25 janvier 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 19-25.478

Première chambre civile - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2023:C100057

Titres et sommaires

CONTRATS ET OBLIGATIONS CONVENTIONNELLES - Convention constatant une obligation perpétuelle - Nullité - Possibilité d'y mettre fin unilatéralement - Cas - Exclusion - Pacte d'associés conclu pour la durée de vie de la société

Il résulte de la combinaison de l'article 1134, alinéa 1, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et de l'article 1838 du même code que la prohibition des engagements perpétuels n'interdit pas de conclure un pacte d'associés pour la durée de vie de la société, de sorte que les parties ne peuvent y mettre fin unilatéralement


CONTRATS ET OBLIGATIONS CONVENTIONNELLES - Conventions qui ont pour objet de créer des droits ou de renoncer à des droits sur une succession non encore ouverte - Clause constituant une condition essentielle et déterminante - Nullité - Portée

Aux termes de l'article 722 du code civil, les conventions qui ont pour objet de créer des droits ou de renoncer à des droits sur tout ou partie d'une succession non encore ouverte ou d'un bien en dépendant ne produisent effet que dans les cas où elles sont autorisées par la loi. Lorsque la nullité en résultant n'affecte qu'une ou plusieurs clauses de l'acte, elle n'emporte sa nullité en son entier que si cette ou ces clauses en constituent une condition essentielle et déterminante

Texte de la décision

CIV. 1

SG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 25 janvier 2023




Cassation partielle


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 57 FS-B

Pourvoi n° M 19-25.478




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 25 JANVIER 2023

M. [R] [F], domicilié [Adresse 5], a formé le pourvoi n° M 19-25.478 contre l'arrêt rendu le 17 octobre 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 3-4), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [W] [F], domiciliée [Adresse 4],

2°/ à M. [G] [F], domicilié [Adresse 2],

3°/ à Mme [C] [F], domiciliée [Adresse 3],

4°/ à M. [I] [F], domicilié [Adresse 7],

5°/ à Mme [B] [F], domiciliée [Adresse 6],

6°/ à la Société centrale de réalisations immobilières promotions, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],

7°/ à la société Socri immo, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits de la société HC ,

défendeurs à la cassation.

La Société centrale de réalisations immobilières promotions,la société Socri immo et M. [I] [F] ont formé un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt.

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Les demandeurs au pourvoi incident éventuel invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Buat-Ménard, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [R] [F], de la SCP Spinosi, avocat de M. [I] [F], de Société centrale de réalisations immobilières promotions et de la société Socri immo, et l'avis de Mme Caron-Deglise, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 décembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Buat-Ménard, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, Conseiller doyen, Mmes Antoine, Beauvois, Dard et Poinseaux, M. Fulchiron, conseillers, M. Duval et Mme Azar, conseillers référendaires, et Mme Layemar, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 17 octobre 2019), par acte du 30 janvier 2010, M. [I] [F] et ses cinq enfants, M. [R] [F], Mme [W] [F], Mme [B] [F], M. [G] [F] et Mme [C] [F], ainsi que la société HC, actionnaires de la société par actions simplifiée Société centrale de réalisations immobilières promotions (la société Socri promotions), ont conclu un contrat intitulé « pacte d'actionnaires », qui prévoit ce qui devra être mis en oeuvre lorsque M. [I] [F] ne sera plus associé du groupe Socri afin que le groupe reste au sein de la famille, ainsi que des dispositions devant immédiatement régir la vie de la société et les actes des associés. Par lettre du 23 février 2017, M. [I] [F] et la société HC ont notifié à M. [R] [F] la résolution unilatérale du pacte d'actionnaires.

2. M. [R] [F] a assigné M. [I] [F] et la société HC, en présence de Mme [W] [F], Mme [B] [F], M. [G] [F], Mme [C] [F], ainsi que de la société Socri promotions, afin qu'il soit jugé que la résolution du pacte avait été mise en œuvre de manière abusive et qu'elle était irrégulière et inefficace. Mme [B] [F] a également résilié de façon unilatérale le pacte d'actionnaires.

