14 décembre 2022
Cour d'appel de Rennes
RG n° 19/05145

5ème Chambre

Texte de la décision

5ème Chambre





ARRÊT N°-377



N° RG 19/05145 - N° Portalis DBVL-V-B7D-P7V4













Mme [X] [N] épouse [S]



C/



SA LA MEDICALE DE FRANCE

SOCIETE HOSPITALIERE D'ASSURANCES MUTUELLES

Organisme CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU FINISTERE

Organisme AG2R REUNICA PREVOYANCE

CAISSE REGIONALE D'ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES BRETAGNE - PAYS DE LA LOIRE



















Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée















Copie exécutoire délivrée



le :



à :











RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 14 DECEMBRE 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie PARENT, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,





GREFFIER :



Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé



DÉBATS :



A l'audience publique du 28 Septembre 2022





ARRÊT :



Réputé contradictoire, prononcé publiquement le 14 Décembre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats après prorogation du délibéré







****





APPELANTE :



Madame [X] [N] épouse [S]

[Adresse 14]

[Localité 8]



Représentée par Me Dominique CARTRON de la SAS DOMINIQUE CARTRON, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Sophie KERZERHO, Plaidant, avocat au barreau de PARIS



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/002093 du 31/10/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RENNES)





INTIMÉES :



La Société LA MEDICALE anciennement SA LA MEDICALE DE FRANCE Agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 7]

[Localité 11]



Représentée par Me Dominique LE COULS-BOUVET de la SCP PHILIPPE COLLEU, DOMINIQUE LE COULS-BOUVET, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Luc PASQUET de la SELARL CONSILIUM ATLANTIQUE AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de LORIENT





Compagnie d'assurances SOCIETE HOSPITALIERE D'ASSURANCES MUTUELLES

[Adresse 3]

[Localité 9]



Représentée par Me Bertrand MAILLARD, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES





Organisme CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU FINISTERE représentant la CPAM du Morbihan

[Adresse 1]

[Localité 5]



Représentée par Me Frantz FAIVRE de la SCP JOURDA FAIVRE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de LORIENT





Organisme AG2R REUNICA PREVOYANCE

[Adresse 2]

[Localité 10]



Représentée par Me Solène BOURROUILLOU de la SCP JOLLY BOURROUILLOU, Postulant, avocat au barreau de RENNES





CAISSE REGIONALE D'ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES BRETAGNE - PAYS DE LA LOIRE- ayant fait l'objet des significations prévues par les articles 902 et 911 du code de procédure civile par remise de l'acte à personne habilitée à le recevoir, n'ayant pas constitué avocat

[Adresse 4]

[Localité 6]













Mme [X] [S] s'est vu diagnostiquer le 24 mars 1995, un carcinome épidermoïde de la vulve. Le docteur [U] a pratiqué une vulvectomie antérieure. Mme [X] [S] a subi une radiothérapie externe à la dose de 45 grays à partir du mois de juin 1995, à la polyclinique [15] sur la prescription du docteur [Z] [F]. Les biopsies pratiquées le 21 août 1995 ont permis de diagnostiquer un lichen scléro-atrophique. Mme [X] [S] a été soumise à un complément de radiothérapie à la dose de 10 grays.



En octobre 1995, elle s'est vue administrer du Medrol. À compter du mois d'avril 1996, elle a été prise en charge à l'Institut [16] de [Localité 21]. Elle a suivi un traitement associant Veinamitol, Deroxat, Tranxène et Oesclin. Le 20 janvier 1997, les docteurs [W], [B], [L] et [V] ont pratiqué une hémi-vulvectomie droite et reconstitution immédiate par lambeau musculo-cutané droit interne. Les suites opératoires ont été marquées par l'apparition de douleurs dans le membre inférieur droit.



Le 2 juin 1997, les docteurs [H], [B] et [M] ont pratiqué une hémi-vulvectomie gauche et reconstitution immédiate par lambeau musculo-cutané droit interne. Les douleurs ont persisté. Un Tens a été installé en 1997.



La patiente est suivie pour le traitement de la douleur par le centre hospitalier de [Localité 20], 1'hôpital [12] de [Localité 18] et le CHI de [Localité 13].



Le 30 mars 1998, Mme [X] [S] est placée en invalidité catégorie 2.



Le 9 avril 1998, la patiente subit une nouvelle opération de reconstruction vulvaire à l'Institut [16] de [Localité 21] puis poursuit ses soins à la clinique [19] de [Localité 20] où elle subit d'autres opérations et soins.



Le 28 janvier 2003, Mme [X] [S] subit une intervention chirurgicale réalisée par le professeur [E]. Son dermatologue constatera le 26 mars 2003 l'absence de foyer de néoplasie.



Enceinte de 6 mois, elle subit une intervention de grossesse pour motif médical le 20 mai 2003.



Souffrant de douleurs persistantes des membres inférieurs, elle a, par acte signifiés les 25, 26 et 30 juillet 2013 sollicité une expertise judiciaire devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Vannes, qui a désigné le docteur [O] [P] pour y procéder au contradictoire de la société Hôpital privé [17] (venant aux droits de la polyclinique [15] et de la polyclinique [19]), du docteur [Y] [U], du docteur [EE] [UI], du docteur [Z] [F], du docteur [T] [K], du centre d'oncologie Saint Yves, de l'Institut [16], de la CPAM du Morbihan et de la caisse régionale d'assurance mutuelle agricole Bretagne-Pays de la Loire (dite Groupama Loire Bretagne).



L'expert a déposé son rapport le 2 août 2014.



Par acte signifié les 20, 23, 25 et 30 mars 2015, Mme [X] [S] a assigné la Médicale de France, la Société Hospitalière d'Assurances Mutuelles (SHAM), la CPAM du Morbihan, AG2R Prévoyance et Groupama Loire Bretagne devant le tribunal de grande instance de Vannes.



Par jugement en date du 14 mai 2019, le tribunal a :

- constaté que la CPAM du Finistère intervient pour le compte de la CPAM du Morbihan dans le cadre de la convention de mutualisation des moyens entre les caisses s'agissant des recours contre tiers pour le recouvrement des prestations, frais et débours versés par la CPAM du Morbihan qu'elle aura vocation à recouvrer en cas de condamnation,

- rejeté l'exception d'irrecevabilité tirée de la prescription,

- rejeté toutes les demandes formées à l'encontre de la Médicale de France,

- condamné Mme [X] [N] divorcée [S] aux dépens de la Médicale de France qui seront recouvrés par la SCP Grunberg conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- décidé que l'Institut [16] est responsable de la maladresse fautive lors de l'intervention chirurgicale de levée de lambeau,

- sursis à statuer sur les autres demandes,

Avant-dire droit,

- ordonné un complément d'expertise afin de déterminer les préjudices en lien avec la lésion du nerf saphène dont l'exécution est confiée au docteur [KL] [G], expert neurologue, lequel pour s'appuyer sur l'analyse d'un sapiteur de son choix avec pour mission, après avoir examiné la patiente recueilli tous renseignements utiles en particulier prendre connaissance de son dossier médical et de l'expertise judiciaire du professeur [P] du 2 août 2014 et éventuellement entendu tous sachants

* reprendre les postes de préjudices définis par le précédent expert et donner son avis technique sur ceux qui sont en lien avec la lésion du nerf saphène.

* définir pour chacun d'eux si ce lien est établi, la part qui revient à cette lésion.

