12 janvier 2023
Cour d'appel de Paris
RG n° 22/12006

Pôle 1 - Chambre 2

Texte de la décision

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 2



ARRÊT DU 12 JANVIER 2023



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/12006 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGBGY



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 24 Juin 2022 -Président du TC de PARIS 04 - RG n° 2022000842





APPELANTE



S.A.S. GALIENA CAPITAL, RCS de Paris n°501 763 163



[Adresse 1]

[Localité 3]



Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Assistée à l'audience par Me Anne-Carine ROPARS-FURET, avocat au barreau de PARIS, toque : R052





INTIME



M. [W] [C]



[Adresse 2]

[Localité 4]



Représenté par Me Emmanuel JARRY de la SELARL RAVET & ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0209

Assisté à l'audience par Me Georges JOURDE, avocat au barreau de PARIS, toque : T06





COMPOSITION DE LA COUR :



L'affaire a été débattue le 01 Décembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :



Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller

Michèle CHOPIN, Conseillère



qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Thomas RONDEAU, Conseiller, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.







Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL









ARRÊT :



- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.



- signé par Thomas RONDEAU, Conseiller, pour la Présidente de chambre empêchée et par Saveria MAUREL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.




*****



EXPOSÉ DU LITIGE



La société Scentys, fondée en 2004, développe et commercialise notamment des diffuseurs de parfum. Elle a été créée par MM. [C] et [P].



M. [C] était le directeur général de cette société jusqu'au 12 octobre 2021.



La société Galiena Capital est une société de gestion de portefeuille, qui gère notamment un fonds d'investissement 'FPCI TIP', entré au capital de Scentys en 2015.



A été conclu à cette occasion, le 25 février 2015, un pacte d'actionnaires entre MM. [C], [P], le FPCI TIP et les autres actionnaires, stipulant notamment, en son article 13, que l'actionnaire majoritaire, FPCI TIP, pourrait offrir à un tiers acquéreur intéressé par la totalité des titres tous les titres, y compris ceux que le fonds ne détiendrait pas, au prix de l'offre.



Le 9 juillet 2021, M. [C] a été informé que le FPCI TIP, géré par Galiena Capital, avait reçu une offre d'acquisition de 100 % des titres de la part d'un autre FPCI géré par Access Capital Partners.



M. [C] fait état de ce que l'offre émanait en réalité non d'Access Capital Partners qui n'a pas fait d'offre mais de deux fonds gérés par Galiena Capital, suspectant ainsi une opération frauduleuse permettant l'acquisition de sa société à un prix sous évalué.



Par requête du 3 novembre 2021, reçue au greffe le 04 novembre 2021, M. [W] [C] a saisi le président du tribunal de commerce de Paris aux fins de mesure d'instruction in futurum au siège de la société Galiena Capital, au visa de l'article 145 du code de procédure civile.



Par ordonnance du 19 novembre 2021, il a été fait droit à cette demande et la société [E] [L] et [O] [D], huissier audiencier du tribunal de commerce de Paris, a été désignée pour exécuter la mesure.



La société [E] [L] et [O] [D] a effectué sa mission les 29 novembre et 9 décembre 2021 et en a dressé constat.



Par acte du 07 janvier 2022, la société Galiena Capital a assigné M. [C] devant le juge des référés du tribunal de commerce de Paris aux fins de voir :

- rétracter l'ordonnance du 19 novembre 2021 rendue par le président du tribunal de commerce de Paris dans toutes ses dispositions ;

- annuler toutes les mesures d'instruction subséquentes qui ont été diligentées le 9 décembre 2021 par la société [E] [L] & [O] [D], huissiers de justice, en exécution de ladite ordonnance du 19 novembre 2021 ;

- ordonner la restitution à la société Galiena capital de tous les éléments saisis lors de la mesure diligentée le 9 décembre 2021, actuellement conservés sous séquestre par la société [E] [L] & [O] [D], huissiers de justice ;

- ordonner la destruction des supports sur lesquels les éléments saisis ont été conservés par la société [E] [L] & [O] [D], huissiers de justice, ainsi que de toute copie physique ou numérique du procès-verbal qui a été rédigé par cette dernière ;

- condamner par provision M. [C] à payer la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts à la société Galiena capital ;

- condamner M. [C] aux entiers dépens d'instance et à payer à la société Galiena capital la somme de 25.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



En réplique, M. [C] a sollicité le rejet des demandes, la levée du séquestre, la condamnation de la demanderesse à lui verser 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et sa condamnation aux dépens.



