9 janvier 2023
Cour d'appel de Paris
RG n° 21/04503

Pôle 5 - Chambre 10

Texte de la décision

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 10



ARRÊT DU 09 JANVIER 2023



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/04503 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDH55



Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Février 2021 -TJ de PARIS RG n° 18/08904



APPELANT



MONSIEUR LE DIRECTEUR RÉGIONAL DES FINANCES PUBLIQUES D'ILE DE FRANCE ET DU DÉPARTEMENT DE PARIS

Pôle Fiscal Parisien 1, Pôle Juridictionnel Judiciaire

Ayant ses bureaux [Adresse 2]

[Localité 4]



Représenté par Me Guillaume MIGAUD de la SELARL ABM DROIT ET CONSEIL AVOCATS E.BOCCALINI & MIGAUD, avocat au barreau de val-de-marne, toque : PC129



INTIMEE



S.A.S. TAHEMA

Ayant son siège social

[Adresse 1]

[Localité 3]

N° SIRET : 792 493 330



Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



Représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER - BEQUET - MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050





COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Monsieur Edouard LOOS, Président, chargé du rapport et Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Présidente.



Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Edouard LOOS, Président

Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Présidente

Madame Sylvie CASTERMANS, Magistrate honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles



Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MOLLÉ







ARRÊT :



- contradictoire



- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.



- signé par Edouard LOOS, Président et par Sylvie MOLLÉ, Greffier présent lors du prononcé.






FAITS ET PROCEDURE





La Sarl Cassiopée Naval Consult a pour associés, à compter du 5 juillet 2013, M. [S] [J], à hauteur de 155 549 parts et la SAS Tahema, à hauteur de 121 309 parts.



La Sarl Cassiopée Naval Consult a clôturé, le 31 mai 2013, un résultat comptable d'un montant de 5 558 459 euros. Elle a affecté ce résultat de la manière suivante :

115 127 euros en réserve légale,

3 308 209 euros en autres réserves,

2 135 123 euros en dividendes.



Au cours de l'assemblée générale annuelle du 30 novembre 20.13, la résolution suivante a été arrêtée à l'unanimité : 'De convention expresse entre les associés, la distribution de dividende susvisée, d'un montant de 2 135 123 euros, est, à titre exceptionnel, intégralement réservée à la société Tahema. '



Considérant que cette distribution de dividendes au seul profit de la Sas Tahema constitue une donation, l'administration fiscale lui a adressé le 19 décembre 2016 une proposition de rectification, assujettissant l'attribution des 1 199 591 euros qui auraient dû revenir à M. [J] aux droits de mutation à titre gratuit.



La société Tahema a formulé des observations le 15 février 2017 pour contester cette rectification, auxquelles l'administration fiscale a répondu le 7 avril 2017 en maintenant l'intégralité de sa proposition de rectification.



Le recours hiérarchique exercé le 24 avril 2017 par la société Tahema a donné lieu à un courrier du 30 mai 2017 dans lequel l'inspectrice principale indique maintenir le rappel des droits.



L'impôt consécutif a été mis en recouvrement le 26 juillet 2017 pour un montant de 823 400 euros, soit 719 755 euros en droits et 103 465 euros en intérêts de retard.



La réclamation contentieuse réalisée par la société Tahema le 19 septembre 2017 été rejetée le 20 juin 2018.



Par acte d'huissier de justice en date du 23 juillet 2018, la société Tahema a fait assigner la Direction générale des finances publiques devant le tribunal judiciaire, sur le fondement des articles 894, 93l et 1842 du code civil, outre l'article 635-1 du code général des impôts.







* * *







Vu le jugement prononcé le 1er février 2021 par le tribunal judiciaire de Paris qui a statué comme suit :



- Infirme la décision de rejet de la réclamation contentieuse du 20 juin 2018 prise par la direction régionale des finances publiques de la région d'lle de France et du département de Paris relative au rehaussement des droits de mutation à titre gratuit correspond à la distribution des entiers dividendes de la société Cassiopée Naval Consult à la société Tahema ;

- Dit qu'il appartiendra au directeur général des finances publiques, agissant en la personne du directeur régional des finances publiques d'Ile de France et du département de Paris, de notifier la décharge du rehaussement mis à la charge de la société Tahema et de M. [J]  ;

- Condamne le directeur général des finances publiques, agissant en la personne du directeur régional des finances publiques d'Ile de France et du département de Paris, aux dépens mentionnés à l'article R. 207-1 du livre des procédures fiscales,

- Condamne le directeur général des finances publiques, agissant en la personne du directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris, à payer la somme totale de 1 500 euros à la société Tahema au titre de l'article 700 du code de procédure civile.