* plus généralement faire toutes remarques, observations et analyses utiles au règlement du litige

- dit qu'à l'issue de la première réunion des parties ou au plus tard de la réunion, l'expert communiquera aux parties, un état prévisionnelle détaillé de l'ensemble de ses frais et honoraires,

- dit que l'expert devra vérifier que les parties ont été à même de débattre des constatations au vu desquelles il entend donner son avis,

- dit que l'expert devra s'assurer que les documents de toute nature au vu desquels il entend donner son avis ont été régulièrement communiqués aux parties,

- dit que l'expert devra procéder personnellement à ses opérations ; il pourra néanmoins recueillir l'avis d'un autre médecin en cas de besoin, mais uniquement dans une spécialité distincte de la sienne,

- dit que l'expert désigné devra, dans le délai de six mois à compter de l'acceptation de la mission, sauf dérogation dûment autorisée par le magistrat charge du contrôle des expertises, déposer son rapport détaillé et motivé et qu'il en délivrera copie à chacune des parties en cause,

- dit que l'expert devra, sur la page de garde de son rapport, indiquer la juridiction qui l'a commis, avec le numéro du rôle de l'affaire,

- dit que si l'expert se heurte à des difficultés qui font obstacle à l'accomplissement de sa mission ou si une extension de celle-ci s'avère nécessaire il devra en référer an Juge charge du contrôle des expertises,

- fixé à titre provisionnel l'avance sur les honoraires de l'expert à la somme de 1 500 euros qui sera consignée auprès de Madame le régisseur d'avances et de recettes du tribunal de grande instance de Vannes, par la Société hospitalière d'assurances mutuelles (Sham) dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision,

- dit qu'en cas d'empêchement, retard ou refus de l'expert désigné, il sera pourvu à son remplacement par ordonnance rendue sur simple requête ou même d'office,

- ordonné le renvoi de la procédure devant le juge de la mise en état à son audience du 11 octobre 2019,

- ordonné exécution provisoire.



Le 30 juillet 2019, Mme [X] [N] épouse [S] a interjeté appel de cette décision.



Le docteur [BF] [FR], désigné par ordonnance de remplacement d'expert le 18 décembre 2019 pour procéder à la mission confiée par le tribunal dans son jugement du 14 mai 2019, a déposé son rapport le 10 mars 2021.







Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 29 août 2022, Mme [X] [N] divorcée [S] demande à la cour de :

- prononcer la nullité du rapport d'expertise déposé le 10 mars 2021 par le docteur [BF] [FR],

- confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté l'exception d'irrecevabilité tirée de la prescription,

- confirmer le jugement en ce qu'il a décidé que l'Institut [16] est responsable de la maladresse fautive lors de l'intervention chirurgicale de levée de lambeau,

- réformer le jugement pour le surplus et, statuant à nouveau,

A titre principal,

- condamner in solidum, ou l'une à défaut de l'autre, La Médicale et La Société Hospitalière d'Assurance Mutuelle à réparer l'intégralité des préjudices subis par Mme [X] [S],

- en conséquence, les condamner à lui payer en indemnisation des préjudices subis, les sommes suivantes, créances des tiers-payeurs déduites :

* frais divers : 5 189,48 euros,

* assistance tierce personne temporaire : 71 680 euros,

* perte de gains professionnels actuels : 63 488,72 euros,

* dépenses de santé futures : 3 752,60 euros,

* frais de véhicule adapté : 27 918,80 euros,

* besoin d'assistance permanent : 201 296,64 euros,

* perte de gains professionnels futurs : 714 096,72 euros,

* incidence professionnelle : 100 000 euros,

* déficit fonctionnel temporaire : 36 052,50 euros,

* souffrances endurées : 20 000 euros,

* déficit fonctionnel permanent : 82 000 euros,

* préjudice d'agrément : 8 000 euros,

* préjudice esthétique permanent : 5 000 euros,

* préjudice sexuel : 20 000 euros,

* préjudice d'établissement : 10 000 euros,



A titre subsidiaire,

- condamner La Médicale à l'indemniser de la perte de chance de 90% d'éviter le dommage qu'elle subit du fait du manquement du docteur [Z] [F] à son obligation d'information,

- fixer comme suit les préjudices subis, par Mme [X] [S], avant déduction de la créance des tiers payeurs :

* frais divers : 5 189,48 euros,

* assistance tierce personne temporaire : 71 680,00 euros,

* perte de gains professionnels actuels : 118 751,87 euros,

* dépenses de santé futures : 22 795,04 euros,

* frais de véhicule adapté : 28 367,60 euros,

* besoin d'assistance permanent : 201 296,64 euros,

* perte de gains professionnels futurs : 942 577,22 euros,

* incidence professionnelle : 100 000 euros,

* déficit fonctionnel temporaire : 36 052,50 euros,

* souffrances endurées : 20 000 euros,

* déficit fonctionnel permanent : 82 000 euros,

* préjudice d'agrément : 8 000 euros,

* préjudice esthétique permanent : 5 000 euros,

* préjudice sexuel : 20 000 euros,

* préjudice d'établissement : 10 000 euros,

- appliquer les dispositions de l'article L376-1 du code de la sécurité sociale relatives au recours poste par poste des tiers-payeurs et au droit de préférence de la victime,

En tout état de cause,

- condamner La Médicale à lui payer la somme de 15 000 euros au titre du préjudice d'impréparation aux risques induits par la radiothérapie,

- condamner La Société Hospitalière d'Assurance Mutuelle à lui payer la somme de 10 000 euros au titre du préjudice d'impréparation aux risques de la chirurgie de reconstruction de la vulve,

- décider que l'intégralité des sommes allouées à Mme [X] [S] en indemnisation de ses préjudices porte intérêt au taux légal à compter du 30 mars 2015 avec capitalisation des intérêts par année entière, comme il est dit à l'article 1154 du code civil,

- condamner in solidum ou l'une à défaut de l'autre la Société Hospitalière d'Assurance Mutuelle et La Médicale à payer à Me Dominique Cartron, avocat au barreau de Rennes, la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.



Par dernières conclusions notifiées le 30 juin 2022, La Société Hospitalière d'Assurance Mutuelle demande à la cour de :

- la recevoir en qualité d'assureur de l'Institut [16], en son appel incident et la dire bien fondée,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté Mme [X] [S] de sa demande tendant à voir imputer à l'Institut [16] un défaut d'information,

- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

* rejeté l'exception d'irrecevabilité tirée de la prescription,

* rejeté toutes les demandes formées à l'encontre de la Médicale de France,

* décidé que l'Institut [16] est responsable de la maladresse fautive lors de l'intervention chirurgicale de levée de lambeau,

* avant dire droit, ordonné un complément d'expertise afin de déterminer les préjudices en lien avec la lésion du nerf saphène,

* fixé à titre provisionnel l'avance sur les honoraires de l'expert à la somme de 1 500 euros qui sera consignée par la SHAM.

Et statuant à nouveau :

A titre liminaire :

Sur la nullité du rapport d'expertise du Docteur [FR] du 10 mars 2021,

- à titre principal, constater que la cour d'appel de Rennes n'est pas saisie de ce rapport,

- à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour d'appel de Rennes décidait d'évoquer ce rapport, procéder à la réouverture des débats,



Sur l'irrecevabilité de l'action de Mme [X] [S], de la société AG2R Prévoyance et d la CPAM du Finistère,

- déclarer irrecevable l'action introduite par Mme [X] [S] car prescrite,

Par conséquent,

- déclarer irrecevables les actions subrogatoires de la CPAM du Morbihan et celle d'AG2R Prévoyance.



