24 janvier 2023
Cour d'appel de Lyon
RG n° 20/07241

1ère chambre civile B

Texte de la décision

N° RG 20/07241 - N° Portalis DBVX-V-B7E-NJVM









Décision du

Tribunal de Commerce de SAINT ETIENNE

Au fond

du 24 novembre 2020



RG : 2018J00311





S.A.R.L. CENTRE IMMOBILIER ET D'ASSURANCE



C/



S.A.S. LOCAM

S.A.R.L. PACA INFORMATIQUE BUSINESS SOLUTIONS 06





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 24 Janvier 2023







APPELANTE :



La société CENTRE IMMOBILIER ET D'ASSURANCE

[Adresse 3]

[Localité 1]



Représentée par Me Florence PASSOT de la SELARL ABIVOX AVOCAT, avocat au barreau de LYON, toque : 1872

Assistée de Me Olivier CASTELLACCI de la SELARL NMCG AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de NICE, toque : 116







INTIMEES :



La société LOCAM-LOCATION AUTOMOBILES MATERIELS

[Adresse 4]

[Localité 6]



Représentée par Me Michel TROMBETTA de la SELARL LEXI, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE





Société PACA INFORMATIQUE BUSINESS SOLUTIONS 06 anciennement dénommée PACA BUREAUTIQUE

[Adresse 5]

[Localité 2]



défaillante





* * * * * *





Date de clôture de l'instruction : 03 Février 2022



Date des plaidoiries tenues en audience publique : 22 Novembre 2022



Date de mise à disposition : 24 Janvier 2023





Audience tenue par Olivier GOURSAUD, président, et Bénédicte LECHARNY, conseiller, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,



assistés pendant les débats de Elsa SANCHEZ, greffier





A l'audience, un des membres de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Olivier GOURSAUD, président

- Stéphanie LEMOINE, conseiller

- Bénédicte LECHARNY, conseiller





Arrêt Rendue par défaut rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,



Signé par Olivier GOURSAUD, président, et par Elsa SANCHEZ, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.




* * * *







FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES:



Le 10 novembre 2015, la société Centre immobilier et d'assurance a signé avec la société Paca Bureautique un contrat de fourniture de matériel pour un photocopieur destiné aux besoins de son activité.



Le contrat a été financé par la société Locam sur la base d'un contrat de location longue durée conclu le même jour, moyennant le règlement de 21 loyers trimestriels de 900€ TTC chacun et s'échelonnant jusqu'au 30 décembre 2020.



La société Centre immobilier et d'assurance a signé et tamponné le procès-verbal de livraison et de conformité du matériel le 10 novembre 2015.



Le 27 janvier 2016, la société Centre immobilier et d'assurance a adressé une mise en demeure à la société Paca Bureautique aux fins de résilier le contrat.



Par exploit d'huissier du 3 janvier 2018, la société Locam a fait assigner la société Centre immobilier et d'assurance en paiement des échéances échues et à échoir du contrat devant le tribunal de commerce de Saint-Etienne.



Par exploit d'huissier du 30 juillet 2018, la société Centre immobilier et d'assurance a appelé en cause la société Paca Bureautique



Par jugement du 24 novembre 2020, le tribunal de commerce de Saint-Etienne a :

- constaté l'indivisibilité des contrats souscrits d'une part entre la société Centre immobilier et d'assurance et la société Paca Bureautique et d'autre part, entre la société Centre immobilier et d'assurance et la société Locam,

- dit que la société Paca Bureautique a rempli ses obligations contractuelles vis-à-vis de la société Centre immobilier et d'assurance,

- rejeté la demande de résolution du contrat conclu entre la société Paca Bureautique et la société Centre immobilier et d'assurance,

- rejeté la demande de caducité du contrat de location financière conclu entre la société Centre immobilier et d'assurance et la société Locam,

- constaté que la société Paca Bureautique n'a pas engagé sa responsabilité,

- débouté la société Centre immobilier et d'assurance de sa demande de dommages et intérêts,

- débouté la société Centre immobilier et d'assurance de toutes ses demandes envers la société Paca Bureautique,

- débouté la société Centre immobilier et d'assurance de toutes ses demandes à l'égard de la société Locam,





- débouté la société Centre immobilier et d'assurance de sa demande de réduction de la clause pénale,

- condamné la société Centre immobilier et d'assurance à verser à la société Locam la somme de 15.840€ outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 26 octobre 2017,

- ordonné la restitution par la société Centre immobilier et d'assurance à la société Locam du matériel, objet du contrat de location,

- rejeté la demande d'astreinte,

- débouté la société Paca Bureautique de sa demande de dommages et intérêts,

- condamné la société Centre immobilier et d'assurance à verser à la société Locam la somme de 800€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Centre immobilier et d'assurance à verser à la société Paca Bureautique la somme de 800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les dépens, dont fais de greffe taxés et liquidés à 130,06 € sont à la charge de la société Centre immobilier et d'assurance,

- dit qu'il n'y a pas lieu à ordonner l'exécution provisoire du jugement,

- débouté les sociétés Locam et Paca Bureautique du surplus de leurs demandes.