Vu l'appel déclaré le 8 mars 2021 par le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris,





Vu les dernières conclusions signifiées le 3 juin 2021 par le directeur régional des finances publiques d'Ile de france et de [Localité 4] ,



Vu les dernières conclusions signifiées le 16 juin 2021 par la société Tahema,





Le directeur régional des finances publiques d'Ile de France et de [Localité 4] demande à la cour de statuer comme suit : ,





- recevoir le Directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et de [Localité 4] en son appel et l'y déclarer fondé ;

- Infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 1er février 2021 (RG 18/08904) ;

Et statuant à nouveau :

- Confirmer la décision de rejet de l'administration du 20 juin 2018 ;

- Déclarer bien fondée la rectification opérée par l'administration ;

- Déclarer bien fondé le rappel en résultant ;

- Condamner au versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner la société Sas Tahema aux entiers dépens.



La société Tahema demande à la cour de statuer comme suit :



-Ordonner la jonction de l'appel du jugement du 1er février 2021 (RG 18/08904) avec l'appel du jugement du 1er février 2021 (RG 1808903) concernant les époux [J] ;

- Déclarer le Directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et de [Localité 4] mal fondé en son appel et l'en débouter, ainsi que de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- Confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 1er février 2021 (RG 18/08904) en toutes ses dispositions ;

- Y ajoutant ;

- Condamner le Directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et de [Localité 4] au versement de la somme supplémentaire de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.








SUR CE, LA COUR





a) Sur la demande de jonction



Il n'y a pas lieu de joindre des appels de jugements distincts n'opposant pas les mêmes parties quand bien même ils porteraient sur la meme situation juridique.





b) Sur le fond





Selon le directeur régional des finances publiques d'Ile de France et de [Localité 4], la répartition des dividendes mis en distribution par la société Cassiopée Naval Consults résulte de la volonté des deux associés qui ont décidé que le dividende non distribué serait intégralement versé à la société Tahema. La société Tahema a ainsi perçu l'intégralité des dividendes distribués alors qu'elle ne détient que 43,82% des parts de la société, M. [J] s'étant irrévocablement dessaisi de la somme de 1 199 591 euros. La société Tahema est ainsi redevable de l'imposition réclamée au titre de cette donation indirecte.

La société Tahema expose que la renonciation à un dividende s'analyse en un abandon de créance dont seule la société Cassiopée Naval Consult est bénéficiaire et non pas la société Tahema, autre associée. Elle invoque également que la décision a été prise non par les associés mais par l'assemblée . Il s'en déduirait une absence d'acte constitutif d'une donation indirecte.



Ceci étant exposé, nonobstant l'absence de production aux débats des statuts de la Sarl Cassiopée Naval Consult ou des décisions d'assemblée générale, il est constant et non contesté que, lors de l'assemblée générale annuelle s'étant tenue le 30 novembre 2013, les comptes ont été approuvés et que la résolution suivante a été adoptée :



'Conformément à la loi , l'Assemblée Générale constate qu 'aucun dividende n 'a été distribué au titre des trois exercices précédents.

De convention expresse entre les associés, la distribution de dividende susvisée, d'un montant de 2 135 123 euros, est, à titre exceptionnel, intégralement réservée à la société Tahema.

Cette décision est prise à l'unanimité. '



Il doit être relevé que la décision de réserver les dividendes de l'exercice à un seul des 2 associés n'a pas été prise par les époux [J] ou par la société Tahema mais par l'assemblée générale des actionnaires.



Il n'est pas non plus établi que les époux [J] se seraient 'dépouillés' au sens de l'article 894 du code civil puisque cette décision a tenu compte de l'absence de dividendes servis lors des trois exercices précédents et qu'il n'est aucunement prouvé que la somme versée à la société Tahema ait privé 'irrévocablement' les époux [J] de leur propre part .



Au vu du résultat comptable au 31 mai 2103 d'un montant de 5 558 459 euros, il n'est pas plus établi que les dividendes versés à la société Tahema à hauteur 2 135 123 euros aient compris l'intégralité des dividendes ayant vocation à être versés aux époux [J] au titre de ce même exercice .



Il se déduit de ce qui précède que les conditions d'une donation au sens de l'article 894 du code civil ne sont pas réunies.



Le jugement déféré doit être confirmé en toutes ses dispositions.



Une indemnisation complémentaire doit être allouée à la société Tahema sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .







PAR CES MOTIFS



La cour,



REJETTE la demande de jonction ;



CONFIRME le jugement déféré ;



CONDAMNE le directeur régional des finances publiques d'Ile de France et de [Localité 4] aux dépens ;



CONDAMNE le directeur régional des finances publiques d'Ile de France et de [Localité 4] à verser à la société Tahema la somme 2 000 euros sur ondement de l'article 700 du code de procédure civile ;



REJETTE toutes autres demandes.







LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,









S.MOLLÉ E.LOOS

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