Sur la conformité de l'appel incident de AG2R Prévoyance,

A titre principal,

- déclarer irrecevables les conclusions d'appel de AG2R Prévoyance signifiées les 23 décembre 2019 et 2 janvier 2020,

Par conséquent,

- déclarer irrecevable l'appel incident de AG2R Prévoyance,

A titre subsidiaire,

- débouter AG2R Prévoyance de ses prétentions,



A titre principal,

- constater l'absence de responsabilité de l'Institut [16],

- débouter Mme [S] de l'ensemble de ses demandes dirigées à l'encontre de la SHAM,

- débouter AG2R Prévoyance et la CPAM du Finistère de l'ensemble de leurs demandes dirigées contre la SHAM,

- condamner Mme [S] aux dépens de première instance et d'appel,



A titre subsidiaire,

- si la cour retenait la responsabilité de l'Institut [16], condamner le docteur [F] et son assureur La médicale de France à le relever et garantir de l'ensemble des condamnations qui pourraient être mises à sa charge,



A titre très subsidiaire,

- ordonner un complément d'expertise afin de permettre de répartir clairement les parts de responsabilité de chacun des intervenants et de dissocier les préjudices en lien avec l'irradiation de ceux en lien avec la lésion du nerf,

- surseoir à statuer sur les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile dans l'attente du dénouement du complément d'expertise,



A titre infiniment subsidiaire,

Sur les demandes indemnitaires présentées par Mme [X] [S],

- dire que seul un taux de responsabilité minime pourra être retenu à l'encontre de l'Institut [16] et appliquer ce taux à l'ensemble des sommes qui pourront être allouées à Mme [X] [S], la CPAM du Morbihan et AG2R Prévoyance,

- débouter Mme [X] [S] de ses demandes présentées au titre de l'assistance par tierce personne avant consolidation, des frais divers, des pertes de gains professionnels actuels, des dépenses de santé futures, des frais de véhicule adapté, de l'assistance par tierce personne après consolidation, des pertes de gains professionnels futurs, de l'incidence professionnelle (et à titre subsidiaire sur ce dernier préjudice, constater qu'une somme de 5 000 euros sera largement satisfactoire), du déficit fonctionnel temporaire,

- réduire en de plus justes proportions les somme qui seront allouées à Mme [X] [S] au titre des souffrances endurées, de son déficit fonctionnel permanent,

- débouter Mme [X] [S] de sa demande présentée au titre du préjudice d'agrément,

- réduire en de plus justes proportions la somme qui sera allouée à Mme [X] [S] au titre du préjudice esthétique permanent qui ne saurait être supérieure à celle de 1 500 euros,

- débouter Mme [X] [S] de ses demandes présentées au titre du préjudice sexuel, du préjudice d'établissement, du préjudice spécifique d'impréparation,

- réduire en de plus justes proportions la somme, qui pourra être allouée à Mme [X] [S] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, qui ne saurait être supérieure à 1 500 euros,

- débouter Mme [X] [S] de sa demande de condamnation in solidum de SHAM et La Médicale de France,





Sur les demandes indemnitaires présentées par AG2R Prévoyance,

- la débouter purement et simplement de l'ensemble de ses demandes présentées par à l'encontre de l'Institut [16],



Sur les demandes indemnitaires présentées par la CPAM,

- réduire en de plus justes proportions la somme qui lui sera allouée au titre des frais médicaux actuels,

- la débouter purement et simplement de sa demande présentée au titre des frais pharmaceutiques actuels,

- réduire en de plus justes proportions la somme qui lui sera allouée au titre des indemnités journalières actuelles,

- la débouter purement et simplement de ses demandes présentées au titre des pertes de gains professionnels actuels, des pertes de gains professionnels futurs, des frais futurs viagers sauf s'agissant de celle relative à la prise en charge de l'appareillage de neurostimulation transcutanée,

- la débouter de sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dépens comme de droit.



Par dernières conclusions notifiées le 15 septembre 2022, la société La Médicale (assureur du docteur [F]) demande à la cour de :

- débouter Mme [X] [S] de son appel comme mal fondé,

- confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes dirigées contre la SA La Médicale anciennement dénommée La Médicale de France,

- condamner Mme [X] [S] à lui payer la somme de

2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [X] [S] aux entiers dépens.



Par dernières conclusions notifiées le 21 juin 2022, la CPAM du Finistère demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a constaté que la CPAM du Finistère intervenait pour le compte de la CPAM du Morbihan dans le cadre de la convention de mutualisation des moyens entre les caisses s'agissant des recours contre tiers pour le recouvrement des prestations, frais et débours versés par la CPAM du Morbihan qu'elle aurait vocation à recouvrer en cas de condamnation,

- confirmer le jugement en ce qu'il a décidé que l'Institut [16] était responsable de la maladresse fautive lors de l'intervention chirurgicale de levée de lambeau,

- infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté toutes les demandes formées à l'encontre de La Médicale anciennement dénommée La Médicale de France,

- la dire et juger recevable et bien fondée en ses demandes,

- condamner conjointement et solidairement La Médicale anciennement dénommée La Médicale de France et la Société Hospitalière d'Assurances Mutuelles à payer à la CPAM du Finistère la somme totale de 213 302,65 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement à intervenir,

- faire application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil et dire que les intérêts échus pour une année entière se capitaliseront pour produire eux-mêmes intérêts,

- condamner conjointement et solidairement La Médicale anciennement dénommée La Médicale de France et la Société Hospitalière d'Assurances Mutuelles à lui payer la somme de 3 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et la somme de

1 080 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L 376-1 du code de la sécurité sociale, et en tous les dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.



Par dernières conclusions notifiées le 8 avril 2021, AG2R Prévoyance demande à la cour de :

- le dire et juger recevable et bien fondé en son appel incident,

- rejeter l'intégralité des demandes formées par la SHAM,

- infirmer le jugement,

- constater qu'AG2R Prévoyance est subrogée dans les droits de Mme [X] [S] à l'encontre de la société La Médicale de France et la Société Hospitalière d'Assurances Mutuelles, à concurrence des sommes par elle payées,

En conséquence,

- condamner in solidum la société La Médicale de France et la Société Hospitalière d'Assurances Mutuelles à lui payer :

* la somme de 16 558,58 euros en remboursement de la rente invalidité servie avant consolidation,

* la somme de 105 280,85 euros au titre de la rente invalidité servie après consolidation,

- dire et juger que les sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter du 3 décembre 2015 et seront capitalisés dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,

- condamner in solidum la société La Médicale de France et la Société Hospitalière d'Assurances Mutuelles à payer à AG2R Prévoyance la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, distraits au bénéfice de la SCP Jolly - Bourrouillou, avocat, sur son affirmation de droit.



La CRAMA n'a pas constitué avocat dans le délai prescrit. La déclaration d'appel ainsi que les conclusions d'appelant ont été signifiées à une personne habilitée le 20 novembre 2019. Les conclusions de la société La Médicale de France lui ont été signifiées le 19 septembre 2022.



L'ordonnance de clôture est intervenue le 28 septembre 2022.