Examen des moyens

Sur le moyen, pris en ses deuxième à quatrième branches, du pourvoi incident, qui est préalable


3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Sur le moyen, pris en sa première branche, du pourvoi incident

Enoncé du moyen

4. Les sociétés Socri promotions et Socri Immo, celle-ci venant aux droits de la société HC, et M. [I] [F] font grief à l'arrêt de dire que le pacte du 30 janvier 2010 est un pacte d'associés et, partant, de rejeter la demande en nullité de ce pacte formée par M. [I] [F], la société HC et Mme [B] [F], alors « qu'une stipulation ayant pour objet d'attribuer un droit éventuel sur tout ou partie d'une succession non ouverte constitue un pacte sur succession future prohibé par la loi ; qu'en l'espèce, en retenant que le pacte du 30 janvier 2010 n'est pas un pacte sur succession future, lorsqu'elle relevait que "l'article 5 […] énonce une disposition relative à un bien futur de la succession de Monsieur [I] [F] dans la mesure où elle prévoit les modalités de remboursement de son compte courant d'actionnaire lors de l'ouverture de sa succession", la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article 722 du code civil. »




Réponse de la Cour

5. Aux termes de l'article 722 du code civil, les conventions qui ont pour objet de créer des droits ou de renoncer à des droits sur tout ou partie d'une succession non encore ouverte ou d'un bien en dépendant ne produisent effet que dans les cas où elles sont autorisées par la loi.

6. Lorsque la nullité en résultant n'affecte qu'une ou plusieurs clauses de l'acte, elle n'emporte sa nullité en son entier que si cette ou ces clauses en constituent une condition essentielle et déterminante.

7. La cour d'appel a retenu que, si l'article 5 du pacte d'actionnaires énonçait une disposition relative à un bien futur de la succession de M. [I] [F] dans la mesure où elle prévoyait les modalités de remboursement de son compte courant d'actionnaire lors de l'ouverture de sa succession, ce pacte ne portait pas, en ses autres dispositions, sur les biens meubles ou immeubles de cette succession, mais avait pour objectif de définir la stratégie de gestion que devraient adopter ses héritiers lorsque M. [I] [F] se serait retiré des affaires ou serait décédé, afin de pérenniser le groupe Socri et de préserver les intérêts de chacun d'entre eux.

8. Elle a relevé que l'examen des quatorze autres articles de ce pacte démontrait que celui-ci traitait notamment de la stratégie d'entreprise, de la responsabilité des descendants, de la rémunération des mandats sociaux, de la prise de décisions collectives, de l'embauche de certains collaborateurs, du fonctionnement des holdings familiales, de la cession des actions entre descendants, des droits sociaux dérivés, de la politique de distribution des dividendes, des engagements de non-concurrence, des droits de préférence, de l'arbitrage et de la médiation en cas de mésentente entre descendants.

9. Elle a estimé que, dans ce contexte, l'article 5 n'avait été conçu que comme une des mesures de gestion de la société au décès de M. [I] [F].

10. Ayant ainsi fait ressortir que l'article 5 n'était pas un élément essentiel du pacte d'actionnaire, déterminant de l'engagement des parties, la cour d'appel n'a pu qu'en déduire que la demande de nullité du pacte en son entier devait être rejetée.

11. Le moyen est donc inopérant.

Mais sur le moyen, pris en sa deuxième branche, du pourvoi principal

La chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation a délibéré sur ce moyen, sur l'avis de M. Lecaroz, avocat général, après débats à l'audience publique du 20 avril 2022 où étaient présents : Mme Mouillard, président, Mme de Cabarrus, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, Mme Daubigney, M. Ponsot, Mme Fèvre, conseillers, M. Guerlot, Mmes Lion, Tostain, MM. Boutié, Gillis, Maigret, conseillers référendaires, M. Lecaroz, avocat général, Mme Fornarelli, greffier de chambre.

