30 janvier 2023
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
RG n° 22/00513

Chambre 1-11 référés

Texte de la décision

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11 référés





ORDONNANCE DE REFERE

du 30 Janvier 2023



N° 2023/ 46





Rôle N° RG 22/00513 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKBIQ







S.A.S. MAT FINANCES





C/



COMPTABLE DU SIE DE [Localité 4] CENTRE COLLINES

S.C.P. BTSG²

MADAME LA PROCUREURE GENERALE



















Copie exécutoire délivrée





le :





à :



- Me Gilles ALLIGIER



- Me Marie-monique CASTELNAU



- Me Roselyne SIMON-THIBAUD



- MADAME LA PROCUREURE GENERALE





Prononcée à la suite d'une assignation en référé en date du 23 Août 2022.





DEMANDERESSE



S.A.S. MAT FINANCES agissant poursuite et diligence de son représentant légal domicilié audit siège es qualité, demeurant [Adresse 3]



représentée par Me Gilles ALLIGIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, Me Kevin GRAZIANI, avocat au barreau de NICE





DEFENDERESSES



Madame MADAME LA COMPTABLE DU SIE DE [Localité 4] COLLINES SERVICE DES IMPOTS DES ENTREPRISES Agissant sous l'autorité du directeur départemental des finances publiques des Alpes Maritimes et du directeur général des finances publiques domicilié es qualité dans les bureaux, demeurant [Adresse 1]



représentée par Me Gilles CHATENET, avocat au barreau de NICE substitué par Me Marie-monique CASTELNAU, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE



S.C.P. BTSG² prise en la personne de Maitre [T] [Y] en qualité de liquidateur de la SAS MAT FINANCES, domicilié en cette qualité audit siège social, demeurant [Adresse 2]



représentée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, Me Florian VIDAL de la SELARL FLORIAN VIDAL AVOCATS, avocat au barreau de NICE



MADAME LA PROCUREURE GENERALE PRES LA COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE, demeurant COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE 20 PLACE VERDUN - 13616 Aix en Provence



non présente, ayant pris des observations écrites











* * * *







DÉBATS ET DÉLIBÉRÉ







L'affaire a été débattue le 28 Novembre 2022 en audience publique devant



Véronique NOCLAIN, Président,



déléguée par ordonnance du premier président.



En application des articles 957 et 965 du code de procédure civile



Greffier lors des débats : Manon BOURDARIAS.



Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Janvier 2023.







ORDONNANCE





Réputée contradictoire,



Prononcée par mise à disposition au greffe le 30 Janvier 2023.





Signée par Véronique NOCLAIN, Président et Manon BOURDARIAS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.






***





Par jugement contradictoire en date du 21 juillet 2022,le tribunal de commerce de Nice a principalement, par décision assortie de l'exécution de droit :

-prononcé la liquidation judiciaire de la SAS Mat Finances;

-désigné monsieur [H] [V] en qualité de juge commissaire;

-désigné la SCP BTSG2, prise en la personne de maître [T] [Y], ès qualités de liquidateur;

-fixé provisoirement au 21 juillet 2022 la date de cessation des paiements;

-dit que la clôture de la procédure sera examinée par le tribunal au plus tard le 21 juillet 2023;

-dit que les dépens seront frais privilégiés de la liquidation judiciaire.



Par déclaration du 1er août 2022, la SA Mat Finances a interjeté appel du jugement sus-dit.



Par actes d'huissier des 23 et 24 août 2022 reçus et enregistrés le 15 septembre 2022, l'appelante a assigné la SCP BTSG2, prise en la personne de maître [T] [Y] ès qualités de liquidateur, madame la comptable du SIE de [Localité 4] Collines et madame la procureure générale près la cour d'appel d'Aix-en-Provence devant le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence au visa des dispositions de 'l'article 524 du code de procédure civile' aux fins d'arrêt de l'exécution provisoire de la décision déférée et dire que les frais du référé seront joints aux frais de la procédure d'appel.



L'affaire est venue en audience le 26 septembre 2022; la présidente de l'audience a mis aux débats des parties la non-application aux procédures collectives des dispositions de l'article 524 du code de procédure civile et l'application des dispositions de l'article R.661-1 du code de commerce; l'affaire a été renvoyée à l'audience du 17 octobre 2022.