MOTIFS DE LA DÉCISION



sur le rapport d'expertise du docteur [FR]



Mme [S] fait valoir que le docteur [FR], expert désigné par le tribunal n'a pas respecté le principe du contradictoire et demande à la cour de prononcer la nullité de ce rapport.



La SHAM considère que ce rapport d'expertise n'a pas à être évoqué devant la cour, qui n'en est pas saisie. Si la cour devait estimer nécessaire d'évoquer sur la base de ce rapport, elle sollicite la réouverture des débats pour chaque partie puisse se prononcer.



La société la Médicale s'oppose à cette demande de nullité ; selon elle Mme [S] ne justifie d'aucun grief, l'expert ayant répondu à ses interrogations.



La déclaration d'appel porte, en autres, sur les termes du jugement en ce qu'il ordonne un complément d'expertise. Depuis le jugement, le rapport d'expertise a été déposé et Mme [S] en sollicite la nullité.



L'étendue de la saisine du juge d'appel, conformément à l'article 562 du code de procédure civile, est limitée aux énonciations de l'acte d'appel, de sorte qu'à raison, la SHAM souligne que seul le tribunal peut connaître de la demande présentée par Mme [S].



La cour constate qu'elle n'est pas saisie du rapport du docteur [FR] et qu'il appartient à la juridiction qui a ordonné l'expertise de statuer sur ce point.



Sur la prescription



La SHAM renouvelle devant la cour, au terme de son appel incident sa demande tendant à déclarer Mme [S], prescrite en son action et demande à la cour de déclarer celle-ci irrecevable, comme les actions subrogatoires de la CPAM du Morbihan et de la société AG2R prévoyance.

Elle fait valoir que l'article L 1142-28 du code de la santé publique prévoit que l'action mettant en cause la responsabilité des professionnels de santé se prescrit par dix ans à compter de la consolidation du dommage, que l'état de santé de Mme [S] était consolidé à la date du 26 mars 2003, de sorte qu'en agissant par actes des 25, 26 et 30 juillet 2013, elle est prescrite en son action.



Mme [S] rappelle que les faits litigieux se sont produits avant l'entrée en vigueur de la loi du 4 mars 2002 instituant les dispositions invoquées, les actes de prévention, de diagnostic et de soins ayant été réalisés entre 1995 et 1997. Elle considère que son action fondée sur le droit commun de la responsabilité contractuelle et donc les dispositions de l'article 1147 du code civil, est soumise au délai de prescription en la matière, qu'avant la réforme de la prescription du 17 juin 2008, cette prescription était de trente ans ; ainsi, la loi nouvelle instituant un délai de dix ans (article 2226 du code civil), il y a lieu de faire application de ses dispositions transitoires, selon lesquelles en cas de réduction du délai, ce nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi, sans que la durée totale ne puisse excède la durée prévue par la loi antérieure. Elle estime que cette prescription intervenant le 20 juin 2018, elle n'est nullement irrecevable en son action et sollicite la confirmation du jugement sur ce point.



L'article L 1142-28 du code de la santé publique, créé qui par l'article 98 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, prévoit :

Les actions tendant à mettre en cause la responsabilité des professionnels de santé ou des établissements de santé publics ou privés à l'occasion d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins et les demandes d'indemnisation formées devant l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales en application du II de l'article L 1142-1 et des articles L1142-24-9, L 1221-14, L3111-9, L. 3122-1 et L 3131-4 se prescrivent par dix ans à compter de la consolidation du dommage.



L'article 101 de cette loi dispose, comme très justement rappelé par les premiers juges que les dispositions du titre IV du livre Ier de la première partie du code de la santé publique issues de l'article 98 de la présente loi, à l'exception du chapitre Ier, de l'article L 1142-2 et de la section 5 du chapitre II, s'appliquent aux accidents médicaux, affections iatrogènes et infections nosocomiales consécutifs à des activités de prévention, de diagnostic ou de soins réalisées au plus tôt six mois avant la publication de la présente loi. Cet article est applicable aux instances en cours n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable.



Il s'ensuit que l'article L 1142-28 est applicable aux accidents médicaux, affections iatrogènes et infections nosocomiales consécutifs à des activités de prévention, de diagnostic ou de soins réalisés au plus tôt le 5 mars 2001.



En l'espèce, il n'est pas contesté que les actes de prévention, de diagnostic et de soins invoqués au soutien de l'action en responsabilité engagée par Mme [S] ont été réalisés entre 1995 et 1997. Dès lors, l'article

L 1142-28 du code de la santé publique n'est pas applicable au litige.



Soumise à la prescription antérieure de 30 ans, l'action a vu toutefois le délai de prescription réduit par la loi n° 2208-561 du 17 juin 2008 publiée le 18 juin 2008, en vigueur le 19 juin 2008, et codifiée à l'article 2226 du code civil, en ces termes :

L'action en responsabilité née à raison d'un événement ayant entraîné un dommage corporel, engagée par la victime directe ou indirecte des préjudices qui en résultent, se prescrit par dix ans à compter de la date de la consolidation du dommage initial ou aggravé.



L'article 26 de la loi n° 2008-561 prévoit que les dispositions de la présente loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.



Le professeur [P] expert fixe la consolidation de Mme [S] en 2003. En conséquence, Mme [S] pouvait engager son action sans encourir la prescription jusqu'au 19 juin 2018.



Force est de constater que son action engagée en 2015 n'est pas prescrite et qu'elle est donc recevable à agir, comme le sont les organismes tiers payeurs en leurs actions subrogatoires.



La cour confirme le jugement en qu'il rejette l'exception d'irrecevabilité tirée de la prescription.



Sur l'irrecevabilité de l'appel incident de la société AG2R Prévoyance



La société AG2R Prévoyance forme appel incident et présente des demandes en paiement dirigées contre la Médicale et la SHAM en remboursement de ses débours, au titre de la rente invalidité servie avant consolidation et après consolidation.



À titre principal la SHAM soulève l'irrecevabilité de l'appel incident de la société AG2R Prévoyance, rappelant avoir présenté un incident sur ce point devant le conseiller de la mise en état qui a considéré qu'il s'agissait d'une question relevant exclusivement de la compétence de la cour.

Au soutien de cette demande, elle fait valoir que Mme [S] a formé un appel limité, qu'il appartient donc à l'appelant incident d'indiquer expressément les chefs du jugement critiqué. Or, en l'espèce, elle relève que les conclusions de la société AG2R Prévoyance des 23 décembre 2019 et 2 janvier 2020, au terme de leur dispositif, ne contiennent aucun énoncé des chefs du jugement critiqué, qu'elles sont donc irrecevables, et qu'en ce qui concerne les conclusions du 17 novembre 2020, celles-ci le sont tout autant pour être tardives.

Dès lors, en l'absence de conclusions d'appel incident, la société AG2R Prévoyance doit, selon elle, être déclarée irrecevable en son appel incident.

À titre subsidiaire, elle demande à la cour de constater l'absence d'effet dévolutif de cet appel incident. Si les conclusions des 23 décembre 2019 et 2 janvier 2020 sont recevables en la forme pour voir été déposées dans les délais, l'absence de précision quant à la détermination du cadre de l'appel incident empêche un quelconque effet dévolutif d'opérer.



