25 janvier 2023
Cour d'appel de Montpellier
RG n° 19/08383

2e chambre sociale

Texte de la décision

Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 25 JANVIER 2023







Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 19/08383 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OOR7



Auquel a été joint le dossier RG 19/8429



ARRÊT n°



Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 DECEMBRE 2019

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NARBONNE - N° RG F 18/00265







APPELANT :



UNEDIC DELEGATION AGS CGEA de [Localité 8]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représentée par Me Michel PIERCHON, avocat au barreau de MONTPELLIER







INTIMES :



Monsieur [T] [L]

né le 15 Mars 1995 à [Localité 7]

[Adresse 6]

[Localité 2]



Représenté par Me Anthony MOTTAIS de la SELARL DERBY AVOCATS, avocat au barreau de CAEN, substitué par Me Romuald PALAO, avocat au barreau de BAYONNE,



Maître [R] [B], ès qualité d mandataire liquidateur de la SASP Racing Club Narbonne Méditerranée.

[Adresse 5]

[Localité 3]



Non constituée



Ordonnance de clôture du 02 Novembre 2022



COMPOSITION DE LA COUR :



En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 NOVEMBRE 2022, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :



Monsieur Jean-Pierre MASIA, Président

Monsieur Jacques FOURNIE, Conseiller

Madame Magali VENET, Conseiller

qui en ont délibéré.



Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER





ARRET :



- réputé contradictoire ;



- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;



- signé par M. Jean-Pierre MASIA, Président, et par Mme Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.








*

* *







EXPOSE DU LITIGE



Le 10 avril 2017, M. [T] [L] a été engagé par la Sasp Racing Club Narbonne Méditerranée en qualité de joueur de rugby espoir suivant un contrat à durée déterminée couvrant la saison sportive 2017/2018.



Le même jour, les parties ont conclu un contrat de travail à durée déterminée avec effet au 1er juillet 2018 pour les saisons sportives 2018/2019 et 2019/2020. M. [T] [L] y était embauché en qualité de joueur de rugby professionnel. La convention n'a pas été homologuée par la commission juridique de la Ligne Nationale de Rugby.





A l'issue de la saison 2017/2018, la Sasp Racing Club Narbonne Méditerranée, qui évoluait en division Pro D2, a été relégué en fédérale 1.



Par ordonnance du 6 juillet 2018, le président du tribunal de commerce de Narbonne a désigné un administrateur provisoire, constatant le non-remplacement du président du club, celui-ci ayant démissionné depuis le 20 avril 2018.



Par jugement du 18 juillet 2018, le tribunal de commerce de Narbonne a prononcé la liquidation judiciaire du Club et désigné Maître [R] [B] en qualité de liquidateur.



Le 26 juillet 2018, M. [T] [L] a été licencié par le mandataire liquidateur.



Le 30 novembre 2018, M. [T] [L] a saisi le conseil de prud'hommes de Narbonne d'une demande de versement de salaire et d'indemnités pour rupture abusive de son contrat à durée déterminée.



Par jugement du 4 décembre 2019, le conseil a :

- fixé la créance de M. [T] [L] dans la liquidation de la Sasp Racing Club Narbonne Méditerranée à la somme de 1 076,70€ à titre de rappel de salaires,

- condamné Maître [B], en sa qualité de mandataire liquidateur de la Sasp Racing Club Narbonne Méditerranée , à adresser au salarié un bulletin de salaire récapitulatif, le certificat de travail et l'attestation Pôle Emploi rectifiés et conformes au jugement,

- rendu la décision opposable à Maître [B] et à l'Unédic AGS Sud Ouest en leur CGEA de [Localité 8] dans la limite de leurs garanties strictement définies dans la loi du 25 janvier 1985,

- condamné la Sasp Racing Club Narbonne Méditerranée, s'il redevient in bonis, à payer la somme de 1 000€ à M. [T] [L],

- débouté les parties du surplus de leur demandes,

- dit que les dépens seront considérés comme créance privilégiée dans la liquidation judiciaire de la Sasp Racing Club Narbonne Méditerranée pour toutes les sommes hors celle allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour laquelle la société, si elle redevient in bonis, sera condamnée aux dépens.