La demanderesse a soutenu lors de l'audience du 17 octobre 2022 ses dernières écritures, notifiées aux autres parties le 27 septembre 2022. Elle a confirmé ses prétentions initiales mais sur le fondement des dispositions de l'article R.661-1 du code de commerce.



La SCP BTSG 2 es qualités, par écritures signifiées le 13 octobre 2022 et soutenues à l'audience, a sollicité le rejet des demandes de la société Mat Finances.



Madame le comptable du service des impôts des entreprises de [Localité 4] Centre-Collines, par écritures notifiées le 12 octobre 2022 aux autres parties, a demandé de débouter la SAS Mat Finances de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement déféré.



Par avis du 23 septembre 2022 communiqué aux autres parties, madame la procureure générale a sollicité le rejet de la demande de la SAS Mat Finances aux motifs que cette dernière ne justifiait pas de sa capacité à honorer la dette due au fisc désormais fixée à la somme de 188 127,85 euros, ni le passif chirographaire et privilégié d'un montant de 594 581,48 euros, ses résultats du 1er au 6 juin 2022 et une facilité de caisse de 10 390 euros au 20 juillet 2022 paraissant bien insuffisants. Elle ajoute que le lien avec la SAS ORGAM ne sont pas précisés, que la SAT Mat Finances est une holding et que la SAS ORGAM n'est pas une filiale qui pourrait être liée à elle par une convention de trésorerie.



Par ordonnance avant dire droit du 31 octobre 2022, la magistrate en charge de la procédure a ordonné la communication contradictoire des procès-verbaux des audiences du 30 juin et du 7 juillet 2022 tenues par le tribunal de commerce de Nice afin d'être informée des moyens et faits débattus par les parties et renvoyé l'affaire et les parties à l'audience de référé du 28 novembre 2022.



Par écritures signifiées pour l'audience du 28 novembre 2022 aux parties adverses et maintenues lors des débats, la SAT Mat Finances a confirmé ses prétentions initiales.



Par écritures signifiées le 23 novembre 2022 et maintenues lors des débats, la société BTSG 2 ès qualités a maintenu sa demande de rejet des prétentions de la SAT Mat Finances.



Madame la comptable du Service des Impôts des Entreprises de [Localité 4] Centre Collines s'en est rapportée à ses précédentes écritures.



Par avis du 23 novembre 2022, madame la procureure générale près la cour d'appel a confirmé sa demande de rejet des prétentions de la SAT Mat Finances.



Il sera renvoyé aux écritures des parties pour un exposé complet des moyens soutenus.






MOTIFS DE LA DECISION





Aux termes de l'article R.661-1 du code de commerce, par dérogation aux dispositions de l'article 514-3 du code de procédure civile, le premier président de la cour d'appel, ne peut, en référé, arrêter l'exécution provisoire des décisions mentionnées aux deux premiers aliénas du présent article, notamment s'agissant des décisions de liquidation judiciaire, que lorsque les moyens à l'appui de l'appel paraissent sérieux.



Pour rappel, dans ses écritures signifiées le 27 septembre 2022, la demanderesse affirmait à l'appui de sa demande disposer des moyens sérieux suivants à l'appui de son appel:

-les premiers juges ont bafoué le principe du contradictoire prévu par l'article 16 du code de procédure civile = le tribunal de commerce a ainsi motivé sa décision sur des documents non produits par les parties et qui n'ont pas été communiqués à la SAS Mat Finances; ces documents n'ont pas été communiqués par le Trésor Public, demandeur absent aux débats;



















-les premiers juges n'ont pas caractérisé l'impossibilité manifeste de redressement dans laquelle la SAS Mat Finances aurait été = la SAS Mat Finances a parfaitement justifié de sa capacité de redressement par les pièces comptables produites; en outre, la réalité de sa capacité de redressement est démontrée par la seule relation contractuelle entretenue avec la SAS OGRAM qui exploite le restaurant Koudou Lounge, laquelle a réalisé un chiffre d'affaires de l'ordre de 822 K sur le 1er semestre 2022; la SAS Mat Finances est créancière à l'égard de cette société d'une somme de 32.913,96 euros HT dont une somme de 17.600 euros HT déjà versée à titre d'acompte; son chiffre d'affaires prévisible sur 2022 est de l'ordre de 80.000 euros sur la base d'une prévision réaliste d'un chiffre d'affaires d'Ogram de 2.000.000 euros sur 2022; le tribunal de commerce ne pouvait au surplus ignorer son recours auprès de l'administration fiscale aux fins d'obtenir la prise en compte de sa demande de report de déficits au visa des articles 219 et 222 du code général des impôts tendant à opérer in fine une réduction de la dette fiscale, objet des poursuites, par compensation avec la créance réclamée sur le Trésor Public;

-la décision entraîne des conséquences manifestement excessives = son activité est paralysée et les sociétés dont elle exerçait un mandat social se trouve dépourvue de toute représentation.