Par ordonnance contradictoire du 24 juin 2022, le juge des référés du tribunal de commerce de Paris a :



- débouté la société Galiena Capital de sa demande de rétractation ;

- dit que la levée de séquestre des pièces obtenues lors des opérations de constat par l'huissier instrumentaire doit se faire conformément aux article R. 153-3 à R. 153-8 du code de commerce ;

- dit que la procédure de levée de séquestre sera la suivante :

- demandé à la société Galiena Capital de faire un tri sur les fichiers des pièces séquestrées en trois catégories :


Catégorie « A » les pièces qui pourront être communiquées sans examen,

Catégorie « B » les pièces qui sont concernées par le secret des affaires et que les défenderesses refusent de communiquer,

Catégorie « C » les pièces que les défenderesses refusent de communiquer mais qui ne sont pas concernées par le secret des affaires ;


- dit que ce tri sera communiqué à la société [E] [L] et [O] [D], en la personne de l'un de ses associés, pour un contrôle de cohérence avec le fichier initial séquestré ;

- dit que pour les pièces concernées par le secret des affaires, la société Galiena Capital, conformément aux articles R. 153-3 à R. 153-8 du code de commerce communiquera au président « un mémoire précisant, pour chaque information ou partie de la pièce en cause, les motifs qui lui confèrent le caractère d'un secret des affaires » ;

- fixé le calendrier suivant :


envoi au président de ce tribunal par la société Galiena Capital avant le 22 juillet 2022 d'un mémoire justifiant le cas échéant du secret des affaires attaché à certaines pièces ;

communication à la société [E] [L] et [O] [D], en la personne de l'un de ses associés, et au président, les tris des fichiers demandés avant le 29 juillet 2022 ;

renvoyé l'affaire, après contrôle de cohérence par l'huissier, à l'audience du 14 septembre 2022 à 14 heures pour réalisation de la levée de séquestre ;


- dit que la société [E] [L] et [O] [D], ès qualités de séquestre, ne pourra procéder à la libération des éléments susvisés entre les mains de M. [W] [C], qu'après que tous les délais d'appel seront expirés et que, dans cette attente, la société [E] [L] et [O] [D], ès qualités, conservera sous séquestre l'ensemble des pièces ;

- condamné la société Galiena Capital à payer à M. [C] la somme de 20.000 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeté le surplus de la demande ;

- rejeté toutes demandes plus amples ou contraire des parties ;

- condamné en outre la société Galiena Capital aux dépens de l'instance, dont ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 58,92 euros TTC dont 9,61 euros de TVA ;

- commis d'office l'un des huissiers audienciers du tribunal de céans pour signifier la décision ;

- rappelé que la présente décision est de plein droit exécutoire par provision en application de l'article 514 du code de procédure civile.



Par déclaration du 08 juillet 2022, la société Galiena Capital a relevé appel de la décision.



Dans ses conclusions remises le 14 novembre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la société Galiena Capital demande à la cour, au visa des articles R. 153-1 et suivants du code de commerce, de l'article 1240 du code civil, des articles 32-1, 145, 496, 497, 700 et 873 du code de procédure civile, de :



- la déclarer recevable et bien fondée en son appel ;

- infirmer l'ordonnance de référé prononcée le 24 juin 2022 par le président du tribunal de commerce de Paris en ce qu'elle a statué par les chefs suivants :


débouté celle-ci de sa demande de rétractation,

dit que la levée de séquestre des pièces obtenues lors des opérations de constat par l'huissier instrumentaire doit se faire conformément aux article R. 153-3 à R. 153-8 du code de commerce,

dit que la procédure de levée de séquestre sera la suivante :

demandé à la société Galiena capital de faire un tri sur les fichiers des pièces séquestrées en trois catégories :


* Catégorie « A » les pièces qui pourront être communiquées sans examen,

* Catégorie « B » les pièces qui sont concernées par le secret des affaires et que les défenderesses refusent de communiquer,

* Catégorie « C » les pièces que les défenderesses refusent de communiquer mais qui ne sont pas concernées par le secret des affaires,


dit que ce tri sera communiqué à la société [E] [L] et [O] [D], en la personne de l'un de ses associés, pour un contrôle de cohérence avec le fichier initial séquestré,

dit que pour les pièces concernées par le secret des affaires, la société Galiena capital, conformément aux articles R. 153-3 à R. 153-8 du code de commerce communiquera au président « un mémoire précisant, pour chaque information ou partie de la pièce en cause, les motifs qui lui confèrent le caractère d'un secret des affaires »,


fixé le calendrier suivant :