Sur ce moyen d'irrecevabilité, la société AG2R Prévoyance réplique que :

- aux termes de ses conclusions du 23 décembre 2019, elle demandait que la cour réforme le jugement,

- aux termes des conclusions du 17 novembre 2020, elle présente une demande d'infirmation du jugement,

- la cour de cassation (civ, 2ème 17 septembre 2020 pourvoi n° 18-23626) a jugé que l'interprétation à donner aux articles 542 et 954 du code de procédure civile selon laquelle lorsque dans le dispositif des conclusions, il n'est demandé ni l'infirmation ni l'annulation du jugement, la cour ne peut que confirmer celui-ci, ne s'applique pas lorsque la déclaration d'appel est antérieure à son arrêt ; en l'espèce, tant la déclaration d'appel que les conclusions litigieuses sont antérieures au 17 septembre 2020, de sorte que la cour ne peut admettre la demande d'irrecevabilité ou de reconnaissance d'une absence d'effet dévolutif,

- au demeurant, au terme de l'appel principal de Mme [S], la question de la responsabilité et du préjudice subi par celle-ci a été posée à la cour, de sorte que les prétentions de l'appel incident, découlent de l'appel principal,

- elle est en outre subrogée dans les droits de Mme [S] en qualité de tiers payeur, et le litige déféré à la cour sur la question de la responsabilité et de la détermination des préjudices est indivisible.



La règle de procédure énoncée par la société SHAM ressort de l'interprétation donnée le 17 septembre 2020 par la Cour de cassation aux articles 562 et 914 du code de procédure civil issus du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 ; la Cour de cassation a expressément indiqué que cette règle d'application immédiate, ne peut être appliquée dans les instances introduites par une déclaration d'appel antérieure à la date de son arrêt, sauf à priver les appelants du droit à un procès équitable.

La cour rejette en conséquence l'exception d'irrecevabilité des conclusions du 23 décembre 2019 et 2 janvier 2020, antérieures à cet arrêt.

S'agissant des conclusions du 17 novembre 2020, le dispositif de celles-ci mentionne une demande d'infirmation du jugement et une demande de condamnation de deux sociétés d'assurance en la cause.

Le caractère tardif de ses conclusions ainsi régularisées au sens des exigences des dispositions précitées, n'est pas établi. La cour rejette donc l'exception d'irrecevabilité de ces conclusions et ne retient pas l'absence d'effet dévolutif prétendue, étant saisie de la question des responsabilités encourues en raison des faits dommageables.



Sur les responsabilités



L'article L124-3 du code des assurances prévoit une action directe du tiers lésé à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile du tiers responsable.



Il appartient dès lors à Mme [S] de démontrer la responsabilité du docteur [F], assuré de la société La Médicale et de l'Institut [16], assuré de la SHAM.



Il n'est pas discuté en l'espèce, que l'appréciation des faits dommageables ne s'inscrit pas dans le cadre des dispositions de la loi Kourchner du 4 mars 2002, ceux-ci datant de 1995 s'agissant de la radiothérapie mise en oeuvre par le docteur [F] et de 1997 s'agissant de la chirurgie entreprise par l'Institut [16].



Le tribunal rappelle à juste titre qu'il appartient à Mme [S] de rapporter la preuve des fautes qu'elle impute aux praticiens, d'un préjudice et d'un lien de causalité. Cette responsabilité est recherchée en l'espèce sur le fondement des dispositions de l'article 1147 ancien du code civil.



sur la faute reprochée au docteur [F]



Mme [S] conteste le jugement écartant la responsabilité du docteur [F] et demande à la cour de recevoir son action en responsabilité dirigée contre l'assureur de ce dernier la société la Médicale, dans le cadre de son action directe à l'encontre de l'assureur du docteur [F].



A titre principal, elle considère que le docteur [F] a commis des fautes techniques et qu'en raison de ces fautes elle peut prétendre à réparation intégrale de son préjudice, et à titre subsidiaire, qu'il a manqué à son devoir d'information et est tenu au titre d'une perte de chance d'éviter le dommage.

S'agissant de la faute technique, elle critique le jugement qui n'a pas tenu compte des conclusions du rapport d'expertise judiciaire, lequel a par ailleurs parfaitement répondu aux objections ressortant d'un avis du docteur [I], de sorte que le tribunal ne pouvait fonder sa décision sur ce dernier.

Elle entend relever que l'hypothèse d'une hypersensibilité à la radiothérapie retenue également par les premiers juges pour écarter ses prétentions à l'encontre de la Médicale est sans incidence, dans la mesure où l'expert a observé que la question du surdosage aurait pu être discuté.

Elle affirme donc qu'ayant présenté un cancer de la vulve localisé de stade I, eu égard à son jeune âge, et au fait qu'elle présentait un lichen avec un risque de récidive de 100%, elle ne devait pas, au regard de la littérature scientifique de l'époque, subir de radiothérapie, à tout le moins dans la région vulvaire, qu'ainsi, si celle-ci n'avait pas été réalisée, la reconstruction par lambeaux n'aurait pas été nécessaire.



À titre subsidiaire, elle entend reprocher au docteur [F] d'avoir manqué à son devoir d'information, ne l'informant pas des conséquences de la radiothérapie mise en oeuvre ou des alternatives thérapeutiques ouvertes.



La société La Médicale conclut à la confirmation du jugement, soutenant que le docteur [F] n'a commis aucune faute.

Elle estime que le protocole mis en place par ce praticien en 1995, date des faits, consistant en un traitement par radiothérapie était parfaitement justifié au regard des données scientifiques acquises de l'époque. Elle appuie ses affirmations sur les avis des docteurs [I] et [A] et relève l'absence de toute littérature médicale venant contredire l'état d'avancement des données médicales de l'époque ainsi expliqué.



S'agissant du grief subsidiaire relatif au devoir d'information, elle objecte qu'en 1995 aucune disposition légale ne prévoyait une obligation d'information du patient, que la loi Kouchner qui prévoit celle-ci à la date du 4 mars 2002 n'est pas applicable au litige, que pas davantage, n'existait une obligation jurisprudentielle d'information avant un arrêt de la Cour de cassation du 25 février 1997.



La caisse primaire d'assurance maladie conclut à l'infirmation du jugement, estimant que la responsabilité du docteur [F] est engagée.



La société AG2R Prévoyance conclut à l'infirmation du jugement sollicitant la condamnation in solidum des sociétés La médicale et SHAM à lui rembourser ses débours.



- sur la faute technique



La question posée au juge en l'espèce, s'agissant d'une responsabilité du docteur [F], est de savoir, si au vu des données de la science en 1995 date de l'irradiation, celle-ci était indiquée dans le cas de Mme [S] et si cette radiothérapie a été réalisée selon les bonnes pratiques.



Il est rappelé par l'expert que Mme [S] a présenté un carcinome malpinghien différencié et kératinisant de la vulve et a bénéficié d'une vulvectomie antérieure de 4cmx 4cm. L'exérèse était complète et la lésion était médiane. Cette lésion survenait sur un terrain de lichen scléro-atrophique.

Du fait de l'existence sur la zone postérieure, d'un lichen scléro- atrophique, pour diminuer le risque de récidive tumorale et ganglionnaire, le docteur [F] radiothérapeute décide de proposer à la patiente une irradiation post-opératoire vulvaire et inguino-crurale bilatérale de 45 Gy avec un surdosage de 10 gy sur le lit tumoral.



