée a été, à bon droit, instruite par la caisse au titre du tableau précité comme le prévoit l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale et ne pouvait l'être sur le fondement des alinéas 4 et 5 de ce même article.



L'appelant n'apporte aucun élément de nature à établir l'existence d'une atteinte radiculaire ,le compte rendu d'IRM lombaire du 11 janvier 2020 indiquant au contraire: « pas de conflit disco-radiculaire décelable ».



En conséquence et dans la mesure où la condition médicale supplémentaire exigée par le tableau, à savoir une atteinte radiculaire de topographie concordante n'est pas remplie, c'est à bon droit que les premiers juges ont dit que la caisse , qui n'avait pas à saisir un CRRMP, avait justement refusé la demande de prise en charge de la maladie déclarée au titre de la législation sur les risques professionnels, sans qu'une expertise soit nécessaire en l'absence de litige d'ordre médical.



Le jugement déféré sera par voie confirmé en toutes ses dispositions.

* Sur les dépens :



Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.



M. [T] [B], qui succombe, sera condamné aux dépens d'appel.





PAR CES MOTIFS



La Cour, statuant par arrêt contradictoire rendu publiquement par sa mise à disposition au greffe, en dernier ressort,



CONFIRME la décision déférée dans toutes ses dispositions,



Y AJOUTANT,



DÉBOUTE M. [T] [B] du surplus de ses demandes,



CONDAMNE M. [T] [B] aux dépens.







Le Greffier, Le Président,

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