- envoi au président de ce tribunal par la société Galiena capital avant le 22 juillet 2022 d'un mémoire justifiant le cas échéant du secret des affaires attaché à certaines pièces,

- communication à la société [E] [L] et [O] [D], en la personne de l'un de ses associés, et au président, les tris des fichiers demandés avant le 29 juillet 2022,

- renvoyé l'affaire, après contrôle de cohérence par l'huissier, à l'audience du 14 septembre 2022 à 14 heures pour réalisation de la levée de séquestre,

- dit que la société [E] [L] et [O] [D], ès qualités de séquestre, ne pourra procéder à la libération des éléments susvisés entre les mains de M. [W] [C], qu'après que tous les délais d'appel seront expirés et que, dans cette attente, la société [E] [L] et [O] [D], ès qualités, conservera sous séquestre l'ensemble des pièces,

- condamné la société Galiena capital à payer à M. [W] [C] la somme de 20.000 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile,


rejeté le surplus de la demande,

rejeté toutes demandes plus amples ou contraire des parties,

condamné en outre la société Galiena capital aux dépens de l'instance, dont ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 58,92 euros TTC dont 9,61 euros de TVA,

commis d'office l'un des huissiers audienciers du tribunal pour signifier la décision,

rappelé que la présente décision est de plein droit exécutoire par provision en application de l'article 514 du code de procédure civile ;




et statuant à nouveau,

- juger que la mission confiée à l'huissier instrumentaire par l'ordonnance du 19 novembre 2021 rendue par le président du tribunal de commerce de Paris n'est justifiée par aucun motif légitime, présente un caractère disproportionné au regard de l'objet du litige et/ou porte une atteinte injustifiée au principe du contradictoire ;

par conséquent,

- rétracter l'ordonnance du 19 novembre 2021 rendue par le président du tribunal de commerce de Paris dans toutes ses dispositions ;

- annuler toutes les mesures d'instruction subséquentes qui ont été diligentées le 09 décembre 2021 par la société [E] [L] & [O] [D], huissiers de justice, en exécution de ladite ordonnance du 19 novembre 2021 ;

- ordonner la restitution à celle-ci de tous les éléments saisis lors de la mesure diligentée le 09 décembre 2021, actuellement conservés sous séquestre par la société [E] [L] & [O] [D], huissiers de justice ;

- ordonner la destruction des supports sur lesquels les éléments saisis ont été conservés par la société [E] [L] & [O] [D], huissiers de justice, ainsi que de toute copie physique ou numérique du procès-verbal qui a été rédigé par cette dernière ;

- juger que la requête soutenue par M. [C] et l'ordonnance exécutée par ce dernier constituent une manifestation de l'abus d'agir et, par conséquent, condamner par provision, M. [C] à lui payer la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

- débouter M. [W] [C] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

- condamner M. [C] aux entiers dépens de première instance et à lui payer la somme de 55.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance ;

en tout état de cause,

- condamner M. [C] aux entiers dépens d'appel dont distraction au profit de Me Boccon-Gibod, avocat, et à lui payer la somme de 30.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



La société Galiena Capital soutient en substance :



- que l'intimé a failli à apporter la preuve de l'action dans le cadre de laquelle il aurait pu avoir besoin de produire les éléments de preuve recherchés et qu'en tout état de cause, le motif invoqué relatif à la prétendue fraude dont il aurait été victime est manifestement infondé ;



- que la mesure d'instruction ordonnée contrevient à l'exigence de proportionnalité qu'impose le régime de l'article 145 du code de procédure civile ;



- que, s'agissant de la dérogation au principe de la contradiction, l'intimé n'a invoqué qu'une énumération de risques propres à toutes saisine de dossiers informatiques ainsi que des risques de concertation ou de comportement opaque non démontrés.



Dans ses conclusions remises le 22 novembre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, M. [C] demande à la cour, au visa des articles 145 et 193 du code de procédure civile, des articles L. 151-1 et R. 153-1 du code de commerce, de l'article 700 du code de procédure civile, de :

- confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance du 24 juin 2022 ;

en conséquence,

- débouter la société Galiena Capital de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

- condamner la société Galiena Capital à lui verser une somme de 30.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Galiena Capital aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Me Emmanuel Jarry.