Enoncé du moyen

12. M. [R] [F] fait grief à l'arrêt de déclarer régulière la résiliation du pacte d'actionnaires du 30 janvier 2010 par M. [I] [F] et la société HC, le 23 février 2017, et par Mme [B] [F], le 10 janvier 2018, et de le débouter de sa demande de dommages-intérêts, alors « qu'un pacte d'associés conclu pour la durée de vie de la société, contribuant ainsi à la stabilité du pacte social, est un contrat à durée déterminée ; qu'en jugeant que le pacte d'associés conclu le 30 janvier 2010 pour la durée restant à courir de la société Socri promotions, soit 58 ans, était d'une durée excessive assimilable à une durée indéterminée, la cour d'appel a violé l'article 1134, alinéa 1er, devenu 1103, du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1134, alinéa 1er, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, et l'article 1838 du même code :

13. Il résulte de la combinaison de ces textes que la prohibition des engagements perpétuels n'interdit pas de conclure un pacte d'associés pour la durée de vie de la société, de sorte que les parties ne peuvent y mettre fin unilatéralement.

14. Pour déclarer régulière la résiliation du pacte d'actionnaires du 30 janvier 2010 par M. [I] [F] et la société HC, le 23 février 2017, et par Mme [B] [F], le 10 janvier 2018, et débouter M. [R] [F] de sa demande de dommages-intérêts, l'arrêt, après avoir constaté que l'article 10 du pacte d'actionnaires prévoit que ce contrat est conclu pour la durée de la société, soit pour le temps restant à courir jusqu'à expiration des 99 années à compter de la date de son immatriculation au registre du commerce et des sociétés, qu'au terme de cette première période, le pacte sera automatiquement et tacitement renouvelé pour la nouvelle durée de la société éventuellement prorogée et qu'à l'occasion de chaque renouvellement, toute partie pourra dénoncer le pacte pour ce qui la concerne, en notifiant sa décision au moins six mois à l'avance aux autres parties, et que, selon l'article 11, le pacte liera et bénéficiera aux héritiers, aux légataires, ayants droit, ayants cause de chacune des parties, et notamment leurs holdings familiales, ainsi que leurs représentants légaux, relève que la société Socri promotions a été immatriculée au RCS le 24 janvier 1969, de sorte que la première période de ce pacte expirera le 24 janvier 2068, et qu'en respectant ces dispositions, les descendants de M. [I] [F] ne pourront sortir du pacte qu'à un âge particulièrement avancé, entre 79 et 96 ans selon les signataires du pacte. Il en déduit que cette durée excessive, qui confisque toute possibilité réelle de fin de pacte pour les associés, ouvre aux parties la possibilité de résilier ce pacte unilatéralement à tout moment.

15. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

REJETTE le pourvoi incident éventuel;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare régulière la résiliation du pacte d'actionnaires du 30 janvier 2010, d'une part, par M. [I] [F] et la SARL HC le 23 février 2017, et d'autre part, par Mme [B] [F] le 10 janvier 2018, déboute M. [R] [F] de sa demande de dommages et intérêts et statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 17 octobre 2019, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne les sociétés Socri promotions et Socri Immo et M. [I] [F] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par les sociétés Socri promotions et Socri Immo et M. [I] [F], ainsi que celle formée par M. [R] [F] en ce qu'elle est dirigée contre Mmes [W], [C] et [B] [F] et M. [G] [F] et condamne les sociétés Socri promotions et Socri Immo et M. [I] [F] à payer à M. [R] [F] la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;



Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille vingt-trois

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit, au pourvoi principal, par la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. [R] [F]