La SCP BTSG 2 es qualités avait exposé par écritures signifiées le 13 octobre 2022 que:

-les premiers juges n'ont pas fondé leur décision sur des documents non communiqués à la SAS Mat Finances, notamment un rapport de maître [X] [D] sur la société Alliance Foncière, filiale de la SAS Mat Finances, mais sur l'absence de règlement de la créance fiscale au moyen d'un apport de liquidités réalisé par la société Le Clan des Oliviers, l'analyse des résultats déficitaires de la SAS Mat Finances au titre des exercices clos aux 31 décembre 2020 et 2021 et au 30 juin 2022, les dettes étant de 680.928 euros au 31 décembre 2021, l'état de la trésorerie de la société Mat Finances insuffisante pour régler le passif fiscal (relevé bancaire portant un solde créditeur de 971,62 euros) et les difficultés des filiales de la SAS Mat Finances, sujettes à des procédures d'alerte de niveau 2 de la part du commissaire au compte [W] suite auxquelles elles ont été convoquées en chambre de prévention , leur dirigeant, monsieur [X] [F], faisant le choix de ne pas se présenter; au surplus, les moyens et prétentions, en procédure orale, sont présumés avoir été contradictoirement débattus, sauf preuve contraire, et la SAS Mat Finances n'apporte pas de preuve de l'absence de débat sur l'ensemble de ces éléments;

-l'ensemble des éléments comptables et de trésorerie ne permet pas de remettre en cause l'analyse du tribunal de commerce de Nice quant à l'absence de possibilité de redressement de la SAS Mat Finances.

La juridiction a examiné dans sa décision avant dire droit les moyens exposés par la demanderesse s'agissant du non-respect par le tribunal de commerce du principe du contradictoire en ces termes: ' la lecture du jugement déféré permet de constater que les premiers juges ont retenu, pour prononcer la liquidation judiciaire de la SAS Mat Finances, les éléments comptables et de trésorerie communiqués par les parties mais également le fait que la SAS Le Clan des Oliviers n'avait pas apporté la somme de 120.000 euros tel qu'annoncé par le dirigeant de la SAS Mat Finances et que 'les autres filiales de la SAS Mat Finances présentant des difficultés ont été convoquées par la chambre de prévention du tribunal de commerce de Nice suite aux procédures d'alerte de niveau 2 diligentée par monsieur [G] [W], commissaire aux comptes pour la SAS Alliance Foncière, SAS Capital Invest et la SAS Foncière des Alpages, ces sociétés n'ont pas déposé leurs comptes et ne se sont pas présentées à la convocation du président du tribunal de commerce de [Localité 4]'; les premiers juges ont retenu que les SAS Mat Finances ne disposait pas d'un actif disponible suffisant et que 'sa situation financière et celles de ses filiales étant particulièrement obérées, suite à de nombreuses plaintes reçues par le président du tribunal de commerce de Nice contre sa filiale la SAS Alliance Foncière'. La SAS Mat Finances affirme que les premiers juges n'ont pas respecté le principe du contradictoire en fondant leur décision sur des documents s'agissant de 'ses filiales' non versés aux débats. La lecture de la pièce 8 de la SAS Mat Finances permet de constater que des éléments concernant les 'filiales' de la SAS Mat Finances ont été mis oralement au débat par le tribunal lors l'audience du 30 juin 2022 , que l'affaire a été renvoyée à l'audience du 7 juillet 2022, que l'avocat de la SAS Mat Finances a adressé un courrier au tribunal de commerce de Nice le 1er juillet 2022 afin que soient produits les documents établissant les éléments mis oralement au débat le 30 juin 2022 et qu'aucune réponse ne semble avoir été apportée à cette demande. Or, en procédure orale, le juge se fonde sur un fait qui n'est pas compris

