M. [C] soutient en substance :



- que la fragilité instrinsèque des éléments de preuve recherchés, l'attitude de dissimulation de Galiena Capital, le risque de concertation frauduleuse et la gravité des faits justifiaient la dérogation au principe de la contradiction ;



- que les faits invoqués au soutien de la requête sont vraisemblables, étant relevé qu'en réalité Galiena Capital faisait l'acquisition de la quasi-totalité du capital, le solde étant acquis par ses dirigeants, ce qui rend parfaitement plausible les actions envisagées, qu'elles soient contractuelles, délictuelles voire pénales ;



- que les mesures sont proportionnées comme portant sur les seuls documents et éléments d'information qui permettent de confirmer, d'une part, la violation du droit d'entraînement prévu par les pactes d'actionnaires et, d'autre part, les man'uvres déloyales et frauduleuses de Galiena Capital, peu important le résultat de la mesure ou la supposée violation du secret des affaires.




SUR CE LA COUR



L'article 493 du code de procédure civile dispose que l'ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse.



En outre, aux termes de l'article 145 du code de procédure civile, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé.



L'article 145 suppose l'existence d'un motif légitime, c'est-à-dire un fait crédible et plausible, ne relevant pas de la simple hypothèse, qui présente un lien utile avec un litige potentiel futur dont l'objet et le fondement juridique sont suffisamment déterminés et dont la solution peut dépendre de la mesure d'instruction sollicitée, à condition que cette mesure ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d'autrui. Elle doit être pertinente et utile.



Ainsi, si le demandeur à la mesure d'instruction n'a pas à démontrer l'existence des faits qu'il invoque puisque cette mesure in futurum est justement destinée à les établir, il doit néanmoins justifier d'éléments rendant crédibles ses suppositions et démontrer que le litige potentiel n'est pas manifestement voué à l'échec, la mesure devant être de nature à améliorer la situation probatoire du demandeur.



De plus, si la partie demanderesse dispose d'ores et déjà de moyens de preuves suffisants pour conserver ou établir la preuve des faits litigieux, la mesure d'instruction demandée est dépourvue de toute utilité et doit être rejetée.



Enfin, ni l'urgence ni l'absence de contestation sérieuse ne sont des conditions d'application de ce texte.



En l'espèce, il y a lieu de relever :



- que, s'agissant d'abord de la dérogation au principe du contradictoire, le président du tribunal de commerce a motivé à juste titre sa décision dans l'ordonnance entreprise en relevant la destruction aisée d'un certain nombre de pièces de nature informatique, la nature des faits reprochés et le risque de concertation frauduleuse ;



- qu'en effet, ces éléments, rappelés par ailleurs dans la requête, sont suffisamment justifiés eu égard à la nature du présent litige, étant observé que, d'une part, l'application de l'article 13 du pacte permettait bien la vente à un tiers acquéreur intéressé par la totalité des titres de tous les titres, y compris ceux que le fonds ne détiendrait pas, ce au prix de l'offre, de sorte qu'un tel mécanisme pouvait induire une offre sous évaluée en cas de connivence du tiers avec un actionnaire actuel ;



- que, d'autre part, dans une procédure de référé distincte, Access Capital Partners a bien, nonobstant la discussion sur le mécanisme des fonds, indiqué (pièce 8 intimé) n'avoir jamais formulé d'offre, contrairement à ce qui avait été relevé par Galiena Capital dans la lettre recommandée du 9 juillet 2021, Galiena Capital étant toujours actionnaire majoritaire de Scentys à hauteur de 58 %, comme en atteste aussi le propre courriel de M. [G], président de Scentys, du 27 juillet 2021 pièce 14 intimé ('Galiena est re rentré à nouveau dans le capital de Scentys à hauteur de 58 % (et reste donc majoritaire), pour un nouveau cycle de 5 ans'), la correction apportée par ce dernier dans une attestation établie au profit de l'appelante, son actionnaire majoritaire (pièce 32 appelante), n'étant pas de nature à lui enlever toute portée probatoire au courriel précédemment mentionné ;