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré régulière la résiliation du pacte d'actionnaires du 30 janvier 2010 par M. [I] [F] et la SARL HC le 23 février 2017, et par Mme [B] [F] le 10 janvier 2018 et d'AVOIR débouté M. [R] [F] de sa demande de dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS QUE l'article 1210 du code civil énonce que les engagements perpétuels sont prohibés. Cependant, ce texte est entré en vigueur le 1er octobre 2016 et le code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ne comportait pas de texte similaire. L'alinéa 2 de cet article 1210 et l'article 1211 ont introduit dans la loi les règles jurisprudentielles antérieures, soit que chaque cocontractant peut mettre fin au contrat dans les conditions prévues au contrat à durée indéterminée, soit à défaut de stipulation expresse, à tout moment sous réserve de respect du délai contractuel de préavis, ou d'un délai de préavis raisonnable. A la date de la signature du pacte, un engagement à durée indéterminée n'entraîne pas la nullité de la convention mais chaque contractant peut y mettre fin de façon unilatérale. Dans la présente instance, l'article 10 du pacte d'actionnaire du 30 janvier 2010 précise qu'il est conclu pour la durée de la société, soit pour le temps restant à courir jusqu'à expiration des 99 années à compter de la date de son immatriculation au RCS, qu'au terme de cette première période, le pacte sera automatiquement et tacitement renouvelé pour la nouvelle durée de la société éventuellement prorogée, qu'à l'occasion de chaque renouvellement, toute partie pourra dénoncer le pacte pour ce qui la concerne, en notifiant sa décision au moins 6 mois à l'avance aux autres parties. L'article 11 ajoute que le pacte liera et bénéficiera aux héritiers, aux légataires, ayants droit, ayants cause de chacune des parties et notamment leurs holdings familiales ainsi que leurs représentants légaux. La SAS Socri Promotions ayant été immatriculée au RCS le 24 janvier 1969, la première période du pacte expirera le 24 janvier 2068, c'est-à-dire, en respectant ces dispositions, les descendants de M. [I] [F] ne pourront sortir de ce pacte qu'à un âge particulièrement avancé, 96 ans pour M. [R] [F], 93 ans pour Mme [W] [F], 81 ans pour Mme [B] [F], 80 ans pour M. [G] [F], 79 ans pour Mme [C] [F]. Cette durée excessive avec un renouvellement automatique tous les 99 ans qui confisque toute possibilité réelle de fin de pacte pour les descendants fait que ce contrat est à durée indéterminée. Dès lors, M. [I] [F], la société HC et Mme [B] [F] pouvaient mettre fin, en ce qui les concerne, audit pacte du 30 janvier 2010 à tout moment. Leur résiliation produit donc effet. En conséquence, M. [R] [F] sera débouté de sa demande tendant à dire que ces résiliations sont inefficaces ;

1°) ALORS QUE l'article 10 du pacte d'associé du 30 janvier 2010 stipule qu'il « est conclu pour la durée de la société, soit pour le temps restant à courir jusqu'à expiration des quatre-vingt-dix-neuf (99) années à compter de la date de son immatriculation au Registre du commerce et des sociétés », intervenue le 24 janvier 1969, qu'« au terme de cette première période [soit au 24 janvier 2068] le pacte sera automatiquement et tacitement renouvelé pour la nouvelle durée de la société éventuellement prorogée » et qu'« à l'occasion de chaque renouvellement, toute partie pourra dénoncer le pacte pour ce qui la concerne, en notifiant sa décision au moins six (6) mois à l'avance aux autres parties » ; qu'en affirmant, pour juger que M. [I] [F], la société HC et Mme [B] [F] pouvaient mettre fin à tout moment au pacte d'associé, que ce contrat dont le terme était fixé à la date du 24 janvier 2068 était un contrat à durée indéterminée, la cour d'appel l'a dénaturé en violation des articles 1134, alinéa 1er, devenu 1103, et 1192 du code civil, ensemble le principe selon lequel le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

2°) ALORS QU'un pacte d'associés conclu pour la durée de vie de la société, contribuant ainsi à la stabilité du pacte social, est un contrat à durée déterminée ; qu'en jugeant que le pacte d'associé conclu le 30 janvier 2010 pour la durée restant à courir de la société Socri Promotions, soit 58 ans, était d'une durée excessive assimilable à une durée indéterminée, la cour d'appel a violé l'article 1134, alinéa 1er, devenu 1103, du code civil;

3°) ALORS QU'un engagement n'est pas perpétuel si les parties ont la faculté de se libérer de leurs obligations ; qu'en relevant que l'âge avancé des descendants de M. [I] [F] à la date de survenance du terme en 2068 les privait de toute possibilité réelle de sortir du pacte d'associés, quand la faculté, pour ces derniers, de dénoncer le pacte d'associés à un âge inférieur à leur espérance de vie n'était pas illusoire, la cour d'appel a violé l'article 1134, alinéa 1er, devenu 1103 du code civil;

