25 janvier 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-83.435

Chambre criminelle - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2023:CR00094

Titres et sommaires

PEINES - Peines correctionnelles - Peine d'emprisonnement prononcée pour un délit - Peine d'emprisonnement avec sursis probatoire - Jugement contradictoire - Révocation du sursis probatoire - Eléments à considérer - Manquements ou infractions nouvelles commis à compter du jour où la décision est devenue exécutoire

Pour apprécier la révocation d'un sursis probatoire, prononcé par jugement contradictoire, le juge de l'application des peines doit prendre en compte les manquements ou infractions nouvelles, commis à compter du jour où la décision est devenue exécutoire, dès lors que ces obligations ont été notifiées à l'audience à l'intéressé, indépendamment du rappel de ces obligations auquel le juge de l'application des peines peut procéder selon l'article R. 59 du code de procédure pénale

Texte de la décision

N° V 22-83.435 F-B

N° 00094


ECF
25 JANVIER 2023


CASSATION


M. BONNAL président,








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 25 JANVIER 2023



Le procureur général près la cour d'appel de Riom a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'application des peines de ladite cour d'appel, en date du 26 avril 2022, qui a prononcé sur un sursis probatoire.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de Mme Guerrini, conseiller référendaire, et les conclusions de Mme Mathieu, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 décembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Guerrini, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.




Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Par jugement contradictoire du 6 juin 2019, le tribunal correctionnel a déclaré M. [S] [F] coupable de faits de diffusion de message violent, pornographique ou contraire à la dignité accessible à un mineur, et l'a condamné à dix-huit mois d'emprisonnement dont douze mois assortis du sursis probatoire pendant deux ans.

3. Par jugement du 3 février 2022, le juge de l'application des peines a révoqué l'intégralité de ce sursis probatoire. Pour justifier cette décision, le jugement relève que, lors de sa condamnation, le demandeur a été averti, par le président de la juridiction, des obligations auxquelles il était astreint et des conséquences de leur manquement. Pour révoquer ce sursis, le juge de l'application des peines a pris en considération, d'une part, la commission, par le demandeur, d'infractions pénales le 17 août 2020 et le 10 décembre 2020, au cours du délai d'épreuve, et, d'autre part, la circonstance qu'il n'a suivi qu'à compter de 2021 les soins auxquels il était astreint.

4. M. [F] et le ministère public ont relevé appel de cette décision.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a infirmé la décision du juge de l'application des peines de révocation du sursis probatoire de M. [F], au motif que les manquements aux obligations, et les nouvelles infractions, retenus par le premier juge ont été commis avant que lui soient notifiées les obligations de la mise à l'épreuve, de sorte que jusqu'à cette date, ils ne pouvaient être pris en compte, alors que ces manquements doivent s'apprécier à compter du caractère exécutoire de la condamnation, de même que les nouvelles infractions commises pendant le délai d'épreuve, la notification des obligations par le juge de l'application des peines prévue à l'article R. 59 du code de procédure pénale n'étant que facultative, outre que M. [F] présent à l'audience de jugement, avait reçu notification de ses obligations par le président du tribunal correctionnel.







Réponse de la Cour

Vu les articles 132-41 du code pénal, 742 et R. 59 du code de procédure pénale :

6. Selon le premier de ces textes, lorsque la juridiction de jugement ne prononce pas l'exécution provisoire, la probation est applicable à l'expiration des délais d'appel du ministère public et du prévenu.

7. Selon le troisième, le juge de l'application des peines peut convoquer le condamné pour lui rappeler les obligations particulières auxquelles il est soumis et lui notifier, le cas échéant, des obligations particulières qu'il ordonne.

8. Selon le deuxième, lorsque le condamné ne se soumet pas aux mesures de contrôle ou aux obligations particulières auxquelles il est astreint au titre de la probation, ou lorsqu'il a commis une infraction suivie d'une condamnation à l'occasion de laquelle la révocation du sursis n'a pas été prononcée, le juge de l'application des peines peut ordonner la prolongation du délai de probation ou révoquer en partie ou en totalité le sursis.

9. Pour infirmer le jugement et ordonner la prolongation du délai d'épreuve pour une durée d'un an, la chambre de l'application des peines énonce que le juge de l'application des peines ne pouvait prendre en considération les infractions pénales commises par le condamné avant le 15 décembre 2020, date à laquelle les obligations du jugement de condamnation lui ont été notifiées, ni ses manquements, avant cette date, aux obligations auxquelles il était astreint, au titre de la probation.

10. En prononçant ainsi, alors que les obligations auxquelles le condamné était astreint ont été portées à sa connaissance lors du prononcé du jugement de condamnation du 6 juin 2019 et sont devenues exécutoires à l'expiration du délai d'appel contre celui-ci, indépendamment de la notification qui lui a été faite de nouveau le 15 décembre 2020 par le juge de l'application des peines, la chambre de l'application des peines a méconnu les textes susvisés.

11. La cassation est, dès lors, encourue.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'application des peines de la cour d'appel de Riom, en date du 26 avril 2022, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'application des peines de la cour d'appel de Lyon, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'application des peines de la cour d'appel de Riom et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille vingt-trois.

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