Si l'expert ne qualifie par l'irradiation des aires ganglionnaires comme fautive, il affirme toutefois (page 35), après avis du sapiteur le docteur [R], sapiteur, que l'irradiation de la vulve n'était pas indiquée au vu des publications scientifiques de l'époque. La lésion était de petite taille, la chirurgie complète. Seule une surveillance semblait indiquée. De plus, lorsqu'une réaction d'épithélite était observée, le surdosage aurait pu être rediscuté. Quant aux lésions de lichen scléro-atrophique, la radiothérapie ne fait pas partie de l'arsenal thérapeutique.

Il conclut page 41 du rapport à une irradiation fautive de la vulve.



Cet avis a fait l'objet de critiques de la part des docteurs [A] et [I] auxquelles l'expert a répondu.



Le docteur [A], oncologue et radiothérapeute, soutient que :

- les réactions immédiates de la radiothérapie ont imposé au docteur [F] la remise en cause de la dose d'irradiation passant de 50 Gy prévus à 41,40 gy réalisés et l'interruption de l'irradiation pendant deux mois. Le complément local a été réalisé dans un très petit volume de 5 cm de diamètre vulvaire seul pour 10 gy soit 51 gy dose totale maximale,

- la simple surveillance n'était pas une option satisfaisante chez cette patiente, qui présentait une nouvelle lésion tous les ans, et une tumeur maligne apparue en huit mois,

- il ne peut être une faute en 1995 que de proposer un traitement conservateur, fer de lance de la pensée française de ces années là. La pensée conservatrice associait une chirurgie limitée (vulvaire), considérée en 1995 comme non carcinologique et une irradiation locale (vulvaire) à dose prophylactique.

Elle précise que le ' ténor' de la radiothérapie américaine le Professeur [XR] (publications 1988-1993) publie les résultats d'une irradiation vulvaire et ganglionnaire pour des stades de cancer vulvaire limité.



Le docteur [I], cancérologue et spécialiste en radiothérapie, fait valoir que :

- l'irradiation pelvienne sera réalisée à la dose de 45 Gy du 8 juin 1995 au 10 juillet 1995. Mme [S] sera revue par le docteur [F] avec une radio épithélite qui nécessitera de décaler le complément de 10 Gy sur le lit tumoral vulvaire de 3 semaines,

- il n'existe à l'époque en 1995 aucun essai clinique randomisé établissant le besoin ou non de radiothérapie post opératoire et seules des cohortes de patientes sont publiées. Dans ces cohortes rapportées dans la littérature scientifique, une irradiation de la vulve et sur les ganglions pelviens dans des formes peu étendues comme le stade I B retenu par le sapiteur pour cette patiente sont décrites. Il cite :

* la série de Trombolini sur des patientes traitées entre 1986 et 1997 : sur 34 femmes traitées en post opératoire, 10 ont été irradiées en post opératoire pour une tumeur vulvaire T1N0 et 15 pour un T2N0. Le volume de radiothérapie était la vulve et les ganglions iliaques à une dose de 45 Gy en fractionnement classique. Il s'agit du protocole identique à celui réalisé pour cette patiente.

* la série de CA [XR] : 50 femmes traités cancer de la vulve non en rechute, toutes ont eu une radiothérapie au décours d'une chirurgie plus ou moins large, dont 13 femmes porteuses de T1 ou T2N0, dont identique à la situation de Mme [S]. La dose était de 50 à 70 Gy.

- la place de la radiothérapie lors des faits ne fait l'objet d'aucun consensus tant pour ses indications sur ses contre-indications, il n'est donc pas possible de la considérer comme contre-indiquée en 1995 tant sur les aires ganglionnaires que sur la tumeur initiale.



En réponse à ces dires, l'expert (page 64 de son rapport) confirme le caractère inhabituel de la radiothérapie vulvaire pour cette tumeur superficielle et affirme qu'une surveillance clinique était possible.

Il évoque les travaux du docteur [XR]. Ceux datant de 1997 ne peuvent être pris en compte au regard de la date de la radiothérapie critiquée (1995). Il cite le livre ' Cancer Principles and practices of oncology' de [KC] [J] de 1989, dans lequel [C] [XR] écrit que le traitement des cancers de la vulve stade I devrait être traité par la chirurgie seule.



Les avis documentés des docteurs [A] et [I] permettent de constater qu'en cas de carcinome épidermoïde de la vulve, pathologie dont les praticiens s'accordent à reconnaître le caractère rare, des irradiations de la vulve, dans les dosages similaires à ceux pratiqués pour Mme [S], et pour des lésions de même stade, ont pu être couramment proposées en post-opératoire, à l'époque des faits, de sorte que la seule radiothérapie de la vulve en soi apparaît conforme aux données de la science en 1995. La cour approuve le tribunal en ce qu'il écarte la seule référence donnée par l'expert pour affirmer le contraire.



Le reproche d'un surdosage doit aussi être écarté, au regard des conditions dans lesquelles cette radiothérapie a pu être entreprise et suivie. Il est observé d'ailleurs sur ce point que le sapiteur le docteur [R], radiothérapeute, indique que la réalisation et la surveillance clinique pendant et après la radiothérapie ont été réalisées selon les bonnes pratiques en vigueur à l'époque et ne suscitent aucune critique particulière. Il note l'absence d'erreur manifeste dans la délivrance de la dose et que le dossier de soins témoigne d'un suivi régulier pendant et après la radiothérapie, selon les bonnes pratiques cliniques avec demande d'avis spécialisés dans des centres parisiens de référence.



S'agissant de la prescription de cette radiothérapie dans le cas précis de Mme [S], le professeur [P], expert, relève sans être critiqué que :

- Mme [S] était un sujet à haut risque de récidive, dans la mesure où présentant un cancer de la vulve à un âge jeune (35 ans), le risque de transformation cancéreuse et de rechute était élevé,

- sa pathologie survenait sur un territoire de lichen scléro-atrophique avec un fort risque de récidive de cette maladie,

- la radiothérapie n'a aucun effet sur le lichen scléro-atrophique et n'empêche pas la récidive de ce dernier.



Ces constats amènent l'expert à considérer que la surveillance clinique, plutôt qu'une radiothérapie, était d'autant plus indiquée, que la patiente présentait tous les ans une poussée de lésion vulvaire de lichen, et que la radiothérapie ne permettait pas d'éradiquer ces lésions de lichen.



L'indication retenue par l'expert, au regard des risques importants de recours à une chirurgie d'exérèse qui devait alors se faire en territoire irradié (avec les connaissances connues), de privilégier la surveillance clinique au lieu de la radiothérapie est contestée par le docteur [A], notamment compte tenu de l'apparition en huit mois de la tumeur maligne.



Il est d'ailleurs observé qu'in fine page 71, l'expert écrit : dans la mesure où il n'y avait pas de consensus sur l'irradiation ou non des lésions superficielles, ne devait-on pas dans ce cas présent, surtout s'abstenir d'irradier dans la mesure où cette lésion néoplasique survenait sur un terrain lichénoïde avec un risque de récidive du lichen de 100% ; ses critiques posées ainsi sous forme interrogative ne peuvent établir une véritable démonstration d'un manquement fautif résultant de la prescription d'une radiothérapie, laquelle n'avait pas pour objet d'éradiquer les lésions de lichen mais bien de diminuer le risque de récidive tumorale et ganglionnaire.



Face à ces contradictions, et en l'absence de documents médicaux, étayant les affirmations de l'expert, et, au regard des données de la science à l'époque des faits, force est d'admettre, comme les premiers juges que les pièces produites par Mme [S], sur laquelle pèse la charge de la preuve, et qui se base sur les seules conclusions de l'expert, ne caractérisent pas avec certitude l'existence d'une faute du docteur [F].