4°) ALORS QU'en toute hypothèse, dans une société familiale, un engagement n'est pas perpétuel si les parties ou leurs ayants droit ont la faculté de se libérer de leurs obligations ; qu'en relevant que l'âge avancé des descendants de M. [I] [F] à la date de survenance du terme en 2068 les privait de toute possibilité réelle de sortir du pacte d'associés quand les héritiers des enfants de M. [I] [F] seront en toute hypothèse en mesure de dénoncer le pacte d'associé à la survenance du terme, la cour d'appel a violé l'article 1134, alinéa 1er, devenu 1103 du code civil.
Moyen produit, au pourvoi incident éventuel, par la SCP Spinosi , avocat aux Conseils, pour M. [F], les sociétés centrale de réalisations immobiliéres promotions et socri immo

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le pacte du 30 janvier 2010 signé par M. [I] [F], la SARL HC, M. [R] [F], Mme [W] [F], Mme [B] [F], M. [G] [F] et Mme [C] [F], en présence de la SA SOCIETE CENTRALE DE REALISATIONS IMMOBILIERES PROMOTIONS (SOCRI PROMOTIONS) est un pacte d'associés et, partant, d'avoir débouté M. [I] [F], la SARL HC et Mme [B] [F] de leur demande de nullité du pacte du 30 janvier 2010 ;

Aux motifs que « 1. Le pacte d'actionnaires ou d'associés est une convention conclue entre tous, ou certains, des actionnaires ou associés d'une société afin de prévoir la mise en oeuvre d'une stratégie d'investissement ou de gestion, ou les mouvements des titres de la société.

Un pacte sur succession future est un contrat portant sur tout ou partie des biens dépendant de la succession d'une personne encore en vie, soimême ou quelqu'un d'autre.

Dans le préambule du pacte du 30 janvier 2010, il est exposé :

"Le Fondateur, a émis le voeu que ses enfants poursuivent son oeuvre dans le cadre de règles destinées d'une part à permettre la pérennisation du Groupe Socri ainsi que de ses actifs, et d'autre part l'entente entre ses enfants dans le cadre de la stratégie devant présider à la conduite des affaires dudit Groupe Socri, l'intérêt de chacun devant toutefois être garanti par une gestion saine et équilibrée.

C'est la raison pour laquelle, après et comme suite à la transformation de la société en société par actions simplifiées, les parties aux présentes se sont réunies pour déterminer les objectifs à long terme de la société et du groupe qu'elle forme avec ses filiales, ainsi que les principes de gestion et de direction des affaires de celles-ci qui devront être respectés par les enfants de Monsieur [I] [F], une fois que celui-ci ne sera plus associé de la société, ce point ces derniers consentent expressément.

De manière plus générale, les parties conviennent que le présent pacte d'associés fait, dans les relations d'associés, indivisiblement corps avec les statuts de la société. Le présent pacte a pour objet de fixer les règles devant régir les relations d'associés au sein du groupe Socri, une fois le décès du Fondateur intervenu."
Ce pacte ne porte donc pas sur les biens meubles ou immeubles de la succession de Monsieur [I] [F], mais a pour objectif de définir la stratégie de gestion que devront adopter les héritiers au sein du groupe Socri lorsque Monsieur [I] [F] se sera retiré des affaires ou sera décédé, afin de pérenniser le groupe, et de préserver les intérêts de chacun des héritiers.

Certes, l'article 5 relatif à la Créance Fondateur énonce une disposition relative à un bien futur de la succession de Monsieur [I] [F] dans la mesure où elle prévoit les modalités de remboursement de son compte courant d'actionnaire lors de l'ouverture de sa succession.

Toutefois, l'examen des 14 autres articles de ce pacte démontre que cette convention traite notamment de la stratégie d'entreprise, la responsabilité des descendants, la rémunération des mandats sociaux, la prise de décisions collectives, l'embauche de certains collaborateurs, le fonctionnement des holdings familiales, la cession des actions entre descendants, les droits sociaux dérivés, la politique de distribution des dividendes, les engagements de non-concurrence, les droits de préférence, l'arbitrage et la médiation en cas de mésentente entre descendants.

Dans ce contexte, l'article 5 a été conçu comme une des mesures de gestion de la société au décès de Monsieur [I] [F].