dans le débat dès lors que ce fait n'apparaît ni dans les écritures des parties ni dans les pièces produites. En l'espèce, les seuls éléments communiqués dans le présent référé ne permettent pas de savoir dans quels termes se sont tenues les audiences du 30 juin et du 7 juillet 2022 ni la réponse apportée par le tribunal de commerce de Nice à l'interrogation de l'avocat de la SAS Mat Finances quant aux éléments évoqués au sujet de ses ' filiales' . Afin que la juridiction puise être parfaitement informée sur ce qui a pu être débattu et communiqué contradictoirement, il y a lieu d'ordonner la réouverture des débats afin de consultation des notes d'audiences du tribunal de commerce de Nice des 30 juin et 7 juillet 2022".



La communication des procès-verbaux des audiences du tribunal de commerce de Nice a été faite; ces procès-verbaux ne comportent aucune mention écrite utile au débat sur le respect du principe du contradictoire tel que ci-dessus rappelé.



La demanderesse soutient que les éléments relatifs à ses filiales n'apparaissent pas comme lui ayant été communiqués et qu'ils relèvent incontestablement 'd'une initiative d'enquête du président du tribunal de commerce transmise en toute clandestinité à la formation de jugement du tribunal de commerce de Nice' malgré la confidentialité attachée à ceux-ci; elle affirme n'avoir pas été en mesure de prendre connaissance de ces éléments et d'en débattre, ce qui justifierait la réformation de la décision pour violation du principe du contradictoire.



La SCP BTSG 2 expose dans ses dernières écritures maintenues le 28 novembre 2022 que les procédures d'alertes mises en oeuvre par le commissaire aux comptes [W] au sujet des filiales de la société Mat Finances ont été non seulement adressées au président du tribunal de commerce de Nice, qui en a fait mention lors des débats, mais également nécessairement à la société Mat Finances et son dirigeant dans le respect des dispositions des alinéas 1 et 2 de l'article L.234-2 du code de commerce et ce, avant même information du président du tribunal de commerce, qu'il ne peut donc y avoir aucune critique sérieuse à ce sujet et que le principe du contradictoire n'a donc pas été bafoué. Elle ajoute que le tribunal n'a au surplus pas fondé sa décision sur des éléments non débattus contradictoirement.



Les éléments ci-dessus exposés par la SCP BTSG 2 remettent en cause les affirmations de la SAS Mat Finances quant à la violation du principe du contradictoire par le tribunal de commerce de Nice par elle alléguée et à ce stade du référé, permettent de dire que le moyen soulevé par la demanderesse à ce titre ne paraît pas sérieux.



Quant aux moyens présentés par la SAS Mat Finances au sujet de ses perspectives de redressement, ils sont sérieusement contrariés par les éléments soutenus en défense à savoir= l'absence de document comptable probant au soutien du prévisionnel remis par la société, l'entrave du dirigeant aux fonctions du commissaire aux comptes, le défaut de dépôt des comptes annuels de la société et de ses filiales, l'absence de sincérité des comptes sociaux, l'absence de coopération du dirigeant au déroulement de la mission du liquidateur, l' absence de liste du passif alors que plusieurs créanciers se sont déclarés spontanément notamment au titre d'actes d'escroquerie commis par la société et son dirigeant, le passif déclaré étant estimé à ce jour à la somme de 677.111,96 euros. Ces éléments ne permettent pas de dire à ce stade que les moyens soutenus par la SAS Mat Finances au soutien de son appel ne paraissent pas séreux.



Quant au moyen relatif à l'existence d'un risque de conséquences manifestement excessives, il n'est pas opérant, cette condition du bien-fondé de la demande n'étant pas reprise par l'article R.661-1 du code de commerce précité.



La demande d'arrêt de l'exécution provisoire sera donc écartée.



Les dépens du référé seront frais privilégiés de la procédure collective.















PAR CES MOTIFS,





Statuant en référés, après débats en audience publique, par décision réputée contradictoire



- Ecartons la demande d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement déféré ;



- Disons que les dépens de l'instance seront frais privilégiés de la procédure collective.



Ainsi prononcé par la mise à disposition de la présente décision au greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 30 janvier 2023, date dont les parties comparantes ont été avisées à l'issue des débats.





LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.