Par déclaration du 21 décembre 2020, la société Centre immobilier et d'assurance a interjeté appel de ce jugement.



Au terme de ses dernières conclusions notifiées le 20 octobre 2021, la société Centre immobilier et d'assurance demande à la cour de :

- la recevoir en son appel et le déclarer bien fondé,

- infirmer le jugement rendu le 24 novembre 2020 par le tribunal de commerce de Saint-Etienne sauf en ce qu'il a constaté l'indivisibilité des contrats souscrits d'une part entre elle et la société Paca Bureautique et d'autre part, entre elle et la société Locam,

et statuant à nouveau,

à titre principal,

- juger que le contrat de livraison conclu entre elle et la société Paca Bureautique a été résilié par lettre recommandée avec accusé de réception datée du 26 janvier 2016,

- prononcer la caducité du contrat conclu entre elle et la société Locam,

- condamner la société Paca Bureautique au paiement d'une somme de 10.000 € à son profit à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice,

à titre subsidiaire,

- juger que la clause pénale stipulée dans les conditions générales de location est manifestement excessive,

- réduire l'indemnité due à ce titre à un euro symbolique,

en toute hypothèse,

- condamner la société Locam et la société Paca Bureautique solidairement à lui payer la somme de 5.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens distraits au profit de Maître Passot.



La société Centre immobilier et d'assurance expose qu'elle a procédé à la résiliation unilatérale du contrat conclu avec la société Paca Bureautique, en lui notifiant par lettre recommandée avec accusé de réception du 27 janvier 2016, sa volonté de résilier le contrat au motif que le photocopieur livré était obsolète, d'occasion et non conforme à son utilisation.



A l'appui de sa demande de résiliation du contrat dont elle estime qu'il est interdépendant avec le contrat de location souscrit auprès de la société Locam, elle fait valoir que :

- la faute grave du cocontractant autorise la rupture unilatérale du contrat par l'autre partie, sans indemnisation ni préavis, et en l'espèce il est justifié d'une faute suffisamment grave de la société Paca Bureautique,

- en effet, alors qu'aux termes du contrat, la société Paca Bureautique devait lui fournir un photocopieur neuf, elle lui a livré un photocopieur d'occasion, ce qui est démontré par le fait que celle-ci n'a jamais contesté dans le cadre de leurs échanges que le matériel livré était un photocopieur reconditionné,

- le procès-verbal de livraison ne vaut pas reconnaissance de non conformité mais rend seulement exigible le premier loyer et autorise l'organisme financier à régler la facture du fournisseur et ce n'est qu'en utilisant le photocopieur qu'elle s'est aperçue que celui-ci avait déjà été utilisé,

- en outre, le matériel s'est révélé obsolète et défectueux ce que n'a pas contesté la société Paca Bureautique qui lui a d'ailleurs proposé, 16 mois plus tard, de remplacer le matériel défectueux,

- le litige est donc né par la faute de la société Paca Bureautique qui a engagé sa responsabilité contractuelle et lui a occasionné un préjudice qu'il convient de fixer à 10.000 €.



A titre subsidiaire, la société Centre immobilier et d'assurance soutient que la clause pénale de 10% prévue par les conditions générales du contrat de location est manifestement excessive



Au terme de ses conclusions notifiées le 30 juin 2021, la société Locam demande à la cour de :

- juger non fondé l'appel de la société Centre immobilier et d'assurance,

- la débouter de toutes ses demandes,

- confirmer le jugement entrepris,

- condamner la société Centre immobilier et d'assurance à lui régler une nouvelle indemnité de 2. 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner en tous les dépens d'instance et d'appel.



La société Locam soutient que :

- le courrier du 27 janvier 2016 invoqué par l'appelante ne vaut pas titre de résiliation,

- le procès-verbal de livraison signé par la société Centre immobilier et d'assurance et par le fournisseur consacre la conformité du contrat et si le matériel était non-conforme, il appartenait à la société Centre immobilier et d'assurance de ne pas le ratifier,

- en outre, le paiement régulier des échéances et l'utilisation du matériel pendant 15 mois n'est pas compatible avec la délivrance non-conforme depuis l'origine.

- l'indemnité égale au montant des loyers restant à courir à dater de la résiliation ne revêt pas un caractère manifestement excessif.



La société Paca Bureautique, à qui la déclaration d'appel a été signifiée par acte du 4 février 2021, remis en étude d'huissier, puis les conclusions de la société Centre immobilier et d'assurance par exploit du 19 avril 2021 délivré conformément aux dispositions de l'article 659 du code de procédure civile, n'a pas constitué avocat et il convient de statuer par décision par défaut.



L'ordonnance de clôture est intervenue le 3 février 2022.



Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.




MOTIFS DE LA DÉCISION :



Le jugement n'est pas remis en cause en ce qu'il a retenu l'indivisibilité des contrats souscrits entre la société Centre immobilier et d'assurance et la société Paca Bureautique d'une part et entre la société Centre immobilier et d'assurance et la société Locam d'autre part et en ce qu'il a débouté de sa demande de dommages et intérêts la société Paca Bureautique qui ne comparait pas devant la cour.