- que, dans ces circonstances, c'est en vain que Galiena Capital fait valoir qu'elle n'a jamais été associée de Scentys, n'agissant que pour des fonds tiers au sens du pacte d'actionnaires, le litige au fond pouvant précisément porter sur un éventuel détournement par l'appelante du mécanisme prévu, par l'intermédiaire de fonds qu'elle représente, en étant de même s'agissant des fonds représentés par Access Capital Partners ;



- que M. [C], au regard du motif frauduleux allégué, pouvait ainsi valablement se prévaloir d'un nécessaire effet de surprise et d'un risque de dépérissement des preuves, la requête visant à saisir tout document informatique en rapport avec une application frauduleuse du pacte d'actionnaires ;



- qu'ainsi la nécessité de déroger au contradictoire est suffisamment établie, l'existence de procédures contradictoires menées par ailleurs important peu ;



- que, concernant le motif légitime, l'intimé fait à juste titre état, ainsi qu'il a été rappelé ci-avant, d'éléments rendant suffisamment crédible la fraude alléguée, M. [C] relevant valablement qu'il n'a pas à établir le bien-fondé de l'action envisagée (contractuelle ou délictuelle voire pénale) ni même son fondement juridique, étant ici observé que l'intimé expose l'éventualité d'une action sur le plan civil (article 1596 du code civil) ou pénal (abus de confiance) ; qu'importe également peu, à ce stade, l'absence de démonstration d'une faute, d'un préjudice et d'un lien entre la faute et le préjudice ;



- que l'ordonnance sur requête est de nature à améliorer la situation probatoire de M. [C], ce dernier, contrairement à ce qu'indique Galiena Capital, s'étant bien interrogé sur le sens de l'opération sans en avoir une connaissance exhaustive dès son courriel du 30 juin 2021, courriel dans lequel l'intimé, s'il fait état de la vente à 100 % des parts pour une valorisation à 15 millions, s'interroge aussi sur la fixation de la valorisation et sur le mécanisme de la vente (pièce 15 appelante), soit les éléments ayant fait naître le présent litige ;



- que le motif légitime au sens de l'article 145 du code de procédure civile est donc caractérisé, aucun élément ne venant établir que l'action serait manifestement vouée à l'échec, la circonstance qu'elle devrait s'exercer contre les fonds représentés par Galiena Capital et non contre Galiena Capital important peu ;



- qu'enfin, sur le caractère légalement admissible des mesures ordonnées, la requête apparaît proportionnée et en rapport avec le motif légitime allégué, ne pouvant être retenus le caractère général de l'investigation ou la mise en place d'une mesure de perquisition civile ;



- que la requête porte en effet, d'une part, sur les échanges intervenus entre Galiena Capital et Access Capital Partner relatifs à l'opération litigieuse (sans mots-clés) et, d'autre part, sur les échanges internes au sein de Galiena Capital avec une liste de mots-clés restreignant la portée de la recherche et en rapport avec les faits litigieux (notamment cession, offre d'acquisition, participation, retrait, minoritaire) ;



- que la période de temps apparaît également limitée et déterminée, du 1er avril 2021 au 30 août 2021, soit quelques mois relatifs à la période de l'opération reprochée ;



- que c'est à juste titre que M. [C] relève que le nombre de pièces n'est pas un critère pertinent, étant relevé en toute hypothèse que la circonstance que 600 documents ont été appréhendés montre en réalité le caractère correctement délimité de la mesure ;



- que l'atteinte au secret des affaires, qui ne constitue pas en lui-même un obstacle à l'exercice du droit à la preuve, sera préservée eu égard à la mesure de séquestre mise en place, de même que la préservation des échanges confidentiels avocat-client qui fera justement l'objet du tri des pièces à venir.



Aussi, au regard de l'ensemble de ces éléments, il y a lieu de confirmer l'ordonnance entreprise, en ce compris le sort des dépens et frais de première instance exactement réglé par le premier juge et le rejet de la demande de dommages et intérêts, M. [C] ayant à juste titre recouru à la procédure sur requête.



A hauteur d'appel, la société appelante devra indemniser l'intimé pour ses frais non répétibles exposées et sera condamnée aux dépens d'appel.



PAR CES MOTIFS



Confirme l'ordonnance entreprise ;



Y ajoutant,



Condamne la SAS Galiena Capital à verser à M. [W] [C] la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel ;



Condamne la SAS Galiena Capital aux dépens d'appel dont distraction au profit de Me Emmanuel Jarry.



LA GREFFIÈRE POUR LA PRESIDENTE

DE CHAMBRE EMPÊCHÉE

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