Le 27 décembre 2019, l'Unedic Délégation AGS CGEA de [Localité 8] a interjeté appel de cette décision. Le recours a été enregistré sous le numéro RG 19/08383.



Le 30 décembre 2019, M. [T] [L] a également interjeté appel de cette décision. Le recours a été enregistré sous le numéro RG 19/08429.



MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES



Vu les dernières conclusions de M. [T] [L] régulièrement déposées au RPVA le 2 juin 2022 par lesquelles il demande à la cour de :

- ordonner la jonction des procédures RG n°19/08429 et RG n°19/08383,

- confirmer le jugement en ce qu'il a fixé au passif de la liquidation judiciaire de la Sasp Racing Club Narbonne Méditerranée les sommes de 1 076,70 € nets au titre de rappel de salaire et 1000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civil,

- l'infirmer en ce qu'il l'a débouté du surplus de ses demandes, fins et conclusions,

- fixer au passif de la Sasp Racing Club Narbonne Méditerranée les sommes de 63 000€ à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail et 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire que l'AGS CGEA devra garantir l'ensemble des sommes visées au présent dispositif,

- ordonner à Me [B] de lui transmettre les bulletins de paie et documents de fin de contrat conformes à la décision à intervenir sous astreint de 50€ par jour de retard passé un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement,

- fixer au passif de la Sasp Racing Club Narbonne Méditerranée les entiers dépens.



Vu les dernières conclusions de l'Unédic Délégation AGS CGEA de [Localité 8] régulièrement notifiées le 4 septembre 2020 aux termes desquelles elle demande à la cour de :

- réformer le jugement en ce qu'il a fixé la créance de M. [T] [L] dans la liquidation judiciaire de la Sasp Racing Club Narbonne Méditerranée à la somme de 1 076,70 € nets à titre de rappel de salaire,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [T] [L] de ses autres demandes, fins et conclusions et notamment de sa demande indemnitaire pour prétendue rupture abusive du contrat de travail,

En tous les cas :

- donner acte à l'Unédic AGS CGEA de ce qu'elle réclame la stricte application des textes légaux et réglementaires,

- rejeter l'appel de M.[T] [L],

- débouter M. [T] [L] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner M. [T] [L] à verser la somme de 1 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.



Vu la signification régulière de la déclaration d'appel le 17 janvier 2020 à Maître [R] [B] en sa qualité de mandataire liquidateur du Club, cette dernière n'ayant pas constitué avocat.



Vu l'ordonnance du 29 août 2022, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la jonction des procédures sous le numéro RG 19/08383.



Vu l'ordonnance de clôture du 2 novembre 2022.



Pour l'exposé des prétentions des parties et leurs moyens, il est renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, à leurs conclusions ci-dessus mentionnées.








MOTIFS DE LA DECISION



Sur le contrat de travail



Le contrat de travail de M. [T] [L], signé le 10 avril 2017 pour les saisons 2018/2019 et 2019/2020, à effet au 1er juillet 2018, prévoyait, en son article 7, que « tout contrat, avenant, accord entre un Club et un joueur non homologué est dépourvu d'existence et d'effets, sous réserve des cas de refus d'homologation pour raisons financières, pour lesquels il sera fait application des dispositions de la convention collective du rugby professionnelle.

Par ailleurs, l'homologation du contrat est une condition préalable à la qualification du Joueur dans les compétitions professionnelles organisées par la LNR (ligue nationale de rugby) ».



L'homologation, ainsi rédigée dans le contrat de travail et acceptée par les deux parties, s'analyse juridiquement comme une condition suspensive du contrat de travail.