- sur le défaut d'information



S'agissant du grief portant sur un défaut d'information, le tribunal a relevé à juste titre l'absence de dispositions légales l'y contraignant avant la loi Kourchner du 4 mars 2002.



Toutefois, bien avant cette date, et contrairement à ce qu'affirme le tribunal, la jurisprudence considère que le médecin est tenu à un devoir de conseil d'information envers son patient et il appartient au patient d'apporter la preuve que le praticien a manqué à son obligation contractuelle de le renseigner sur la nature de l'intervention projetée et sur les risques pouvant en découler.



L'expert écrit page 36 du rapport : il ne semble pas que la patiente ait été informée au préalable des risques d'atteinte ganglionnaire, ni des risques et conséquence de cette radiothérapie.



L'expert a pu prendre connaissance des pièces médicales, de sorte que son appréciation sur ce point résulte de l'analyse de celle-ci.



La société La Médicale ne verse aux débats aucun élément, permettant de contredire cette absence d'information ainsi mise en lumière par l'expert.



La cour retient en conséquence la responsabilité du docteur [F] pour avoir manqué à son devoir d'information quant aux conséquences prévisibles de la radiothérapie dans le cas particulier de la patiente dont les risques d'intervention chirurgicale ultérieure étaient importants.



Il est exactement soutenu par Mme [S] qu'un tel manquement lui a fait perdre une chance d'éviter le dommage, à savoir une chirurgie reconstructrice avec levée de lambeaux, laquelle n'aurait pas été entreprise en cas d'abstention de radiothérapie sur la vulve.



Cette perte de chance sera évaluée à 50 %, étant rappelé que la radiothérapie était décidée pour diminuer le risque tumoral.



La cour infirme le jugement rejetant toute demande formée à l'encontre de la société La Médicale, assureur de M. [F].





Sur la faute reprochée à l'institut [16]



Mme [S] appelante, entend voir confirmer le jugement qui retient une maladresse fautive de l'Institut [16] lors de l'intervention chirurgicale de levée de lambeau.

Elle fait valoir que l'expert a expliqué que lors de la levée de lambeau, le nerf saphène avait été traumatisé et a exclu toute autre cause aux douleurs présentées par Mme [S].

Elle ajoute qu'aucune précaution n'a été prise pour éviter l'atteinte du nerf notamment au titre d'un repérage per-opératoire du nerf, que la SHAM admet que la lésion est imputable à l'acte chirurgical. Elle souligne qu'en la matière, la charge de la preuve est inversée et que la SHAM ne démontre pas qu'une quelconque anomalie rendait inévitable l'atteinte audit nerf.



La société SHAM, assureur de l'Institut [16], forme appel incident et conclut à son absence de responsabilité, soutenant que la lésion du nerf saphène droit relève d'un accident médical non fautif.

Elle entend faire observer que l'expert est moins affirmatif que prétendu et qu'il ne relève aucune faute du praticien à l'origine de la lésion du nerf.



La caisse primaire d'assurance maladie estime engagée la responsabilité de

l'Institut [16] au titre de la faute technique commise.



La preuve de l'existence d'une faute incombe au patient, dès lors que les professionnels de santé ne sont tenus à l'égard de leurs patients que d'une obligation de moyen et non de résultat.



La Cour de cassation a toutefois retenu, à partir du 23 mai 2000 (1ère Civ. 23 mai 2000 pourvoi n 98-20.440 et pourvoi n 98-19.869), dans des cas de lésions provoquées par un geste chirurgical à l'aide d'instruments, que lorsque la réalisation d'une intervention médicale n'impliquait pas l'atteinte à la personne du patient qui s'était produite au cours de celle-ci, la faute du praticien ne pouvait être écartée que s'il existait une anomalie rendant l'atteinte inévitable pour réaliser l'intervention.



L'atteinte portée par un chirurgien à un organe ou un tissu que son intervention n'impliquait pas, est fautive en l'absence de preuve par celui-ci d'une anomalie rendant l'atteinte inévitable ou de la survenance d'un risque inhérent à cette intervention qui, ne pouvant être maîtrisé, relève de l'aléa thérapeutique.



L'application de cette présomption de faute implique qu'il soit tenu pour certain que l'atteinte a été causée par le chirurgien lui-même en accomplissant son geste chirurgical.



En l'espèce, le rapport d'expertise rappelle que :

- le 20 janvier 1997 a été réalisée un hémi-vulvectomie droite avec reconstruction immédiate par lambeau musculo-cutané de droit interne droit,

- le 11 mars 1997, la patiente présente des douleurs des membres inférieurs,

- le 2 juin 1997, il est réalisé une hémi-vulvectomie gauche avec reconstruction immédiate par lamabeau musculo-cutané de droit interne droit.

- la patiente est vue par le docteur [NK] le 31 décembre 1997 qui note qu'au décours d'une intervention, elle a présenté une douleur de la jambe droite qui présente une double cicatrice. Les douleurs sont décrites en termes de douleurs neuropathiques typiques.



L'expert page 36 conclut que malgré la réussite chirurgicale, la levée de la lambeau au niveau de la jambe droite s'est associée à un phénomène douloureux en rapport probablement avec une lésion d'un nerf cutané, le nerf saphène interne.



La lésion du nerf saphène lors de la levée de lambeaux nécessaire à la réfection de la vulve à l'Institut [16] n'est pas véritablement contestée par la SHAM qui oppose sur ce point l'existence d'un accident médical non fautif et l'absence de maladresse démontrée du chirurgien.



Mme [S] justifie par un scanner de la hanche droite qui interviendra le 16 janvier 2014 pour le motif de douleurs du membre inférieur droit, l'absence d'argument en faveur d'une coxarthrose droite.

Le docteur [D], neurologue, dans un courrier du 30 janvier 2014 au docteur [YU] rapporte que la patiente se plaint de douleurs du membre inférieur droit qui concerne surtout la face antéro-interne de la jambe droite. Cette douleur est à type de brûlures et de piqûres. La description de la douleur semble concerner surtout le territoire du nerf saphène interne droit. Il préconise toutefois une scintigraphie osseuse pour ne pas méconnaître une algoneurodystrophie associée à cette douleur neuropathique.

Cet examen est donc réalisé le 17 février 2014 et conclut à l'absence d'argument scintigraphique pour évoquer une algodystophie.



Mme [S] soutient donc à raison que l'hypothèse d'une lésion du nerf saphène au décours de la première intervention chirurgicale du 20 janvier 1997, évoquée par l'expert est la seule plausible et doit donc être retenue.



Dès lors, il appartient à la SHAM de démontrer, face à cette présomption de faute, l'existence d'une anomalie rendant l'atteinte inévitable ou la survenance d'un risque inhérent à cette intervention qui, ne pouvant être maîtrisé, relève de l'aléa thérapeutique.



Force est de constater que cette preuve n'est pas rapportée.



La cour, comme les premiers juges, retient donc la faute de l'Institut [16] et confirme le jugement qui décide qu'il est responsable de la maladresse fautive lors de l'intervention chirurgicale de levée de lambeau.