1. sur la résiliation du contrat de fourniture de matériel et la responsabilité de la société Paca Bureautique :



Les contrats concomitants ou successifs qui s'inscrivent dans une opération incluant une location financière sont interdépendants et sont réputées non écrites les clauses des contrats inconciliables avec cette inter dépendance.



En l'espèce, ainsi que rappelé plus haut le jugement n'est pas remis en cause en ce qu'il a retenu l'indivisibilité des contrats.



La résiliation de l'un quelconque d'entre eux entraîne la caducité, par voie de conséquence, des autres, sauf pour la partie à l'origine de l'anéantissement de cet ensemble contractuel à indemniser le préjudice causé par sa faute ;



La société Centre immobilier et d'assurance se prévaut donc de ce qu'elle a résilié unilatéralement le contrat



S'il n'est pas contestable que la faute grave d'un cocontractant peut justifier la rupture unilatérale du contrat par l'autre partie, cela ne dispense pas celle-ci en cas de désaccord entre les parties de justifier de la réalité et de la gravité des fautes alléguées à l'appui de cette rupture.



Il convient au préalable de constater que la société Centre immobilier et d'assurance ne conclut pas au rejet de la demande en paiement des arriérés de loyer.



Elle verse pour seule pièce justificative de ses prétentions un courrier de son conseil daté du 27 janvier 2016 adressé à la société Paca Bureautique mentionnant que le matériel loué serait quasiment obsolète et surtout d'occasion et qu'elle entend résilier le contrat, ce qui est manifestement insuffisant.



La cour reprend en effet à son compte les motifs du premier juge selon lesquels la société Locam n'apporte aucun élément ou constat de la défaillance du matériel hormis ce courrier qui ne prouve rien.



Le procès-verbal de livraison et de conformité ne porte aucune mention concernant la non conformité du matériel livré ou le fait qu'il s'agirait d'un matériel d'occasion.



La société Centre immobilier et d'assurance n'est par ailleurs pas fondée à soutenir que la société Paca Bureautique n'aurait jamais contesté cette défectuosité alors qu'il résulte au contraire des énonciations du jugement dont appel que devant le premier juge, la société Paca Bureautique avait contesté la demande en mentionnant notamment que c'était par un appel téléphonique du 30 octobre 2017 que la société Centre immobilier et d'assurance lui avait fait part d'un problème sur le copieur, qu'elle avait accepté de remplacer le matériel défectueux sans délai mais que la société Centre immobilier et d'assurance avait changé d'avis, que celle-ci avait déclaré arbitrairement que le matériel était défectueux et qu'aucun technicien n'avait pu se rendre sur les lieux et constater ce fait et que le service technique envoyé à deux reprises pour vérifier ce fait et réparer éventuellement le photocopieur n'avait pas été reçu sur les lieux.



Au vu de l'ensemble de ces éléments et en l'absence de plus amples justificatifs, la cour ne peut que constater que la société Centre immobilier et d'assurance ne rapporte pas la preuve d'une faute ou d'une inexécution fautive grave justifiant la résiliation du contrat de fourniture du photocopieur et le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté la demande tendant à constater la résiliation de ce contrat et par voie de conséquence la demande de caducité du contrat de location financière avec la société Locam.



Pour le surplus, par des motifs pertinents que la cour adopte, le premier juge après avoir rappelé la clause de résiliation du contrat à défaut de règlement des loyers impayés et constaté le défaut de paiement de plusieurs échéances de loyers malgré une mise en demeure, a justement jugé que le contrat se trouvait de plein droit résilié, condamné la société Centre immobilier et d'assurance, en exécution des clauses du contrat, à lui payer les loyers impayés et à échoir et ordonné la restitution du matériel loué.



Il a également à bon droit, en l'absence de faute prouvée à l'encontre de la société Paca Bureautique, débouté la société Centre immobilier et d'assurance de sa demande en paiement de dommages et intérêts formée à l'encontre de cette société.



2. sur la demande de réduction de clause pénale :



Selon l'article 1152 2ème alinéa dans sa version applicable à la cause, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire, toute stipulation contraire étant réputée non écrite.



En l'espèce, au regard de l'immobilisation du matériel financé par la société Locam, la clause pénale stipulant le paiement d'une somme égale à la totalité des loyers restant à courir jusqu'à la fin du contrat et majorée d'une clause pénale de 10 % ne peut être considérée comme manifestement excessive.



Le jugement est également confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.



3. sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :



Le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.



La cour estime que l'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société Locam en cause d'appel et lui alloue à ce titre la somme de 1.000 €.



Les dépens d'appel sont à la charge de la société Centre immobilier et d'assurance qui succombe en sa tentative de remise en cause du jugement.





PAR CES MOTIFS

LA COUR



statuant dans les limites de l'appel,



Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,



y ajoutant,



Condamne la société Centre immobilier et d'assurance à payer à la société Locam la somme de 1.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;



Condamne la société Centre immobilier et d'assurance aux dépens d'appel.





La greffière, Le Président,

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