Il est relevé que cette condition d'entrée en vigueur est reprise par la convention collective en vigueur qui prévoit, dans son titre II, chapitre 1, article 2.1 que tout contrat, conclu entre un Club et un joueur non homologué est dépourvu d'existence et d'effets, sous réserve des dispositions de l'article 2.3.8.b ci-après relatives aux cas de refus d'homologation pour raisons financières. Il en va de même pour tout avenant, convention, accord, contre-lettre dont l'objet est de compléter le contrat de travail conclu.

Par ailleurs, l'homologation du contrat est une condition préalable à la qualification du joueur dans les compétitions professionnelles organisées par la LNR.



La convention collective du rugby professionnel stipule à son article 2.2.1du titre II, chapitre I que le contrat entre en vigueur à la date et aux conditions prévues au contrat sous réserve de son homologation.



Il s'ensuit que l'homologation conditionne l'entrée en vigueur du contrat de travail pour les joueurs professionnels.



Il est constant que ce contrat de travail en cause n'a pas été homologué par la LNR.



Cela étant, il importe peu que le club ait été relégué en Fédérale 1 et ce d'autant plus qu'aux termes des dispositions spécifiques applicables aux joueurs des clubs promus en 2ème division professionnelle (Titre III de la convention collective et titre III de l'accord collectif statut du joueur et de l'entraîneur de Fédérale 1), l'accord d'adaptation prévus par l'article L.2261-14 du code du travail n'est applicable qu'aux joueurs titulaires d'un contrat de travail homologué par la LNR en cours avec un club relégué/rétrogradé en Fédérale 1. Il s'ensuit que l'accord collectif n'était pas immédiatement applicable à M. [T] [L] dès lors que son contrat n'avait pas été initialement homologué.



Si M. [T] [L] soutient qu'il y a eu un commencement d'exécution du contrat, le planning produit, qui ne comporte aucun nom, est insuffisant pour rapporter la preuve de la réalité d'un travail effectif à compter du 1er juillet 2018.



Par ailleurs, contrairement à ce que soutient M. [T] [L], il ne peut être fait application des effets résultant du refus d'homologation pour raisons financières dès lors qu'il n'y a pas eu de refus d'homologation.



Sur les conditions d'homologation en revanche, c'est à juste titre que l'intéressé invoque que c'est à l'employeur qu'il incombe de soumettre le contrat de travail à homologation et le salarié ne peut se voir opposer un défaut d'homologation résultant de la carence de l'employeur dans l'accomplissement de cette obligation.



Si l'AGS-CGEA justifie par la production de sa pièce n°3 que l'employeur a bien adressé la demande d'homologation à la ligue compétente, force est de constater que la responsable du pôle suivi des effectifs et relations sociales affirme que l'employeur n'a pas fourni le certificat médical du joueur lequel est impératif pour l'homologation.



Le défaut d'homologation est donc au moins partiellement imputable à l'employeur. Cette carence ne permet pas de rendre le contrat valide mais ouvre droit pour l'intéressé à la réparation du préjudice résultant du défaut d'homologation.



En l'espèce, le préjudice correspond à l'application des termes de l'avenant à compter du 1er juillet 2018. M. [T] [L] est donc fondé à solliciter la fixation au passif de la liquidation judiciaire du club narbonnais la somme de 1 076,70€ net au titre de rappel de salaire.



Le jugement sera donc confirmé sur ce point.



Faute d'homologation ou de commencement d'exécution du contrat, le contrat de travail n'a pu produire d'effet du 10 avril 2017. La rupture des relations contractuelle ne s'analyse donc pas comme une rupture abusive d'un contrat de travail.



En conséquence, M. [T] [L] sera débouté de sa demande de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, par confirmation du jugement.





Il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.





PAR CES MOTIFS



La Cour,



Confirme le jugement du 4 décembre 2019 rendu par le conseil de prud'hommes de Narbonne en toutes ses dispositions.



Y ajoutant :



Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;



Dit que les dépens d'appel seront déclarés frais privilégiés de liquidation judiciaire.



LE GREFFIER LE PRESIDENT

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