Sur le droit à réparation de Mme [S]



Mme [S] soutient pouvoir prétendre à réparation intégrale de ses préjudices, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, et ce, sans qu'il soit nécessaire de recourir à une expertise telle qu'ordonnée par le jugement déféré. Elle conclut donc à l'infirmation du jugement qui ordonne d'une part une expertise pour déterminer les préjudices en lien avec la lésion du nerf saphène et ordonne d'autre part le sursis à statuer sur ses préjudices.

Elle formule des demandes d'indemnisation sur la base des conclusions du rapport du docteur [P].



La SHAM relève que le tribunal a ordonné une expertise aux seules fins de déterminer les préjudices en lien avec la lésion du nerf saphène sans demander de dissocier ceux résultant de l'irradiation, de sorte que si un complément d'expertise doit bien être ordonné, la mission donnée à l'expert doit permettre de répartir clairement les parts de responsabilités de chacun des intervenants. Elle conclut au sursis à statuer.



La société la Médicale objecte que les chefs de préjudices invoqués par Mme [S] sont en relation directe avec la lésion du nerf saphène en 1997, sans lien avec les actes médicaux pratiqués par la docteur [F].



La responsabilité du docteur [F] au titre d'une faute liée à la radiothérapie prescrite à Mme [S] n'a pas été retenue. Seul un manquement à son obligation d'information est admis en l'espèce, entraînant une perte de chance de 50 % d'éviter le dommage.

Le dommage indemnisable est donc celui résultant de la faute reprochée à l'Institut [16], consécutif à la lésion du nerf saphène.



La cour confirme l'analyse du tribunal qui, en l'absence de faute reconnue du docteur [F] au titre des soins de radiothérapie, considère que la seule maladresse fautive retenue contre l'Institut [16] ne peut avoir seule provoqué la totalité des préjudices subis et ordonne une expertise dans des termes parfaitement adaptés.



Il n'y a pas lieu de modifier cette mission et notamment de distinguer les préjudices liés à la lésion du nerf saphène de ceux résultant de l'irradiation, la cour arrêtant la responsabilité du radiothérapeute sur le fondement d'une perte de chance, évaluée à 50 % des dommages.



La cour rappelle qu'elle ne peut connaître du rapport d'expertise du docteur [FR] et qu'il appartient à la juridiction de première instance de se prononcer sur celui-ci et d'apprécier les demandes de liquidation du préjudice de Mme [S], mais également les recours des tiers payeurs en la cause, la caisse primaire d'assurance maladie et la société AG2R Prévoyance.



Le jugement est donc confirmé en ce qu'il ordonne une expertise médicale avant dire droit.





Sur la demande subsidiaire de garantie formée par la SHAM



La SHAM demande la condamnation du docteur [F] et de son assureur La Médicale à la relever et garantir de l'ensemble des condamnations susceptibles d'être mises à sa charge.



Cette demande, non fondée, est rejetée par la cour, en l'absence de toute faute technique liée à l'irradiation, la cour ne retenant qu'un défaut d'information source d'une perte de chance d'éviter le dommage.





Sur les demandes relatives à un préjudice d'impréparation



Ces demandes n'ont pas été présentées devant les premiers juges.



Mme [S] demande la condamnation de l'assureur du docteur [F] à lui payer une somme de 15 000 euros au titre de l'impréparation aux risques induits par la radiothérapie et la condamnation de l'assureur de l'Institut [16] au paiement d'une somme de 10 000 euros au titre de l'impréparation aux risques de la chirurgie de reconstruction de la vulve.



La société La Médicale conclut au rejet de cette demande, objectant qu'un tel manquement d'information n'a été consacré en jurisprudence qu'en 2010, et ne peut donc être reproché au docteur [F] à l'occasion d'actes médicaux effectués en 1995.



La SHAM affirme que Mme [S] a été largement associée et accompagnée par l'équipe médicale dans toutes les prises de décisions, n'a jamais été tenue à l'écart, a été informée des possibilités existantes et des risques d'échecs.

Elle ajoute que l'expert ne retient aucun manquement de l'Institut [16] à son obligation d'information et conclut donc au rejet de cette prétention.



Le non-respect, par un professionnel de santé, de son devoir d'information sur les risques d'un acte individuel de prévention, de diagnostic ou de soins, auquel il a eu recours fautivement ou non, cause à celui auquel l'information était due, lorsque l'un de ces risques s'est réalisé, un préjudice moral distinct des atteintes corporelles subies, résultant d'un défaut de préparation à l'éventualité que ce risque survienne.



La cour a retenu l'existence d'un manquement du docteur [F] à son obligation d'information quant aux conséquences prévisibles de la radiothérapie sur une chirurgie ultérieure. En conséquence, la cour évalue le préjudice moral d'impréparation au risque invoqué par Mme [S] à la somme de 5 000 euros.



S'agissant de l'Institut [16], la SHAM relève à raison l'existence de différents courriers dans le dossier médical attestant d'une information régulière donnée à Mme [S] quant aux actes envisagés, et leurs conséquences : courriers du docteur [B] à des confrères du 2 août 1996, du 21 novembre 1996, du 29 novembre 1996, du 12 février 1997, courrier du docteur [W] du 11 mars 1997, du docteur [H] du 13 juin 1997, du 10 février 1998, le compte rendu opératoire du 6 avril 1998, courrier du 2 juillet 1998.



A défaut de tout manquement de l'Institut [16] à son devoir d'information, la demande indemnitaire de ce chef n'apparaît pas fondée et est rejetée.



Sur les autres demandes



La cour confirme les dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens, sauf en ce qui concerne la condamnation de Mme [S] aux dépens de la Médicale de France et dit que ceux-ci seront réservés.



Les dépens de l'instance d'appel sont supportés in solidum par les sociétés La Médicale et SHAM.



L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'appelante, seule. Les sociétés La Médicale et SHAM sont condamnées in solidum à lui payer une somme de 3 000 euros de ce chef.



PAR CES MOTIFS



La cour, statuant publiquement, contradictoirement et par mise à disposition au greffe,



Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a rejeté toutes les demandes formées à l'encontre de la Médicale de France et a condamné Mme [X] [N] divorcée [S] aux dépens de la Médicale de France qui seront recouvrés par la SCP Grunberg conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,



Statuant à nouveau sur les chefs de jugement infirmés,



Déboute Mme [X] [S] de sa demande tendant à reconnaître la responsabilité du docteur [F] au titre d'une faute technique ;



Dit que le docteur [F] a manqué à son obligation d'information ;



Dit que ce manquement a entraîné pour Mme [X] [S] une perte de chance d'éviter le dommage subi et évalue cette perte de chance à 50 % ;



Réserve les dépens de la société de La Médicale ;



Y ajoutant,



Constate que la cour n'est pas saisie du rapport d'expertise du docteur [BF] [FR] ;



Dit que la demande de nullité dudit rapport doit être soumise la juridiction qui l'a ordonnée ;



Rejette l'exception d'irrecevabilité des conclusions et de l'appel incident de la société AG2R Prévoyance ;



Déboute la société SHAM de sa demande tendant à être relevée et garantie de l'ensemble des condamnations susceptibles d'être mises à sa charge ;



Dit qu'il appartient à la juridiction de première instance de statuer sur les demandes d'indemnisation présentées par Mme [S], la CPAM du Finistère et la société AG2R Prévoyance ;



Condamne in solidum les sociétés La Médicale et SHAM à payer à Mme [X] [S] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;



Condamne in solidum les sociétés La Médicale et SHAM aux dépens d'appel.



Le Greffier La Présidente

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