Enfin, même si sont utilisés les termes de "Fondateur" et de "Descendants", il ne peut en être tiré aucun argument. En effet, d'après les définitions énoncées à l'article 1 du pacte du 30 janvier 2010, "Descendant" s'applique à toute personne physique ou morale autre que le Fondateur qui est M. [I] [F]. Or la société HC, actionnaire, n'est pas la descendante de M. [I] [F].

Ces termes sont utilisés dans les statuts de la société Socri Promotions du 30 janvier 2010 qui a transformé la SA en SAS ainsi que dans le projet de modification des statuts présenté à l'assemblée générale du 24 juin 2015 de façon identique, soit Fondateur et Descendants, ces derniers étant tous les actionnaires, personne physique ou morale qui ne sont pas le Fondateur.

Il suit de là que le pacte du 30 janvier 2010 est un pacte d'associés » ;

Et que « le pacte d'associés est un contrat qui ne peut déroger aux statuts de la société, ni être contraire à l'intérêt social, ni être contraire aux règles d'ordre public.

Par application des dispositions de l'article 1108 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, quatre conditions sont essentielles pour la validité d'une convention :

-le consentement de la partie qui s'oblige,
-sa capacité à contracter,
-un objet certain qui forme la matière de l'engagement,
-une cause licite dans l'obligation.

Au regard des griefs formulés par M. [I] [F], la société HC et Mme [B] [F], ne sont contesté ni le consentement des parties, ni leur capacité à contracter, ni l'absence d'objet certain au pacte du 30 janvier 2010.

M. [I] [F], la SARL HC et Mme [B] [F] sollicitent la nullité du pacte du 30 janvier 2010, les deux premiers en soutenant qu'il s'agit d'un pacte sur succession future, la troisième en invoquant l'irrégularité de plusieurs clauses dudit pacte.

En premier lieu, il a déjà été explicité et retenu que le pacte du 30 janvier 2010 est un pacte d'associés. Or, un pacte d'associés est une convention licite.

En second lieu, l'illicéité invoquée de certaines clauses, à la supposer établie, n'entraîne pas la nullité de la convention en son entier.

Comme il ne pourra être fait droit à la demande de Mme [B] [F] de nullité du pacte pour illicéité de certaines des clauses, il n'y a lieu d'examiner lesdites clauses.

M. [I] [F], la société HC et Mme [B] [F] seront donc déboutés de leur demande de nullité du pacte du 30 janvier 2010 » ;

1°) Alors que, d'une part, une stipulation ayant pour objet d'attribuer un droit éventuel sur tout ou partie d'une succession non ouverte constitue un pacte sur succession future prohibé par la loi ; qu'en l'espèce, en retenant que le pacte du 30 janvier 2010 n'est pas un pacte sur succession future, lorsqu'elle relevait que « l'article 5 […] énonce une disposition relative à un bien futur de la succession de Monsieur [I] [F] dans la mesure où elle prévoit les modalités de remboursement de son compte courant d'actionnaire lors de l'ouverture de sa succession » (arrêt, p. 7), la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article 722 du code civil ;

2°) Alors que, d'autre part, l'article 3 du pacte du 30 janvier 2010 stipule « qu'à l'ouverture de la succession de Monsieur [I] [F], ses héritiers directs, associés en pleine propriété de la société, notamment par l'effet de la réunion de l'usufruit et de la nuepropriété des actions procéderont en tant que de besoin à la constitution pour chacun d'eux d'une holding familiale […] » ; qu'en énonçant, pour débouter M. [I] [F] de sa demande d'annulation du pacte, que ce dernier n'était pas un pacte sur succession future, la cour d'appel a dénaturé ledit pacte et méconnu l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause, ensemble l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause ;

3°) Alors que, de troisième part, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile en ne répondant pas au moyen, péremptoire, tiré de ce que le pacte du 30 janvier 2010 est irrégulier en la forme en ce que, ajoutant des charges à des donations-partages de 1990 et 1998, il devait être conclu par acte notarié (conclusions d'appel, pp. 36-38) ;

4°) Alors que, de quatrième part, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile en ne répondant pas au moyen, péremptoire, tiré de ce que le pacte du 30 janvier 2010 emportait renonciation à l'action en réduction de sorte qu'à défaut d'avoir été formalisé par acte authentique, il était entaché de nullité (conclusions d'appel, pp. 39-40).

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